1-Hand Covers Bruise 4.18
2-In Motion 4.56
3-A Familiar Taste 3.35
4-It Catches Up With You 1.39
5-Intriguing Possibilities 4.24
6-Painted Sun in Abstract 3.29
7-3:14 Every Night 4.03
8-Pieces Form The Whole 4.16
9-Carbon Prevails 3.53
10-Eventually We Find Our Way 4.17
11-Penetration 1.14
12-In The Hall of the
Mountain King 2.21
13-On We March 4.14
14-Magnetic 2.10
15-Almost Home 3.33
16-Hand Covers Bruise (Reprise) 1.52
17-Complication With
Optimistic Outcome 3.19
18-The Gentle Hum of Anxiety 3.53
19-Soft Trees Break The Fall 4.44

Musique  composée par:

Trent Reznor/Atticus Ross

Editeur:

Null Corporation NULL01

Album produit par:
Trent Reznor, Atticus Ross

(c) 2010 Columbia Pictures/Relativity Media. All rights reserved.

Note: ***
THE SOCIAL NETWORK
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Trent Reznor/Atticus Ross
Adapté du roman « The Accidental Billionaires » de Ben Mezrich sorti en 2009, le nouveau long-métrage de David Fincher, « The Social Network », nous ramène en octobre 2003, quelque part dans une chambre étudiante à l’université d’Harvard aux Etats-Unis. Mark Zuckerberg (Jesse Eisenberg) est un jeune étudiant solitaire, détestable et orgueilleux, mais c’est un véritable génie de l’informatique. Les cours l’ennuient, et il préfère passer son temps devant son écran d’ordinateur en créant de nouveaux sites concept sur le net. Après avoir été plaqué par sa petite amie, Zuckerberg décide de pirater le système informatique de l’université d’Harvard pour accéder aux dossiers de toutes les filles du campus. Il crée alors le site « Facemash », sur lequel sont affichées deux photos d’étudiante du campus, et où l’on demande alors aux internautes de voter pour la fille la plus canon. Le lancement de Facemash est un vif succès, aboutissant à la destruction du système informatique d’Harvard. Malgré des ennuis avec la direction de l’université, Zuckerberg décide de voir plus grand et fait alors la connaissance des frères Winklevoss et de leur associé, Divya Narendra (Max Minghella) : ces derniers ont entendu parler de l’exploit informatique de Zuckerberg et lui proposent alors de s’associer à eux pour créer un tout nouveau site de réseau social sur internet. D’abord volontaire, Zuckerberg s’éclipse rapidement pour créer de son propre côté un jeune site au concept révolutionnaire : « thefacebook.com », qui deviendra par la suite « Facebook ». Devenu riche grâce à sa création au bout de six ans, le plus jeune milliardaire de toute l’histoire devra faire face à des problèmes personnels et juridiques, lorsque ses anciens associés se retourneront contre lui et l’accuseront d’avoir volé leur idée. Le scénario d’Aaron Sorkin reste extrêmement documenté et soigné et offre au jeune Jesse Eisenberg un rôle en or dans la peau de cet informaticien de génie constamment décrit dans le film comme un salaud et un opportuniste orgueilleux. David Fincher réalise un film immersif et troublant sur la genèse de Facebook, un sujet risqué que le cinéaste maîtrise finalement de bout en bout, servi par une mise en scène sobre et sans artifice, et un rythme rapide et soutenu - malgré quelques longueurs un brin fastidieuses. « The Social Network » doit aussi beaucoup au talent de ses jeunes interprètes, de Jesse Eisenberg à Andrew Garfield sans oublier un Justin Timberlake redoutablement charismatique dans le rôle du nouvel associé de Zuckerberg dans la deuxième partie du film. En prenant comme sujet la création mouvementée de Facebook, David Fincher s’interroge sur les enjeux de la création, les limites du succès et les profits qui en découlent. Dommage cependant que le film soit tourné avec un côté documentaire parfois un peu froid et désincarné, refusant toute folie visuelle ou esthétique : cela aurait certainement permis de digérer davantage les nombreuses longueurs d’un film pourtant très réussi mais imparfait. Quoiqu’il en soit, David Fincher frappe encore une fois très fort et s’impose à nouveau comme l’un des meilleurs réalisateurs américains de son époque.

