1-District 9 6.28
2-I Want That Arm 2.13
3-She Calls 1.35
4-Exosuit 3.15
5-Harvesting Material 1.46
6-Heading Home 1.14
7-A Lot of Secrets 2.27
8-Back to D9 1.45
9-Wikus Is Still Running 2.57
10-Got Him Talking 2.05
11-Prawnkus 4.00

Musique  composée par:

Clinton Shorter

Editeur:

Sony No Label Number

Produit par:
Clinton Shorter

Artwork and pictures (c) 2009 TriStar Pictures. All rights reserved.

Note: ***
DISTRICT 9
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Clinton Shorter
Très attendu depuis un certain temps, « District 9 » est assurément l’une des plus belles surprises cinématographiques du moment. Premier film du réalisateur sud-africain Neill Blomkamp, « District 9 » est un film de science-fiction ambitieux - produit par Peter Jackson, excusez du peu ! Il y a 28 ans, un gigantesque vaisseau spatial extra-terrestre s’échoua sur notre terre, mystérieusement immobilisé juste au dessus de Johannesburg, en Afrique du sud. Incapables de faire redémarrer leur vaisseau, les extraterrestres durent se résigner à vivre parmi les terriens, parqués très rapidement par le gouvernement sud-africain dans le District 9, une sorte de ghetto/bidonville où règne la crasse, la pauvreté et la corruption. Alors que les différents gouvernements cherchent une solution à la gestion de cette affaire, le cas du District 9 est confié au MNU (Multi-National United), une société privée qui cherche à exploiter l’armement ultra high-tech des extraterrestres et ne se soucie guère du sort des aliens - surnommés les « crevettes » par la population locale. Les années passent, mais la tension entre les humains et les aliens ne cesse de monter, alors que le MNU décide finalement de transférer les extraterrestres dans un autre camp de fortune. L’affaire est confiée au timide Wikus van der Merwe (Sharlto Copley), qui, durant l’opération, contracte accidentellement un virus extraterrestre qui modifie alors son ADN. Wikus devient alors l’homme le plus recherché du monde, moitié-humain moitié-alien. Il représente désormais une véritable fortune, car sa mutation est la clé pour percer le secret de la technologie des crevettes. Rejeté par tous et isolé, Wikus doit fuir et n’a plus qu’une seule solution : retourner se cacher parmi les extraterrestres au cœur même du District 9.

« District 9 » est un film ambitieux donc à plus d’un titre. Pour commencer, le script aborde le sempiternel sujet de l’arrivée d’extraterrestre sur terre sous un angle politico-social encore rarement vu au cinéma. Et pour se faire, Neill Blomkamp va même jusqu’à construire toute la première partie de son film sous la forme d’un documentaire journalistique parsemée de caméra-reporter et d’interviews diverses. Autre point fort du film - et probablement l’élément le plus audacieux de l’histoire - l’évocation à peine déguisée de l’apartheid en Afrique du sud, vu à travers les problèmes d’intégration des extraterrestres, parqués comme des bêtes dans un camp de fortune à Johannesburg. Le réalisateur (lui-même originaire de Johannesburg) fait un parallèle évident dans son film entre les dérives de l’affaire du District 9 et la politique d’apartheid menée par les afrikaners entre 1948 et 1991, touchant essentiellement les populations noires sud-africaines. Et pour renforcer le réalisme de l’histoire, Blomkamp a décidé d’imiter le style des médias (internet, journaux télévisés, reportages, téléréalité, etc.) tout au long de la première partie du film. Curieusement, ce concept fonctionne parfaitement mais s’estompe progressivement au cours d’une seconde partie plus conventionnelle, dans laquelle le réalisateur cède la place à l’action et aux effets spéciaux - dantesques, pour une production au budget modeste (30 millions de dollars !). Impossible dès lors de ne pas évoquer la qualité assez incroyable des effets spéciaux - et plus particulièrement l’animation des extraterrestres, très réussis. Blomkamp prouve ainsi qu’on peut réaliser de très bons effets spéciaux avec un budget assez modeste. Dommage simplement que la seconde partie du film bascule dans un style jeu vidéo d’action bourrin décérébré, tendance shoot’em up testostéroné, abandonnant le parti pris audacieux pourtant superbement mis en place au début du film. Du coup, on a parfois l’impression d’avoir à faire à deux films en un, l’un conceptuel et novateur dans la forme (moins dans le fond), l’autre traditionnaliste et résolument hollywoodien dans son propos (on tire et on détruit tout ce qui bouge avec le plus d’effets spéciaux possibles, d’explosions et de fusillades high-tech). Le film fonctionne de bout en bout mais aurait dû aboutir à un renouveau du genre de la science-fiction américaine si le réalisateur avait pris le soin de pousser son concept jusqu’au bout sans céder la place à la facilité hollywoodienne plus commerciale. Néanmoins, malgré ses défauts, « District 9 » est assurément la plus belle surprise cinématographique de la rentrée 2009, un film ambitieux, d’une richesse visuelle/narrative assez impressionnante pour un premier film.

