1-Discombobulate 2.25
2-Is It Poison, Nanny? 2.53
3-I Never Woke Up In
Handcuffs Before 1.44
4-My Mind Rebels At Stagnation 4.31
5-Data, Data, Data 2.15
6-He's Killed The Dog Again 3.15
7-Marital Sabotage 3.44
8-Not In Blood, But In Bond 2.13
9-Ah, Putrefaction 1.50
10-Panic, Shear Bloody Panic 2.38
11-Psychological Recovery...
6 Months 18.18
12-Catatonictes 6.44

Musique  composée par:

Hans Zimmer

Editeur:

Sony Classical 88697630662

Score produit par:
Hans Zimmer, Lorne Balfe
Musique additionnelle:
Lorne Balfe
Montage musique:
Peter Oso Snell
Coordinateur de production:
Andrew Zack

Artwork and pictures (c) 2009 Warner Bros Pictures. All rights reserved.

Note: ****
SHERLOCK HOLMES
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Hans Zimmer
Le célèbre roman d’Arthur Conan Doyle a été adapté à de nombreuses reprises au cinéma, à tel point que Sherlock Holmes est devenu au fil des années l’un des héros les plus populaires du monde de la littérature et du cinéma. Les adaptations sont nombreuses et variées, certains films allant même jusqu’à proposer des crossovers avec le célèbre détective britannique et d’illustres personnages de l’histoire (Freud dans « The Seven Percent Solution » de Herbert Ross en 1976). Véritable icône policière du monde du septième art, Sherlock Holmes se devait de faire son grand retour dans le cinéma d’aujourd’hui, en 2009. C’est finalement le réalisateur britannique Guy Ritchie qui nous propose une nouvelle adaptation des aventures du célèbre détective (Robert Downey Jr.) toujours affublé de son fidèle bras-droit, le Docteur John Watson (Jude Law). L’histoire débute à Londres. Peu de temps après avoir réussi à arrêter l’effroyable Lord Blackwood (Mark Strong), responsable de nombreux meurtres rituels qui ont ensanglanté la capitale, Holmes et Watson décident de prendre un peu de repos après une enquête solidement menée de bout en bout. Mais à l’approche de son exécution, Lord Blackwood demande à Holmes de venir le rencontrer en prison : grand adepte de la magie noire, le sinistre individu révèle au détective roublard qu’il renaîtra d’entre les morts après son exécution pour abattre sa vengeance sur Londres et ses habitants. Evidemment, Sherlock Holmes ne le prend pas au sérieux et rentre chez lui comme si de rien n’était. Pourtant, quelques temps après, l’incroyable se produit alors : Lord Blackwood a ressuscité et menace désormais la ville entière, plongée dans la panique la plus totale. Malgré un différend au sujet de leur façon de gérer leur vie privée, Holmes et Watson doivent de nouveau faire équipe pour une dernière enquête qui s’avère être particulièrement complexe et périlleuse.

« Sherlock Holmes » nous propose ainsi un solide dépoussiérage de l’oeuvre d’Arthur Conan Doyle, avec un casting de haut niveau, une atmosphère ironique et décalée, de l’action explosive et des décors londonien séduisants, le tout réalisé à la façon d’un film d’action hollywoodien survolté type des années 2000 ! Les concepteurs du film voulaient ainsi revisiter la mythologie Holmesienne en utilisant les moyens d’aujourd’hui, en mettant de côté certains éléments célèbres (la réplique « élémentaire, mon cher Watson ! », le chapeau et la pipe du détective, etc.) pour en accentuer d’autres (les penchants d’Holmes pour la débauche, son côté manipulateur et égocentrique, etc.). Ici, c’est surtout l’action qui domine, avec une enquête plutôt captivante, comme à l’accoutumée, des dialogues incisifs et des acteurs qui semblent s’en être donné à coeur joie - Robert Downey Jr. et Jude Law forment un duo parfait, face à un Mark Strong idéal dans le rôle du bad guy de service, sans oublier la très séduisante et très belle Rachel McAdams. On appréciera ainsi la qualité de l’intrigue, qui nous maintiendra en haleine jusqu’au bout, la mise en scène nerveuse de Guy Ritchie et les quelques idées plutôt sympathiques, comme ces scènes de combat dans lesquelles Holmes décortique au ralenti de façon chirurgicale et ultra scientifique les différents coups qu’il va infliger à son ennemi. On retrouve dans le film la rigueur absolue de Sherlock Holmes, le dénouement de l’intrigue étant d’ailleurs un hymne à la logique et à la rigueur pure. Si le film risque fort de diviser par son côté quelque peu iconoclaste et son coup de jeune offert à l’oeuvre d’Arthur Conan Doyle, « Sherlock Holmes » séduira néanmoins une bonne partie du public grâce à son punch irrésistible et à ses scènes d’action explosives. Une belle surprise !

