1-Incident On Pearl Street Bridge 4.10
2-One Demand Only 5.59
3-We're On The Clock 5.28
4-Serve and Protect 3.16
5-Suspended 5.30
6-A Man of Zero Tolerance 2.10
7-Bellissimo 3.59
8-Motorbike Pursuit 4.53*
9-Fire In The Hole 6.07
10-Justice By Any Means 3.53
11-You Don't Always Win 7.23
12-Take Off 4.26*

*Co-écrit par Trevor Jones
et Ian Green.

Musique  composée par:

Trevor Jones

Editeur:

Contemporary Media Recordings

Produit par:
Trevor Jones

Artwork and pictures (c) 2005 Chaotic Productions. All rights reserved.

Note: **
CHAOS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Trevor Jones
Film d’action hollywoodien signé Tony Giglio, « Chaos » met en scène Jason Statham et Ryan Phillippe dans un polar malin oscillant entre manipulation, trahison et faux semblants. Face à eux, un Wesley Snipes impeccable dans le rôle de l’imprenable criminel au plan méticuleusement préparé avec soin. L’histoire commence lorsque cinq hommes cagoulés font irruption dans une banque de Seattle et prennent les employés et les clients en otage. Lorenz (Wesley Snipes), le chef du gang, exige de ne s’entretenir qu’avec un seul homme, l’inspecteur Quentin Conners (Jason Statham), qui a été suspendu suite à une bavure ayant entraîné la mort d’un otage. Conners reprend donc ses fonctions à contre-coeur et se retrouve obligé de faire équipe avec une jeune recrue, l’inspecteur Dekker (Ryan Phillippe). Mais le casse de la banque se termine par l’explosion du bâtiment, le sauvetage in extremis des otages et la disparition mystérieuse des ravisseurs, qui ont réussis à prendre la fuite. Désormais, Conners et Dekker doivent mener l’enquête afin de retrouver Lorenz et l’empêcher de mettre son plan machiavélique à exécution : ce dernier projette alors de supprimer tous ses anciens complices, incluant un policier corrompu. Mais le flair et le sens de la déduction de Dekker vont très vite l’amener à comprendre que les choses ne sont pas ce qu’elles semblent être. Le scénario de « Chaos » s’inspire de la fameuse théorie du chaos et nous propose un suspense haletant et une histoire pleine de rebondissements qui tenteraient presque d’égaler le « Usual Suspects » de Bryan Singer dans sa façon de jouer sur la manipulation et les faux semblants. Mais Tony Giglio n’est pas Singer, et la comparaison entre « Chaos » et « Usual Suspects » s’arrête donc là : la réalisation est bien trop molle et impersonnelle pour pouvoir soutenir la comparaison avec les modèles que « Chaos » tente d’imiter en vain. Néanmoins, voilà une bonne série-B d’action/suspense qui se laisse regarder avec un certain plaisir, même si l’on a connu les principaux acteurs du film bien plus inspirés.

La musique synthético-orchestrale de Trevor Jones apporte un rythme très soutenu au long-métrage de Tony Giglio. Le compositeur de « Dark Crystal » et « The Last of the Mohicans » lorgne ainsi dangereusement sur « Chaos » avec le style musical emblématique moderne du studio Media-Ventures/Remote Control de Hans Zimmer, et plus particulièrement dans la façon dont Trevor Jones incorpore tout au long de sa partition une pléiade de loops électro/techno modernes et autres rythmiques hip-hop branchées. Le compositeur d’origine sud-africaine, plus connue pour ses partitions symphoniques classiques d’esprit, étonne donc avec « Chaos » en surfant sur la vague des musiques synthético-orchestrales chères à Zimmer et sa bande. Ce constat déçoit au premier abord, donnant parfois l’impression d’entendre un Trevor Jones totalement impersonnel, en pilote automatique, obligé de se plier aux exigences contraignantes de producteurs frileux et avides de rythmes modernes à la mode. Quoiqu’il en soit, c’est donc le style pour lequel Trevor Jones a dû opter sur sa partition de « Chaos ». Dès les premières minutes du film, la musique impose d’emblée ce ton résolument moderne dans « Incident on Pearl Street Bridge » où les rythmiques électro sont légions, sur fond d’orchestre dominé par des cordes et des cuivres typiques du compositeur. Le style général n’est guère éloigné des précédents travaux action du compositeur comme « Desperate Measures » ou « G.I. Jane ». Ce premier morceau introductif permet au compositeur de développer son thème pour orchestre sur fond de loops électro totalement impersonnels, thème associé dans le film aux deux enquêteurs, Dekker et Conners. Trevor Jones poursuit son exploration des rythmiques électroniques modernes dans « One Demand Only » dans lequel il illustre la prise d’otage avec une approche prévisible orchestre/synthétiseur sans grande imagination. Si l’on pourra toujours apprécier le rythme cool apporté ici par l’électronique, on regrettera le manque totalement de personn alité et le recours souvent facile à des loops électro sans originalité, qui pourraient surgir de n’importe quelle partition de chez Media-Ventures. Même l’écriture orchestrale, pourtant fort brillante d’habitude, semble ici bien maigrichonne et incroyablement cheap en regard des réelles possibilités de Trevor Jones : difficile de reconnaître dans « One Demand Only » le talent ou la personnalité du compositeur de « Dark City », « Excalibur » ou bien encore « Dark Crystal » !

