1-Death Camp 3.01
2-Ambush 3.24
3-Mutant School 3.45
4-Magneto's Lair 4.57
5-Cerebro 2.09
6-Train 2.35
7-Magneto Stand Off 2.58
8-The X-Jet 3.45
9-Museum Fight 2.20
10-The Statue of Liberty 2.36
11-Final Showdown 2.28
12-Logan and Rogue 5.58

Musique  composée par:

Michael Kamen

Editeur:

Decca Records
289 467 270-2 DH

Album Produit par:
Michael Kamen, Stephen McLaughlin,
Christopher Brooks

Monteur de la musique:
Daryl Kell
Musique supervisée pour la 20th Century Fox par:
Robert Kraft,
Michael Knobloch

Artwork and pictures (c) 2000 20th Century Fox. All rights reserved

Note: ***1/2
X-MEN
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Michael Kamen
Après le très fort 'Usual Suspects' et le très critiqué 'Apt Pupil' ("Un élève doué"), Bryan Singer revient en force sur la très attendue adaptation cinématographique du célèbre comics américain de chez Marvel, 'X-Men', histoire de mutants aux pouvoirs spéciaux et surhumains devant cohabiter avec les êtres humains pour qui ils ont décidés de se battre contre Magneto (Ian McKellen), un mutant qui s'est mis en tête d'exterminer la race humaine. C'est la guerre entre les mutants pacifistes et ceux dont la haine contre les humains constitue leur principale motivation et leur soif de destruction et de chaos. Les critiques annonçaient à l'avance un film de super héros différent, plus psychologique, moins nunuche et surfait que 'Batman et Robin', plus travaillé. Mais l'ensemble n'est pourtant guère aussi original que les critiques ont bien pu le prétendre, même si le travail autour des personnages et de leurs sentiments, qui aurait sans aucun doute gagné à être encore plus approfondi, est tout de même suffisamment intéressant pour pouvoir permettre au spectateur d'accrocher avec le film et ses personnages. On admirera aussi l'excellente mise en scène de Singer, assez conventionnelle (trop d'images de synthèse, trop d'effets spéciaux qui, comme d'habitude, tendent à dénaturer la personnalité et le style du réalisateur) mais tout de même très percutante et au dessus de la moyenne hollywoodienne des films de super-héros. On a ainsi beaucoup parlé d'un certain climat d'ambiguïté permanent entre les personnages et d'une ambiance très sombre et finalement moins héroïque que d'autres films de super héros précédents, même si une fois de plus les héros l'emportent sur la menace grandissante du mal. On pourra apprécier plus particulièrement le personnage de Logan (Wolverine dans la BD, interprété dans le film par Hugh Jackman) qui conserve un côté toujours assez sombre, froid et dur, un combo entre un héros et un anti-héros. La première séquence du film, dans le camp de concentration nazi durant la guerre de 39/45 est peut être décalée par rapport au sujet du film, mais elle évoque néanmoins le fait que les mutants sont implantés dans notre monde, et ce depuis des générations. C'est aussi une séquence majeure dans le sens où évoque les origines de la haine de Erik Lehnsherr/Magneto à l'égard des hommes. Brillante idée donc d'avoir utilisé un moment de notre histoire pour y mélanger une trame fictionnelle, fort bien décrit d'ailleurs dans le film - un enfant que l'on enlève à ses parents casse les barrières d'un grillage par la force de la pensée, sous l'effet du désespoir. Au final, 'X-Men' permet donc de passer un bon moment. L'ensemble est tout de même au dessus de la norme habituelle des films de super-héros, même si le film de Bryan Singer ne constitue en rien LE nouveau chef-d'oeuvre du réalisateur.

Concernant la nouvelle partition composée par le grand Michael Kamen, renommé d'ailleurs "Michael K-Men" à l'occasion (petite touche humoristique fort d'à propos), les directives du réalisateur étaient de ne pas faire une musique avec de grands thèmes héroïques aisément mémorisables, comme 'Superman' ou 'Batman', mais de créer une ambiance atmosphérique plus subtile et sombre, contenant néanmoins quelques motifs en guise de thème, sans être véritablement accrocheurs dès la première écoute, ce qui semble d'ailleurs avoir troublé bon nombre de béophiles qui s'attendaient à un nouveau thème majeur de super-héros. C'est aussi dans cette approche plus originale de la musique pour un film de super héros que Singer réaffirme sa volonté de ne pas céder à la facilité du genre. Il faut rappeler au passage que John Ottman, déjà compositeur pour Bryan Singer sur 'Public Access', 'The Usual Suspects' et 'Apt Pupil', devait composer à l'origine la musique de ce film. Mais alors qu'il était occupé sur son premier long-métrage, 'Urban Legends: The Final Cut', John Ottman du céder la place à Michael Kamen qui a eu la chance de participer pour la première fois à un film de Bryan Singer.

