1-Mori no Kioku 0.42
2-Chouwa Oto-with reflection 4.38*
3-Agito to Kain 2.49
4-Doruido 1.27
5-Toola 0.59
6-Dai Kouzui 1.53
7-Chuuritsu Toshi 3.05
8-Taizai Kyoka 1.21
9-Ragna Gun 2.20
10-Houshi Katsudou 1.19
11-Agito to Toola 1 1.47
12-Agashi 1.35
13-Kako Kara Kita Otoko 3.10
14-Sudachi 1.08
15-Toria City 3.13
16-Minka no Kanashimi 1.03
17-Kikan Shinden 1.47
18-Kyouka Karada 0.54
19-Agito to Toola 2 1.56
20-Chikara no Bousou 3.21
21-Yolda no Omoi 1.05
22-Tsuki ga Kowareta Hi 1.24
23-Chikyuu Ryokka Project 2.09
24-Istolk Shidou 3.00
25-Soukougeki 3.23
26-Istolk wo Yamero 1.32
27-Dai Funka-Agito to Toola 3 3.06
28-Boku Tachi no
Mirai no Tame ni 2.44
29-Mori to Nin wo Tsunagu Mono 1.01
30-Ai no Melody
(Soundtrack version) 7.16*
31-M-10a-M-10b 3.08
32-M-21a 0.56
33-M-21b 1.32
34-M-23 2.51

*Ecrit et interprété par KOKIA

Musique  composée par:

Taku Iwasaki

Editeur:

Victor Entertainment VICL-61837

Album produit par:
Taku Iwasaki

Artwork and pictures (c) 2006 Studio Gonzo. All rights reserved.

Note: ***1/2
GIN'IRO NO KAMI NO AGITO
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Taku Iwasaki
En pleine ère de préoccupations environnementalistes, « Gin'iro no Kami no Agito » (que l’on connaît sous le titre anglais « Origin : Spirits of the Past ») est un film qui tombe à point nommé ! Réalisé par Keiichi Sugiyama, « Origin : Spirits of the Past » est un film animé sorti au Japon courant janvier 2006 et présenté quelques mois plus tard aux USA au Festival du film fantastique d’Austin, dans le Texas. C’est d’ailleurs grâce à ce festival que le film s’est fait largement connaître auprès du grand public. Remarqué pour son animation moderne mélangeant 2D et 3D et son message résolument écologique, « Origin » s’inspire quelque peu du « Nausicaa » d’Hayao Miyazaki et nous propose à son tour la description d’une terre futuriste livrée aux dégâts causés par l’homme. L’histoire se déroule ainsi 300 ans dans le futur. Alors que la Terre a été dévastée par la folie humaine, les esprits de la Forêt ont pris le pouvoir sur les survivants humains. L’apocalypse a été déclenchée par une série d’expériences génétiques qui consistaient à reproduire des cellules d’arbre, expériences conduites sur la lune terrienne. Mais l’expérience tourna à la catastrophe et les arbres prirent vie et envahirent la terre, dévastant tout sur leur passage après avoir brisé en deux la lune. Aujourd’hui, le monde est quasiment gouverné par la Forêt et les Druides, des êtres mystérieux qui vivent à l’intérieur de la Forêt et qui contrôlent les ressources naturelles restantes (et plus particulièrement l’eau). Agito est l’un des survivants humains, qui vit avec ses proches dans la Cité Neutre, une communauté pacifique qui tente de vivre en harmonie avec la nature. Un jour, il s’aventure par mégarde avec son ami Cain dans une caverne souterraine où il découvre de mystérieuses capsules de survie contenant des cadavres humains. Parmi ces cadavres, Agito fait une découverte encore plus stupéfiante : le corps d’une jeune fille encore en vie nommée Toola. Cette dernière s’éveille alors mais ne reconnaît pas le monde d’aujourd’hui : elle vient en réalité du passé - son sommeil cryogénique dura près de 300 ans - et porte autour de son cou un mystérieux Raban, un objet en forme de collier électronique qui abrite bien des secrets. La Forêt ne voit pas d’un très bon oeil l’éveil de Toola et craint que cette dernière ne tombe entre les mains de Shunack, un guerrier redoutable à la tête des troupes de Ragna, une cité guerrière qui lutte contre la Forêt et cherche à reconquérir le monde par la force. Toola tente alors de s’intégrer parmi les habitants de la Cité Neutre, mais rien n’y fait : ne se sentant plus à sa place ici, Toola décide de quitter la Cité et de partir s’aventurer au coeur même de la Forêt, à la recherche de réponses. Agito tente alors de l’en empêcher, mais en vain : Shunack est plus rapide que lui et finit par s’emparer de la jeune fille, qu’il compte bien utiliser pour arriver à ses fins. Désormais, seul Agito est capable de mettre fin aux méfaits des guerriers de Ragna et de sauver Toola et le monde entier. « Origin » s’avère donc être un film animé plutôt réussi et ambitieux, bien qu’à des années lumières d’un Miyazaki. Effectivement, le film de Keiichi Sugiyama lorgne indiscutablement du côté de « Nausicaa », à tel point que le scénario même de « Origin » semble dérivé tout droit du chef-d’oeuvre d’Hayao Miyazaki. L’animation est plutôt réussie, mais, comme souvent, le mélange 2D/3D ne fonctionne pas toujours très bien. En revanche, les décors s’avèrent être assez grandioses et les personnages plutôt attachants. Quand à l’histoire, elle reste donc particulièrement téléphonée et sans réelle surprise, avec un message écologique banal et déjà-vu (la nature qui se venge de l’homme et reprend ses droits sur la terre). Malgré tout, les fans du genre apprécieront sans aucun doute le travail de Keiichi Sugiyama sur ce premier film animé produit par les studios Gonzo.

