1-Theme from the Escapist 1.36
2-Diamond 0.46
3-Confessional 2.08
4-Underground Escape 2.15
5-Viv's Lab 0.56
6-Lacey Hunted 1.16
7-Lenny Recruited 0.53
8-Into The Dryer 0.31
9-Sump Chase 3.14
10-The Trade 1.07
11-Elegy for Brodie 1.01
12-Tony Killed 1.21
13-Abandoned Station 2.50
14-Frank's Vision 1.06
15-Wonderment 1.17
16-Train 0.40
17-Lacey Is Free 2.35
18-Escalator 3.14
19-Reunion 1.19
20-End Credits 1.01

Musique  composée par:

Benjamin Wallfisch

Editeur:

Movie Score Media MMS-09010

Musique produite par:
Benjamin Wallfisch
Musique supervisée et
co-produite par:
Alison Wright
Producteur exécutif de l'album:
Mikael Carlsson
Préparation de la musique:
Ruth Chan, Tony Stanton

Artwork and pictures (c) 2009 Picture Farm (The Escapist) Limited and Parallel Film Productions Limited. All rights reserved.

Note: ****
THE ESCAPIST
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Benjamin Wallfisch
« The Escapist » (Ultime évasion) est un long-métrage britannique de Rupert Wyatt évoquant l’univers carcéral des prisons anglaises avec une grande inventivité. Franck Perry (Brian Cox) est un détenu qui purge sa peine depuis de nombreuses années, mais qui décide un jour d’organiser un plan d’évasion audacieux afin de retrouver sa fille mourante et de faire la paix avec elle avant qu’il ne soit trop tard. Franck réunit autour de lui une bande de détenus tous plus dérangés les uns que les autres, et ensemble, ils organisent minutieusement l’évasion. Si le scénario de « The Escapist » reste classique et tient sur une ligne, c’est surtout la réalisation rafraîchissante et originale de Rupert Wyatt qui apporte tout son charme à ce film d’évasion dans la grande tradition du genre. Certes, le film ne révolutionne pas le genre et ne propose rien de bien nouveau quand à la représentation habituelle du milieu carcéral au cinéma. Mais la construction narrative réalisée en montage parallèle rend le film véritablement captivant (ironie !), l’histoire étant racontée à partir de flashbacks concernant le personnage principal brillamment interprété par l’acteur écossais Brian Cox (un habitué des seconds rôles à Hollywood !). Le récit évolue ainsi lentement mais sûrement, un peu à l’instar du plan d’évasion brillant organisé par Franck et ses compères. Brian Cox nous offre ici une performance remarquable dans la peau d’un personnage à la fois bourru, complexe et parfois même émouvant (la scène dans le parloir ou la séquence finale dans les escaliers du métro). Face à lui, un Damian Lewis terrifiant dans le rôle du maître des lieux brutal et machinal, et dans les seconds rôles, quelques pointures du cinéma britannique comme Joseph Fiennes, Dominic Cooper ou Liam Cunnigham. Dommage cependant que le film tombe par moment dans un certain mauvais goût, avec notamment des allusions homosexuelles un brin lourdingues et inutiles (on se serait par exemple passé de la scène de la poursuite dans les douches !). Au final, « The Escapist » reste une bien belle réussite dans son genre, un divertissement très correct plutôt sombre et intense, signe de la vitalité du cinéma britannique contemporain !

La musique de « The Escapist » a été confiée au jeune compositeur britannique Benjamin Wallfisch (29 ans seulement lorsqu’il compose la musique du film de Rupert Wyatt !). Le compositeur signe là une partition orchestrale d’une grande inventivité, utilisant, en plus de l’orchestre symphonique traditionnel, un ensemble instrumental incluant un cymbalum, des percussions diverses, un piano, un violoncelle, des synthétiseurs et même quelques vocalises de la soprano Elenor Bowers-Jolley. Le thème principal de la partition est entendu dès le début du film dans « Theme from the Escapist », avec ses rythmes syncopés de cordes urgentes en staccatos secs et son motif mystérieux associé à l’idée de l’évasion. Wallfisch ajoute à ses cordes un cymbalum, un piano et une flûte, le cymbalum apportant ici une couleur assez particulière à la musique du film. L’instrument revient d’ailleurs dans « Diamond » et ses rythmes syncopés et complexes, tandis que « Confessional » évoque les sentiments de Franck Perry par le biais d’un piano plus intime sur fond de cordes chaleureuses et de vocalises de la soprano soliste, un très beau morceau apportant une émotion et une profondeur humaine au personnage de Brian Cox dans le film, et son envie de revoir une dernière fois sa fille mourante - d’où l’utilisation de vocalises féminines. Le mélange entre piano, soprano, cordes et violoncelle apporte ici une certaine nuance au personnage, un morceau à la fois sombre, mélancolique et incertain d’une grande justesse (dans lequel le thème principal de l’évasion ne semble guère loin !). Benjamin Wallfisch varie ainsi les ambiances à loisir tout au long du film, passant ainsi d’un style à un autre avec une aisance incroyable. Ainsi, après l’intimité nuancée de « Confessional », le compositeur nous offre dans le sombre et menaçant « Underground Escape » un morceau d’action techno/atonal assez saisissant, pour la séquence où les prisonniers s’évadent dans le tunnel à la fin du film. Ici, Wallfisch mélange tout un attirail de percussions électroniques/acoustiques pour parvenir à ses fins, flirtant avec le style de la musique électro un brin expérimentale, surtout dans la deuxième partie du morceau, exclusivement consacré au travail des percussions acoustiques/synthétiques. Le compositeur fait preuve ici d’une très grande inventivité.

