1-Half Remembered Dream 1.12
2-We Built Our Own World 1.56
3-Dream Is Collapsing 2.24
4-Radical Notion 3.43
5-Old Souls 7.44
6-528491 2.24
7-Mombasa 4.54
8-One Simple Idea 2.28
9-Dream Within A Dream 5.04
10-Waiting For A Train 9.30
11-Paradox 3.25
12-Time 4.36

Musique  composée par:

Hans Zimmer

Editeur:

WaterTower Music/Reprise 524667-2

Score produit par:
Hans Zimmer
Musique additionnelle de:
Lorne Balfe
Concepteur du sound design:
Mel Wesson
Coordination du score:
Andrew Zack
Programmation du score:
Ryeland Allison
Assistant monteur musique:
Peter Oso Snell
Programmation synthétiseurs:
Howard Scarr

Artwork and pictures (c) 2010 Warner Bros. Pictures. All rights reserved.

Note: ***1/2
INCEPTION
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Hans Zimmer
Après l’excellent « The Dark Knight », le surdoué Christopher Nolan nous offre un nouveau long-métrage en passe de devenir un grand classique du genre, « Inception ». Pour ce projet de longue date, le réalisateur a travaillé sur son propre scénario pendant près de 10 ans, influencé par des classiques tels que « Matrix », « Dark City » ou « The Thirteenth Floor ». « Inception » raconte l’histoire de Dom Cobb (Leonardo DiCaprio), un agent secret spécialisé dans l’extraction des informations contenues dans les rêves des gens. Les extracteurs sont des voleurs professionnels qui utilisent cette mystérieuse technologie de « l’extraction » afin de recueillir et de dérober des informations dans le subconscient des personnes qui rêvent, informations qui ne pourraient pas être accessibles autrement. Les talents de Cobb sont tels qu’une société d’espionnage industriel a décidé de faire appel à ses services pour une nouvelle mission périlleuse. Cobb, qui n’a plus de famille (sa femme est décédée tragiquement il y a longtemps), a été obligé de s’exiler en laissant derrière lui ses deux jeunes enfants. La nouvelle mission que lui propose alors Saito (Ken Watanabe), un riche homme d’affaire japonais que Cobb a tenté de tromper dans ses propres rêves, va permettre à l’agent américain d’obtenir sa rédemption. Après moult hésitations, Cobb finit par accepter le job : il va devoir pratiquer, avec toute son équipe, une « inception », c’est-à-dire l’implantation d’une idée dans le subconscient d’un sujet. Ce processus est beaucoup plus complexe qu’une simple extraction, et s’avère être aussi dangereuse pour ceux qui la pratiquent que pour le sujet lui-même. La « victime » de cette inception est Robert Fischer (Cillian Murphy), le fils du vieux et puissant homme d’affaire Maurice Fischer (Pete Postlethwaite), principal concurrent de Saito. L’objectif de cette inception sera de pousser le jeune Fischer à démanteler l’empire de son père (qui est en train d’agoniser), afin d’empêcher un monopole qui risquerait de nuire définitivement aux affaires de Saito. La tâche sera très difficile, et Dom Cobb devra pour cela recruter de nouveaux membres et concevoir une stratégie extrêmement complexe et élaborée.

