1-Lionel and Bertie 2.10
2-The King's Speech 3.54
3-My Kingdom, My Rules 2.51
4-The King Is Dead 2.06
5-Memories of Childhood 3.36
6-King George VI 3.05
7-The Royal Household 1.43
8-Queen Elizabeth 3.35
9-Fear and Suspicion 3.24
10-The Rehearsal 1.42
11-The Threat Of War 3.56
12-Speaking Unto Nations
(Beethoven Symphony No.7-II) 5.02
13-Epilogue (Beethoven Piano
Concerto No.5 "Emperor"-II) 3.56

Musique  composée par:

Alexandre Desplat

Editeur:

Decca Records B0015064-02

Album produit par:
Alexandre Desplat

Artwork and pictures (c) 2010 See-Saw Films/Bedlam Productions. All rights reserved.

Note: ***
THE KING'S SPEECH
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Alexandre Desplat
Grand gagnant aux Oscars 2011, « The King’s Speech » (Le discours d’un roi) permet au réalisateur britannique Tom Hooper d’évoquer l’histoire vraie et peu connue du duc d’York et futur roi George VI (Colin Firth), le père de l’actuelle Reine Elisabeth. George VI, alias « Bertie », est un homme introverti et fragile, incapable de s’exprimer correctement en public à cause d’un bégaiement qu’il traîne depuis son enfance. Après l’abdication de son frère Edouard VIII (Guy Pearce), Bertie se voit donc proclamé roi, alors que certains le considèrent comme inapte à occuper cette fonction. C’est grâce à la volonté tenace de son épouse Elizabeth Bowes-Lyon (Helena Bonham Carter) que le roi finira par rencontrer Lionel Logue (Geoffrey Rush), orthophoniste australien aux méthodes peu orthodoxes. D’abord réticent et incrédule, le roi va apprendre à surmonter progressivement ses difficultés de langage grâce aux méthodes inhabituelles de Logue et à sa grande détermination. Cela devient une nécessite absolue pour le roi, alors que l’Europe est sur le point d’entrer dans la Seconde Guerre Mondiale et que George VI doit plus que jamais assumer ses responsabilités et montrer auprès du peuple anglais le visage d’un dirigeant sûr et fort sur lequel le pays pourra compter en temps de guerre. « The King’s Speech » est une biopic somme toute assez académique, mais qui apporte un regard neuf à une histoire peu connue, et pourtant très touchante. Drame historico-intimiste maîtrisé de bout en bout, « The King’s Speech » vaut surtout pour l’interprétation magistrale de Colin Firth, absolument remarquable dans le rôle de ce roi bègue harassé par ses difficultés d’élocution. Face à lui, un Geoffrey Rush très inspiré dans le rôle de l’orthophoniste et futur ami du roi, le tout baignant dans un casting britannique assez éclectique (Michael Gambon, Helena Bonham Carter, Guy Pearce, Timothy Spall, Derek Jacobi, etc.). Grand succès au box-office 2011, l’excellent film de Tom Hooper a remporté 4 Oscars, dont celui du meilleur réalisateur et du meilleur acteur principal.

