1-Main Title 2.43
2-Welcome To St. Francis 2.20
3-First Warning 2.15
4-Pot of Tea 2.13
5-Dancing Lesson 2.38
6-Lifeguard 1.44
7-The Trouble With Angels 1.59*
8-Sewing Circle 2.42
9-Future Plans 2.46
10-Marching Band 2.11
11-Rachel Says Goodbye 3.16
12-End Title 1.13

*Ecrit par Jerry Goldsmith
Paroles de Ernie Sheldon
Interprété par The Devils.

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

Mainstream S/6073

LP produit par:
Jerry Goldsmith

Artwork and pictures (c) 1966 Columbia Pictures. All rights reserved.

Note: ***
THE TROUBLE WITH ANGELS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
Comédie gentillette réalisée par Ida Lupino en 1966, inspirée des mémoires de Jane Trahey, « The Trouble With Angels » (Le Dortoir des anges) nous plonge dans l’univers clos d’une école catholique privée dirigée par un groupe de religieuses. L’école de St. Francis Academy est un pensionnat catholique pour jeunes filles tenu par des religieuses très sévères. Pourtant, les choses vont changer avec l’arrivée de deux adolescentes particulièrement turbulentes, Mary Clancy (Hayley Mills) et Rachel Devery (June Harding). Les deux jeunes filles, insouciantes, délurées et rebelles, vont commencer à semer la pagaille dans tout le pensionnant en multipliant les bêtises en tout genre, et ce au grand dam de la mère supérieure (Rosalind Russell). Leurs bêtises mettront alors en péril l’autorité de la mère supérieure, ainsi que leur avenir dans le prestigieux pensionnant catholique du St. Francis Academy. « The Trouble With Angels » est le dernier long-métrage de la réalisatrice américaine Ida Lupino, plus connu en tant qu’actrice pour le cinéma hollywoodien des années 40/50. Cette cinéaste un peu atypique du cinéma américain nous offre une satire délirante de l’univers des pensionnats religieux dans « The Trouble With Angels », caricaturant sans vergogne les règles de vie des nonnes et des écoles catholiques traditionnelles. Et pour dynamiter l’ordre établi - une idée récurrente au milieu des années 60 - deux jeunes filles turbulentes, qui braveront continuellement l’autorité de la mère supérieure, brillamment incarnée avec force et conviction par une star du Golden Age hollywoodien, Rosalind Russell. Le film permit aussi de révéler la jeune Hayley Mills, qui débuta sa carrière dans les années 60 avec des comédies familiales pour ados de chez Walt Disney et obtint ainsi, avec « The Trouble With Angels », l’un de ses meilleurs rôles au cinéma. Entre gags, humour noir et réflexion sur l’autorité et l’adolescence, « The Trouble With Angels » est une comédie 60’s plutôt réussie et relativement moderne pour l’époque, un film malheureusement tombé quelque peu dans l’oubli, mais qui mériterait pourtant d’être réhabilité et apprécié à sa juste valeur.

La partition orchestrale exubérante de Jerry Goldsmith apporte un charme et une énergie juvénile remarquable au film d’Ida Lupino. Composée à une époque où le maestro californien commence tout juste à se faire remarquer du grand public et de la profession, avec des partitions monumentales telles que « Freud » (1962), « The Satan’s Bug » (1965) et « The Blue Max » (1966), la musique de « The Trouble With Angels » révèle une facette plus légère et humoristique du style musical de Jerry Goldsmith. Le compositeur n’en était pas à son premier coup d’essai dans le domaine des musiques de comédie, puisqu’il écrivit ainsi en 1963 la musique de « Take Her, She’s Mine » pour le film oublié d’Henry Koster avec James Stewart et Sandra Dee. Pour « The Trouble With Angels », Jerry Goldsmith vive, exubérante et colorée utilisant toutes les ressources de l’orchestre symphonique habituel agrémenté de quelques solistes évoquant l’univers de l’école catholique de la St. Francis Academy. Ainsi, le film s’ouvre au son de l’enjoué et sautillant « Main Title » qui introduit le thème principal avec l’orchestre et quelques cloches (pour évoquer le pensionnant religieux), avant d’enchaîner sur un pur délire musical typique du compositeur : batterie/guitare basse aux rythmes typiquement rock’n roll « sixties », instrumentation colorée passant d’un instrument à un autre avec un humour ravageur et quelques touches de mickey-mousing à la limite du dessin animé (trombones en sourdine, piccolo, cordes, piano, saxophones, woodblocks, klaxon, etc.). A vrai dire, l’approche mickey-mousing délirante voulue par Goldsmith dans le générique de début est totalement justifiée par le fait que le générique est entièrement animé, la musique complétant ainsi parfaitement le caractère facétieux de ce générique. Goldsmith développe ici le thème principal exubérant et enjoué associé à Rachel et Mary tout au long du film, un thème qui évoque bien évidemment le caractère déluré et turbulent des deux adolescentes : un pur moment de délire et d’humour musical !

