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1-Once Upon the Time...1.49
2-This Means War! 1.34 3-The Good, the Oil and the Beauty 3.49 4-The Battle 1.31 5-The Plan 1.32 6-The Drunk Waltz 2.30 7-First Night Alone 1.49 8-Business As Usual 1.35 9-Cats Chasing 1.23 10-The Trial 1.43 11-Return of the Beauty 2.42 12-Ambush/KKK 1.48 13-The Whip 2.51 14-Monologue 1.31 15-Deadly Solution 1.32 16-Painful Memories/Face Off 1.50 17-The Last Stand/The Kiss 1.51 18-Farewell 1.10 19-Epilogue/End Credits 4.47 Musique composée par: Erwann Kermorvant Editeur: MovieScore Media MMS10005 Musique produite par: Hugues Darmois Producteur exécutif de l'album pour Gaumont: Quentin Boniface Producteur exécutif de l'album pour MovieScore Media: Mikael Carlsson Musique orchestrée par: Jean Pascal Beintus, Erwann Kermorvant Artwork and pictures (c) 2006 Gaumont. All rights reserved. Note: ***1/2 |
BIG CITY
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ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
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Music composed by Erwann Kermorvant
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« Big City » est un projet plutôt atypique pour une production cinématographique française. Djamel Bensalah, réalisateur de « Le Ciel, les oiseaux et…ta mère ! », « Le Raid » et « Beur sur la ville » change totalement de registre avec « Big City » et s’essaie à un genre assez périlleux pour une production française : un western familial, destiné aux plus jeunes. Sorti en 2007, « Big City » nous plonge dans l’univers de la petite ville de Big City perdue aux confins de l’Ouest américain en pleine année 1880. La ville attend sous peu une arrivée massive d’immigrants, hélas, leur caravane est attaquée par des indiens alors qu’elle était sur le point d’arriver en ville. Dès lors, tous les adultes et tous les enfants de plus de 12 ans partent à la rescousse des immigrants pour combattre les indiens, mais ils ne reviennent pas. Livrés à eux-mêmes, les enfants de Big City se rendent compte qu’ils vont désormais prendre les choses en main et gérer tout seul la ville entière, en attendant le retour hypothétique de leurs parents. Avec l’aide d’un adulte, Tyler (Eddy Mitchell), vieil homme alcoolique resté en ville, les enfants décident de reprendre les différents postes occupés par leurs parents. Ainsi, l’idiot du village, Banjo (Atmen Kelif), devient shérif, le vieil alcoolique devient le juge et l’enfant du maire devient maire à son tour, et commence à faire régner la corruption et la terreur sur la ville. Mais au même moment, les enfants des indiens apparaissent à leur tour et observent d’un oeil vigilant les habitants de Big City. L’histoire est racontée par Papy Banjo, qui se souvient de cette année exceptionnelle au cours de laquelle ils vécurent tous ensemble une grande aventure dans la petite ville de Big City. Le long-métrage de Djamel Bensalah s’avère donc être agréable et sympathique, et doit beaucoup à l’interprétation remarquable et rafraîchissante de ses jeunes acteurs : le film s’adresse avant tout aux enfants, mais même si les adultes sont peu présents dans l’histoire, certains éléments du récit contiennent des thèmes plus graves et universels comme la lutte pour le pouvoir, les difficultés du monde du travail et surtout le racisme et l’intolérance, sujet récurrent dans les films de Bensalah : c’est ce qu’incarne ici le personnage de White (Jérémy Denisty), le fils du maire corrompu qui clame haut et fort que les noirs n’ont aucun droit et qui décide un jour de passer à tabac un enfant indien en portant les costumes du ku-klux klan tout en faisant brûler une croix. Le film évoque ainsi certaines heures sombres de l’histoire américaine, sous la forme d’allusions pédagogiques pour les enfants (et les adultes). Et c’est là où « Big City » s’avère être finalement le plus intéressant, dans la façon dont les enfants deviennent eux-mêmes de véritables adultes, parlant et agissant comme leurs parents, avec les bons comme le mauvais aspects. Le film de Djamel Bensalah possède ainsi une portée politique/sociale évidente et rappelle que le racisme est une chose malheureusement universelle, que ce soit contre l’enfant juif, le petit commerçant chinois, les deux enfants noirs ou les indiens (incarnés d’ailleurs symboliquement ici par des enfants d’origine arabe). Mais le réalisateur a tout de même la clairvoyance de ne pas essayer d’asséner son message socio-politique et garde constamment en tête le divertissement pour enfant qu’il souhaitait faire dès le début du projet. Tourner un western qu’avec des enfants était un véritable challenge, mais le résultat est très réussi et assez rafraîchissant : « Big City » rejoint ainsi des classiques du genre tels que « La Guerre des boutons » ou « Les Enfants de Timpelbach ».
