1-Main Title 2.23
2-Macon Alone 4.42
3-Trip To London 1.55
4-The Healing Process 5.10
5-Fixing The Plumbing
On A Rainy Afternoon 3.14
6-A Second Chance 3.12
7-Wedding Scene 2.51
8-Back With Sarah 4.04
9-Bedroom Conversation 4.33
10-Rose and Julian 2.08
11-A New Beginning 3.27
12-End Credits (Second Chance) 3.13

Musique  composée par:

John Williams

Editeur:

Film Score Monthly Vol. 11 No. 6

Réédition produite par:
Lukas Kendall
Montage musique:
Ken Wannberg
Assistance production:
Mike Matessino

Artwork and pictures (c) 1988 Warner Bros. Pictures. All rights reserved.

Note: ***
THE ACCIDENTAL TOURIST
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Williams
« The Accidental Tourist » est l’adaptation cinématographique du roman éponyme de l’écrivaine américaine Anne Tyler, publié en 1985, un film réalisé par Lawrence Kasdan (à qui l’on doit quelques classiques tels que « Silverado », « The Big Chill », « Body Heat » ou bien encore « Wyatt Earp »). Macon Leary (William Hurt) rédige des guides touristiques consacrés aux voyages d’affaire. Macon et sa femme Sarah (Kathleen Turner) ne se sont jamais vraiment remis de la mort d’Ethan, leur jeune fils de 12 ans tué dans une fusillade : leur mariage est en train de sombrer lentement. C’est pourquoi Sarah décide alors de demander le divorce et quitte sa maison pour partir s’installer seule dans un appartement. Peu de temps après, Macon chute dans l’escalier de sa cave et se retrouve obligé de porter un plâtre et des béquilles. Il décide alors de s’installer dans la maison familiale, en compagnie de son excentrique fratrie - sa soeur Rose (Amy Wright), ses frères Porter (David Ogden Stiers) et Charles (Ed Begley Jr.). Leur principal passe-temps consiste à ne jamais répondre au téléphone, à jouer à un jeu de cartes baptisé « vaccination » et à classer la nourriture par ordre alphabétique dans les placards de la cuisine. C’est alors que Macon reçoit la visite de son éditeur Julian (Bill Pullman), qui finit par tomber amoureux de Rose. Macon engage alors Muriel Pritchett (Geena Davis), une jeune femme dynamique et attirante, pour dresser son chien Edward - duquel il refuse de se séparer, Edward ayant été autrefois le chien d’Ethan. Réticent à l’idée de rencontrer la jeune femme en dehors de son job de dresseuse, Macon finit par fréquenter Muriel et passe une bonne partie de ses nuits chez elle, en compagnie de son jeune fils. C’est alors que Sarah ressurgit et tente de reconquérir Macon afin d’offrir une seconde chance à son ex-mari. Macon se retrouvera finalement pris entre deux femmes, avec un choix difficile qui s’avérera déterminant pour son avenir. « The Accidental Tourist » réunit ainsi une poignée d’excellents acteurs dans une histoire intimiste évoquant la complexité des relations humaines et les hasards de la vie. William Hurt s’impose radicalement par son mélange de mélancolie et de résignation, face à une Geena Davis spontanée et pétillante et une Kathleen Turner plus paisible. L’histoire du guide touristique « The Accidental Tourist » de Macon Leary n’est qu’un prétexte dans le film à de nombreux parallèles sur la vie et les relations humaines. Le réalisateur Lawrence Kasdan dresse un portrait psychologique fort de ses différents personnages, et ce même si l’on regrettera parfois le côté un peu lent et ennuyeux du film. Réalisé de façon extrêmement sobre sans grand artifice particulier, « The Accidental Tourist » s’avère être une comédie dramatique assez touchante qui remporta quelques prix et autres nominations en 1988.

La musique de John Williams reste sans aucun doute l’un des éléments les plus remarquables du film de Lawrence Kasdan. Plutôt inattendu sur ce type de film, John Williams eut enfin l’occasion de sortir en 1988 du registre habituel des gros films d’action/aventure pour écrire ici une partition symphonique plus intime et sobre, jouant sur le minimalisme et la retenue. Le score de « The Accidental Tourist » repose avant tout sur deux thèmes principaux répétés constamment tout au long du film : ainsi, le « Main Title » nous permet de découvrir le premier thème, constitué d’un motif mélodique de quatre notes à la fois sombre et entêtant, très présent tout au long du film. Le second thème apparaît brièvement au piano à la fin du « Main Title » et se reconnaît à sa phrase mélodique plus intime et émouvante, un thème qui sera lui aussi très présent tout au long du film. Le piano est ici l’instrument central de la partition de « The Accidental Tourist », instrument de l’intimité par excellence. John Williams l’accompagne ici par toute une série d’orchestrations comme toujours très soignées et élaborées, entre les cordes, les bois et quelques cuivres plus discrets. Le « Main Title » apporte dès le générique de début du film un climat quelque peu mélancolique et sombre, un élément récurrent dans la partition de John Williams qui, de toute évidence, ne respire pas vraiment la jovialité. Le motif de 4 notes revient dans « Macon Alone » et est très vite associé dans le film au personnage de Macon Leary (William Hurt). Il évoque ici l’isolement du personnage, tourmenté par les souvenirs douloureux de son fils Ethan. Williams développe ensuite le très beau thème principal de piano avec ses harmonies quasi romantiques et suaves du plus bel effet - et un classicisme d’écriture indissociable de l’univers musical de John Williams.

