1-The Hollow Man 3.02
2-Isabelle Comes Back 6.04
3-Linda & Sebastian 2.57
4-This Is Science 6.17
5-Not Right 2.42
6-What Went Wrong? 1.44
7-Broken Window 3.01
8-False Image 1.58
9-Hi, Boss 2.49
10-Find Him 4.38
11-Bloody Floor 9.57
12-The Elevator 3.01
13-The Big Climb 3.06

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

Varèse Sarabande
302 066 171 2

Album produit par:
Jerry Goldsmith
Producteur exécutif:
Paul Verhoeven
Producteur exécutif pour Varèse Sarabande:
Robert Townson
Monteur de la musique:
Ken Hall
Assistant de Mr.Goldsmith:
Lois Carruth

Artwork and pictures (c) 2000 Columbia Pictures Industries. All Rights Reserved.

Note: ***1/2
HOLLOW MAN
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
Pour son septième film américain, Paul Verhoeven s'attaque désormais au mythe de l'homme invisible dans 'Hollow Man', thriller violent dans lequel il décrit la longue plongée en enfer d'une équipe de scientifiques piégés par un savant devenu fou après avoir testé sur lui un sérum qui rend invisible. Sebastian Caine (Kevin Bacon) est sur le point d'achever l'oeuvre de sa vie le jour où il découvre ce mystérieux sérum et le teste avec succès sur une femelle gorille. Malgré la réticence du Dr.Howard Kramer (William Devane) qui finance ses recherches, Caine va décider d'appliquer le sérum sur lui-même, prétextant à son équipe qu'il aurait soi-disant reçu le feu vert de Kramer. Après une transformation assez douloureuse, Caine peut enfin savourer les plaisirs de l'invisibilité, jusqu'à ce qu'il finisse par découvrir avec horreur qu'il est impossible de le rendre visible. Dès lors, Caine se retrouve piégé dans cette invisibilité qui finit par le rendre dingue. Le jour où Caine découvre que Linda McKay (Elisabeth Shue), son assistante dont il est fou amoureux, couche avec Matthew Kensington (Josh Brolin), l'un des membres de son équipe, c'est le début de l'enfer pour toute l'équipe de chercheurs de Sebastian. Devenu fou furieux, ce dernier les élimine les uns après les autres en les piégeant dans le laboratoire souterrain, bien décidé à utiliser son invisibilité pour assouvir ses propres pulsions. Mais Linda et Matthew sont déterminés à l'empêcher de nuire définitivement.

Fidèle à ses idées, Paul Verhoeven ('le hollandais violent') continue de défier les organismes de censure américaine (la MPAA) à travers ses films cumulant sexe et violence parfois extrême. Dans 'Hollow Man', Verhoeven est malheureusement tombé dans de l'hollywoodien basique avec des personnages stéréotypés au possible, des situations à suspense ultra convenues et sans surprise, ainsi que le lot habituel de violence gratuite typique du réalisateur. Ce qui partait alors d'une bonne intrigue (un scientifique devient invisible et est condamné à le rester - dès lors, il comprend qu'il pourra réaliser tous ses fantasmes les plus malsains) prend finalement un dérapage incontrôlé pour finir dans un véritable bain de sang gratuit avec les sempiternels effets sanguinolents. Comme d'habitude, Verhoeven en profite pour glisser un certain parfum d'érotisme dans son film, surtout dans la façon où le réalisateur évoque les fantasmes de Sebastian Caine ou la relation torride entre Linda (excellente Elisabeth Shue) et Matthew (Josh Brolin). On est très loin ici de l'érotisme sulfureux du très décrié 'Showgirls' ou des films hollandais de Verhoeven, mais pour une grosse production américaine, c'est déjà pas si mal que cela. Evidemment, on sent que la censure est passée par là, surtout dans la coupure qui vient interrompre brutalement la scène où Sebastian, invisible, viole sa voisine (qui, comme par hasard, est interprété par la plantureuse Rhona Mitra). En bref, Verhoeven avait à ses dispositions des éléments psychologiques particulièrement intéressants mais a finalement tout saccagé en tombant dans le formatage hollywoodien le plus conventionnel qui soit. C'est dommage! Ainsi, on aurait particulièrement apprécié que le réalisateur développe les possibilités qui s'offrent à Caine au lieu d'insister sur sa folie meurtrière qui ne sert finalement de prétexte qu'à un étalage de violence gratuite typique du réalisateur. A noter malgré tout d'impressionnants effets spéciaux (plus de 560 plans d'effets spéciaux durant tout le film!) comme la scène de la transformation du gorille au début du film, utilisant un procédé d'images de synthèse assez révolutionnaire (le corps rendu visible de l'animal se reconstitue sous nos yeux en partant du sang dans les veines jusqu'à la chair et aux poils). Mention spéciale à Kevin Bacon, le véritable anti-héros du film, rendu invisible dans le film grâce aux génies des effets spéciaux de Sony Pictures Imageworks et du studio de Phil Tippett. Au final, 'Hollow Man' est une déception majeure de la part d'un réalisateur qui n'est plus au meilleur de sa forme, et qui a finit par tomber dans les pièges des compromis hollywoodien!

