1-Prologue: Mighty Han River/
The Monster Is Growing 2.09
2-Sudden Attack In
Broad Daylight 2.09
3-Hand Out Of Reach 1.13
4-The Family Leaves 0.48
5-Yellow Virus 1.48
6-Whelk @ 0.42
7-The Monster's Lair 0.52
8-Hyun Suh In A Dark Place 1.28
9-In Praise Of The
Han River (B4-A3) 1.48
10-Checkpoint In The Rain 1.17
11-Hyun Suh! 2.23
12-A False Shooting 0.32
13-Starving Brothers 1.12
14-Starving Monster 0.38
15-Brother and Sister
In The Sewer 1.52
16-Dawn, Hard Rain And
A Bloody Fight 2.03
17-Wet Newspaper 2.10
18-Most Wanted 1.32
19-Non-Taxable Income 1.08
20-Smart Fugitive 1.15
21-Faint Message 0.43
22-Turtle 0.56
23-Running Lonely 1.32
24-A New Family 1.39
25-No Virus 1.38
26-Over Wonhyo Bridge 1.24
27-Girl, Run! 0.23
28-Scream 0.36
29-Unreachable Hand 1.11
30-Agent Yellow 2.19
31-Can't Let Go Of The Hand 0.52
32-Reunion 2.18
33-A Single Molotov Cocktail 1.40
34-The Expert Archer 0.47
35-A New Family
(Alternate Version) 2.02
36-In Praise Of The
Han River (Trumpet Version) 1.13
37-Abandonned Song 2.36
38-Little Hut In Snow 2.49
39-In Praise Of The
Han River (Vocal Version) 3.02*
40-Running Lonely
(Alternate Version) 4.21

*Interprété par Jae Hyung Jang.

Musique  composée par:

Byung-woo Lee

Editeur:

Milan Records 399 083-2

Album produit par:
Byung-Woo Lee

(c) 2006 Chungeorahm Film/Showbox/Mediaplex. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE HOST
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Byung-woo Lee
Grand succès du cinéma sud-coréen de l’année 2006, « The Host » est un film de monstre comme on en voit rarement au cinéma asiatique. Réalisé par Bong Joon-ho, « The Host » se déroule de nos jours à Séoul. Park Gang-du (Song Kang-ho) travaille en tant que vendeur au bord du fleuve Han, où il dirige un modeste snack en compagnie de sa fille unique Hyuen-seo (Ko Ah-seong), son père Hee-bong (Byeon Hee-bong), sa sœur Nam-joo (Bae Doona), une championne ratée de tir à l’arc, et son frère Nam-il (Park Hae-il), un étudiant récemment diplômé mais toujours au chômage. Un jour, alors que tout ce petit monde vaque à ses occupations, un événement dramatique survient brusquement : une étrange et monstrueuse créature surgit de l’eau et commence à attaquer la foule qui traîne au bord de la rivière, détruisant tout sur son chemin. C’est la panique la plus totale. Gang-du tente alors de s’enfuir avec sa fille, mais cette dernière est enlevée par le monstre qui part ensuite avec elle au fond de la rivière. Bouleversé et déprimé, Gang-du se sent responsable de la disparition de Hyuen-seo, mais ne peut pas croire qu’elle est morte. Il décide alors de partir à sa recherche, avec l’aide de sa famille, prêt à affronter le monstre par la même occasion. « The Host » est de loin l’une des plus belles surprises que nous ait offert le cinéma sud-coréen depuis bien longtemps. Le long-métrage de Bong Joon-ho se propose ainsi de revisiter le genre du film de monstre, un genre jusqu’alors très prisé par le cinéma américain mais curieusement peu présent dans le cinéma sud-coréen. Refusant d’entrée de jeu de livrer un pur produit hollywoodien, Bong Joon-ho a préféré jouer ici la carte du décalage en livrant un film à l’humour noir rafraîchissant (les frasques de la famille Park, l’imbécillité de certaines de leurs attitudes, le côté pathétique du chef de famille, la dérision de certaines scènes, etc.), servi par des effets spéciaux extrêmement réussis pour une production sud-coréenne de cette envergure. Bien plus qu’un simple film de monstre et de science-fiction, « The Host » est aussi une satire sociale grinçante et pleine de dérision qui égratigne au passage l’Amérique par son message clairement écologique - dans le film, le monstre est la conséquence de la pollution du fleuve par l’armée américaine qui y a déversé des tonnes de produit toxique. Entre la pastiche cynique, la série-B fantastico-horrifique et la satire sociale grinçante et décalée, « The Host » est une pure réussite du début jusqu’à la fin, avec, cerise sur le gâteau, des acteurs très convaincants et une créature extrêmement réussie, qui n’a rien à envier à ses homologues U.S. Voilà en tout cas un bijou du cinéma fantastique sud-coréen à ne rater sous aucun prétexte - ne serait-ce que pour son impressionnante confrontation finale contre la créature et le double niveau de lecture astucieux du film et son message écologique et politique !

