1-Prelude and Outer Space 1.42
2-Radar 2.06
3-Danger 0.24
4-Klaatu 2.08
5-Gort 0.45
6-The Visor 1.10
7-The Telescope 0.43
8-Escape 0.57
9-Solar Diamonds 1.00
10-Arlington 1.22
11-Lincoln Memorial 2.10
12-Nocturne 2.47
13-The Flashlight 0.53
14-The Robot 2.08
15-Space Control 1.11
16-The Elevator 0.30
17-The Magnetic Pull 1.36
18-The Study 0.45
19-The Conference 0.31
20-The Jeweler 0.47
21-12:30 0.30
22-Panic 0.46
23-The Glowing 1.01
24-Alone 1.03
25-Gort's Rage 0.43
26-Nikto 0.35
27-Captive 0.32
28-Terror 1.48
29-The Prison 1.43
30-Rebirth 2.03
31-Departure 0.55
32-Farewell 0.35
33-Finale 0.37

Musique  composée par:

Bernard Herrmann

Editeur:

Varèse Sarabande 302 066 314 2

Producteur exécutif:
Robert Townson
Réenregistrement conduit par:
Joel McNeely

Artwork and pictures (c) 1951 Twentieth Century Fox Film Corporation. All rights reserved.

Note: ****1/2
THE DAY THE EARTH STOOD STILL
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Bernard Herrmann
Classique incontournable de la science-fiction réalisé en 1951 par Robert Wise, « The Day The Earth Stood Still » (Le jour où la terre s’arrêta) évoque la rencontre entre l’homme et les extra-terrestres. L’histoire commence le jour où une soucoupe volante atterrit sur Terre, avec à son bord un alien à l’apparence humaine, que l’on croyait hostile, mais qui viendra finalement délivrer un message de paix à l’humanité toute entière. Plus qu’un simple long-métrage de science-fiction aux effets spéciaux kitsch et extrêmement modestes, même pour l’époque (le look carton-pâte de la soucoupe volante, l’extra-terrestre à figure humaine, le robot Gort qui n’est rien d’autre qu’un acteur dans un costume, etc.), « The Day The Earth Stood Still » est avant tout un film qui s’inscrit dans la paranoïa communiste inspirée par la guerre froide (le film a été tourné en 1951), avec un important message de paix, et ce à l’inverse de la plupart des films de science-fiction aperçus à cette époque au cinéma américain. Ainsi donc, Klaatu (Michael Rennie), l’extra-terrestre du film, ne vient pas pour détruire notre monde mais, au contraire, pour nous mettre en garde contre l’arme atomique découverte récemment, et la menace probable d’un conflit nucléaire. Le film est donc porteur d’un message de paix - en pleine ère de la guerre froide - illustré par l’extra-terrestre, une sorte de messie du futur aux résonnances christiques évidentes (il descend sur terre pour délivrer un message de paix aux hommes, et prendra même le nom de « Charpentier » lorsqu’il se retrouvera au milieu des humains). Et pour s’assurer que le message puisse passer de la façon la plus directe possible, Robert Wise s’arrangea ainsi pour que « The Day The Earth Stood Still » soit filmé avec un certain réalisme, mettant ainsi les effets spéciaux au second rang (d’où le strict minimum utilisé ici pour le look de l’OVNI, de l’alien et de son robot). A ce sujet, les scènes où Klaatu se fond dans la masse en se faisant passer pour un certain Charpentier sont hélas bien moins intéressantes et n’apportent pas grand chose au récit du film - on a parfois l’impression qu’elles font davantage office de remplissage plus qu’autre chose - mais elles s’avèrent néanmoins nécessaires pour pouvoir permettre au spectateur moyen de s’identifier plus facilement au personnage et de mieux appréhender le message qu’il tente de délivrer à l’époque à la bonne conscience de l’américain moyen. Le reste appartient à l’histoire : le film est ainsi devenu une oeuvre culte du cinéma populaire, très souvent cité et référencé dans de nombreux long-métrages, séries TV, documentaires et dans les médias en général (le film a même eu droit à un remake réalisé par Scott Derrickson en 2008 avec Keanu Reeves dans le rôle de Klaatu). La phrase « Klaatu barada nikto ! », est très rapidement devenue culte, référencée dans de nombreux films, tout comme le personnage du robot Gort, véritable icône populaire du cinéma de science-fiction américain.