La musique d’Alexandre Desplat est l’un des atouts principaux de « The King’s Speech ». Le compositeur expliqua d’ailleurs à la sortie du film que le principal enjeu sur ce film était de composer une musique qui devait fonctionner avec le silence, le temps et l’idée du son de la voix. Le but n’était pas d’accentuer la dramaturgie du récit mais d’évoquer la tristesse intériorisée du roi et de son mutisme handicapant, ainsi que son amitié naissante avec Lionel Logue. Desplat opta ainsi pour une approche entièrement minimaliste avec une formation instrumentale à base de piano et de cordes, ainsi que d’une harpe et d’un hautbois. Le score de « The King’s Speech » s’articule autour d’un thème principal élégant et intimiste, entendu dans « The King’s Speech ». Desplat confie ici le thème à un piano soliste agrémenté de quelques cordes, un thème sobre baignant dans une écriture classique, minimaliste et toute en retenue. L’approche classique et minimaliste voulue par le compositeur sur « The King’s Speech » s’inscrit d’ailleurs dans la continuité de ses précédents travaux pour des films tels que « The Queen » ou « The Special Relationship ». Le thème de piano de « The King’s Speech » possède à la fois un côté fragile, intime et léger retranscrivant à la fois les sentiments intérieurs du personnage de Colin Firth et son amitié naissante avec Lionel Logue. La seconde partie du morceau se veut d’ailleurs plus mélancolique et amère, évoquant les difficultés d’élocution de George VI en public. Le deuxième thème de la partition est introduit dans « My Kingdom, My Rules », un thème plus mélancolique et touchant, toujours confié au piano et aux cordes, avec un souci constant de minimalisme et de retenue : chaque note semble être sagement à sa place, sans jamais tenter de dépasser le cadre des images ou d’en faire trop par rapport aux scènes que les musiques illustrent. L’émotion intérieure des personnages est donc grandement valorisée ici par la musique avec une retenue touchante et une économie de moyens assez extrême. Point d’envolées orchestrales mélodramatiques ici, priorité à une émotion toute en finesse dans la musique d’Alexandre Desplat.

Les influences classiques du compositeur deviennent assez probantes dans « Lionel and Bertie », un magnifique morceau pour cordes, bois et piano qui s’inspire du début du deuxième mouvement du cinquième concerto pour piano dit « L’empereur » de Beethoven. Desplat imite quelque peu le style et les harmonies du célèbre morceau de Beethoven dans une écriture lyrique et poignante évoquant l’amitié touchante entre les deux hommes, tandis que le morceau original de Beethoven est utilisé quand à lui pour l’épilogue du film, après le discours final du roi à la veille de l’entrée en guerre de l’Angleterre dans la Seconde Guerre Mondiale. Ici aussi, il règne un sentiment de noblesse et d’inimitié avec touchant, typique du compositeur français. Même des passages plus dramatiques comme « The King is Dead » font preuve d’une extrême économie de moyen particulièrement émouvante dans le film, tout comme « Memories of Childhood » et ses notes hésitantes de piano sur fond de tenues de cordes, évoquant les troubles et les souvenirs de Bertie sur son enfance. Ici, point d’approche solennelle ou même ‘royale’ dans la musique de Desplat, priorité à une émotion toute en finesse et en retenue, comme le rappelle l’amer « King George VI », « Queen Elizabeth » ou un « The Royal Household » plus optimiste, avec le retour du thème principal de piano, illustrant le parcours difficile de Bertie, qui va apprendre progressivement à surmonter ses difficultés avec l’aide précieuse de son thérapeute. On appréciera d’ailleurs les harmonies élégantes et subtiles du thème qui, tout en étant sobre et délicat en apparence, recèle malgré tout quelques subtilités harmoniques plutôt bien trouvées. Un morceau comme « Fear and Suspicion » partage de façon efficace la double facette de la partition, entre l’amertume mélancolique d’un « King George VI » ou l’entrain plus optimiste et léger de « The Royal Household ». De l’optimisme, il est justement question dans « The Rehearsal » pour la scène où Bertie s’entraîne à réciter son texte en compagnie de Lionel. Desplat ajoute à l’orchestre et au piano quelques bois et quelques rythmes plus marqués pour illustrer la détermination et l’espoir de Bertie alias George VI. Enfin, le film se termine avec une utilisation brillante et poignante des deux pièces de Beethoven, un extrait du célébrissime deuxième mouvement de la 7ème Symphonie lors du discours final de George VI et un extrait du « Concerto de l’empereur ». Partition intimiste, sobre et minimaliste baignant dans un académisme sage et un brin prévisible, « The King’s Speech » est une musique honnête et touchante qui, bien que très classique et sans grande prise de risque dans son approche, satisfera à coup sûr les inconditionnels du compositeur français. Dommage cependant que la musique ne laisse pas un grand souvenir après écoute (trop minimaliste ? Trop monotone ?), et ce même si le résultat à l’écran est très réussi et digne d’intérêt !



---Quentin Billard