La musique de Taku Iwasaki apporte une réelle force aux images du film. Le compositeur utilise ici toutes les ressources d’un grand orchestre symphonique et nous livre une partition orchestrale grandiose, entre classicisme d’écriture raffiné et passages électroniques plus modernes - un mélange orchestre/synthétiseur assez caractéristique des travaux du compositeur nippon sur des animes japonais de ce genre (on doit au compositeur les scores d’animes tels que « Ruroni Kenshin », « Witch Hunter Robin », « Black Cat » ou bien encore le récent « Soul Eater »). La musique possède tout au long du film une certaine importance, puisqu’elle semble commenter véritablement l’intégralité de l’histoire, entre l’émotion dramatique des passages sombres ou les envolées guerrières épiques pour les scènes de bataille avec les soldats de Ragna. Si l’introduction s’avère être plutôt anecdotique bien que résolument mystérieuse (« Mori no Kioku »), la chanson d’ouverture brillamment interprétée par la chanteuse japonaise KOKIA, « Chouwa oto - with reflection » nous rassure de suite quand à la qualité de cette partition. A noter d’ailleurs que la chanson a été éditée en single et a largement servie à la promotion du film dès janvier 2006 au Japon. La chanson de KOKIA évoque l’idée de la préservation du monde, avec un chant empruntant des accents de la musique lyrique classique et des chants ethniques, soutenu par un groupe de chanteuses du plus bel effet, une sorte d’hymne vibrant à la terre entre opéra et chanson pop japonaise.

Puis, le score de Taku Iwasaki prend alors son envol avec l’excellent « Agito to Kain », alors que l’on aperçoit Agito et Cain s’amuser ensemble au début du film. La musique révèle alors tout le classicisme d’écriture et la maîtrise orchestrale incontestable du compositeur, qui possède un réel savoir-faire orchestral, dans la lignée des grandes partitions symphoniques de Joe Hisaishi pour les films de Miyazaki. « Agito to Kain » développe une sorte de thème de scherzo à trois temps enjoué et énergique à souhait (associé à Agito dans le film), d’une très grande fraîcheur, passant d’un instrument à un autre avec brio - niveau inspiration, on pense par moment à Prokofiev ou Johann Strauss pour le côté dansant et léger. La scène de la découverte des druides (« Doruido ») permet au compositeur d’utiliser des sonorités plus étranges et mystérieuses, plus proche de la musique ethnique orientale, avec ses instruments à vents légèrement désaccordés et ses quelques percussions exotiques/boisées évoquant le monde de la Forêt. Dans « Toola », Iwasaki dévoile l’un des thèmes majeurs de sa partition, un magnifique Love Theme associé à Agito et Toola dans le film, écrit dans un style romantique élégant et sophistiqué, partagé entre les cordes et les vents. L’action débute enfin avec « Dai Kouzui », illustrant la scène de l’inondation avec brio. Iwasaki se montre visiblement très à l’aise dans le domaine de l’action et nous offre un superbe déchaînement orchestral plutôt virtuose, ample et maîtrisé pour la scène de l’inondation, un style musical que l’on retrouvera d’ailleurs tout au long du film.

On découvre ensuite la Cité Neutre dans « Chuuritsu Toshi » avec des cors plus solennels et un orchestre plus apaisé évoquant le calme apparent de la cité. On notera encore une fois la qualité des orchestrations et de l’écriture du compositeur, qui mélange à la fois harmonies classiques et raffinées, orchestrations soutenues et contrepoint de qualité, sans oublier quelques touches ethniques indispensables - et aussi quelques éléments électroniques plus discrets. Iwasaki fait même brièvement référence au style mickey-mousing habituel des musiques de dessin animé dans « Taizai Kyoka » (Permis de séjour), avec une certaine fraîcheur et une légèreté qui fait écho à « Agito to Kain », reprenant le thème d’Agito dans une version plus légère et lente. Dans « Ragna Gun », on découvre le thème martial associé aux troupes de Ragna, thème soutenu par son lot de cordes, cuivres et percussions électroniques/métalliques. Les synthétiseurs s’avèrent être plus présents ici, probablement pour apporter un côté plus froid et menaçant aux guerriers de Shunack, qui menacent de détruire la Forêt pour de bon. Iwasaki continue ensuite en développant certains de ses thèmes, comme le thème d’Agito dans un arrangement qui rappelle ici aussi Joe Hisaishi (« Houshi Katsudou » - Services rendus à la communauté) ou le magnifique Love Theme repris dans « Agito to Toola 1 » d’une grande beauté, suave et tendre à souhait - avec un soupçon de nostalgie. Taku Iwasaki en profite alors pour évoquer ici le rapprochement entre Agito et Toola avec une poésie et un lyrisme tout en finesse, parfois proche des harmonies romantiques du 19ème siècle. On retrouve d’ailleurs un lyrisme plus dramatique et toujours aussi élégant et sophistiqué dans « Agashi » et sa magnifique partie de cordes poignante, apportant une certaine émotion au film. Le thème guerrier de Ragna revient dans « Kako Kara Kita Otoko » (L’homme venu du passé) et évoque les sombres desseins de Shunack et ses troupes.