La musique originale de « The Social Network » a été confiée au duo Trent Reznor/Atticus Ross. Les deux compositeurs sont issus du célèbre groupe de rock/indus Nine Inch Nails et ont récemment fondé en 2010 un tout nouveau groupe, How to Destroy Angels. Ross n’en est pas à son premier coup d’essai au cinéma, puisqu’il avait déjà écrit la même année le score du film « The Book of Eli ». En revanche, « The Social Network » marque l’arrivée de Reznor dans la musique de film, après avoir écrit précédemment la musique d’un court-métrage, d’un jeu vidéo et d’un documentaire TV. Pour « The Social Network », Reznor et Ross ont fait appel à un solide mélange de musique électro/indus pour parvenir à leurs fins, représentant ainsi la personnalité mouvementée et géniale Mark Zuckerberg et l’univers informatique du film. Ici, aucune concession au style hollywoodien habituel, toute la musique de « The Social Network » est constituée de loops électro, de sonorités expérimentales et de guitares metal clairement inspirées de Nine Inch Nails. Les fans du groupe de rock seront aux anges avec cette composition hybride évoluant ainsi entre électro et metal avec une certaine inventivité. Dès le début du film, Reznor et Ross créent un motif entêtant de piano, constamment répété sur fond de loop assourdissant (« Hand Covers Bruise »). On regrettera d’ailleurs le côté extrêmement bruyant et fatiguant de ce morceau répétitif qui, une fois sorti des images, peine à trouver un quelconque intérêt sur l’album. Néanmoins, la musique parvient à créer à l’écran un sentiment étrange, une ambiance particulière, propre au film de David Fincher - on est très proche par moment du travail des Dust Brothers sur « Fight Club ». Si le thème de piano apporte un regard plus intimiste sur la vie privée de Zuckerberg au début du film, l’expérimental « In Motion » évoque davantage la création informatique à l’aide de sonorités synthétiques échappées des années 80 : les amateurs des fameux « modules » de chez Amiga seront aux anges avec « In Motion » ! Dans le film, la musique apporte un rythme indispensable et une vitalité rafraîchissante, tout en sachant se faire discrète. Dommage qu’ici aussi, malgré toutes les bonnes trouvailles sonores, le morceau devienne très vite lassant, trop répétitif et parfois même trop bruyant. Ceci étant dit, difficile de dissocier « In Motion » de la personnalité unique de Mark Zuckerberg dans le film : un créateur de génie doublé d’un misogyne insupportable et détestable. Toute la dualité paradoxale du personnage est retranscrite ici dans la musique, à la fois captivante et difficile d’accès.

Les sonorités metal industrielles deviennent plus présentes dans « A Familiar Taste », où l’on retrouve un son électro plus moderne, et toujours ces entêtants loops un brin assourdissants. Plus intime, « It Catches Up With You » reprend le style du générique de début avec un piano solitaire sur fond de nappe sonore pour rappeler le côté plus humain de l’histoire du film - et qui rappelle par la même occasion le style de l’album « The Fragile » de Nine Inch Nails. « Intriguing Possibilities » élabore quand à lui toute une palette sonore à base de synthétiseurs 80’s kitsch - on se souvient des fameux Square Wave, Saw Tooth, Triangle Wave et autres « pad » caractéristiques de la musique MIDI qui firent la gloire des vieux synthétiseurs analogues comme le Minimoog, le Yamaha CS-80 ou le Prophet-5 dans les années 80 - c’est d’ailleurs actuellement une tendance dans la musique électro : le retour aux sonorités synthétiques eighties « old school » comme le pratiquent des groupes comme Kraftwerk ou Daft Punk. Les morceaux s’enchaînent donc dans le film avec toujours une inventivité constante et un souci d’expérimentation, malgré le côté souvent répétitif des morceaux qui créent finalement une ambiance assez envoûtante sur les images sans jamais en faire de trop - la musique contribue d’ailleurs aussi au côté « froid » et finalement assez aseptisé de la mise en scène très sage de David Fincher. Plus expérimental et angoissant, « 3 :14 Every Night » évoque les tourments de la création avec des sonorités industrielles glauques que n’aurait pas renié un Akira Yamaoka. Trent Reznor et Atticus Ross n’hésitent pas à sampler certains instruments comme ces effets de col legno de cordes entendus dans « Pieces from the Whole », sur fond de loop et sons « old school ». On frôle la techno expérimentale dans « Carbon Prevails » et le rock indus dans « Eventually We Find Our Way », sans oublier le piano entêtant de « Penetration ». Plus étonnant encore, Reznor et Ross nous proposent une reprise assez iconoclaste de la célèbre « dans la grotte du roi de la montagne » du « Peer Gynt » d’Edvard Grieg en version électro pour la séquence où les frères Winklevoss sont en pleine compétition d’aviron, un morceau assez particulier dans la bande originale de « The Social Network » qui rappelle un peu ce qu’avait fait Wendy Carlos avec Beethoven dans « A Clockwork Orange » de Stanley Kubrick en 1971. Certains morceaux comme « On We March » apportent davantage de force aux images par le développement d’une mélodie répétitive et entêtante évoquant l’ascension glorieuse de Zuckerberg et sa fortune grandissante.

Vous l’aurez donc compris, la musique de « The Social Network » est une oeuvre un peu à part dans le paysage musical hollywoodien, car, sans révolutionner pour autant le fond, c’est la forme qui prime ici, Reznor et Ross restant fidèle à eux-mêmes et renouant avec un style rock/indus/électro qui fit leur gloire au temps de Nine Inch Nails. Néanmoins, l’écoute s’avère être assez laborieuse sur l’album, la musique manquant cruellement de souffle, de respiration, de relief. A trop vouloir mélanger les idées et les sonorités, les deux compositeurs ont accouché d’une oeuvre musicale indigeste, parfois facile d’accès, parfois redoutablement expérimentale, apportant un style et une force particulière aux images - tout en résolvant rapidement l’équation « film sur l’informatique = musique électro ». Les fans de musique électronique en auront donc pour leur argent avec le score assez particulier de « The Social Network », une musique qui risque fort de ne pas convenir à tous, et qui a pourtant reçu le Golden Globe 2010 de la meilleure musique de film - un choix discutable quand on connaît les autres candidats. Un score étonnant et laborieux donc, à recommander aux auditeurs chevronnées et patients !



---Quentin Billard