Autre surprise de taille sur « Sherlock Holmes » : la participation de Hans Zimmer à la musique du film ! Totalement inattendu sur un projet pareil, le compositeur teuton s’est adjoint les services de son complice Lorne Balfe (pour une fois crédité directement sur la couverture de l’album) pour écrire la musique du film de Guy Ritchie. Et comme si cela ne suffisait pas, Zimmer se paie carrément le luxe d’éviter complètement l’approche symphonique classique habituelle des films de Sherlock Holmes et opte pour un style assez atypique et plutôt novateur pour une histoire du célèbre détective privé britannique. C’est ainsi que Hans Zimmer a eu l’idée d’utiliser une série d’instruments associés à un style plus folklorique proche de la musique tzigane et de celle d’Europe de l’est. Ce choix peut paraître assez curieux à première vue, mais il contribue néanmoins à créer une ambiance assez particulière dans le film de Guy Ritchie. Le compositeur utilise alors une série d’instruments réunissant un cymbalum, des banjos, un accordéon et un violon tzigane afin de rappeler de façon sous-jacente la vie de bohémien que mène Holmes - et aussi le fait qu’il est lui-même violoniste dans le film, et utilise d’ailleurs son instrument lors d’une scène du film pour mener une expérience très étonnante sur le pouvoir de certains sons produits par le violon. Dès le début, la musique de « Sherlock Holmes » surprend ainsi - comme le film lui-même - par son côté iconoclaste : exit le classicisme romantique de Miklos Rozsa pour « The Private Life of Sherlock Holmes » (1970) ou le symphonisme flamboyant de Bruce Broughton pour « Young Sherlock Holmes » (1985) ! La musique de Hans Zimmer se veut donc plus moderne, mais aussi plus atypique dans son approche, probablement dans l’idée de renforcer l’excentricité totale d’un Holmes bien déluré et plus loufoque que jamais.

Le score est dominé par un thème principal assez mémorable, voire entêtant, car très présent tout au long du film et bien trouvé ! Il évoque parfaitement le côté déterminé du personnage brillamment campé par Robert Downey Jr. et son mélange entre ironie et rigueur absolue. Très carré dans sa construction et facilement mémorisable dans sa configuration mélodique, le thème principal de « Sherlock Holmes » est l’incarnation parfaite du résidant du 221B Baker Street revu et corrigé par Guy Ritchie et son équipe. Introduit dès le début du film par le cymbalum sur fond de cordes et de banjos, le thème prend très vite une tournure rythmique et énergique sur fond de mélodie populaire avec son lot de cymbalum, de cordes rythmées typiques de Hans Zimmer, de notes rapides au violon et de percussions électroniques/acoustiques martelées. L’utilisation de l’accordéon rappelle clairement ici certains passages associés à Johnny Depp dans « Pirates of the Caribbean 3 », Hans Zimmer semblant ainsi faire clairement référence à son travail pour le film de Gore Verbinski avec une certaine forme d’humour sous-jacente assez savoureuse. Le thème est ainsi introduit dans toute sa splendeur tout au long de l’énergique et enthousiasmant « Discombobulate », une bien belle surprise pour tous ceux qui s’attendaient à retrouver le style synthético-orchestral habituel du compositeur à la tête de l’écurie Media-Ventures/Remote Control, une formidable entrée en la matière en somme ! Dans « Is It Poison, Nanny ? », Zimmer prolonge avec une certaine inventivité son travail autour des instruments solistes et surprend là aussi en utilisant des sonorités inédites pour le compositeur, délaissant l’orchestre quasiment relégué ici au second plan : cymbalum, notes rapides d’un violon au jeu spiccato entêtant, petites percussions diverses et quelques sonorités électroniques diverses suffisent à maintenir un certain suspense, alors que l’enquête d’Holmes poursuit son chemin.