Avec un thème qui restera omniprésent tout au long du film, Goldsmith bâtit lentement sa partition avec une fraîcheur et une inventivité typique du compositeur. Dans « Welcome To St. Francis », le maestro conserve ce côté exubérant et mickey-mousing en développant progressivement son thème sous différentes formes - marche pleine d’ironie, versions instrumentales plus lentes, etc. - L’arrivée des deux jeunes filles à la St. Francis Academy permet au compositeur de faire s’entrecroiser l’austérité harmonique et instrumentale du pensionnant (harmonies tonales très claires et posées, cordes, etc.) et l’exubérance juvénile de Mary et Rachel (petites percussions diverses incluant un marimba, utilisation humoristique d’un orgue de barbarie, etc.). Le compositeur parvient ici aussi à glisser quelques touches d’humour, comme par exemple pour la scène où soeur Clarissa demande aux jeunes filles de se regrouper dans le bus, Goldsmith en profitant alors pour reprendre le thème sous la forme ironique d’une marche militaire, se moquant ainsi de l’autorité des religieuses dans le film. On retrouve une ambiance similaire dans « First Warning », où le morceau est néanmoins teinté de quelques touches légèrement plus sombres, avec une reprise du thème principal et le retour de l’orgue de barbarie de « Welcome To St. Francis » et de la guitare électrique ‘rock’n roll’ kitsch du « Main Titles ».

Le compositeur n’oublie pas pour autant d’illustrer, de leur côté, l’univers plus austère et sage des religieuses dans « Pot of Tea », où les harmonies de cordes deviennent ici plus posées, avec un piano aux notes descendantes et sereine, et même quelques cuivres plus solennels. On retrouve ici le thème de piccolo entendu dans l’ouverture du « Main Title ». Poursuivant dans un registre plus humoristique et délirant, le maestro nous offre avec « Dancing Lesson » un pur moment de délire musical annonçant clairement ses futurs travaux sur les films de Joe Dante : ici, Jerry Goldsmith illustre la scène de la danse de leçon avec un mélange entre rythmes rock’n roll, marche militaire et raclements de percussions accompagnant un orchestre très coloré, teinté de touches mickey-mousing amusantes. A noter que l’on retrouve ici l’orgue de barbarie qui apporte une couleur supplémentaire à la musique du film d’Ida Lupino. Le compositeur joue ainsi sur ses différentes couleurs instrumentales avec une inventivité et une fraîcheur extrême, annonciatrice de ses futures grandes partitions comédie des années 80/90 (et plus particulièrement de scores tels que « Gremlins », le segment de Joe Dante pour « Twilight Zone : The Movie » ou bien encore « The ‘Burbs »). « Lifeguard » évoque encore une fois les nombreuses bêtises et facéties de Mary et Rachel avec le retour de la batterie rock’n roll et l’apparition ici d’un synthétiseur kitsch typiquement « sixties », le compositeur en profitant pour développer pleinement son thème principal.

Dans « Sewing Circle », la musique devient alors moins exubérante et plus introspective. On entre alors dans la seconde partie du film, et la musique révèle enfin les sentiments intérieurs des personnages, et plus particulièrement de Mary, qui commence à ressentir l’envie de devenir une nonne. Quelques touches musicales légères et joyeuses parsèment encore l’ensemble (orgue de barbarie, pizzicati, etc.) avant de céder la place à un piano plus lyrique sous la forme d’une valse intime et élégante pour le personnage de Mary. La musique parvient alors à apporter une certaine émotion inattendue, après avoir développé tout au long de la première partie une atmosphère plutôt humoristique et délirante. Dans « Future Plans », la musique devient ici aussi plus sage et posée. C’est le temps de la réflexion, et pour les deux jeunes filles, le retour sur terre après avoir accumulé tellement de bêtises : ici aussi, Goldsmith évoque les sentiments intérieurs de Mary, lorsqu’elle commence à s’intéresser à la vie des religieuses et ressent petit à petit le besoin de devenir l’une des leurs. Goldsmith reprend ici le thème principal sous une forme plus lente, intime et apaisée, avec une grande délicatesse (on retrouve ici un piano qui rappelle la poésie et l’intimité du score pour le film « A Patch of Blue »). Le compositeur se fait ensuite plaisir avec « Marching Band », une fanfare exubérante qu’il a écrite pour la scène de la fanfare de la St. Francis Academy vers le milieu du film. L’aventure touche à sa fin dans « Rachel Says Goodbye », lorsque les deux amies sont obligées de se faire leurs adieux, alors que Rachel rentre chez elle et que Mary décide de rester pour devenir une religieuse. On retrouve ici quelques références au thème principal, avant d’enchaîner sur le générique de fin (« End Title »), reprenant une dernière fois le thème avec ses rythmes rock’n roll et ses sonorités instrumentales bondissantes reprises de l’ouverture.

Vous l’aurez certainement compris, la musique de « The Trouble With Angels » dévoile une facette plus humoristique et légère du style de Jerry Goldsmith, une musique fraîche et exubérante sur l’insouciance de la jeunesse, écrit par un compositeur qui semble s’être fait véritablement plaisir sur le film d’Ida Lupino. Sans être un travail majeur dans l’immense filmographie du compositeur, le score de « The Trouble With Angels » reste néanmoins l’un des plus beaux efforts du maestro dans le domaine des musiques de comédie, un genre dans lequel il brillera tout particulièrement entre les années 80 et 90. Voici donc un score frais, enjoué et coloré, porté par un sens de l’humour typique du compositeur et des orchestrations d’une grande inventivité, qui complètent parfaitement l’ambiance du film d’Ida Lupino !



---Quentin Billard