Benjamin Wallfisch rappelle avec « Viv’s Lab » qu’il possède une culture musicale classique/contemporaine absolument indéniable, le morceau étant un pastiche de certaines pièces de Béla Bartók - on pense ici à certains mouvements de la « Musique pour cordes, percussions ou célesta » ou à certaines mesures de la « Sonate pour deux pianos et percussions » du même Bartók, notamment dans le mélange complexe entre pizzicati, effets de cordes (incluant les fameux pizz à la Bartók) et piano. La musique devient alors plus sombre et atmosphérique dans « Lacey Hunted », pour la séquence (inutile) de la traque dans les douches. Wallfisch utilise alors ici des cordes dissonantes sur fond de nappes synthétiques obscures et quasi expérimentales, un morceau d’atonalité pur parfait pour retranscrire à l’écran la tension de cette séquence. Le thème principal revient ensuite dans « Lenny Recruited » pour rappeler l’idée que le plan d’évasion est en marche. Les percussions inventives de « Underground Escape » reviennent dans « Into The Dryer », Wallfisch ayant ici recours à des loops tirés de la banque de son « Percussive Adventures » de chez EastWest (un classique des loops de percussions dans les musiques de film contemporaines !). Le morceau accompagne la scène où les prisonniers passent par la buanderie pour s’échapper de la prison. Plus étonnant encore, « Sump Chase » accompagne la séquence dans la tuyauterie avec l’utilisation inattendue de synthétiseurs kitsch très connotés années 80. Ici aussi, le compositeur se montre très inventif et nous propose différentes idées avec une fraîcheur assez étonnante. A noter que la partie finale de « Sump Chase » se conclut, comme dans « Lacey Hunted », dans un magma sonore et atonal de cordes dissonantes. On appréciera aussi l’émotion du poignant « Elegy for Brodie », sans aucun doute le plus beau morceau de la partition de « The Escapist ». Les fans du compositeur Krzysztof Penderecki seront aux anges avec « Tony Killed », qui est en réalité copié sur le célèbre « Thrènes pour les victimes d’Hiroshima » de Penderecki, oeuvre qui a décidément inspiré beaucoup de compositeurs au cinéma ! « Tony Killed » illustre la séquence de la mort de Tony à grand renfort de cordes dissonantes et torturées, incluant tous les effets avant-gardistes habituels de glissandi, clusters stridents, vibrato au demi-ton/quart de ton, gargouillis de pizzicati aléatoires, sonorités percussives de col legno (on frappe les cordes avec le bois de l’archet) et effets de trémolos en sul ponticello (sur la touche).

La musique reste tout aussi sombre dans l’agressif et dissonant « Train » ou l’atmosphérique « The Abandoned Station », dominé par des cordes dissonantes et un sound design obscur qui rappelle beaucoup ici Elliot Goldenthal. Le piano qui apparaît à la fin de « The Abandoned Station » revient dans le mélancolique et tragique « Frank’s Vision » qui apporte une émotion dramatique poignante au personnage de Brian Cox vers la fin du film. Même chose pour la montée dramatique de « Wonderment », alors que « Lacey is Free » apporte un sentiment d’espoir et de paix retrouvée, alors que les poignants « Escalator » et « Reunion » concluent l’histoire sur une ultime touche d’émotion, deux morceaux de toute beauté révélant une sensibilité évidente de la part du compositeur britannique. Vous l’aurez donc compris, Benjamin Wallfisch nous offre ici une partition de qualité à l’éclectisme rafraîchissant, servi par un savoir-faire évident et une inventivité constante. Certes, on pourra toujours reprocher au compositeur d’être encore trop soumis à de nombreuses influences évidentes (Bartók, Penderecki, etc.), mais la partition de « The Escapist » reste malgré tout une très bonne surprise, un score brillant et rafraîchissant écrit par un jeune compositeur très prometteur, à découvrir rapidement !



---Quentin Billard