On entre de manière dramatique et très sombre avec 'Death Camp', musique illustrant la scène introductive du camp de concentration. Un motif de piano solo ouvre délicatement la musique tandis qu'un climat sombre et tragique se met en place dans la scène avec l'arrivée de l'orchestre où les cordes sont particulièrement mises grâce à leur facilité à créer des ambiances sombres adéquates. La montée tragique de la musique à l'image de la douloureuse séparation de l'enfant et de ses parents est renforcée par un habile motif dramatique suggérant un profond sentiment de tristesse tandis qu'un autre petit motif sur un balancement de deux notes refait son apparition. L'orchestre se défoule au moment où l'on voit l'enfant briser les grillages par la force de la pensée, une scène très bien illustré par l'écriture orchestrale toujours aussi percutante de Michael "K-Men". En poussant l'écoute plus loin, un autre motif est déjà annoncé, passant totalement inaperçu lors de la première écoute mais qui possède une certaine importance puisqu'il sera rattaché par la suite au personnage de Magneto (excellent Ian McKellen!), le mauvais de l'histoire.

On notera ici une sérieuse tendance de Michael Kamen a se rapprocher par moment d'un style musical plus proche de Hans Zimmer, avec un mélange orchestre/synthé et percussions électroniques très similaires au style de Zimmer. Il n'est d'ailleurs pas étonnant de retrouver Klaus Badelt, l'un des complices de Hans Zimmer à Media-Ventures, crédité aux percussions électroniques du score de 'X-Men'. Heureusement, Kamen reste Kamen et n'a rien à voir avec l'univers musical de Hans Zimmer. La partie orchestrale reste toujours primordiale, les synthétiseurs ne noyant jamais vraiment l'orchestre, tout en conservant une base électronique sonore importante pour le soutien des différents ambiances orchestrales. L'action est accentuée par des cordes frénétiques et un pupitre de cuivres massifs (trompettes, trombones, cors, etc.), sans oublier la partie plus restreinte réservée aux vents, plutôt utilisés dans les passages plus intimes du film ('Logan and Rogue' par exemple). On pourra aussi évidemment mentionner le côté futuriste du film évoqué à travers les synthétiseurs dans la musique de Kamen. Cette évidence s'explique aussi à travers la simple évocation d'un monde nouveau pour l'homme, celui des mutants, si différents des hommes de part leurs incroyables pouvoirs, mais pas toujours différents d'eux physiquement. Si l'on poussait l'analyse plus loin, on pourrait alors penser que le synthétiseur évoque la partie mutante des X-Men et l'orchestre la partie humaine. Toujours est il que le score marque un point avec un excellent travail de sonorités électroniques original de la part de Michael Kamen, très pertinent à l'écran, illustrant le côté irréel des pouvoirs des mutants à travers une variété de sons futuristes parfois presque étranges.

Concernant la construction du score, il serait fort hasardeux de prétendre, comme l'affirmèrent certaines critiques, que le score ne possède aucune thématique. Tout d'abord, Kamen a opté pour une approche atmosphérique renforcée d'un caractère sombre tout au long du film. Deuxièmement, le compositeur a écrit une importante thématique pour 'X-Men' mais sans la facilité d'un système de leitmotive à la John Williams. Les thèmes sont suggérés plus subtilement, presque parfois inconsciemment pour l'auditeur qui restera sans aucun doute perplexe au cours d'une première écoute, étant donné le fait que le score s'avère être relativement difficile d'accès à la première écoute. Certains ont ainsi été très vite dérouté par le caractère sombre, peu héroïque et apparemment athématique de la musique. Mais une écoute plus approfondie permet de déceler toutes les subtilités d'un score décidément très réussi. Voici donc les différents thèmes: tout d'abord, le thème dramatique de 'Death Camp' que l'on réentendra dans une autre pièce de l'album, finalement assez peu utilisé durant tout le film. Vient ensuite dans ce même morceau le thème de Magneto, suggéré habilement en arrière-fond sonore, un thème ascendant et menaçant sur quelques courtes notes, un motif de méchant qui ne ressemble pas aux thèmes de mauvais qu'écrit John Williams pour ce type de film. Le thème principal qui revient le plus souvent est celui des X-Men, confié aux cuivres et aux cordes sur un motif mélodique lui aussi ascendant, ayant un point commun avec celui de Magneto, comme si le thème de ce dernier était un habile dérivé modifié de celui des X-Men (peut être est-ce pour rappeler que Magneto et les X-Men ont un point commun: ce sont tout deux des mutants). Logan et Rogue possèdent un motif intimiste qui n'est exposé que dans 'Logan and Rogue'. Michael Kamen suggère dans ce morceau l'amitié naissante qui unit Logan et la jeune Rogue, dépassée par ses propres pouvoirs qu'elles ne comprend pas. Le thème des X-Men est entendu surtout dans l'excellent 'The X-Jet', scène du vaisseau des X-Men qui permet à Kamen d'illustrer l'aspect quasi-héroïque des héros qui partent au combat, sans pour autant créer un véritable sentiment d'héroïsme pourtant si fréquent dans la musique de ces films, et ce depuis les grandes partitions de la fin des années 70/début 80 de John Williams. On réentend aussi le thème dans 'Ambush', 'Logan and Rogue' ,'The Statue of Liberty' et 'Final Showdown' pour les scènes du combat final dans la statue de la liberté entre les X-Men, Magneto et ses acolytes. Pour finir, on notera la présence d'un thème attribué aux acolytes de Magneto et utilisé dans 'Museum Fight', sans oublier l'intrigant motif de violoncelle associé à Mystique dans le film ('Magneto Stand Off'). On final, on se retrouve donc avec une quantité impressionnante de motifs, toujours plus ou moins bien caché dans la musique mais jamais vraiment développé à l'instar des grands thèmes mémorables à la Williams.