Scénario captivant, mise en scène complexe et intelligente, ambition artistique incroyable, esthétique époustouflante, idées neuves à profusion, tels sont les superlatifs qui permettraient de définir le nouveau tour de force cinématographique de Christopher Nolan. Avec son mélange improbable de réflexions quasi métaphysiques et de scènes d’action démesurées, « Inception » peut désormais être considéré comme un véritable classique instantané, en passe de devenir l’un des films de science-fiction/action les plus complexes et les plus passionnants de la décennie. Pour ce projet de longue date, Christopher Nolan a travaillé d’arrache-pied en étant à la fois réalisateur, scénariste et producteur. Avec un budget conséquent de 160 millions de dollars, Nolan a réussit à créer une atmosphère quasi unique en son genre, celle du voyage dans le subconscient et les rêves des gens, une idée qui, si elle n’a rien de révolutionnaire en soi (on pense par exemple au « The Cell » de Tarsem Singh en 2001), prend avec « Inception » une ampleur quasi jamais vue au cinéma. Empruntant quelques idées à « Matrix » ou à « Dark City » - celle d’un monde dans lequel les personnages évoluent mais qui n’est pas réel - le long-métrage ambitieux de Christopher Nolan construit une intrigue complexe se déroulant dans plusieurs niveaux de temps, et dans deux dimensions mises ici en parallèle : le rêve et la réalité. Mais là où le film devient réellement passionnant, c’est dans la façon dont il crée plusieurs dimensions à l’intérieur même du rêve (avec une logique tout à fait crédible, pour peu que l’on accepte le postulat de départ), qui serait construit comme une sorte de gigantesque construction à plusieurs niveaux, et dans lequel des « architectes » auraient le pouvoir de bâtir cette réalité onirique à leur guise, laissant des possibilités quasi infinies, puisque le monde des rêves est dépourvu des limites de la réalité (cf. le fameux paradoxe des escaliers dans les rêves). Pour s’assurer qu’il est bien dans la réalité, Dom Cobb, le héros du film, porte régulièrement sur lui une toupie métallique qu’il n’hésite pas à faire tourner sur elle-même pour savoir s’il est dans le rêve ou dans la réalité - un élément-clé de l’intrigue du film.

Dans ce gigantesque puzzle reproduisant plusieurs strates de rêve, « Inception » s’affirme donc comme une production extrêmement ambitieuse, servie par un scénario brillant -fruit de près de 10 ans de travail et de réflexion de la part du cinéaste- un casting incroyable (Leonardo DiCaprio, Joseph Gordon-Levitt, Ellen Page, Ken Watanabe, Marion Cotillard, Tom Hardy, Cillian Murphy, Michael Caine, Tom Berenger, Lukas Haas, Peter Postlethwaite, etc.) et bien sûr, une mise en scène de génie, mélangeant réflexion sur le subconscient humain et le pouvoir des rêves, scènes d’action énormes (toute la séquence de la longue bataille dans la montagne enneigée est un grand moment de cinéma d’action !) et histoire d’amour bouleversante - la relation torturée dans le film entre Leonard DiCaprio et Marion Cotillard- à noter d’ailleurs l’utilisation surprenante de la chanson « non, je ne regrette rien » d’Edith Piaf, que le public a très rapidement associé à Marion Cotillard dans le film et à son rôle dans le film « La Môme » (2007) alors qu’en réalité, Nolan avait eu déjà cette idée il y a 10 ans (ce serait donc une pure coïncidence !). Enfin, et c’est peut être le plus important ici, en filmant le monde des rêves et du subconscient humain avec une complexité rarement vue dans une grosse production d’action hollywoodienne de cette envergure, Christopher Nolan nous prouve que l’on peut faire un blockbuster survitaminé tout en apportant une solide dose de réflexion et d’intelligence - sans oublier un autre fait important : à l’inverse de bon nombre de ses congénères hollywoodiens d’aujourd’hui, « Inception » prend véritablement le temps de développer ses personnages et son intrigue, un miracle quasi paradoxal étant donné le montage ultra speed du film. Le film possède d’ailleurs plusieurs niveaux de lecture audacieux (à l’image des différents niveaux de rêve décrits dans le film), chacun pouvant se faire sa propre interprétation de l’histoire et de son final, qui a été sujet à de nombreuses discussions et théories sur la toile un peu partout dans le monde. « Inception », c’est donc à la fois un polar psychologique complexe, un film d’action déchaîné (les scènes de fusillades sont nombreuses et d’une intensité rare), une histoire d’amour tragique digne du mythe d’Orphée et Eurydice et un film plus cérébral sur les méandres du subconscient humain et les différents degrés de perception de la réalité : en clair, un grand moment de cinéma, non dénué de défauts (le film est un peu trop long et la longue bataille dans la neige aurait dû être écourtée d’au moins 15 ou 20 bonnes minutes !), un grand classique en passe de devenir un chef-d’oeuvre du genre, et aussi l’un des plus gros succès de l’année au cinéma : incontournable !

