1-Main Title 2.15
2-Thank God For The Rain 1.38
3-Cleaning The Cab 1.05
4-I Still Can't Sleep/
They Cannot Touch Her
(Betsy's Theme) 4.31
5-Phone Call+/I Realize
How Much She Is Like
The Others/A Strange Customer/
Watching Palantine On TV/
You're Gonna Die In Hell+/
Betsy's Theme/
Hitting The Girl 6.10
6-The .44 Magnum Is
a Monster 3.20+
7-Getting Into Shape/
Listen You Screwheads/
Gun Play+/Dear Father & Mother/
The Card/Soap Opera 5.25
8-Sport and Iris 2.18+
9-The $20 Bill/Target Practice 2.33
10-Assassination Attempt/
After The Carnage 5.04
11-A Reluctant Hero/Betsy/
End Credits 4.40

Additional Interpretations

12-Diary of a Taxi Driver
(Album Version) 4.28
13-God's Lonely Man
(Album Version, with
Alternate Ending) 2.00
14-Theme From Taxi Driver 4.02*
15-I Work The Whole City 2.24*
16-Betsy In A White Dress 2.13*
17-The Days Do Not End 4.05*
18-Theme From Taxi Driver
(Reprise) 2.25*

*arrangé et conduit
par Dave Blume
+Non utilisé dans le film.

Musique  composée par:

Bernard Herrmann

Editeur:

Arista Records 07822-19005-2

Score produit par:
Neely Plumb
Ressortie masterisée par:
James P. Nichols.
Ressortie produite par:
Didier C.Deutsch
Producteur associé:
Ford A. Thaxton

Dédié à la mémoire de
Bernard Herrmann
(June 30, 1911 -
December 24, 1975)

Artwork and pictures (c) 1976 Columbia Pictures Corp. All rights reserved

Note: ***1/2
TAXI DRIVER
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Bernard Herrmann
Chef-d'oeuvre de Martin Scorsese, qui remporta la palme d'or au festival de Cannes en 1976, « Taxi Driver » évoque l'histoire de Travis Bickle (Robert De Niro), un jeune homme du Middle West démobilisé des marines souffrant d’un déséquilibre psychique et d’insomnie. C’est alors qu’il décide de travailler comme conducteur de taxi à New York. Ses journées se limitent simplement à regarder des films pornographiques dans des cinémas obscurs tout en errant sans but au volant de son taxi. Pour Travis, New-York la nuit se transforme en une jungle qui réveille en lui tous ses traumatismes (c’est un ancien combattant du Viêt-Nam), toutes ses obsessions. Sa rencontre avec la belle Betsy (Cybill Shepherd), assistante d’un sénateur newyorkais, l’amènera à s’intéresser à l’amour. Betsy finit par accepter le rendez-vous que lui propose Travis, mais lorsque la jeune femme s’aperçoit que Travis veut l’emmener dans un cinéma pornographique miteux, elle quitte rapidement la salle, écoeurée. C’est un nouveau coup dur pour Travis, qui ne supporte pas la réaction de Betsy. La révolte gronde au fond de cet homme, il en veut au monde entier, ne supporte plus les injustices qu’il voit chaque jour, ne supporte plus son impuissance face à ces situations dégradantes. Il commence à haïr la société et la décadence humaine. C’est alors qu’il devient obsédé à l’idée de venir en aide à une jeune prostituée mineure, Iris (Jodie Foster, alors âgée de 14 ans au moment où elle tourne dans ce film !), qu’il a rencontré quelques jours auparavant, et pour qui il ira même jusqu’à tuer son proxénète (Harvey Keitel). « Taxi Driver » a été le film choc de l’année 1976, un film sur la violence de la société américaine de l’époque, sur les refoulements et les tourments des vétérans du Viêt-Nam, un film sur la colère et la rédemption. Le scénario de Paul Schrader (en partie autobiographique) permet d’offrir à Robert De Niro l’un des plus grands rôles de toute sa carrière, un chauffeur de taxi tourmenté et révolté contre les abus de la société : violence, drogue, prostitution. Le film doit beaucoup à la performance inoubliable de De Niro et à sa réplique cultissime : « You talkin’ to me ? Well, I’m the only one ! » (C’est à moi que tu parles ? D’ailleurs, il n’y a que moi ici !). On raconte d’ailleurs que cette célèbre réplique aurait été en partie improvisée par l’acteur lui-même pour les besoins du film. « Taxi Driver » a aussi pas mal fait parler de lui pour sa violence jugée particulièrement choquante à l’époque - et notamment une scène de fusillade particulièrement sanglante et crue à la fin du film (typique de la violence dans les films de Scorsese !). Le film est néanmoins devenu culte et a marqué d’une pierre blanche le cinéma américain des années 70, remportant pour l’occasion la Palme d’or au Festival de Cannes 1976.

