1-Grammophone Lullaby 1.27
2-Don't Be Afraid of the Dark
Main Titles 1.22
3-Sally Arrives at
Blackwood Manor 2.42
4-Lamb Lamp Lambency 1.07
5-Sally's Lullaby 2.13
6-Garden Music 2.24
7-Into The Basement 3.19
8-Sneaky Sally 0.50
9-Silly Sally 2.11
10-Tooth Fairy Gift 1.23
11-Gardener Gets Snipped 5.32
12-Treesome 2.46
13-Don't Turn Out The Lights 2.04
14-Bed Bugs 1.42
15-Shrink Rap 1.22
16-Sally Leaves 2.51
17-The Library 4.01
18-Goblins In The Garage 3.59
19-Goblin Trouble 7.34
20-Return To Blackwood 2.38
21-Voices From The Pit 1.23

Musique  composée par:

Marco Beltrami/Buck Sanders

Editeur:

Lakeshore Records LKS0342372

Produit par:
Marco Beltrami, Buck Sanders
Montage musique:
Craig Beckett, Jason Ruder,
Tim Ryan

Orchestrations:
Bill Boston, Rossano Galante

Artwork and pictures (c) 2011 Miramax Films. All rights reserved.

Note: ***1/2
DON'T BE AFRAID OF THE DARK
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Marco Beltrami/Buck Sanders
Cela faisait près de 10 ans que Guillermo Del Toro traînait le projet de remake du téléfilm d’épouvante « Don’t be Afraid of the Dark » sorti en 1973 dans ses tiroirs. On raconte que le cinéaste mexicain aurait été tellement terrorisé en regardant plus jeune le téléfilm de John Newland qu’il aurait rapidement décidé d’en faire un film, quelques décennies plus tard. « Don’t be Afraid of the Dark » version 2011 est confié à la caméra de Troy Nixey, qui livre là sa première réalisation pour le cinéma après s’être fait remarquer par Guillermo Del Toro en 2007 pour son court-métrage « Latchkey’s Lament ». L’histoire de « Don’t be Afraid of the Dark » débute alors que Sally (Bailee Madison), jeune fillette de 8 ans, vient tout juste de s’installer dans sa nouvelle demeure, le somptueux manoir Blackwood situé à Rhode Island, avec son père Alex (Guy Pearce) et sa fiancée Kim (Katie Holmes). Sally déprime car elle n’arrive pas à prendre ses marques dans cette nouvelle maison, alors que sa mère l’a forcée à venir s’installer ici avec son père et sa nouvelle petite amie. La petite fille découvre alors que le manoir est peuplé de petites créatures maléfiques qui vivent dans le noir et commencent à la harceler régulièrement. Terrorisée et incomprise par son père, Sally va se réfugier davantage dans sa solitude et sa détresse, tandis que Kim va petit à petit se rapprocher de la petite fille : elle sera d’ailleurs la première à comprendre que quelque chose ne vas pas dans cette maison, et que Sally dit vrai lorsqu’elle parle des créatures qui la harcèlent toutes les nuits. « Don’t be Afraid of the Dark » est un production plutôt mineure de la part de Guillermo Del Toro. Renouant avec un style fantastico-horrifique emprunté au superbe « Pan’s Labyrinth », le film de Troy Nixey contient tous les éléments chers à Del Toro, mais déçoit aussi par son manque d’ambition et de souffle. A l’origine, « Don’t be Afraid of the Dark » a été conçu comme une sorte de film d’horreur pour enfants, le but n’étant pas de faire dans la surenchère gore (le film a quand même reçu un PG-13 à sa sortie) mais de terroriser un public plus jeune en évoquant les peurs primaires de l’enfance : phobie du noir, créatures qui vivent sous le lit et viennent nous harceler la nuit, etc. On y retrouve aussi les thèmes similaires à « Pan’s Labyrinth » : une jeune fille qui vit dans un environnement familial conflictuel, le refuge dans l’imaginaire et le fantastique pour fuir la réalité, les créatures qui surgissent d’un conte, etc. Aucune surprise particulière ici, le film de Troy Nixey rappelant d’ailleurs une autre production récente de Del Toro, « El Orfanato » de l’espagnol Juan Antonio Bayona. Le film vaut surtout par la qualité de l’interprétation sans faille de la petite Bailee Madison, entourée des excellents Katie Holmes et Guy Pearce, tandis que les créatures, bien souvent tapissées dans l’ombre et brillamment suggérées, semblent surgir à la fois d’un conte de fée et d’un cauchemar : les créatures s’avèrent d’ailleurs être bien plus perverses que réellement monstrueuses, notamment dans la façon dont elles jouent sur les émotions de la petite fille pour parvenir à leurs fins. Mais il paraît évident que le film effraiera davantage un plus jeune public, les adultes risquant fort de s’ennuyer devant ce conte horrifique sans grand relief, sympathique mais tout à fait dispensable.