La partition musicale de « Big City » a été confiée à Erwann Kermorvant, compositeur d’origine bretonne qui s’est fait remarquer avec ses musiques pour des films tels que « Mais qui a tué Pamela Rose ? », « 36 Quai des Orfèvres » ou bien encore « Un ticket pour l’espace ». Le compositeur s’est formé très tôt à la musique hollywoodienne, puisqu’il travailla pendant sa jeunesse en tant qu’assistant dans le studio américain de Ralph Grierson, célèbre claviériste d’Hollywood connu en tant que collaborateur régulier sur les musiques de James Horner. Par la suite, Kermorvant étudia la musique et se forma à Los Angeles, et plus particulièrement à la prestigieuse UCLA où il aura comme professeur Gerald Fried, Steven Scott Smalley et Don B.Ray. A son retour en France, le compositeur s’essaie à différentes choses, mais c’est vers la musique de film qu’il se destinera essentiellement. La partition d’Erwann Kermorvant pour « Big City » est sans aucun doute l’une des plus belles réussites du compositeur dans le domaine. Le musicien nous offre ainsi une solide partition symphonique qui suit avec passion les traces et les codes de l’univers musical des westerns américains d’antan, citant Aaron Copland (« Rodéo », « Appalachian Spring », « Billy the Kid »), Bruce Broughton (« Silverado ») et même Alfred Newman (« How the West Was Won »). Le cinéma français n’offre quasiment plus aucune opportunité de ce genre pour les compositeurs de musique de film, mais pour Erwann Kermorvant, « Big City » a été un challenge rare et passionnant pour le compositeur, lui permettant ainsi de s’exprimer pleinement à travers une grande musique symphonique vive, énergique, riche et colorée, avec des thèmes de qualité et des orchestrations solides et soignées – une marque de fabrique du compositeur. Confiée à un Hungarian Radio Orchestra de 80 musiciens dirigé par Bela Drahos, la partition de « Big City » est donc un véritable retour aux sources de la musique western d’antan. C’est ce que confirme clairement l’ouverture dans « Once Upon the Time », qui nous permet de découvrir le thème principal de la partition d’Erwann Kermorvant, thème de trompette enjoué et dynamique qui rappelle beaucoup le thème de « Silverado » de Bruce Broughton, notamment dans la construction de la mélodie. Les orchestrations s’avèrent très soignées et colorées, évoquant au passage l’exubérance de ce western pour enfant. La fin de « Once Upon the Time » n’est pas sans rappeler la jovialité légère de certaines mesures du « Maverick » de Randy Newman, tandis que certaines notes rappellent beaucoup le son americana traditionnel d’Aaron Copland, influence majeure de Kermorvant sur « Big City ». Les indiens ont droit à leur propre thème dans « This Means War ! », confié à des violons en cordes à vide sur fond de tambours et de vocalises ethniques des musiciens qui imitent ici certaines paroles en Iroquois. Très vite, l’orchestre reprend le dessus avec de nouveaux élans symphoniques énergiques et colorés, qui rappellent parfois le style des musiques de film animés de Randy Newman (curieusement, un passage de cuivres vers 1:03 rappelle un motif de « Cars »). On notera ici l’omniprésence du xylophone pour le caractère ‘cartoon’ et fun de la musique, tandis que « The Good, the Oil and the Beauty » nous permet de réentendre le thème principal de trompette sur un rythme de chevauchée western plus entraînant, lui aussi similaire au thème du « Silverado » de Bruce Broughton. Erwann Kermorvant connaît visiblement parfaitement ses classiques et maîtrise toutes ses références avec une passion évidente et rafraîchissante pour une production française de cette envergure (Kermorvant avoue même adorer Bruce Broughton). Le morceau s’enchaîne