1-Possibility 2.34
2-Car Trouble 1.08
3-Washer Vodka 1.53
4-Cereal Bum 1.04
5-Come Out Jerry 1.10
6-Fixture Vodka 1.37
7-Rat Bastard 0.56
8-One Kiss 1.46
9-Tardiness 2.11
10-In Recovery 1.01
11-Jaguar 1.03
12-Dumpster 1.09
13-Sleepover 4.32
14-Cosmic Aristotle 1.56
15-Euphemism 1.05
16-Homeless 1.00
17-Pay It Forward 1.04
18-Night and Day and Night 1.07
19-Asthma 0.59
20-Powers of Three 1.03
21-Desert Drive 1.34
22-Wasted Air 1.42
23-The Bad Thing 0.51
24-Gasoline 1.37
25-Velocity Organ 1.27
26-I Forgive You 2.21
27-Calling All Angels 5.32*

*Ecrit et interprété par
Jane Siberry.

Musique  composée par:

Thomas Newman

Editeur:

Varèse Sarabande VSD-6195

Produit par:
Thomas Newman, Bill Bernstein
Producteur exécutif:
Robert Townson
Superviseur de la musique:
G. Marq Roswell
Monteur musique:
Bill Bernstein
Contrat musique:
Leslie Morris
Préparation de la musique:
Julian Bratolyubov
Assistant monteur musique:
Jordan Corngold

Artwork and pictures (c) 2000 Warner Bros. and Bel Air Pictures, LLC. All rights reserved.

Note: ***
PAY IT FORWARD
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Thomas Newman
« Pay It Forward » (Un monde meilleur) est le troisième long-métrage de la réalisatrice Mimi Leder après « The Peacemaker » (1997) et « Deep Impact » (1998). Dans cette adaptation du roman éponyme de Catherine Ryan, la réalisatrice raconte l’histoire du jeune Trevor McKinney (Haley Joel Osment), jeune ado ordinaire de 11 ans qui décide, à la suite d’un devoir imposé par son professeur Eugène Simonet (Kevin Spacey), de trouver une idée afin de rendre le monde meilleur. Respectant très sérieusement le sujet de son travail d’école, Trevor a une idée de génie : il décide de rendre un important service à trois personnes. En échange, ces personnes devront passer le relais en aidant à leur tour trois autres personnes, et ainsi de suite. Trevor commence ainsi en aidant un SDF, Jerry (Jim Caviezel), puis son professeur Mr. Simonet, qu’il cherche à caser avec sa mère alcoolique Arlene (Helen Hunt), et enfin son ami Adam (Marc Donato), harcelé par d’autres élèves à l’école. Mais l’enfant aura fort à faire, entre une mère qui a sombré dans l’alcool, un SDF héroïnomane, un professeur célibataire hanté par un passé douloureux et un ami quotidiennement harcelé par des caïds de l’école. Trevor va découvrir qu’il n’est pas facile de changer le monde, et malgré son ingéniosité et son inventivité, il va se heurter à la dure réalité lorsqu’il tentera de jeter Mr. Simonet dans les bras de sa mère. Mais son professeur, qui est pourtant quelqu’un d’instruit, intelligent et sensible, n’a aucune envie de bousculer ses habitudes et de voir son monde changer. Quand à Arlene, elle ressent des sentiments pour Eugène mais a encore bien du mal à combattre l’alcool. Le film de Mimi Leder repose ainsi sur une idée géniale au demeurant mais ô combien utopique : et si chacun décidait à son tour de contribuer à améliorer notre monde en aidant trois personnes qui en aideront trois autres et ainsi de suite ? Avec cet appel naïf à la générosité et à la bonté de l’humanité, « Pay It Forward » nous dévoile une fable humaniste plutôt touchante et intelligente bien que l’on regrettera parfois le côté larmoyant du film et son pathos déconcertant. Le film est dominé par l’épatant Haley Joel Osment, jeune acteur surdoué révélé par « Sixth Sense » et « A.I. », qui confirme encore une fois son statut de jeune comédien prometteur d’une maturité incroyable pour son âge – la réalisatrice dira même de lui qu’il est un acteur incroyable qui ressent énormément de choses, comme un adulte. A ses côtés, Kevin Spacey incarne un professeur humaniste bouleversant, avec ses cicatrices qui reflètent le poids des souffrances du passé, sans oublier l’excellente Helen Hunt en mère brisée qui tente de se reconstruire en gagnant l’amour du professeur de son fils. Parmi les seconds rôles, on notera la présence du chanteur Jon Bon Jovi et de Jay Mohr et Angie Dickinson. Hormis son aspect moralisateur un peu limite et son caractère larmoyant, « Pay It Forward » repose sur une idée intéressante et bien exploitée, un drame humaniste émouvant qui confirme le talent incroyable du jeune Haley Joel Osment, véritable star du film.

