1-Générique Début 3.43
2-Chateauneuf 2.04
3-Ecriture 1.46
4-Ronde 3.05
5-Brigands 2.35
6-En Marge 2.37
7-Aria - Admira une Dulzura 4.16*
8-Bal Masqué 4.03
9-Lièvre 2.16
10-Solitude 0.52
11-Courtisane 1.54
12-Prestigium Vocalis 1.06**
13-Générique Fin 3.42

*Interprété par Joseph de Torres
**Interprété par Philippe Bestion
et Karin Knobbs.

Musique  composée par:

Michel Portal

Editeur:

Milan Music 3991202

Album produit par:
Michel Portal

(c) 2007 Cinétévé/France 2 Cinema. All rights reserved.

Note: *1/2
JEAN DE LA FONTAINE, LE DÉFI
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Michel Portal
Avec « Jean de la Fontaine, le Défi », le réalisateur français Daniel Vigne signe le tout premier long-métrage consacré au célèbre poète français du 17ème siècle, un poète que tout le monde connaît mais que personne ne connaît réellement comme le déclara le scénariste Jacques Forgeas peu de temps après la sortie du film en 2007. En ce matin du 5 septembre 1661, Fouquet, le principal conseiller du roi Louis XIV (Jocelyn Quivrin) est arrêté sur ordre de Colbert (Philippe Torreton), parce qu’il a organisé une cérémonie trop somptueuse qui fit de l’ombre au roi et provoqua sa jalousie. Désormais, tous les grands artistes français sont obligés de se rallier au roi, incluant ainsi Molière, Boileau et Racine. Seul le jeune poète Jean de la Fontaine refuse de se plier aux exigences du roi et décide de s’insurger contre la décision arbitraire de Louis XIV concernant Fouquet, le surintendant déchu. Colbert jure alors de tout faire pour tenter de contenir la rébellion de Jean de la Fontaine, qui affirme avec provocation que son art est au dessus du roi lui-même. Vivant dans la misère et l’anonymat, Jean de la Fontaine continuera malgré tout de se battre pour ses propres convictions, rédigeant des pamphlets assassins et des poèmes qui divertiront son entourage, alors même que le jeune poète renégat est sur le point de concevoir son plus célèbre chef-d’oeuvre qui traversera toutes les époques : les Fables de la Fontaine. Le film de Daniel Vigne nous propose ainsi un portrait inédit et inattendu du célèbre poète français campé avec justesse par Lorant Deutsch, jeune acteur cultivé et spontané qui semble véritablement à l’aise dans la peau de Jean de la Fontaine. Face à lui, Philippe Torreton campe un Colbert déterminé et glacial bien qu’un brin caricatural. Le film manque cependant d’énergie et s’essouffle très vite, alors qu’on l’attendait pourtant au tournant. Effectivement, pour un premier film consacré au célèbre poète français du 17ème siècle, on se serait attendu à quelque chose d’un peu plus épique et de moins léger, le long-métrage de Daniel Vigne revisitant une partie de notre patrimoine culturel à travers les célèbres fables de la Fontaine, sans apporter le moindre point de vue au personnage et à sa vie tumultueuse et bien méconnue. Dommage, car « Jean de la Fontaine, le Défi » rate la marche et s’apparente davantage à une jolie fable pédagogique et scolaire qu’à une vraie biopic historique sérieuse et documentée, malheureusement desservi par un scénario linéaire et une direction d’acteurs pas toujours très convaincante. L’ennui pointe malheureusement le bout de son nez dans ce film qui ressemble davantage à un téléfilm à petit budget qu’à un vrai long-métrage sur la vie (méconnue) et l’oeuvre de Jean de la Fontaine. Une occasion manquée, en somme !

Le compositeur et musicien Michel Portal est connu pour son parcours éclectique en tant que saxophoniste et clarinettiste de jazz (et parfois même bandonéoniste). Son répertoire musical évolue ainsi constamment entre la musique classique/contemporaine et le jazz. En tant que compositeur, Michel Portal a écrit des musiques pour des téléfilms et des films en tout genre. Son travail le plus connu au cinéma reste sans aucun doute sa partition musicale pour le film de Daniel Vigne « Le Retour de Martin Guerre » en 1982, qui permit au musicien d’obtenir à l’époque le César de la meilleure musique de film. C’est ainsi que le réalisateur français décida de travailler à nouveau avec Michel Portal sur « Jean de la Fontaine, le Défi » en 2007, pour lequel le musicien français livre un score orchestral à la fois classique et moderne, idéal pour évoquer le caractère rebelle et avant-gardiste du poète français. Le thème principal est introduit dans « Générique de Début », et s’inspire en grande partie du style de la musique baroque du 17ème siècle avec l’intrusion d’éléments électroniques modernes quelque peu fantaisistes et volontairement anachroniques. Si l’introduction déçoit par son utilisation inattendue et maladroite de cordes samplées atrocement cheap et incompréhensibles dans le contexte du film, le reste du morceau fait intervenir une guitare hispanisante et quelques instruments samplés apportant un peu plus de crédibilité à une ouverture fantaisiste et agréable, malheureusement gâchée par les sonorités artificielles des cordes samplées. On comprend ce que le compositeur a voulu exprimer à travers l’utilisation de l’électronique - l’avant-gardisme, la liberté d’opinion et la rébellion artistique de La Fontaine - mais le résultat n’est franchement guère heureux, et les mélanges entre les samples orchestraux cheap et les instruments acoustiques ne fonctionnent pas vraiment ici !