Qui dit Guillermo Del Toro dit évidemment Marco Beltrami, qui signe pour « Don’t Be Afraid of the Dark » une solide partition orchestrale/chorale riche, dense et inspirée, épaulé par son assistant et fidèle complice, Buck Sanders. En maître des musiques d’épouvante, Beltrami élabore pour le film de Troy Nixey une partition dense et envoûtante qui évoque à la fois l’atmosphère troublante et angoissante du film avec une bonne dose de lyrisme et de mélancolie. Le thème principal, qui s’apparente à une berceuse sous forme de valse lente et triste, est entendu dans « Grammophone Lullaby » et associé dans le film à la petite Sally. Le thème évoque autant la solitude et la détresse de la petite fille, face aux créatures qui la hantent. Ce thème, confié aux cordes et aux bois, est repris dans l’impressionnant « Don’t Be Afraid of the Dark Main Titles » où il est confié à l’orchestre au complet avec un choeur féminin envoûtant, des cordes, des bois, des cuivres et des timbales agressives. L’écriture staccato et aigue des cordes reste typique de Beltrami, tandis que le thème gagne en ampleur tout au long du générique de début : une belle ouverture, typique du compositeur italien ! Les choses se calment ensuite avec l’arrivée de la petite fille au manoir (« Sally Arrives at Blackwood Manor »), où l’écriture instrumentale reste plus nuancée, mais ne cache pas pour autant la terreur à venir, en imposant discrètement quelques notes plus ambiguës aux violons, à la harpe, à la flûte et au célesta. Comme toujours avec Beltrami, les orchestrations sont très riches et soignées, reflétant le savoir-faire plus qu’évident du compositeur. La musique est non seulement bien écrite, mais aussi maîtrisée dans son approche des différentes couleurs instrumentales en fonction des situations du film : mystérieuse au début, mélancolique et solitaire pour la petite fille (la berceuse enfantine de « Lamb Lamp Lambency », diffusée par la boîte à musique située près du lit de Sally dans le film) puis petit à petit empreinte d’un certain malaise et d’une tension évidente, pour aboutir aux déchaînements orchestraux qui hantent la dernière partie du score. On notera la façon dont la boîte à musique de « Lamb Lamp Lambency » finit par se dérégler étrangement de manière troublante, comme si la musique plongeait petit à petit dans une sorte de folie angoissante et chaotique. Le thème de la berceuse revient dans « Sally’s Lullaby », magnifique pièce empreinte d’une poésie mélancolique et d’un lyrisme gracieux avec célesta, flûte, violoncelle, cordes, harpe et piano.

Avec « Garden Music », le mystère s’épaissit, notamment à travers l’utilisation des voix fantomatiques mélangées à l’orchestre. « Into the Basement » annonce clairement quand à lui l’arrivée des créatures maléfiques dans un style suspense/frisson qui rappelle le grand Beltrami de l’époque des « Scream » et autre « Mimic ». La dissonance devient ici le maître mot du compositeur, plongeant sa musique dans une atonalité brumeuse et complexe dont lui seul en possède le secret. Comme dans « Mimic », Beltrami élabore une instrumentation dense et élaborée pour refléter la présence des monstres, notamment à travers l’utilisation de bois graves (contrebasson, clarinette basse), des cordes, de la harpe et des petites percussions. Beltrami n’hésite pas à mettre en avant certains instruments comme le vibraphone et des sonorités synthétiques étranges dans « Sneaky Sally ». La terreur finit enfin par rattraper l’héroïne dans « Silly Sally », où la boîte à musique (évoquant l’innocence de l’enfance) se retrouve désormais malmenée par les dissonances de l’orchestre et les quelques sonorités électroniques glauques qui parsèment le morceau. La scène de l’attaque du jardinier (« Gardener Gets Snipped ») permet à Beltrami de nous dévoiler son premier grand morceau de terreur pure, reprenant les cordes staccatos stridentes du « Main Titles », acérées comme des lames de rasoir. Si la musique reste encore mélancolique et intimiste au détour de « Don’t Turn Out the Lights » ou « Treesome », « Bed Bugs » confirme l’atmosphère d’angoisse voulue par le compositeur, et reprend toutes les recettes habituelles du genre, avec une maestria évidente. Clusters, effets instrumentaux aléatoires, dissonances multiples et stridentes, tout est mis en oeuvre pour plonger l’auditeur dans le cauchemar que vit la petite Sally, harcelée par les créatures du noir. La terreur est donc au rendez-vous, dans l’attaque de la bibliothèque (« The Library »), la scène du garage (« Goblins in the Garage ») ou l’intense et complexe « Goblin Trouble », sans oublier le conclusif « Return to Blackwood » et l’inquiétante coda de « Voices from the Pit ». Vous l’aurez donc compris, « Don’t be Afraid of the Dark » est un score riche et inspiré de Marco Beltrami, qui semble s’être enfin réveillé sur le film de Troy Nixey, et paraît bien plus inspiré que sur ses dernières partitions horrifiques, qui semblaient tourner dangereusement en rond. Avec cette nouvelle production Guillermo Del Toro et les récents « Soul Surfer » et « The Thing », Beltrami confirme l’excellente tenue de cette cuvée 2011, une jolie réussite qui devrait satisfaire les amateurs de frissons et de musiques mystérieuses, gothiques et prenantes, autant réussie dans le film que sur l’album ! Rien de bien original, certes, mais une bonne dose de frissons, de mystère et de lyrisme. Que demande le peuple ?




---Quentin Billard