La partition musicale du compositeur sud-coréen Byung-Woo Lee est de loin l’un des meilleurs éléments du film de Bong Joon-ho, une partition éclectique et variée mélangeant différents genres musicaux pour parvenir à ses fins. Ici, hors de question de verser dans un style hollywoodien pur. Byung-Woo Lee privilégie au contraire différentes pistes musicales intéressantes afin de retranscrire le mélange de fantastique, d’épouvante, de science-fiction et de comédie du film. Avec le sombre « Prologue : Mighty Han River/The Monster Is Growing », le compositeur introduit sans surprise des cordes sombres et tendues pour évoquer la naissance du monstre. Rien de bien surprenant pour le moment. Dans « Sudden Attack In Broad Daylight », la musique bascule clairement dans l’action et la menace avec un orchestre largement dominé par des cuivres dissonants et des cordes menaçantes, sur fond de percussions entêtantes pour évoquer la séquence de l’attaque du monstre au début du film. Le morceau est véritablement impressionnant à l’écran, optant pour une approche atonale et agressive du plus bel effet, entièrement accompagné par un rythme de percussions s’apparentant à un battement de coeur. La musique reste tout aussi sombre et menaçante dans « Hand Out Of Reach » avec ses cordes sinistres et froides qui feraient presque penser à du Christopher Young voire du Bernard Herrmann. Byung-Woo Lee fait donc preuve ici d’un savoir-faire évident et joue clairement sur les codes de la musique de thriller à l’américaine avec une efficacité indiscutable. Mais la dimension horrifique est loin d’être le seul élément privilégié dans la composition de Byung-Woo Lee, puisque « The Family Leaves » vient illustrer avec une certaine retenue touchante la dimension plus humaine et dramatique de l’histoire, lorsque la famille Park quitte le fleuve Han, totalement abattu par la disparition de leur fille.

Dans « Yellow Virus », le compositeur a recours à un style plus proche de la musique savante contemporaine à base de staccatos de cordes acérées évoquant une atmosphère de trouble et de menace, sans oublier l’utilisation d’éléments synthétiques sournois qui viennent renforcer la tension de l’intérieur. « The Monster’s Lair » évoque quand à lui le repère du monstre dans les égouts de Séoul avec une atmosphère plus glauque et dissonante aux cordes, baignant dans une atonalité brumeuse et pesante. Même chose pour le sinistre « Hyun-Suh In A Dark Place ». Plus étonnant, « In Praise Of The Han River » est une fanfare ironique et inattendue, apportant une dérision surprenante aux images pour la scène où la famille Park aide Gang-du à s’échapper du complexe scientifique. « In Praise Of The Han River » est assez représentatif de cet éclectisme musical voulu par le compositeur sur « The Host », un éclectisme rafraîchissant et inattendu sur un film de monstre de cette envergure, preuve que le cinéma coréen a décidément de la suite dans les idées et beaucoup de chose à nous dire. Très vite, la tension revient dans « Checkpoint In The Rain », tandis que le thème de la famille Park, dérisoire et ironique dans « In Praise Of The Han River », revient dans un très bel arrangement pour cordes et hautbois dans « Hyun Suh ! ». Le suspense atonal est à nouveau présent dans le sinistre « A Falshe Shooting » et « Starving Monster » (malheureusement gâché par des samples orchestraux très cheap), alors que « Starving Brothers » apporte une émotion appréciable aux Park qui tentent de sauver leurs proches dans le film. L’action est de mise dans « Dawn, Hard Rain and a Bloody Fight » tandis que « Wet Newspaper » distille un doux parfum de lyrisme raffiné et élégant au classicisme d’écriture soutenu. A noter une très belle reprise du thème familial dans un solo de guitare doux et intime dans « Most Wanted », ainsi qu’un arrangement orchestral élégant et raffiné pour hautbois, piano et orchestre dans « Running Lonely », et ses percussions action déterminées.