La partition symphonique de Bernard Herrmann reste l’un des éléments les plus mémorables du film de Robert Wise. Ainsi donc, « The Day The Earth Stood Still » serait une production bien terne et timorée sans le génie mélodique, harmonique et instrumental de Bernard Herrmann, qui créa pour ce long-métrage une partition massive, sombre, mystérieuse et envoûtante, qui reste encore aujourd’hui l’un des plus grands chef-d’oeuvres de la musique de film hollywoodienne - et qui, comme le film, inspirera aussi beaucoup d’autres compositeurs par la suite, notamment grâce à son utilisation assez rafraîchissante à l’époque du théremin, instrument électronique très à la mode dans le monde de la musique de films de science-fiction/fantastique des années 40/50. Le film s’ouvre ainsi au son d’un « Prelude and Outer Space » magistral, l’une des plus grandes pages musicales de l’immense Bernard Herrmann : après une ouverture quasi surréaliste introduite par le long glissando du théremin, Herrmann bâtit son ouverture autour d’un thème principal mystérieux et envoûtant à souhait, avec un motif de 4 notes de cuivres accompagné par une série d’arpèges rapides de deux pianos/harpe cristallins et quasi impressionnistes, hypnotisant à souhait (annonçant par moment le style de l’ouverture du « Vertigo » d’Hitchcock). A noter d’ailleurs qu’Herrmann n’utilise pas un seul mais bien deux théremins pour les besoins de sa partition ! Les deux théremins apportent ici une couleur fantastique et surréaliste absolument magistrale à cette brillante ouverture, évoquant le monde des profondeurs spatiales et l’arrivée de l’extra-terrestre Klaatu sur terre. Cet instrument sera véritablement au coeur de la partition de « The Day The Earth Stood Still ». Comme toujours avec Bernard Herrmann, le choix des orchestrations est ici absolument crucial : c’est pourquoi le compositeur a choisi de souligner le noir et blanc du film de Robert Wise en mettant de côté les bois et les cordes pour privilégier une formation orchestrale incluant des cuivres (trompettes, trombones, tuba, mais pas de cors !), un piano, un vibraphone, deux théremins, deux orgues hammond et un orgue d’église, des percussions (incluant un gong et des timbales), un violon électrique amplifié, une guitare, un violoncelle et une contrebasse. L’orgue d’église, mixé discrètement dans l’ouverture, apporte une dimension quasi mystique au générique de début, couplé adroitement aux deux théremins symbolisant l’extra-terrestre dans le film.

« Radar » évoque un sentiment d’urgence et de tension alors que les radars américains détectent l’arrivée d’un OVNI dans le ciel des Etats-Unis. Herrmann suggère ici adroitement la panique et l’appréhension en utilisant de façon très minimaliste une série de notes rapides et répétitives des deux pianos (l’un mixé à droite, l’autre à gauche, pour la stéréo) et de quelques notes de vibraphone, un morceau qui rappelle un peu la musique de Béla Bartók et annonce par moment le style de certaines futures partitions de Jerry Goldsmith dans les années 60/70. L’arrivée de l’extra-terrestre sur terre (« Klaatu ») est un autre grand moment de la partition de Bernard Herrmann : ici, la musique devient plus mystérieuse, envoûtante, énigmatique, mystique : les notes aigues du théremin, couplé à des notes graves et discrètes de l’orgue créent ici une atmosphère surréaliste et quasi onirique pour la scène où Klaatu descend de l’OVNI et se dévoile au public : un morceau lent, répétitif et envoûtant, typique du compositeur ! A contrario, la musique évoque le danger et la menace dans « Gort », où Herrmann choisit d’évoquer le robot de Klaatu avec des glissandi du théremin, des notes graves des trombones en sourdine avec le piano, le gong et les timbales. La partition reste peu généreuse dans sa thématique, le compositeur préférant opter ici pour une approche plus atmosphérique et instrumentale, probablement afin de renforcer l’atmosphère étrange et sombre du film de Robert Wise. L’agressivité soudaine de « The Visor » et l’atmosphère surréaliste et mystérieuse de « The Telescope » renforcent ce sentiment d’étrangeté bien inquiétant, le tout écrit avec une modernité incroyable pour l’époque (le film date de 1951), typique de la personnalité musicale unique de Bernard Herrmann. Même un morceau d’action agressif comme « Escape » et son théremin déchaîné ne semble pas avoir pris la moindre ride ! On appréciera aussi la façon dont Herrmann joue sur ses différentes couleurs instrumentales pour renforcer l’atmosphère du film, comme c’est le cas avec l’utilisation de notes longues d’un vibraphone solitaire dans le mystérieux « Solar Diamonds ».