Jerry Goldsmith retrouve Paul Verhoeven après leurs collaborations sur 'Total Recall' et 'Basic Instinct'. Le score de 'Hollow Man' ne diffère guère de 'Basic Instinct' ou 'Total Recall' puisqu'on retrouve ici aussi le même style action, les mêmes mélanges orchestre/synthé, etc. Devenu un grand maître de la musique d'action, Goldsmith n'a depuis très longtemps plus rien à prouver à ce niveau là. Un score comme 'Hollow Man' nous prouve à quel point le maestro californien est passé maître dans l'art des déchaînements orchestraux. Pourtant, deux aspects très nuancés priment ici: tout d'abord, la trame psychologique - peut-être la plus intéressante dans le score et dans le film - dominé par un thème principal envoûtant et des synthétiseurs atmosphériques et mystérieux avec des cordes sombres et froides à la fois. Cette atmosphère de mystère à la fois sombre et inquiétante est évoquée dans l'excellent 'The Hollow Man' pour le générique de début du film (avec l'animation des molécules vues au microscopique dans lequel se forment les titres du générique pour souligner l'univers scientifique du film). Le thème est développé par ces cordes froides et ces synthés envoûtants hérités de 'Total Recall' et 'Basic Instinct'. A vrai dire, l'ouverture du score n'est pas sans rappeler celle de 'Basic Instinct', la musique de 'Hollow Man' ayant ici héritée du style mystérieux et psychologique de cette précédente partition incontournable du compositeur! Avec cette excellente ouverture, Goldsmith évoque déjà l'âme tourmentée de Sebastian Caine et de ses fantasmes malsains, d'où l'emploi de l'électronique qui donne un côté envoûtant et hypnotisant particulièrement inquiétant dans la musique.

Si on a tôt vite fait de faire le rapprochement avec le début de 'Basic Instinct', c'est pour mieux s'échapper vers un style guère neuf mais à la personnalité musicale plus affirmée. Ainsi, 'Isabelle Comes Back' développe une idée neuve, un ostinato rythmique de pizzicati de contrebasses/violoncelles et de synthé basés sur des mesures ternaires avec des changements de mesure constants. L'utilisation de l'électronique sert ici à accentuer la partie rythmique qui ne cesse de faire monter la tension au fur et à mesure que l'écriture orchestrale/électronique ne cesse de s'intensifier au cours d'un premier grand crescendo de tension lors de la transformation de la femelle gorille Isabelle au début du film. 'Isabelle Comes Back' est aussi le premier morceau à faire intervenir deux éléments majeurs ici - le thème des scientifiques, développé ici par deux cors et la musique d'action, un élément majeur du score de 'Hollow Man'. On retrouve ici toutes les formules traditionnelles des scores d'action de Jerry Goldsmith: percussions brutales (timbales, tambours, etc.), cuivres avec sourdines, cordes tendues et agitées, etc. Passé un 'This Is Science' tout à fait similaire dans la construction (Caine décide d'appliquer sur lui-même le sérum d'invisibilité, sans en prévoir les conséquences), on retrouve le même genre d'explosion de violence orchestrale dans le chaotique 'Not Right', lorsque Caine décide de redevenir visible, mais en vain. La tension se fait ici plus grande, dominé par les rythmiques discrètes de synthé, des cordes sombres, des percussions brutales et des cuivres martelés. Il y a ici un véritable traitement orchestral particulièrement massif à l'écran, une sorte de manière d'amplifier la tension et les enjeux de cette course au sérum d'invisibilité (et de visibilité). 'Not Right' est typique des musiques d'action de Goldsmith, avec ses rythmes syncopés, ses changements de mesures et ses cuivres/percussions martelés.

Goldsmith relâche la tension au cours de pièce plus calme comme 'What Went Wrong?' où il développe le thème principal lorsque les collègues de Caine lui fabriquent un masque en latex et s'interrogent ensemble sur les causes de l'échec de l'anti-sérum. On notera ici la présence d'un morceau d'ambiance plus romantique/intime dans 'Linda & Sebastian', le seul véritable passage intime qui jure un peu avec le reste du score mais qui nous permet de respirer un grand coup avec cette longue descente abyssale dans les méandres fumeuses de l'esprit torturé de Sebastian Caine et de sa terrifiante montée de violence. Après un début paisible et rêveur au piano électrique avec vents et cordes (Sebastian tente de séduire Linda une dernière fois), on notera le style plus atmosphérique et envoûtant de la dernière partie du morceau, qui évoquent une fois encore la trame psychologique du film avec les tourments intérieurs qui hantent Sebastian, en proie à des doutes et des fantasmes grandissants. Cette partie psychologique pleinement assurée par Goldsmith est sans aucun doute l'une des plus belles réussites d'un score d'action qui sait aussi faire appel à un style plus hypnotisant et psychologique qui convient à merveille au film.