La partition musicale de Thomas Newman contribue à son tour à renforcer l’émotion et le rythme du film avec le style minimaliste si singulier du compositeur américain. Encore une fois, on retrouve dans « Pay It Forward » l’ensemble de solistes habituels des musiques de Newman, en plus de l’orchestre symphonique habituel : George Doering (guitares, autoharpe, dutar), Michael Fisher (cloches, percussions, loops), Rick Cox (guitares préparées, etc.), Steve Kujala (flûte alto, etc.), George Budd (instrument en verre, phonographe), Steve Tavaglione (EWI), Bill Bernstein (saz) et Thomas Newman lui-même au piano. Pas de surprise donc quand à l’angle d’attaque du compositeur sur la musique du film de Mimi Leder. « Possibility » débute au son de tenues de cordes et introduit rapidement le thème principal, motif rythmique et répétitif partagé entre vibraphone, percussions (tambourins), guitare et piano. Le caractère obstiné de ce thème répétitif dont les notes tournent sur elles-mêmes rappelle encore une fois Philip Glass ou Steve Reich pour l’aspect minimaliste et répétitif, influences majeures dans la musique de Thomas Newman. Ce thème est associé dans le film à l’idée du « relais » d’une personne à une autre, d’où l’aspect rythmique obstiné. On retrouve aussi le style expérimental habituel du compositeur dans « Car Trouble » où Newman expérimente autour de différentes sonorités manipulées par l’électronique, tandis que le vibraphone revient dans « Washer Vodka » avec un environnement électronique minimaliste et atmosphérique – on est clairement ici dans la lignée des travaux de « American Beauty » ou « Erin Brockovich » - « Cereal Bum » évoque le premier essai du jeune Trevor pour aider une personne – ici, Jerry le SDF – avec un rythme plus moderne et contemporain tendance pop/rock minimaliste et répétitive, sur fond de sonorités instrumentales manipulées (percussions diverses, synthés, guitares diverses et même quelques notes de flûte alto). Le piano de Thomas Newman revient dans « Come Out Jerry » sur fond de percussion, cordes et guitare/basse, avant de devenir l’instrument de l’intimité et de l’émotion dans le touchant « Fixture Vodka », qui évoque les problèmes d’alcoolisme d’Arlene. Les notes hésitantes du piano sur fond de nappes sonores rappellent un nombre incalculable de partitions écrites par Thomas Newman par le passé, à tel point que l’on finira parfois par avoir l’impression d’entendre ici du réchauffé de la part du compositeur, qui ne prend donc aucun risque par rapport à son style habituel.

« One Kiss » nous permet de découvrir le très beau Love Theme mélancolique, hésitant et délicat pour Arlene et Eugène, thème de piano sur fond de nappes de cordes/synthés, absolument typique de Thomas Newman, qui rappelle certaines mélodies de « Cinderella Man », « Meet Joe Black », « Road to Perdition » ou « White Oleander ». Le reste du score oscille ainsi entre cette intimité chaleureuse chère à Thomas Newman et ces moments plus rythmés et modernes évoquant la propagation de l’idée de l’entraide entre individus, comme le suggère le retour du thème principal dans « Tardiness » avec son mélange de piano, guitares, synthé et percussions diverses. Impossible de résister à l’émotion familière de « In Recovery » ou du tendre « Sleepover » et son utilisation minimaliste et très retenue des instruments solistes (piano mis en avant). Newman dévoile la facette plus moderne de sa personnalité musicale dans « Cosmic Aristotle » où il va même jusqu’à manipuler des samples/FX de guitare électrique étranges sur fond d’ostinato rythmiques entêtants. Cette idée de rythmes entêtants revient tout au long du film pour suggérer l’idée de l’entraide entre individus, qui est en train de se répandre un peu partout dans le pays. Dans « Pay It Forward », Thomas Newman confirme son envie d’explorer un style plus moderne en ayant recours à quelques rythmes pop/électro éclectiques et une instrumentation toujours aussi inventive et peu conventionnelle (cf. « Velocity Organ »). Le thème principal, véritable leitmotiv musical majeur du film, revient encore une fois dans « Desert Drive », alors que le poignant « Wasted Air » apporte une vraie bouffée d’émotion durant le dernier quart d’heure du film, émotion confirmée pour le final « I Forgive You ». Pas de surprise particulière donc au menu de cette nouvelle bande originale de Thomas Newman, intime, inventive et touchante, mais guère originale de la part du compositeur qui semble se conforter plus que jamais dans un style bien à lui mais dénué de la moindre prise de risque. Newman se retrouve désormais obligé de recycler sans cesse les mêmes formules musicales d’un film à un autre, flirtant dangereusement avec la monotonie et l’ennui. Malgré tout, sa musique prolonge l’émotion du très beau film de Mimi Leder et permet au musicien d’assurer la pérennité de son oeuvre en ajoutant une nouvelle pierre à un édifice solide, bien qu’incontestablement plus paresseux qu’auparavant : Thomas Newman, victime de son propre succès ? Peut-être. Toujours est-il que le résultat est suffisamment intéressant pour susciter l’intérêt d’un auditeur curieux et des fans (et ils sont nombreux) de l’un des compositeurs les plus intéressants du cinéma américain moderne !



---Quentin Billard