« Taxi Driver » fut le dernier film sur lequel travailla Bernard Herrmann, le compositeur ayant décédé peu avant la sortie du film. On retrouve dans « Taxi Driver » le style habituel du grand Bernard Herrmann, une partition orchestrale à l’atmosphère lourde, pesante, oppressante, dans le style des grandes musiques de thriller des films d'Alfred Hitchcock. Parallèlement à cette ambiance oppressante qui retranscrit parfaitement dans le film la vision noire et pessimiste de Martin Scorsese, Herrmann a composé un très beau thème pour « Taxi Driver », un morceau d’inspiration jazzy, avec prédominance du saxophone soliste (interprété brillamment par le grand Tom Scott), un thème qui apparaît d’ailleurs de façon assez contradictoire dans l’histoire : contradiction parce que le dit thème est écrit dans un style romantique très rétro, sensuel et rêveur, alors que Travis vit une déception amoureuse avec Besty (Cybill Shepherd), qui représente une sorte de beauté idéalisée de la ville, alors que la réalité newyorkaise est très éloignée de ce rêve et dévoile une jungle urbaine cauchemardesque où se mêlent débauche, violence et décadence humaine, bref, n'ayons pas peur des mots : la lie de l’humanité. Le morceau paraît souvent en contradiction avec les images du film et suggère habilement les tourments d'un homme tiraillé entre les plaisirs artificiels de la ville et son dégoût pour ces vils plaisirs (il va voir des films pornos, alors qu'en fait, il les déteste.). Ce thème de saxophone jazzy - accompagnant par un ensemble jazz classique piano, batterie, contrebasse avec cordes et trompette en sourdine - s'impose rapidement dans la partition du film de Scorsese, l'envahissant progressivement, comme pour montrer l'isolement d’un homme enfermé dans un univers urbain suffocant, où l'homme perd toutes les vraies valeurs de la vie.

Hormis ce thème romantique langoureux de saxophone jazzy particulièrement mémorable (et qui a rendu la partition assez célèbre dans les années 70), la partition orchestrale de Bernard Herrmann est fidèle à la personnalité musicale du compositeur : pesante, oppressante, dissonante, rappelant par moment « Vertigo », « The Wrong Man » ou « Psycho ». Le ton est d’ailleurs donné dès le superbe « Main Title » où le style de Bernard Herrmann culmine au plus haut point : percussions agressives, orchestrations denses (cordes sombres, cuivres imposants et vents graves) et allusions subtiles au thème jazzy, un morceau qui résume parfaitement dès le début du film toute l’essence même du long-métrage de Scorsese. Mais l’exemple le plus flagrant reste sans aucun doute le sombre « Assassination Attempt/After the Carnage », qui, comme son l'indique, se situe juste après la scène du carnage où Travis fait une descente armée chez le proxénète d'Iris, pour le massacrer lui et ses complices avec les armes qu'il porte sur lui et permettre ainsi d’offrir sa liberté à la jeune Iris. La scène où les policiers arrivent sur la place - une longue et grande séquence entièrement filmée au ralenti - est soutenue par une musique particulièrement pesante et oppressante, dont le message semble on ne peut plus clair à l’écran : « le fauve est lâché et qu'il ira jusqu'au bout ». A noter ici les orchestrations qui mélangent de façon assez complexe cordes, cuivres et vents graves.

La partition d’Herrmann s’avère donc être extrêmement cohérente d’un bout à l’autre du film, le compositeur - sur la fin de sa vie - ayant atteint une maîtrise totale et spectaculaire de son art. Le seul problème, c’est que la musique s’avère être très répétitive et parfois un brin monotone. Certes, la partition alterne pourtant entre deux genres musicaux différents dans le film : le thème de saxophone jazzy pour la ville de New York (probablement en référence au jazz newyorkais des années 30/40), et une partie symphonique essentiellement dominée par des orchestrations denses et oppressantes qui contribuent à renforcer la vision noire du film de Martin Scorsese. Cette partie orchestrale devient assez rapidement étouffante et très répétitive dans le film, tout comme le thème de saxophone, qui revient un peu trop souvent. Et pourtant, c’est bel et bien l’effet voulu par le compositeur sur « Taxi Drive » : évoquer les obsessions sans fin de Travis, obsession guidée ici par le thème de saxophone omniprésent tout au long de l’histoire, et par la musique orchestrale qui semble elle aussi monolithique, plate et sans relief. En réalité, Bernard Herrmann - en tant que grand spécialiste des atmosphères psychologiques torturées - a voulu recréer à travers sa musique un sentiment d’étouffement, d’isolement, la sensation d’être perdu dans un labyrinthe sans issue. Cette vision particulièrement pessimiste du monde se retrouve donc, de manière assez fascinante, dans la musique d’Herrmann.

A l’instar de certaines partitions plus anciennes du compositeur, « Taxi Driver » est le genre de partition que l’on ne pourra pas apprécier à la première écoute, une oeuvre riche et dense qui nécessite d’être explorée en profondeur et que l’on ne pourra pas comprendre et assimiler en la survolant brièvement. Certes, on pourra toujours reprocher cette uniformité lassante de la musique dans le film, mais toujours est-il que c'est exactement l’effet voulu par le compositeur, et qui contribue grandement à renforcer le malaise véhiculé constamment tout au long du film. Pour la toute dernière oeuvre de sa vie, Bernard Herrmann nous rappelle qu’il a toujours été le musicien des tourments du psychisme humain (« Vertigo » et « Psycho » en sont les dignes représentants !). « Taxi Driver » permit ainsi au compositeur de tirer sa révérence en nous offrant une ultime grande oeuvre dédiée au cinéma, une oeuvre sombre et déprimante, un adieu à la vie à la fois poétique (« Betsy’s Theme ») et résigné (« A Reluctant Hero/Betsy/End Credits »). A noter pour finir que le film de Scorsese est dédié à la mémoire du grand Bernard Herrmann : 30 juin 1911 - 24 décembre 1975.



---Quentin Billard