C'est avec le sombre 'Broken Window' que Goldsmith décrit la longue descente aux enfers de Caine et de son équipe de scientifiques piégés dans le laboratoire souterrain. Dans 'Broken Window', Goldsmith évoque la folie furieuse de Caine lorsqu'il découvre la vérité à propos de Linda et Matthew. La tension et le suspense se font ici plus imposants, plus affirmés (on est proche par moment du style suspense de 'Basic Instinct'). Comme d'habitude, le compositeur se plait à allier électronique atmosphérique brumeuse avec orchestre sombre dominé par des cordes inquiétantes, des cuivres menaçants et le traditionnel 'piano thriller' à la 'L.A. Confidential'. A partir de 'Broken Window', c'est un certain sentiment de menace qui domine la partition, une menace parfaitement véhiculée à l'écran par la musique de Goldsmith qui renforce l'âme noire et torturée de Caine. Dès lors, la tension ne va cesser de monter inexorablement, aboutissant à une explosion de violence orchestrale comme on en aime en entendre habituellement chez Goldsmith. On appréciera ainsi la scène de la mort de Kramer dans la piscine avec le brutal 'Hi Boss' et ses cuivres/percussions agressives avec ses cordes aiguisées comme des rasoirs, évoquant la folie meurtrière de Sebastian. Pour finir, on appréciera une fois encore l'excellent travail autour des sonorités électroniques envoûtantes, qui donnent parfois un côté 'fantôme' au personnage invisible de Kevin Bacon.

La traque contre le tueur invisible se poursuit dans l'excitant 'Find Him' (l'équipe se forme autour de Linda et Matthew pour tenter de trouver Caine et de mettre fin à ses agissements), véritable jeu du chat et de la souris où, pendant plus de 4 minutes, Goldsmith alterne entre suspense glauque et explosion de violence orchestrale soudaine. Pour maintenir la tension, Goldsmith utilise un petit ostinato rythmique électronique avec ses cordes tendues aboutissant avec son lot habituel de percussions brutales et de cuivres martelés. La terreur se fait alors de plus en plus grande au fur et à mesure où les morts commencent à s'accumuler et où le danger devient omniprésent. C'est le chaos qui s'installe dans l'immense laboratoire souterrain, où règne une lourde atmosphère d'incertitude et de danger. C'est en tout cas ce que Goldsmith a parfaitement retranscrit dans sa musique, particulièrement efficace à l'écran comme en écoute isolée (malgré le manque d'originalité flagrant de ces morceaux d'action/suspense, on ne peut qu'admirer le savoir-faire du maestro!). Le chaos culmine dans l'excellent 'Bloody Floor' qui débute avec des trompettes en sourdine avec des timbales e des trombones en sourdine aux sonorités reconnaissables entre mille. 'Bloody Floor' évoque la violente confrontation entre Sebastian et Sarah (Kim Dickens) sur le sol recouvert de sang, le morceau décrivant pendant près de 9 minutes la folie furieuse de Caine. Le reste du morceau continue de nous faire plonger dans une abîme de terreur impressionnante bien que peu originale en soi (on a déjà entendu ça un paquet de fois auparavant chez Goldsmith!). On notera la reprise du thème des scientifiques aux cors, thème qui devient alors celui de Linda et Matthew lorsque ces derniers réussissent à s'évader hors de la chambre froide où les a enfermé Caine. Finalement, la confrontation finale dans l'ascenseur atteint son climax avec les excitants 'The Elevator' (impressionnante montée de tension avec quelques reprises morcelées du thème de Linda aux cuivres) et 'The Big Climb', véritable apogée d'action du score qui finira avec une énième reprise du thème de Linda sous une forme plus paisible et résolue.

Au final, ne vous attendez pas à beaucoup de subtilité sur la dernière partition symphonique de Jerry Goldsmith pour le nouveau film de Paul Verhoeven. Le score de 'Hollow Man' est tout sauf subtil, en plus d'être assez répétitif à la longue - cela fait un peu toujours pareil au bout d'une heure! Malgré tout, le maestro continue de nous prouver qu'il est décidément un très grand maître de la musique d'action, toujours très à l'aise dans son approche musicale des émotions et des intrigues d'un film. Sa mise en musique du caractère à la fois psychologique et violent du film de Verhoeven est particulièrement efficace à la fois à l'écran et sur le plan purement musical. Certes, on retrouve une fois encore les formules habituelles du genre, entendues des tas de fois auparavant, mais avec un score aussi percutant, massif et brutal, difficile de ne pas apprécier ses formules à leur juste valeur dans le score de Goldsmith. Sans être le nouveau chef-d'oeuvre du compositeur, 'Hollow Man' est la preuve flagrante du talent d'un compositeur qui n'a de toute façon plus rien à prouver depuis bien longtemps. Devant une musique d'action/suspense d'une telle qualité, on s'incline, c'est tout!


---Quentin Billard