Mais la plus grande surprise du score de « Sherlock Holmes » vient surtout du morceau « I Never Woke Up In Handcuffs Before », pièce écrite sous la forme d’une danse tzigane savoureuse rappelant clairement les musiques juives d’Europe de l’est pour une scène de combat du film. Là où un compositeur ordinaire aurait opté pour une approche « action » orchestrale/électronique typiquement hollywoodienne, Hans Zimmer a préféré prendre le contrepied total en utilisant un style inédit pour ce type de scène, une danse tzigane : le résultat à l’écran s’avère être assez splendide et inventif, maniant à la fois l’humour et la dérision avec une fraîcheur de style que l’on ne connaissait pas vraiment chez le compositeur - pourtant paradoxalement très critiqué pour avoir contribué à l’uniformisation d’un certain style musical hollywoodien ! On retrouve le thème de Holmes et son indispensable cymbalum dans « My Mind Rebels At Stagnation » (on appréciera au passage la qualité des titres des morceaux de l’album !) où le compositeur continue ainsi d’avoir recours au violon et à quelques sonorités électroniques discrètes pour renforcer la tension de certaines scènes du film - et plus particulièrement des scènes illustrant les méfaits de Lord Blackwood dans l’histoire. A noter ici l’utilisation d’un motif entêtant de 4 notes constamment répétées par le violon soliste dans un style plus dramatique sur la fin du morceau, suggérant l’idée que Blackwood est en train de semer tragiquement le chaos autour de lui.

Hans Zimmer se montre plus inspiré que jamais tout au long de cette oeuvre et prouve qu’il possède décidément plus d’un tour dans son sac ! « Data, Data, Data » illustre une scène d’enquête alors qu’Holmes recherche des indices sur le lieu d’un crime. Zimmer utilise ici les différentes sonorités instrumentales des solistes avec une certaine inventivité, qu’il s’agisse d’un ostinato de pizzicati, de notes staccatos rapides au violon ou de petites notes brèves au cymbalum. L’action devient plus présente dans « He’s Killed The Dog Again », où le thème principal est alors repris par l’orchestre dans un style plus musclé et déchaîné (cuivres et cordes à l’appui). L’action se prolonge dans l’agité « Marital Sabotage » où l’on retrouve un style énergique et rythmique manifestement hérité de « The Dark Knight », avec son lot d’ostinatos de cordes staccatos et de percussions synthétiques survoltées, sans oublier l’omniprésence du thème au cymbalum. « Marital Sabotage » est de loin l’un des meilleurs morceaux d’action du score de « Sherlock Holmes », Hans Zimmer se montrant ici aussi assez inventif dans l’utilisation de ses instruments (même dans les morceaux d’action !). Autre passage remarquable, le superbe « Not In Blood, But In Bond », accompagnant la scène de l’explosion sur les quais vers la fin du film. Entièrement filmée au ralenti, cette scène est accompagnée par une mélodie élégiaque d’un violon solitaire aux résonnances tziganes, interprétant une sorte de lamentation funèbre de toute beauté. On retrouve un côté vaguement dramatique dans les très belles harmonies de « Ah, Putrefaction », tandis que l’action reprend le dessus dans « Panic, Shear Bloody Panic » et « Psychological Recovery…6 Months », long morceau d’action de plus de 18 minutes accompagnant la séquence finale de l’affrontement contre Blackwood. Le morceau s’avère être particulièrement intense avec une montée de tension progressive tout bonnement excitante et très impressionnante à l’écran. A vrai dire, la musique insuffle une certaine puissance remarquable à ces scènes d’action dans le film, preuve en est que Hans Zimmer n’a toujours pas perdu la main !

Hans Zimmer est donc plus que jamais en forme et nous le prouve grandement avec sa nouvelle partition pour « Sherlock Holmes », une musique rafraîchissante et énergique qui se propose à son tour de dépoussiérer l’univers musical souvent très académique des films de Sherlock Holmes, en utilisant une instrumentation plus proche de la sensibilité musicale d’Europe de l’est, un style étonnant et atypique pour un film de ce genre, mais qui fonctionne à la perfection tout au long du long-métrage de Guy Ritchie ! Hans Zimmer confirme ainsi qu’il aime prendre des risques et expérimenter de nouvelles choses, à une époque où le compositeur semble avoir fait le tour de toutes ses musiques d’action qui ont fait de lui une star incontournable de la musique de film hollywoodienne d’aujourd’hui. Zimmer déclarait récemment que ce qui l’intéressait maintenant, c’était de pouvoir travailler sur des projets pour lesquels il peut épancher sa soif de conceptualisation musicale, et cette approche conceptuelle semble faire ses preuves depuis quelques temps, qu’il s’agisse des expérimentations sonores de « The Dark Knight » ou des élans instruments aux consonances tziganes/juives de « Sherlock Holmes ». Sans être LE nouveau chef-d’oeuvre de Hans Zimmer, le score de « Sherlock Holmes » confirme néanmoins que le compositeur teuton continue toujours autant de s’éclater sur ses films et qu’il n’a pas fini de nous étonner un peu plus !



---Quentin Billard