La musique devient alors plus posée et sereine dans « Arlington », alors que Klaatu prend l’identité de Charpentier et se fond dans la masse humaine. Herrmann développe alors ici un thème de trompettes plus solennel et « americana » d’esprit, thème que l’on retrouvera dans « Lincoln Memorial », alors que Klaatu/Charpentier découvre les grands monuments de l’Histoire des Etats-Unis. On retrouve ensuite les sonorités mystérieuses de l’extra-terrestre dans un adroit mélange cuivres/orgue/vibraphone pour « Nocturne », traversé de quelques effets intéressants de harpe. Les deux théremins ne sont jamais très loin eux aussi, comme le rappelle le bref et très mystérieux « The Flashlight ». Dans « The Robot », Herrmann ramène un peu de tension, pour rappeler le réel objectif de Klaatu : trouver une façon de délivrer un message de paix à la population terrienne. « The Robot » crée une certaine tension discrète mais néanmoins présente avec quelques timbales et des cuivres plus graves typiques du compositeur. On retrouve ensuite le style cristallin de l’ouverture avec les deux pianos et les deux théremins dans l’envoûtant « Space Control » - autre évocation inspirée du monde de l’espace - dans lequel Herrmann utilise une guitare acoustique qui vient s’ajouter à sa formation instrumentale assez éclectique. Plus impressionnant, « The Magnetic Pull » joue davantage sur les effets de stéréo avec le retour du duo de théremin mystérieux, tandis que le compositeur continue de développer son atmosphère énigmatique et étrange dans des passages tels que « The Conference », « The Glowing », « 12.30 » ou un agité « Panic » reprenant le thème principal en suggérant une atmosphère de panique. On retrouve d’ailleurs les orchestrations plus massives et tonitruantes pour le robot dans « Gort’s Rage », alors que Klaatu est en danger et que Gort s’active, prêt à tout détruire autour de lui. On retrouve une atmosphère similaire dans le sombre « Terror », dominé par des trombones en sourdine graves, un orgue sombre et un théremin jouant dans le registre grave, une atmosphère de suspense latent typique de Bernard Herrmann. A noter l’utilisation du violon électrique dans « Rebirth », débouchant sur les mystérieux « Departure » et « Farewell », qui conclut l’aventure sur un sentiment à la fois étrange et apaisé, après que Klaatu ait délivré son message de paix aux terriens.

Partition symphonique atmosphérique, mystérieuse et envoûtante, « The Day The Earth Stood Still » est à n’en point douter l’un des grands chef-d’oeuvres incontournables de la filmographie de Bernard Herrmann, une musique passionnante, captivante et envoûtante, bien qu’un brin répétitive et parfois un peu monotone (un défaut habituel du compositeur). Certes, la partition de « The Day The Earth Stood Still » n’est pas très facile d’accès, mais pour peu que l’on soit perméable au style très particulier du légendaire compositeur américain, cette somptueuse composition orchestrale révélera toutes ses richesses aux auditeurs les plus curieux, un score majeur dans l’univers des musiques de science-fiction hollywoodiennes, qui a influencé bon nombre de compositeurs par la suite (et notamment Danny Elfman qui a pastiché cette musique dans son ouverture du film « Mars Attacks ! » de Tim Burton). Le contraste saisissant entre les quelques déchaînements orchestraux du score et les passages plus calmes et mystérieux apporte une richesse insoupçonnée à la musique d’Herrmann dans le film de Robert Wise. Le score crée ainsi une atmosphère assez particulière et propre au célébrissime long-métrage du cinéaste américain, une atmosphère assez unique à redécouvrir d’urgence grâce à la géniale réinterprétation du score par Joel McNeely en 2002, une réinterprétation confondante de vérité et extrêmement respectueuse de l’oeuvre d’origine et de ses différents détails. En somme, un classique incontournable de la musique de film !



---Quentin Billard