« Inception » doit aussi beaucoup à la partition synthético-orchestrale très prenante de Hans Zimmer, le compositeur teuton retrouvant ainsi Christopher Nolan après avoir écrit les musiques de « Batman Begins » (2005) et « The Dark Knight » (2008). Pour « Inception », Zimmer a eu l’idée de construire sa thématique en détournant de façon inventive la fameuse chanson-clé du film, « Non, je ne regrette rien » d’Edith Piaf. Le compositeur, de plus en plus connu pour son goût pour une certaine forme de conceptualisation, a construit en réalité l’ensemble de sa partition autour d’une idée « secrète » que certains auditeurs ont sut très vite découvrir et décortiquer à partir de plusieurs écoutes de l’album : le concept est en fait parti de Christopher Nolan lui-même, qui eut l’idée, il y a 10 ans, d’utiliser la chanson d’Edith Piaf en tant que « signature » musicale du film (la chanson a aussi un rôle direct dans le film, puisqu’elle permet aux personnages de s’éveiller des rêves et de revenir à la réalité). Plus précisément, Zimmer s’est intéressé à l’accompagnement instrumental de la chanson avec le motif de deux notes des trombones (« da-da, da-da, da-da », etc.), motif qu’il a modifié, transformé et ralenti pour les besoins du film. L’ensemble de la partition de « Inception » repose d’ailleurs sur ce concept de détournement de l’accompagnement de « Non, je ne regrette rien », un secret bien gardé jusqu’à ce qu’une vidéo apparue récemment sur le net dévoile l’énigme de la musique de Zimmer. Certes, s’il paraît bien impossible de remarquer ce genre de chose dans le film (hormis peut être dans le générique de début), on ne pourra qu’applaudir l’idée d’un compositeur qui n’en manque décidément pas, et qui aime conceptualiser sa musique jusque dans les plus infimes détails.


Au niveau des interprètes, Hans Zimmer a fait appel à Johnny Marr, ex-guitariste du groupe de rock anglais des années 80 « The Smiths » pour interpréter plusieurs parties de guitares électriques tout au long du score. Le reste de la partition est essentiellement dominé par une pléiade de synthétiseurs et de loops électro en tout genre, accompagné de quelques parties orchestrales se limitant bien souvent à des cordes et des cuivres. Mais ici, ce sont essentiellement les synthétiseurs qui dominent l’ensemble de la partition, Zimmer renouant avec un style musical qui rappelle bien souvent les sonorités de ses anciens scores d’action du début des années 90, plus particulièrement « Black Rain » ou « Pacific Heights » - une chose que l’on avait déjà remarqué dans son récent travail sur « Angels & Demons ». Encore une fois, plus le temps avance, plus le compositeur allemand semble vouloir revenir aux sources de son art, renouant de plus en plus avec un style de son passé, des sonorités provenant d’une décennie révolue mais pourtant toujours aussi vivante dans la musique de Zimmer. Le score de « Inception » ne déroge donc pas à la règle et apportera donc son lot de sonorités électroniques familières aux fans du Hans Zimmer des années 90. Abordant ainsi le film de Christopher Nolan et son atmosphère surréaliste/onirique avec un ton résolument moderne, Zimmer bâtit lentement sa partition autour d’un thème principal associé à l’idée des rêves, et un autre thème plus intime et poignant pour la romance torturée et impossible entre Cobb et le souvenir de Mall, sa femme décédée. « Half Remembered Dream » ouvre ainsi le film sur un énigmatique motif de cuivres de deux notes graves scandées de façon agressive en crescendo : il s’agit en réalité du fameux motif issu du détournement de la chanson d’Edith Piaf, une ouverture simple, sombre et massive en même temps, qui annonce ici une aventure bien agitée. On remarquera d’ailleurs la façon avec laquelle le style musical de Hans Zimmer semble avoir quelque peu changé au cours de ces 5 dernières années, s’orientant de plus en plus vers un style plus atmosphérique, moins mélodique et parfois même plus simple et épuré, chose que l’on ressent particulièrement dans « Inception ».