Si les pièces atmosphériques telles que 'Mutant School', dont les quelques premières minutes possèdent quelque chose de plus lumineux et plus léger que le reste de la partition (scène où Xavier fait découvrir l'école des mutants à Logan au détour d'un très bref rappel du thème principal) sont intéressantes, le principal attrait de la BO réside encore dans les excellentes parties d'action particulièrement intenses du score. On constate ainsi à quel point la musique de Kamen reste sombre tout au long du film, comme pour rappeler au spectateur qu'il assiste à une guerre sans merci et que les personnages ont une certaine complexité psychologique parfois non dénué d'ambiguïté (ne serait-ce que pour Logan par exemple, ou même Xavier et ses échanges quasi-amicaux avec son adversaire Magneto). 'Train' est une de ces superbes pièces d'action furieuse dans laquelle l'orchestre et les grosse masses de sonorités électroniques viennent renforcer la violente scène de l'attaque de Magneto dans le train, qui repousse Logan et enlève Rogue pour s'accaparer ses propres pouvoirs. Le thème de Magneto est particulièrement présent, soulignant au passage les attaques du grand méchant de service. Les sonorités électroniques sont adéquates dans ces passages d'action, soulignant les pouvoirs des X-Men et les attaques irréelles des mutants (à grand renfort d'images de synthèse!). 'Magneto Stand Off' s'ouvre une fois de plus sur le rappel du motif de Magneto à travers un morceau atmosphérique très réussi dans lequel apparaît le motif de violoncelle attribué au personnage sensuel de inquiétante mystique (Rebecca Romijn-Stamos). La pièce d'action la plus réussie reste sans aucun doute l'excellent 'Museum Fight' avec une écriture de cordes virtuoses déchaînées où l'on retrouve le thème des acolytes de Magneto et celui des X-Men, puisqu'il s'agit du combat dans le musée opposant les X-Men et les sous-fifres de Magneto qui leur bloquent le passage. Totalement déchaîné, 'Museum Fight' rappelle les grands moments d'action des musiques des 'Die Hard' ou des 'Lethal Weapon'.

'The Statue of Liberty' est un super exemple d'écriture action faisant la part belle à l'orchestre mais aussi à un ensemble de textures électroniques des plus adéquat au sein de la musique mais aussi dans le film, les sonorités synthétiques et les percussions rappelant beaucoup une fois encore le style de Hans Zimmer. 'Final Showdown' permet de réentendre le thème de mystique ainsi que celui des X-Men. Le morceau retranscrit toute l'intensité du combat final et du compte à rebours engagé par Magneto qui lance une vague éléctro-magnétique qui, si elle atteint la ville, touchera et contaminera tous les humains qui deviendront des mutants et seront condamnés à mourir par la suite. On peux ainsi se reposer à la fin de 'Final Showdown' et le début du très beau motif d'amitié dans 'Logan and Rogue', thème vaguement mélancolique d'esprit, montrant que rien n'est encore sur et que la guerre est loin d'être terminée, d'où une fin en suspend. On notera au passage la retour du petit motif de piano qui ouvrait 'Death Camp' juste à la fin de 'Logan and Rogue', comme pour fermer la boucle, pour montrer que l'aventure touche à sa fin, du moins sur l'album du score, le film se concluant quand à lui sur une envolée magistrale du thème principal absente de l'album du score (qui omet d'ailleurs beaucoup de passages importants du score de Michael Kamen).

Que dire de plus, sinon que 'X-Men' marque avec brio le retour de Michael Kamen qui signe une nouvelle grande BO ayant été particulièrement critiquée et incomprise à cause de ses subtilités et de son refuse d'une thématique trop évidente. Si l'ensemble ne peut prétendre se hisser au rang des chefs d'oeuvre de l'histoire de la musique de film, 'X-Men' représente une nouveau tournant dans l'univers des musiques de films de super héros, peu héroïque, plus narrative, plus atmosphérique, plus sombre, plus psychologique. En un mot: une musique sensiblement différente pour ce type de film. Pour un peu, on serait presque tenté de dire que cela n'annonce que du bon pour la musique des futures productions hollywoodiennes mettant en scène des super-héros.


---Quentin Billard