La musique ne se contente donc pas seulement d’apporter frissons, terreur et suspense au film mais évoque aussi avec une émotion plus nuancée le destin des principaux personnages du film, prêts à tout pour sauver l’un des membres de la famille et détruire le monstre responsable de tous leurs ennuis. La musique se fait même plus expérimentale et étrange dans « Non-Taxable Income » avec ses pizzicati ironiques, alors qu’à contrario l’émouvant « A New Family » se veut plus classique d’esprit avec ses cordes lyriques et poétiques, sans oublier une utilisation assez étonnante une série de tambours dans « Smart Fugitive ». Ici aussi, l’éclectisme est de mise, Byung-Woo Lee enchaînant les idées sans jamais perdre le fil conducteur de sa partition. Le compositeur ménage donc les surprises et offre à sa partition un relief considérable dans sa façon de casser systématiquement la routine et la monotonie de ce genre de musique horrifique/suspense en multipliant les genres musicaux et les trouvailles instrumentales avec brio. Le suspense et la terreur reviennent alors dans le dissonant « Scream » avec ses gargouillis aléatoires de cordes et ses percussions déchaînées. « Cant’ Let Go Of The Hand » évoque le combat final contre la créature avec des cordes sombres et agitées créant une tension assez intense à l’écran. Si « Reunion » et « A Single Molotov Cocktail » rappellent la partie plus dramatique du récit, « The Expert Archer » évoque le grand moment de bravoure de Nam-joo et son arc à la fin du film. Enfin, le compositeur nous propose quelques très belles variations autour de son thème principal dans le mélancolique et hésitant « Abandoned Song », sans oublier le nostalgique et paisible « Little Hut In Snow ».

La partition de « The Host » reste donc une belle surprise, fraîche, variée et éclectique, une partition à suspense qui n’oublie pas pour autant la dimension dramatique, humaine et étrangement humoristique du film. Byung-Woo Lee opte donc ici pour un style à la fois classique, moderne et parfois même décalé, comme cette fanfare pleine de dérision pour la séquence où le héros s’échappe du complexe de l’armée grâce au concours de sa famille. Entre lyrisme, gravité, suspense et humour, la partition de « The Host » est un bel accomplissement dans son genre, sans être d’une folle originalité pour autant. La musique reste néanmoins suffisamment riche et variée pour maintenir un intérêt constant dans le film comme sur l’album (où les morceaux s’avèrent être hélas un peu courts et un peu nombreux). Byung-Woo Lee en profite aussi pour nous rappeler qu’il n’est pas forcément nécessaire de verser dans le massif et les dissonances tonitruantes pour illustrer un film d’épouvante/fantastique. L’approche plus lyrique, éclectique et décalée du compositeur sud-coréen sur le film est suffisamment réussie et parfaitement adéquate pour prouver toute l’ingéniosité de la démarche du musicien sur le film de Bong Joon-ho. A découvrir, donc !



---Quentin Billard