1-Beginning 1.16
2-Intro to Green Ball 1.18
3-Discovery/Transformation
(Den and the Green Ball) 3.15
4-Den Makes Out (Den Makes It) 2.42
5-Castrate Him/Searching
for Loc Nar 2.04
6-Queen for a Day
(Den and the Queen) 2.54
7-Pursuit (Den's Heroics) 2.51
8-Fiste 1.27
9-Getting Bombed 3.06
10-Green Ball 2.15
11-Dem Bones 2.44
12-No Alarm 0.58
13-Robot Love (Space Love) 1.32
14-Harry 1.35
15-The Next Morning 1.56
16-End of Baby 2.43
17-Council (Taarna Summoned) 2.49
18-The Flight to Temple (Flight) 2.16
19-The Sword (Taarna Prepares) 3.32
20-Flight to Holiday Town 2.20
21-Fighting 2.43
22-My Whips!/Taarna
Escapes Pit 4.57
23-Finish (Taarna Forever) 3.34

Bonus Tracks

24-Den Makes Out (film version) 2.49
25-Bomber and the Green Ball
(album edit) 4.35
26-Harry and the Girl
(album edit) 3.41
27-Barbarians (album edit) 3.34

Musique  composée par:

Elmer Bernstein

Editeur:

Film Score Monthly
FSMCD Vol.11 No. 02

Ressortie produite par:
Lukas Kendall

Artwork and pictures (c) 1981 Columbia Pictures Industries Inc. All rights reserved.

Note: ****1/2
HEAVY METAL
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Elmer Bernstein
Véritable icône cinématographique des années 80, « Heavy Metal » (Métal hurlant) est un film d’animation canadien réalisé par Gerald Potterton et produit par Len Mogel et Ivan Reitman, inspiré de dessins et d’histoires tirés de la revue française « Métal hurlant » (et de sa version U.S., « Heavy Metal », d’où le titre du film). Le film est composé d’une série d’histoires ayant comme sujet principal un pouvoir maléfique représenté par une mystérieuse sphère verte, le Loc-Nar. L’intrigue du pouvoir maléfique permet de conserver un fil conducteur entre les différentes histoires qui mêlent avec inventivité humour, action, érotisme et même heroic-fantasy (un genre alors très à la mode à cette époque au cinéma !). Le film de Gerald Potterton est avant tout l’oeuvre de différents artistes qui se sont réunis pour les besoins du film afin de créer ces différents univers - parfois assez insolites - comme par exemple la célèbre introduction de l’astronaute revenant sur terre à bord d’une voiture volante, l’épisode du chauffeur de taxi Harry Canyon dans le New-York du futur (épisode qui a semble-t-il très inspiré Luc Besson pour son film « Le Cinquième Elément »), l’épisode de Dan, un jeune homme sans ambition qui deviendra un super-héros grâce aux pouvoirs du Loc-Nar, parti en mission dans une autre dimension pour libérer un peuple dominé par deux souverains ennemis, sans oublier l’épisode du procès d’un jeune héros psychopathe, celui à bord du B-17 dans lequel les pilotes d’avion doivent affronter des soldats zombies, celui du robot qui couche avec une humaine ou, plus important, l’épisode final avec Taarna, guerrière sexy chargée de sauver notre monde d’un groupe de barbares qui tirent leurs pouvoirs du Loc-Nar. « Heavy Metal », c’est donc le film d’animation de toute une génération, un pur hymne aux années 80 comme on en reverra certainement plus : avec son animation parfois très sommaire (voire carrément kitsch) mais néanmoins très détaillée et sa bande son mêlant de nombreux groupes de hard rock/heavy-metal (Trust, Sammy Hagar, Nazareth, Black Sabbath, etc.), « Heavy Metal » doit aussi beaucoup à l’esthétique du magazine français « Métal hurlant » qui publia entre les années 70 et 80 des bandes dessinées de grands artistes tels que Moebius, Jean-Pierre Dionnet, Philippe Druillet ou bien encore Bernard Farkas. Totalement libre de ton et destiné à un public adulte, « Heavy Metal » s’autorise ainsi toutes les excentricités possibles et nous propose différentes histoires aux qualités diverses, certaines étant bien évidemment plus réussies que d’autre. C’est sans aucun doute grâce à l’épisode d’heroic-fantasy mettant en scène la guerrière Taarna que le film a acquis sa grande popularité, cet épisode ayant d’ailleurs généré une suite sortie en 2000, « Heavy Metal 2000 » - quoique l’épisode de « Den » reste aussi l’une des histoires les plus appréciées du film animé de Gerald Potterton. Aujourd’hui, l’influence de « Heavy Metal » dans la culture cinématographique populaire est incontestable, un segment du film ayant même été carrément parodié dans un épisode de la série animée trash « South Park », tandis que Luc Besson s’est carrément inspiré de l’épisode d’Harry Canyon pour « Le Cinquième Elément », etc. Voilà en tout cas un classique incontournable du cinéma d’animation des années 80, un film culte au concept assez inédit pour l’époque !