Michel Portal se fait plaisir en nous offrant dans « Châteauneuf » un solide morceau pour piano et clarinette (interprété avec brio par le compositeur lui-même), un morceau plus fantaisiste qui rappelle clairement la musique répétitive de Philip Glass ou de Steve Reich, et, par la même occasion, la culture musicale savante contemporaine de Michel Portal. Le jeu subtil et nuancé de la clarinette apporte une couleur particulière au personnage de Monsieur de Châteauneuf interprété par l’excellent Jean-Claude Dreyfus dans le film. La musique conserve en tout cas cette approche clairement minimaliste, avec une formation instrumentale restreinte proche d’un effectif de chambre. A noter que le jeu des instruments frôle bien souvent ici l’improvisation, une volonté du réalisateur Daniel Vigne qui souhaitait ainsi que la musique de son film souligne l’idée que La Fontaine était avant tout l’artiste de l’improvisation verbale. Et qui de mieux que Michel Portal pour évoquer avec un tel brio ce sens inné de l’improvisation, propre au musicien de jazz français ? On retrouve alors le thème de Jean de la Fontaine dans une très belle version pour piano dans « Ecriture », évoquant l’idée de la création des célèbres textes poétiques de La Fontaine. Le classicisme d’écriture du piano pourrait ainsi faire penser à une sonate classique ou à une petite pièce pour piano du 18ème ou du 19ème siècle. Ce sont d’ailleurs ces pièces pour piano et clarinette qui s’imposent finalement ici, apportant une délicatesse plus nuancée à la musique du film de Daniel Vigne, comme le rappelle l’envoûtant et mélancolique « Ronde ».

« Brigands » utilise quand à lui les cordes synthétiques et quelques rythmiques électroniques plus modernes afin d’offrir un côté intemporel à l’histoire de La Fontaine. Dommage cependant qu’ici aussi, le côté cheap des samples instrumentaux fasse perdre toute crédibilité à la musique, qui ressemble davantage ici à la bande son d’un téléfilm modeste que d’un vrai film historique sur Jean de la Fontaine. Heureusement, Michel Portal se rattrape avec le développement du thème principal pour clarinette et piano dans « En marge », alors qu’un morceau comme « Bal Masqué » tombe à nouveau dans le mauvais goût absolu avec l’utilisation d’un orchestre samplé et totalement artificiel, qui semble même ne pas coller aux images du film lors de cette séquence de bal masqué - un choix musical totalement incompréhensible au final (volonté artistique du compositeur ? Problème de budget ?). Encore une fois, ce sont les passages pour clarinette qui s’imposent ici comme le rappelle le mélancolique « Lièvre » et son utilisation plus virtuose et quasi improvisée du piano. On appréciera aussi l’intimité du piano solo de « Solitude » ou d’un « Courtisane » très classique d’esprit, reflétant un certain lyrisme salvateur et plutôt poétique. On préfèrera d’ailleurs oublier les samples cheap de « Récital » ou de l’insupportable « Ritournelle » qui semble surgir d’une mauvaise compilation de musiques synthétiques des années 90 !

Au final, la musique de « Jean de la Fontaine, le Défi » apporte une ambiance particulière au film de Daniel Vigne (un peu comme dans « Le Retour de Martin Guerre »), une partition à double facette, entre le mauvais goût incompréhensible des morceaux synthétiques aux sonorités MIDI - inadaptées dans le film - et la délicatesse poétique et nuancée des passages pour formation de chambre, et plus particulièrement avec le piano et la clarinette de Michel Portal. Malheureusement, il paraît difficile d’apprécier pleinement le score de « Jean de la Fontaine, le Défi » sans avoir à grincer des dents à trois ou quatre reprises, alors que le compositeur nous déstabilise en se montrant à la fois très pertinent dans ses passages plus intimistes et très maladroit dans ses morceaux synthétiques. Le résultat est d’ailleurs tout aussi discutable à l’écran, à commencer par l’ouverture elle-même, un bilan finalement extrêmement mitigé, avec cette BO qui n’arrive malheureusement pas à la cheville du précédent effort de Michel Portal sur « Le Retour de Martin Guerre » !



---Quentin Billard