ensuite avec un thème plus intimiste lors de l’arrivée de la jeune lady au début du film. « The Battle » nous offre quand à lui un bref passage d’action tonitruant et virtuose typiquement hollywoodien, et toujours servi par des orchestrations très solides rappelant le savoir-faire évident du compositeur. Dans « The Plan », Kermorvant dévoile les sonorités associées aux bad guys dans le film, à base de bois, célesta et trompettes en sourdine wah-wah plus sournoises. Un morceau se distingue alors du lot dans « The Drunk Waltz » : cette pièce s’apparente à une joyeuse valse inspirée des grands classiques viennois de Johann Strauss, et accompagne avec humour la scène où les enfants ont beaucoup bus et sèment la pagaille dans toute la ville. Le morceau est parsemé de quelques touches inévitables de mickey-mousing et s’inspire des rythmes traditionnels de valse viennoise pour cette longue scène assez intense qui réclama pas mal d’efforts au compositeur. Signalons pour finir un troisième thème associé aux enfants, et entendu notamment dans « The Last Stand/The Kiss » et « Farewell », thème intimiste et nostalgique qui rappelle que les jeunes héros du film sont avant tout des enfants fragiles qui ne cherchent qu’une chose : retrouver leurs parents. On appréciera la façon dont Erwann Kermorvant apporte une certaine ambiguïté plus inquiétante à sa musique dans « First Night Alone », « Cats Chasing », « The Trial » ou « Ambush/KKK », traversés de quelques sursauts orchestraux plus agressifs voire parfois même dissonants. La scène du ku-klux klan permet d’ailleurs au compositeur de développer à la fois les sonorités des indiens et celles de White et ses sbires. Cette partie plus sombre de la musique se retrouve d’ailleurs dans le dramatique « The Whip », morceau qui s’enchaîne sur un nouveau passage d’action tonitruant et héroïque à souhait. On appréciera aussi la complexité de « Return of the Beauty » et son écriture orchestrale plus virevoltante et virtuose, notamment dans la façon dont Kermorvant passe d’un instrument à un autre avec une maestria évidente. On appréciera aussi l’allusion au Allegro du « Appalachian Spring » d’Aaron Copland au début de « Business as Usual », évoquant le train de vie quotidien des enfants à Big City occupés à leurs postes respectifs. Enfin, la dernière partie du film oscille ainsi entre trompette solennelle à la Copland (« Deadly Solution ») et percussions guerrières (« Painful Memories/Face Off ») annonçant clairement l’imminence d’un affrontement entre habitants de Big City et indiens à la fin du film, chose confirmée par « The Last Stand/The Kiss », qui se conclut d’ailleurs de façon plus apaisée et romantique avec le retour du thème des enfants à la flûte, repris ensuite de façon solennelle dans « Farewell » pour la mort de Tyler à la fin du film, sur fond de piccolo aux consonances quasi celtiques. Le thème principal est alors repris au piano au début de « Epilogue/End Credits », avant de céder à nouveau la place à l’orchestre pour une dernière reprise du thème façon « Silverado » dans une dernière chevauchée héroïque et savoureuse. Erwann Kermorvant nous offre donc avec « Big City » une partition western énergique, vive et colorée, qui mélange les influences avec brio et possède malgré tout la patte orchestrale du compositeur. La musique apporte une énergie considérable au long-métrage de Djamel Bensalah, et rappelle à quel point Erwann Kermorvant reste assurément l’un des meilleurs musiciens officiant à l’heure actuelle pour le cinéma français, un compositeur talentueux et inspiré qui reste aussi, avec Frédéric Talgorn, Alexandre Desplat ou Philippe Rombi, un grand défenseur de la musique symphonique au cinéma. ---Quentin Billard |