« We Built Our Own World » développe l’atmosphère onirique de la musique du film avec l’utilisation de loops électros entêtants et de sonorités synthétiques diverses accompagnées d’un motif de cordes mystérieux, pour la scène de l’extraction dans le rêve de Saito au début du film. La musique reste ici assez mystérieuse, le caractère froid et envoûtant des sonorités synthétiques suggérant clairement à l’image l’idée de la traversée d’un univers fictif, celui du subconscient humain. Cette idée aboutit à un premier climax impressionnant dans la partition de Hans Zimmer, l’excellent et puissant « Dream Is Collapsing », pour la scène où Saito s’éveille et où son rêve s’effondre autour de Cobb et Arthur. Zimmer développe ici un thème harmonique constitué d’une série de 4 accords puissants de cordes et de cuivres. Le compositeur développe alors son thème à travers une impressionnante montée dramatique qui emporte immédiatement le public dans une dimension spectaculaire propre à la musique de « Inception » (et qui renvoie clairement au spectaculaire des images). Véritablement prenante à l’écran, la musique participe activement à l’élaboration de ce monde onirique et complexe en devenant -conceptualisation oblige- un véritable personnage à part entière. Ainsi, loin de se limiter au simple statut d’underscore fonctionnel, la musique apporte à son tour son propre point de vue et sa propre interprétation au dédale psychologique crée à l’écran par Christopher Nolan. Plutôt que d’accompagner bêtement chaque action par un geste musical, Zimmer opte ici pour une approche globalisante des images, un principe récurrent dans ses dernières oeuvres musicales et qui fonctionne ici plus que jamais dans le film. Mieux encore, Zimmer s’est arrangé pour homogénéiser le plus possible sa musique afin de gommer subtilement la perception des frontières entre la réalité et le rêve, un peu comme le fit Don Davis lui-même dans « The Matrix » (Zimmer n’ayant malheureusement ni le savoir-faire ni le talent du compositeur américain !). Ainsi, un passage comme « Dream Is Collapsing » développe le mélange entre percussions synthétiques et orchestre de cordes et de cuivres avec un côté ample et grandiose propre à la musique de « Inception », mais sans jamais donner le moindre indice au spectateur quand à l’identité de la réalité perçue à l’écran (même si l’on sait au moment de « Dream Is Collapsing » qu’il s’agit du rêve de Saito qui est en train de s’effondrer).

Moins intéressant, « Radical Notion » renforce la partie plus atmosphérique et latente de la musique de « Inception » avec un travail plus prononcé autour des différentes sonorités électroniques, retravaillées et modifiées pour les besoins de la musique. En revanche, on appréciera davantage l’atmosphère envoûtante et planante du superbe « Old Souls », développant le thème romantique torturé pour Cobb et Mall, partagé entre un clavier rêveur et des nappes synthétiques new-age : impossible ici de ne pas penser immédiatement au style du « Blade Runner » de Vangelis, une influence flagrante dans la partition de « Inception » (Vangelis étant d’ailleurs l’un des musiciens fétiches de Hans Zimmer, avec Ennio Morricone !). Zimmer bâtit sur « Old Souls » un long crescendo dramatique en répétant inlassablement son thème sur plus de 7 minutes, par-dessus lequel finiront par se greffer des cordes et des loops électro de plus en plus prenants et entêtants. Ici aussi, Zimmer - comme Nolan lui-même - prend son temps pour développer son matériau, comme le rappelle d’ailleurs son impressionnante montée dramatique de cordes dans « 528491 ». Les inconditionnels du compositeur retrouveront le Hans Zimmer de l’action dans « Mombasa » pour une scène de fusillade vers le milieu du film, avec son lot de percussions synthétiques, de guitare et de loops électro en tout genre. L’approche électro/techno voulue ici par le compositeur et certains rythmes caractéristiques renvoient clairement au style de certains scores d’action qu’il écrivit dans les années 90 (l’ombre de « Black Rain » plane ici sur ce morceau, quoique l’on pourrait aussi penser au morceau d’action introductif de « The Dark Knight », écrit dans un style tout à fait similaire !). Certes, on pourra toujours reprocher au compositeur le côté un peu facile de cette utilisation simpliste des loops électro tonitruants, mais dans le film, l’impact de la musique à l’écran est assez indiscutable, tout en conservant l’approche électronique moderne voulue par le compositeur - c’est d’ailleurs à partir de là que le score risque fort de diviser ceux qui auraient souhaité un traitement musical plus original et ambitieux, à la hauteur de l’incroyable complexité géniale du film. Si vous avez apprécié l’action et les rythmes électroniques speed très 90’s de « Mombasa », attendez d’entendre le retour du thème des rêves dans « Dream Within A Dream », qui reprend de façon grandiose la montée dramatique de « Dream Is Collapsing » avec une intensité toujours extrêmement prenante à l’écran.

