Le Couperet

1-Prologue 0.47
2-Ceci est ma confession 2.53*
3-Le meurtre de Barnet 3.35
4-Désarroi 3.27
5-La poursuite de Barnet 3.16
6-La pompe 3.51
7-Le vol 1.44
8-Krantz 2.19
9-La valse du couperet 5.09

Amen

10-To Warn the World 2.28
11-Gernstein's Theme 1.46
12-Euthanasia 1.00
13-Roman Ghetto 3.35
14-The Train I 2.13
15-Beyond The Spy-Hole 1.39
16-Nightmare 3.26
17-Ricardo's Deportation 3.39
18-The Train II 2.52
19-The Bishop's Complaint 1.03**
20-Flames in the Night 5.10
21-The Train III 1.19
22-In The Corridor 0.44
23-Gerstein's Theme 1.45
24-A Boat To Argentina 4.02

*Dialogue écrit par Costa-Gavras
et Jean-Claude Grumberg
**Ecrit par Laurent Levesque.

Musique  composée par:

Armand Amar

Editeur:

Naive France K1618

Album produit par:
Armand Amar

Artwork and pictures (c) 2005 K.G. Productions. All rights reserved.

Note: ***
LE COUPERET
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Armand Amar
Adaptation cinématographique du roman de Donald E. Westlake, réalisé par Costa-Gavras, « Le Couperet » évoque les dérives de la société capitaliste et la lutte acharnée pour la concurrence. Ce thriller sur fond de satire sociale met en scène José Garcia dans le rôle inattendu d’un serial-killer, prêt à tout pour défendre son travail. Bruno Davert est un cadre supérieur d’une usine de production de papier. Suite à une délocalisation, son entreprise a décidé de le licencier avec une centaine de ses collègues. Se retrouvant au chômage du jour au lendemain, Bruno se met alors en quête d’un nouveau travail, souhaitant ainsi obtenir un poste à son niveau. Et pour s’assurer que ce poste ne lui passera pas sous le nez, Bruno décide d’assassiner un par un tous ses concurrents. Devenu serial-killer, Bruno va devoir vivre une double vie, cachant ainsi ses activités criminelles à sa famille, pendant qu’il s’occupe de pister ses concurrents et des les tuant le plus discrètement possible. Et quand il n’est pas occupé à assassiner un concurrent potentiel au poste qu’il convoite, Bruno en profite pour se présenter dans des entretiens d’embauche pour lesquels il multiplie les échecs. « Le Couperet » est donc une satire grinçante sur le monde du travail dans la société capitaliste d’aujourd’hui, un thriller moderne filmé avec sobriété par un Costa-Gavras qui a compris tous les enjeux de son récit, et place tous ses espoirs en la personne de José Garcia. L’acteur, pourtant connu pour ses rôles comiques, nous livre ici une interprétation époustouflante de ce cadre supérieur prêt à tout pour retrouver du travail, qui s’est mis en tête d’éliminer directement la concurrence à grand coup d’armes à feu, de traquenards et de pièges en tout genre. Rarement aura-t-on vu l’acteur José Garcia dans un rôle aussi sombre, froid, glacial et neutre, un personnage très inquiétant qui nous offre ainsi une autre facette plus méconnue d’un comédien que l’on a trop souvent catalogué aux rôles de comiques, mais qui possède néanmoins une force et une conviction dramatique assez incroyable. Humour noir grinçant, intrigue captivante, mise en scène sobre et réaliste, acteur en état de grâce, il n’en fallait pas plus pour que ce « Couperet » devienne un excellent thriller au suspense tranchant (ironie !) et à l’humour noir ravageur, une vraie réussite dans son genre !

La musique orchestrale d’Armand Amar contribue à son tour à renforcer l’ambiance à la fois sombre et dramatique du film de Costa-Gavras, tout en conservant une approche clairement minimaliste et retenue, afin de conserver le ton réaliste du film. Armand Amar avait déjà écrit la musique d’un film précédent du réalisateur d’origine grecque, « Amen », en 2002. Ce fut d’ailleurs à l’époque l’une de ses premières compositions pour le cinéma qui lui permit de se faire remarquer du public. Pour « Le Couperet », Amar retrouve donc Costa-Gavras pour la seconde fois en 2005, le compositeur livrant ici une partition exclusivement écrite pour un petit orchestre à cordes. Dès « Prologue », la musique reflète la noirceur dramatique de l’histoire et des préoccupations du personnage de José Garcia en mélangeant pizzicati de cordes graves/aigues, staccatos syncopés et tenues de cordes. Armand Amar superpose ici avec adresse les rythmes syncopés et mouvants dans un style répétitif et minimaliste clairement inspiré de Philip Glass et de Mychael Nyman. C’est d’ailleurs ce côté répétitif qui domine ici dans le jeu des cordes, comme le rappelle « Ceci est ma confession », qui nous propose un dialogue de José Garcia tiré du film, sur fond de cordes répétitives, envoûtantes et sombres, reflétant les sentiments du personnage principal. L’approche clairement psychologique de la musique d’Armand Amar apporte ici une certaine tension et une densité dramatique sobre mais néanmoins efficace dans le film.