La dernière partie du film permet au compositeur de faire monter la tension en multipliant les passages dramatiques/intimes (« Sudachi ») et les morceaux d’action tonitruants. On retrouve d’ailleurs les rythmiques électroniques dans l’excellent « Toria City » et ses orchestrations très soignées, sans oublier « Minka no Kanashimi » (Le chagrin de Minka) et ses harmonies quasi impressionnistes qui rappellent vaguement Ravel, avec un lyrisme toujours aussi raffiné. L’action reprend avec « Kyouka Karada » (L’être amélioré) et ses rythmes martiaux très hollywoodiens d’esprit pour évoquer l’avancée des troupes de Ragna après que Shunack ait capturé Toola et Agito - devenu l’être amélioré après son passage dans le sanctuaire de la Forêt. Le Love Theme revient de façon toujours aussi poignante dans le très beau « Agito to Toola 2 », apportant un éclairage émotionnel fort entre deux morceaux d’action. Puis, « Chikara no Bousou » (Une force hors de contrôle) développe un nouveau déchaînement orchestral saisissant pour la scène de l’attaque du train militaire, faisant la part belle aux percussions militaires et aux cuivres frénétiques (avec ses effets de notes staccatos rapides virtuoses des trompettes), sans aucun doute l’un des meilleurs morceaux d’action du score de « Origin ». Iwasaki apporte une dimension grandiose et quasi épique à ses morceaux d’action, d’une ampleur saisissante - même pour un anime japonais de ce genre - la qualité des orchestrations et de l’écriture orchestrale y étant pour quelque chose. Le compositeur développe un thème dramatique au piano et au violoncelle dans « Tsuki ga Kowareta Hi » (Le jour où la Lune fut détruite), pour la scène du flash-back sur la destruction de la Lune suite au projet écologiste. A noter qu’ici, Iwasaki crée une ambiance quasi mystique à l’aide de violons aigus en suspend, d’un piano vaporeux et de quelques nappes synthétiques mystérieuses. On remarquera d’ailleurs comme le piano deviendra particulièrement présent sur la fin, puisqu’on le retrouvera aussi dans « Chikyuu Ryokka Project » (Projet Ecologiste Terrestre) et « Istolk Shidou » (L’activation d’Istok). L’action culmine avec les déchaînements orchestraux de « Soukougeki » (Attaque générale) pour la bataille finale au pied du volcan, qui se trouve être une version amplifiée et développée du morceau de l’attaque du train, qui se prolonge d’ailleurs dans « Istolk wo Yamero » (Il faut arrêter Istolk). Le motif d’action qui traverse l’ensemble de ces morceaux se retrouve d’ailleurs dans la scène de l’éruption finale (« Dai Funka-Agito no Toola 3 ») qui se conclut sur une ultime reprise poignante du magnifique Love Theme d’Agito et Toola. Du coup, « Boku Tachi no Mirai no Tame ni » (Pour notre futur) ramène la paix avec un sentiment d’espoir et de triomphe, reprenant le thème romantique de façon plus grandiose et victorieuse. Le thème est ensuite repris de façon plus apaisée dans « Mori to Nin wo Tsunagu Mono » (Ce qui relie la forêt et les hommes) pour célébrer la paix retrouvée entre la Forêt et les hommes.

Taku Iwasaki signe au final une partition symphonique très classique d’esprit pour « Origin : Spirits of the Past », une oeuvre musicale riche et sophistiquée qui doit beaucoup à la qualité de ses thèmes et à ses orchestrations extrêmement soignées et élaborées, digne des grands maîtres. Iwasaki possède un réel savoir-faire et n’hésite pas à le mettre en avant pour les besoins de l’anime de Keiichi Sugiyama, nous offrant ainsi une superbe partition orchestrale dans la lignée de Joe Hisaishi, Yuji Nomi, Masamichi Amano ou bien encore Yôko Kanno. La musique de « Origin » apporte une force et une émotion incontestable au film, et ce bien que l’ensemble demeure sans originalité particulière. On restera néanmoins conquis par la qualité des thèmes, la puissance des morceaux d’action et le lyrisme raffiné qui se dégage de certains passages plus intimes et émotionnels : du très bon travail en somme, à découvrir en même temps que le film de Keiichi Sugiyama !



---Quentin Billard