La partie finale de « Macon Alone » étonne par son orientation plus sombre et oppressante. Williams développe ici une atmosphère atonale quasi suffocante pour une scène de flashback où Macon se souvient du moment où il se rendit à la morgue pour voir le corps d’Ethan. On retrouve ici un John Williams plus atonal avec son lot de cordes dissonantes à l’écriture plus avant-gardiste, essentiellement constitué ici de clusters stridents et angoissants. La musique évoque le malaise de Macon, hanté par des flashbacks quasi cauchemardesques sur la mort de son fils Ethan - des passages dissonants et angoissants qui jurent un peu avec le style plus intime et émouvant du reste de la partition. Le thème principal revient ensuite dans un « Trip To London » plus rafraîchissant et optimiste, dans lequel John Williams fait intervenir un orchestre plus énergique (cordes, bois, cuivres, piano) et même quelques touches électroniques plus discrètes. Même le motif de 4 notes de Macon est repris à la fin du morceau avec des harmonies plus éclairées et optimistes. Williams fait intervenir un piano électrique très 80’s au début de « The Healing Process », un passage plus atmosphérique et lent dans lequel le thème de piano est toujours très présent, avec les orchestrations classiques et les harmonies complexes typiques du maestro américain. Ici aussi, on appréciera le caractère souvent entêtant et cyclique des deux thèmes principaux, qui reviennent constamment comme pour rappeler les tourments et la mélancolie de Macon Leary et les incertitudes liées à sa vie sentimentale.

Certains passages semblent apporter un peu plus d’optimisme comme c’est le cas dans « Fixing The Plumbing On A Rainy Afternoon », pour la scène où Macon commence à fréquenter Muriel. Le thème de piano est repris dans une version plus légère et intime, entre pizzicati sautillants et instruments à vent plus rafraîchissants - et, comme toujours, un travail harmonique assez complexe et savant. John Williams va même encore plus loin et nous offre un passage clairement enjoué et sautillant dans « A Second Chance », où l’espoir d’un avenir meilleur est enfin permis pour le personnage principal de l’histoire. L’utilisation du piano dans « Wedding Scene » est assez représentative du style plus intime et minimaliste de John Williams, brillamment accompagné ici par des orchestrations plus chaleureuses (cor anglais, cordes, harpe, piano électrique et même quelques synthétiseurs new-age plus discrets). Et lorsque Macon décide de se remettre avec son ex, Sarah (« Back With Sarah »), la musique devient plus intime et apaisée, entre le motif de 4 notes du célesta/piano électrique, et ce même si les harmonies complexes et ambigües du compositeur rendent la musique souvent plus nuancée et bien plus psychologique qu’elle n’y paraît. On retrouve ensuite une ambiance absolument similaire dans « Bedroom Conversation », le romantique « Rose and Julian » et la coda orchestrale plus dramatique et enlevée, « A New Beginning », sans oublier le générique de fin du film, « End Credits (Second Chance) ».

John Williams nous prouve donc avec « The Accidental Tourist » qu’il n’est pas que le compositeur des grandes fanfares héroïques à la « Superman »/ « Indiana Jones » mais qu’il sait aussi écrire des partitions plus intimes et chaleureuses comme c’est le cas sur le film de Lawrence Kasdan. Seule ombre au tableau : le maestro a souvent tendance à répéter trop systématiquement les mêmes thèmes tout au long de sa partition, et ce jusqu’à plus soif. Dommage, d’autant que l’écoute de la musique dans le film et sur l’album finit par devenir assez fastidieuse et monotone à la longue. Néanmoins, avec ses orchestrations très élaborées, son utilisation habile du piano et d’harmonies souvent assez complexes et ambigües, John Williams accouche d’une partition somme toute très psychologique et tourmentée, reflétant les sentiments intérieurs des différents personnages du film. En ce sens, on pourra apprécier l’effort du compositeur pour avoir su concilier son goût pour une écriture orchestrale classique savante et une approche musicale plus retenue et humaine. On regrettera simplement le caractère hyper répétitif de cette musique tout au long du film (dans un registre similaire, on appréciera davantage « Stanley & Iris » !). Voilà donc un score intime et élégant à réserver en priorité aux fans de John Williams !



---Quentin Billard