Dans « Le Meurtre de Barnet », Amar évoque la première scène de meurtre en utilisant des cordes sombres agrémentées de quelques effets électroniques plus atmosphériques et lointains. La musique est porteuse ici aussi d’un certain suspense adéquat, avec une approche plus atonale de l’écriture des cordes, et une omniprésence des ostinatos mélodiques des cordes. La musique conserve ce côté répétitif, évoquant la détermination de Bruno Davert. A noter que le compositeur rajoute ici à ses cordes staccatos entêtantes une sorte de bruit de montre continu qui renforce la tension lors de cette première scène de meurtre. A contrario, la musique devient plus chaleureuse et introspective dans « Désarroi », où elle évoque les tourments de Bruno Davert, ses doutes et son désarroi, par le biais de cordes plus mélancoliques et plaintives. Amar fait alors intervenir ici un piano pour accompagner l’orchestre à cordes, le tout avec une grande retenue très touchante typique du style plus intimiste et pudique du compositeur.

La partie suspense du score du « Couperet » revient dans « La poursuite de Barnet », qui prolonge le travail du compositeur sur « Le meurtre de Barnet » et développe à nouveau ses ostinatos mélodiques entêtants des cordes avec une intensité constante. Sans jamais sombrer dans la cacophonie facile, la musique crée ici la tension et le suspense par l’accentuation des rythmes et le mélange des ostinatos mélodiques avec les cordes et quelques effets électroniques discrets. Ici aussi, la musique fait preuve d’un minimalisme certain et d’une grande sobriété, sans jamais tomber dans le piège facile des musiques de suspense hollywoodiennes. A noter l’utilisation d’un ostinato rythmique entêtant d’effets de col legno des cordes (on frappe les cordes du violon avec le bois de l’archet) dans « La Pompe », où la musique prolonge la tension et le suspense avec le sentiment de détermination des cordes répétitives associées à Bruno Davert. Dans « Le Vol », Amar introduit une nouveauté, l’utilisation d’un rythme de clarinette, de basson et de cors samplés sur fond d’ostinato répétitif de piano et de cordes. Ici aussi, l’ombre de Philip Glass ou de Steve Reich n’est guère loin, la musique d’Amar faisant clairement référence au style de la musique répétitive/minimaliste américaine du 20ème siècle - une constante, chez le compositeur ! Enfin, « Krantz » évoque une autre scène de meurtre avec une reprise du mélange staccatos/pizzicati agité du « Prologue ». Pour finir, le compositeur nous fait entendre son thème principal dans « La Valse du Couperet », qui accompagne brièvement quelques passages du film et que l’on retrouve surtout dans le générique de fin du film. Cette valse est associée au personnage de José Garcia dans le film, dominée par une mélodie de cordes et de piano sur fond de pizzicati et d’ostinatos entêtants des cordes.

Pour ceux qui seraient désireux de découvrir l’univers musical d’Armand Amar, la partition du film « Le Couperet » est de loin une très bonne entrée en la matière, tant l’on retrouve ici toutes les marques de fabrique habituelles du compositeur d’origine israélienne : l’accent est mis ici sur un orchestre de chambre restreint, avec un mélange d’ostinatos mélodiques entêtants des cordes, un caractère répétitif et une approche minimaliste tout à fait représentative du style musical habituel d’Armand Amar. Le compositeur a écrit très peu de musique pour le film (à peine 25 minutes), mais ce qu’il nous donne à entendre ici reste tout à fait convaincant et parfaitement adapté à l’ambiance sombre et l’ironie grinçante du film de Costa-Gavras. Sans jamais en faire de trop, la musique d’Amar explore parfaitement la psychologie torturée de Bruno Davert, en reflétant ses états d’âme (« Ceci est ma confession ») ou même l’ironie de sa situation - « La valse du couperet », surtout à la fin du film, qui nous rappelle que tout n’est qu’un cycle perpétuel. Partition répétitive, sombre et minimaliste, la musique du « Couperet » est un score appréciable bien que sans aucune originalité particulière, idéal pour aborder le style musical personnel d’Armand Amar dans ses musiques de film pour le cinéma français !



---Quentin Billard