Outre une bande son regorgeant de groupes de hard rock et de heavy-metal alors très en vogue dans les années 80 (incluant le groupe de rock français Trust), « Heavy Metal » nous propose aussi une formidable partition symphonique du regretté Elmer Bernstein, qui signa en 1980 l’une des partitions-clé de sa filmographie pour le film animé de Gerald Potterton. Le score de « Heavy Metal » est interprété par le prestigieux Royal Philharmonic Orchestra (l’orchestre de prédilection d’Elmer Bernstein) avec les choeurs du London Voices et les Ondes Martenot de l’indispensable Jeanne Loriod - rappelons d’ailleurs qu’il s’agit de l’instrument fétiche du compositeur américain, qui écrira à de nombreuses reprises pour cet instrument dans des partitions 80’s telles que « Black Cauldron » ou « Ghostbusters ». La partition originale de « Heavy Metal » éblouit d’emblée l’auditeur par son symphonisme très classique d’esprit, influencé par le style de la musique symphonique du 20ème siècle, celle de Bartók, Stravinsky ou même des grands musiciens du Golden Age hollywoodien (on pense parfois ici Rozsa, Steiner ou même Newman). Le score s’articule autour d’une pléiade de thèmes, avec pour commencer un thème pour le Loc-Nar, entendu dès l’ouverture du film dans « Beginning ». Ce thème est alors confié à des choeurs féminins mystérieux et grandioses (doublés par un hautbois), accompagnés ici par un orchestre aux sonorités amples et cristallines. « Beginning » et « Intro to Green Ball » évoque clairement le caractère à la fois énigmatique, mystérieux et envoûtant du Loc-Nar, une source de force maléfique qui fascine tout autant qu’elle anéanti ceux qui s’en approchent.

Comme toujours chez Elmer Bernstein, les orchestrations sont ici d’une richesse et d’une complexité remarquable, le compositeur privilégiant tous les pupitres de l’orchestre avec un savoir-faire exemplaire digne des plus grands maîtres. « Beginning » et « Intro to Green Ball » frôlent d’ailleurs le style de la musique atonale du 20ème siècle, avec un accompagnement orchestral quasi impressionniste, et une instrumentation plus complexe et inventive pour le passage de terreur évoquant les méfaits du Loc-Nar à la fin de « Intro to Green Ball ». A noter pour finir que le morceau dévoile un autre thème du score, entendu brièvement ici par un hautbois pastoral sur fond de cordes plus légères, un très beau thème mélodique qui n’est pas sans rappeler curieusement le style de certaines mélodies de Jerry Goldsmith. Même chose pour l’impressionnant « Discovery/Transformation », qui oscille ici aussi entre atonalité envoûtante et passages quasi impressionnistes, avant de dévoiler un autre thème majeur du score, une mélodie de trompettes héroïque et rétro. Le morceau accompagne la première histoire du film, celle de « Den », à grand renfort de cuivres héroïques, de développements thématiques et d’orchestrations luxuriantes et très détaillées. Elmer Bernstein développe son atmosphère d’aventure et d’héroïsme rétro dans « Den Makes Out » pour évoquer le super-héros parti pour sauver un peuple opprimé, idée qui culmine dans l’excitant « Castrate Him/Searching for Loc-Nar » où l’on retrouve ici aussi un symphonisme classique d’une grande richesse, très inspiré du Golden Age hollywoodien. L’introduction de « Queen for a Day » possède un petit côté holstien plutôt intéressant (on pense par exemple à l’introduction du « Jupiter » des « Planètes » de Holst), servi par une grande reprise du thème héroïque des trompettes. La musique verse même dans un style martial et guerrier extrêmement solide dans « Pursuit », traversé ici aussi d’envolées héroïques fulgurantes et grandioses.