La musique de « District 9 » a été confiée à un jeune compositeur canadien encore méconnu, Clinton Shorter, qui oeuvre depuis 2001 sur des séries TV en tout genre. Shorter a décidé d’évoquer les décors sud-africains du film en utilisant les vocalises éthérées d’un soliste africain dans un style qui rappelle parfois les envolées vocales de Youssou N'Dour sur « Blood Diamond » de James Newton Howard. A noter que les paroles du chant sont basées sur deux dialectes africains, le peul (parlé dans plusieurs états d'Afrique occidentale/centrale et au Sénégal) et le Malinké (parlé en Guinée, au Mali, au Sénégal ou en Côte d'Ivoire), les deux dialectes étant ici mélangés afin d'obtenir un résultat plus étonnant et recherché. Le score de « District 9 » se rapproche assez souvent du style des scores d’action de chez Media-Ventures/Remote Control. Clinton Shorter utilise donc la panoplie habituelle de synthétiseurs, rythmiques électroniques et nappes de cordes atmosphériques. Dès le début du film, sa musique met en place une ambiance à la fois planante et sombre, où règne un sentiment de confusion et de tension. Le score vaut surtout pour ses vocalises élégiaques africaines dévoilées dans le très beau « District 9 », cédant ensuite la place à une partie plus rythmée avec cordes, cuivres et percussions martiales évoquant l’organisation du District 9, avec la voix toujours très présente du soliste africain. A noter que le style d’écrire n’est pas sans rappeler par moment le Steve Jablonsky de l’action tendance « Transformers » (pour le côté martial et les cordes staccatos). L’influence des scores d’action modernes transparaît nettement dans un passage d’action mouvementé comme « I Want That Arm » (scène où le héros affronte le gang des nigériens) et son lot de percussions électroniques habituelles, qui apportent une excitation et une tension adéquate aux scènes les plus agitées du film de Neil Blomkamp.

Clinton Shorter n’oublie pas pour autant la partie plus émotionnelle/dramatique du film et évoque le destin peu joyeux du protagoniste principal dans « She Calls » avec son lot de nappes synthétiques et de cordes mélancoliques. L’action est au beau fixe avec les percussions africaines survoltées de « Exosuit » pour l’impressionnante bataille finale où l’on retrouve les rythmes martiaux du début - qui rappellent ici aussi le « Transformers » de Steve Jablonsky. Le score se déroule ainsi du début jusqu’à la fin, oscillant entre tension atmosphérique, rythmes/loops électroniques modernes (« Harvesting Material », « Heading Home », « Back to D9 »), vocalises africaines (« A Lot of Secrets ») rappelant les décors du film, sans oublier l’action (l’excitant « Wikys Is Still Running » et son attirail de percussions africaines/électroniques déchaînées). Shorter manipule l’électronique à loisir dans « Get Him Talking », apportant à sa partition une tournure résolument moderne, inspirée de l’école Remote Control et autres productions made in Hans Zimmer - un aspect musical plus qu'évident, étant donné l'importance de la technologie dans le film de Neil Blomkamp. Shorter va même jusqu’à nous refourguer dans « Get Him Talking » le cliché habituel du duduk arménien utilisé ici pour renforcer la couleur exotique de la musique du film de Neil Blomkamp. Enfin, « Prawnkus » s’impose par son côté plus élégiaque et poignant, reprenant les harmonies de cordes mélancoliques planantes du début et la voix du chanteur africain lorsque le héros a accomplit sa mission et peut désormais se retirer dans un coin où on l’oubliera.

Vous l’aurez donc compris, le score du jeune Clinton Shorter pour « District 9 » ne révolutionnera certainement pas le genre mais s’impose néanmoins dans le film par son efficacité indéniable à l’écran et son côté résolument moderne, inspiré des productions Media-Ventures/Remote Control tendance Steve Jablonsky. L’ensemble manque cruellement d’audace, de personnalité et d’originalité, mais on se laissera néanmoins séduire par les envolées vocales du chanteur africain et l’émotion des passages élégiaques - comme pour la fin du film - sans aucun doute les meilleurs passages du score de Clinton Shorter. Quoiqu’il en soit, la musique remplit parfaitement son rôle à l’écran et le compositeur manipule les recettes habituelles du genre avec un certain savoir-faire évident, même s’il ne lui manque encore qu’un peu d’idée et de personnalité. On attend impatiemment d’entendre le compositeur sur des projets tout aussi ambitieux et plus personnels, des projets qui lui permettront de s’épanouir musicalement et artistiquement !



---Quentin Billard