La musique remplit parfaitement le cahier des charges dans le film, en apportant action et tension au film sans jamais briller d’une originalité quelconque. Pire encore, un morceau comme « We’re On The Clock » semble surgir d’une banale musique de série TV à budget modeste, avec son recours quasi systématique à des banques de son archi usées à Hollywood, des rythmes électro comme s’il en pleuvait et des orchestrations monotones et sans réelle personnalité, dans lesquelles les bois semblent totalement absents. Le morceau nous dévoile néanmoins un premier passage d’action tonitruant, dans lequel Jones tente d’insérer l’un de ses principaux tic d’écriture, une série de rythmes syncopés et tournoyants aux cordes, une sorte de motif un peu obsessionnel qui revient très souvent depuis ces 10 dernières années dans ses partitions d’action. Les morceaux se suivent et se ressemblent sans apporter quoique ce soit de nouveau au travail du compositeur comme le rappelle bien tristement « Serve and Protect » et ses rythmes peu inspirés. La musique tente néanmoins de jouer, à de rares moments, la carte de l’émotion avec le thème de piano résigné de « Suspended », lorsque Conners se voit retirer l’affaire par son supérieur hiérarchique. Hélas, ce rare moment d’accalmie s’avère être bien trop court, la musique rebasculant très vite dans la tension atmosphérique et l’action. Les fans de musique d’action moderne à la Media-Ventures apprécieront sans aucun doute le travail du compositeur sur le frénétique « Motorbike Pursuit », dans lequel on perçoit pendant un très bref instant le brio du compositeur pour les musiques d’action orchestrales, avant de laisser l’orchestre céder la place à une série de loops électro/techno tonitruants pour accompagner la scène de la poursuite en moto. Ici, on nage en plein cliché de la musique d’action héritée des bandes sons technoïsantes des séries-TV policières actuelles, la seconde moitié de « Motorbike Pursuit » devant en fait beaucoup au travail du musicien électro Ian Green, dont la contribution à la musique de « Chaos » se résume essentiellement à quelques passages électro/techno tonitruants. Même un morceau d’action orchestral comme « Fire In The Hole » ne parvient pas à nous convaincre complètement : Trevor Jones tente d’appliquer les recettes mais la mayonnaise ne prend pas. Peut-être n’était-il tout simplement pas inspiré par le film qu’on lui a proposé ou les directives que la production lui a imposées sur la musique du film ?

Enfin, « You Don’t Always Win » suggère un sentiment de révélation et de résignation, alors que le twist final pointe enfin le bout de son nez, et que l’orchestre reprend la place qui lui revient de droit : cordes et guitare sèche à l’appui, Trevor Jones développe une atmosphère orchestrale plus prenante durant un peu plus de 7 minutes, un morceau long qui permet au compositeur de développer par la même occasion quelques uns de ses thèmes. La partition se conclut sur le très fun « Take Off », co-écrit par Trevor Jones et Ian Green. Le morceau s’avère être en fait un remix électro du thème principal entendu dans « Incident On Pearl Street Br », accompagné par un loop électro à la Moby sur fond de cordes, synthétiseurs et samples de choeurs. A vrai dire, il s’agit sans aucun doute ici du seul morceau qui retiendra véritablement notre attention après écoute de la musique dans le film, accompagnant fièrement le générique de fin tout en rappelant, encore une fois, l’orientation résolument moderne et électronique de la musique de « Chaos ». Vous l’aurez donc compris, Trevor Jones nous livre ici un score d’action totalement impersonnel, avec son lot de boucles électro sans originalité et de rythmiques faciles. Le compositeur a tenté de faire un effort pour tempérer son approche orchestrale classique par une utilisation assez facile de l’électronique, mais sans grand succès : Trevor Jones n’a ni l’étoffe d’un Hans Zimmer ni le talent d’un Harry Gregson-Williams pour tout ce qui touche aux synthétiseurs, et sa partition pour « Chaos » s’en fait donc cruellement ressentir, et ce même si la musique remplit parfaitement le cahier des charges dans le film. On sent d’ailleurs à quel point le musicien - rompu à l’art des grandes partitions symphoniques classiques - a dû se faire violence pour pouvoir accoucher d’une oeuvre aussi fonctionnelle, froide et impersonnelle que « Chaos ». Une solide déception, d’autant plus frustrante que les contributions musicales de Trevor Jones pour le cinéma se font de plus en plus rares ces derniers temps : à l’instar de certains de ses collègues pourtant résolument symphonistes tels que Alan Silvestri, James Newton Howard ou bien encore James Horner, voilà que Trevor Jones se voit imposer par le diktat artistique de l’écurie Media-Ventures/Remote Control un style musical qui n’est pas le sien : en découle au final une partition frustrante et décevante, indigne du compositeur. A quand le véritable réveil d’un compositeur qui semble s’être totalement assoupi ces 5 dernières années ?



---Quentin Billard