« Getting Bombed » sort à nouveau l’artillerie lourde avec un orchestre dominé par des percussions martiales et des cuivres massifs et guerriers du plus bel effet - sans aucun doute l’un des meilleurs morceaux d’action du score de « Heavy Metal ». Le thème du Loc-Nar est repris dans « Green Ball » avec des choeurs grandioses et un orchestre particulièrement agité et virtuose, servi par une écriture plus complexe et détaillée. Les amateurs de déchaînements orchestraux apprécieront sans aucun doute « Dem Bones » et ses cuivres en sourdine qui pourraient presque faire penser au « Sacre » de Stravinsky. L’orchestre résonne ici dans toute sa puissance pour la séquence de l’attaque des zombies dans le B-17. Le morceau se prolonge dans le sombre et complexe « No Alarm ». Bernstein s’intéresse ensuite à l’épisode du robot et de l’humaine avec le magnifique « Robot Love », développant un thème romantique rétro et absolument savoureux qui pourrait quasiment faire penser à celui de « A Summer Place » (1959) de Max Steiner. Elmer Bernstein joue bien évidemment ici la carte du décalage et le caractère empathique et exubérant de son Love Theme apportant un éclairage quelque peu ironique à la scène, un second degré appréciable rappelant la fraîcheur et la vitalité de cette grande partition symphonique monumentale. Avec « Harry », Bernstein illustre la séquence d’Harry Canyon avec une utilisation plus surprenante d’un saxophone jazzy évoquant le style des musiques de film noir des années 50 (on pense ici au style de la musique de « The Maltese Falcon » d’Adolph Deutsch), alors que le saxophone développe le thème du Loc-Nar dans une version jazzy/polar assez savoureuse, dans la lignée du « The Man With The Golden Arm » (1955) de Bernstein. Le saxophone est d’ailleurs aussi présent dans « The Next Morning » et « End of Baby », qui rappelle l’univers polar/film noir du segment d’Harry Canyon.

La musique devient plus massive et cuivrée dans « Council » avant de prendre son envolée avec le superbe et grandiose « The Flight To Temple » pour le segment de Taarna, alors que le guerrier s’envole sur le dos de sa créature ailée en direction du temple. Bernstein reprend alors le superbe thème mélodique entendu brièvement dans « Intro to Green Ball », devenu ici une sorte d’hymne d’aventure solennel et épique d’une grande beauté, illustré par des choeurs démesurés, les Ondes Martenot de Jeanne Loriod (apportant une couleur assez particulière au morceau) et un orchestre cuivré et puissant : un grand moment de la partition d’Elmer Bernstein ! Dans « The Sword », la musique fait même brièvement référence au style des musiques de péplum 50’s de Miklos Rozsa avec des harmonies et des orchestrations très typées. Le thème de Taarna (entendu dans toute sa splendeur dans « Flight to Temple ») est alors repris par les Ondes Martenot et les choeurs dans « The Sword », pour la séquence de l’épée, un thème qui n’est pas sans rappeler le lyrisme de Jerry Goldsmith (et plus particulièrement de ses grands thèmes lyriques et solennels des années 80). Entre lyrisme et harmonies/instrumentations guerrières à la Rozsa, « The Sword » est assurément un autre morceau-clé du score de « Heavy Metal ». Aucun doute possible, avec le segment de Taarna, Elmer Bernstein s’est lâché et nous offre quelques uns de ses meilleurs morceaux, où la puissance orchestrale est libérée et apporte aux images du film une force incroyable. Il en va de même pour le superbe « Flight to Holiday Town » - toujours dominé par des orchestrations massives et des solos des Ondes Martenot - et le martial et guerrier « Fighting » pour l’affrontement final contre le chef-sorcier des barbares (agrémenté de quelques percussions et rythmes syncopés très inspirés de Béla Bartók). Le combat culmine dans le massif et tonitruant « My Whips ! Taarna Escapes Pit », alors que « Finish » conclut l’aventure avec une puissance symphonique totalement démesurée, le thème du Loc-Nar étant repris par un tutti orchestral/choral impressionnant avant de céder la place à une reprise triomphante et conclusive du thème lyrique de Taarna.

Vous l’aurez donc compris, avec « Heavy Metal », nous sommes bel et bien en présence ici de l’une des plus grandes musiques de film du cinéma des années 80, une très grande partition symphonique complexe, intense et démesurée, teintée d’un classicisme d’écriture dans la continuité du « Star Wars » de John Williams - n’a-t-on d’ailleurs pas dit à plusieurs reprises que « Heavy Metal » était souvent considéré comme le « Star Wars » d’Elmer Bernstein ? Le compositeur américain démontre avec « Heavy Metal » toute l’étendue de son savoir-faire et brasse les influences (notamment celles du Golden Age hollywoodien) avec une inspiration constante. A l’inventivité éclectique et l’univers visuel kitsch particulier du film de Gerald Potterton, Elmer Bernstein répond par un langage symphonique épique, classique et démesuré, une partition complexe et massive qui ne fait pas dans la dentelle mais qui apporte une force impressionnante à ces différentes histoires autour du maléfique Loc-Nar, une partition immense, grandiose et colossale digne des plus grandes oeuvres symphoniques classiques - mais qui manque simplement un peu d’originalité - un must de la musique de film des années 80, tout simplement !



---Quentin Billard