On entame alors la dernière partie du film dans l’incroyable « Waiting For A Train », qui reprend le thème romantique torturé de « Old Souls » dans un véritable climax émotionnel plus intense. Le morceau accompagne ici aussi la relation difficile entre Cobb et Mall, avec l’utilisation de ces cordes en harmoniques glaciales qui évoquent l’idée du souvenir de Mall, l’idée que la jeune femme a cessé d’être l’épouse de Cobb pour devenir un simple souvenir, enfermé dans le subconscient de Cobb. Le morceau se conclut encore une fois avec le retour de l’imposant thème des rêves, développant sur plus de 9 minutes un style plus atmosphérique et sombre typique du compositeur. L’émotion devient plus présente avec le touchant « Paradox » et ses cordes en harmoniques froides et distantes, et son utilisation réussie d’un violon et d’un violoncelle, pour les retrouvailles entre Cobb et Mall dans le subconscient du héros. Le morceau possède une mélancolie profonde, une amertume résignée assez impressionnante à l’écran. Même chose pour « Time », qui reprend la même mélodie bâtie -comme le thème des rêves- sur une succession de 4 notes, probablement dans le but de relier le souvenir de Mall au monde des rêves. A noter que l’album omet malheureusement d’importants morceaux, et plus particulièrement le passage très prenant qui accompagne la séquence des triples niveaux de réalité vers la fin du film : dans la camionnette, dans l’hôtel et dans la montagne enneigée. Cette omission impardonnable de l’un des plus impressionnants morceaux du score laisse un goût amer dans la bouche, suite à l’écoute de l’album, tant on aurait aimé en entendre davantage (peut-être une future édition complète suite au grand succès du film ?).

Quoiqu’il en soit, la musique de « Inception » remplit donc parfaitement le cahier des charges : fonctionnant à plusieurs niveaux dans le film, elle englobe le spectateur dans une atmosphère incroyablement prenante, elle contribue à rendre floue les frontières entre le rêve et la réalité, et elle complète aussi parfaitement les sentiments et la psychologie des personnages tout en apportant des pistes sur l’interprétation possible de certaines scènes (les cordes en harmoniques froides de l’émouvant « Paradox » ne pourraient-elles pas faire penser à la théorie selon laquelle toute l’histoire serait entièrement vécue dans le propre rêve de Cobb ?). La symbiose entre les images et la musique est indiscutable ici, Zimmer rappelant encore une fois son goût pour une démarche originale basée sur la conceptualisation et la réflexion - incluant le petit « secret » autour de la réutilisation cachée du motif d’accompagnement de la chanson d’Edith Piaf. Seulement voilà, malgré toutes ses bonnes idées, la musique déçoit quelque peu par son côté un peu facile et trop simple dans son écriture. Avec un film aussi complexe et ambitieux, on était en droit d’attendre une partition tout aussi complexe et ambitieuse, mais le style de Hans Zimmer (et ses limites techniques évidentes, notamment dans l’écriture très pauvre de ses parties orchestrales) paraît peu adapté à un pareil sujet. Le compositeur a compensé tout au long de ces années ses faiblesses d’écriture par une conceptualisation et une réflexion plus grande sur l’implication de la musique dans le scénario et dans les images du film. Mais sa partition pour « Inception » place hélas de façon flagrante, plus que jamais, le compositeur face à ses propres limites. La musique est certes incroyablement prenante et pertinente à l’écran (et aussi parfaitement cohérente) mais ne possède pas cette âme, ce trait de génie qui aurait permis à la musique de d’atteindre ou d’égaler l’ambition du film de Christopher Nolan : le film était-il trop bien pour s’adapter au style musical de Hans Zimmer ? Chacun se fera son propre avis sur la question, mais il paraît évident que la nouvelle grande partition du compositeur allemand n’a pas fini de susciter des débats et de diviser le public béophile. Malgré tout, voilà un excellent score à ne pas rater, réservé surtout aux inconditionnels de Hans Zimmer, mais qui devrait malheureusement aussi rebuter tous les détracteurs du compositeur, tant le style musical simple et direct de Zimmer semble avoir trouvé ici ses limites face à un sujet peut être trop ambitieux pour lui !



---Quentin Billard