Disc 1 The Complete Score

1-Main Title 2.49
2-The Principal's Office/
The Ashtray 1.35
3-Margaret Comes Home/
The Telephone Call 2.26
4-The Closet: St. Sebastian/
The Mirror/The Reflection 1.24
5-Calisthenics 1.15
6-The Card Catalogue/Telekinesis 1.17
7-Carrie and Miss Collins 1.49
8-The Slaughter/The Storm/
Outside the Gym/Margaret Prays 1.33
9-The Tuxedo Shop 1.30
10-Waiting for Tommy/
Tommy Arrives 0.55
11-Born to Have it All 3.02*
12-I Never Dreamed Someone
Like You Could Love
Someone Like Me 4.07*
13-The Ballot/Carrie and Tommy/
The Conspirators 2.12
14-The Coronation/The Blood 5.24
15-The Retribution 3.07
16-Carrie Returns Home 3.38
17-The Bath/Carrie and Margaret 1.04
18-The Crucifixion 2.47
19-The House 1.35
20-The Dream/The Nightmare/
End Titles 5.04

Bonus Tracks:

21-Born to Have it All
(Instrumental version) 3.02
22-I Never Dreamed
Someone Like You Could
Love Someone Like Me
(Instrumental version) 5.37

Disc 2 The Original Album

1-Theme from Carrie 2.51
2-I Never Dreamed
Someone Like You Could
Love Someone Like Me 3.09*
3-And God Made Eve 2.02
4-At the Prom 1.54
5-Contest Winners 2.45
6-Born to Have it All 3.02*
7-Bucket of Blood 2.42
8-School in Flames 3.08
9-Mother at the Top
of the Stairs 3.40
10-For the Last Time
We'll Pray 2.41
11-Collapse of Carrie's Home 1.36
12-Sue's Dream 2.16
13-Theme from Carrie 1.00

*Interprété par Katie Irving
Musique de Pino Donaggio
Paroles de Merritt Malloy.

Musique  composée par:

Pino Donaggio

Editeur:

Kritzerland KR20017-5

CD1 produit par:
Bruce Kimmel
Remixé par:
John Adams
CD 2 remasterisé
et produit par:
Bruce Kimmel
Album original produit par:
LeRoy Holmes
Score conduit par:
Natale Massara

Edition limitée à 1200 exemplaires.

Artwork and pictures (c) 1976/2010 Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
CARRIE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Pino Donaggio
Film culte incontournable des années 70, « Carrie » est un film de jeunesse de Brian De Palma. Deux ans après le succès de « Phantom of the Paradise » qui le fit connaître du grand public, De Palma signe en 1976 la réalisation de « Carrie », adaptation cinématographique du roman éponyme de Stephen King. Le film comme le roman illustre l’histoire de Carrie White (Sissy Spacek), une jeune ado de 17 ans qui possède d’étranges pouvoirs télékinésiques. Mais parce qu’elle a un physique disgracieux et un comportement solitaire, Carrie est la risée de ses camarades du lycée qui la maltraitent régulièrement, jusqu’au jour où la jeune fille est humiliée dans la douche qui suit le cours de sport parce qu’elle vient tout juste de remarquer des saignements dus à ses règles mais qu’elle ne peut s’expliquer. Ses camarades lui jettent alors des tampons hygiéniques en criant qu’elle a ses règles. Miss Collins (Betty Buckley), la prof de sport, décide alors de renvoyer la jeune fille chez elle, mais à son retour, Carrie se fait violemment disputer par sa mère Margaret (Piper Laurie), une extrémiste religieuse qui prétend que ce sont les péchés de sa fille qui l’ont conduite à atteindre la puberté (et le début des règles). Enfermée dans un placard obscur et en pleurs, Carrie se voit contrainte de prier pour expier ses prétendues fautes. Au lycée, Miss Collins décide alors de punir les filles qui ont humilié Carrie en les forçant à effectuer 55 minutes de retenue en sport tous les jours, alors que les réfractaires s’exposent à 3 jours d’exclusion et à l’interdiction de venir au bal de promotion de fin d’année, qui se rapproche de plus en plus. C’est ainsi que Susan Snell (Amy Irving), l’une des camarades de Carrie qui a eu l’idée des tampons, décide de se rattraper, honteuse de son comportement, en demandant à son petit ami Tommy Ross (William Katt) d’inviter Carrie au bal de fin d’année. D’abord sceptique et méfiante, la jeune fille se laisse finalement convaincre par l’invitation de Tommy, mais la soirée au bal de fin d’année tourne au cauchemar, alors que Chris Hargenson (Nancy Allen), une camarade de classe de Carrie qui la déteste depuis toujours, a organisé un plan diabolique avec son compagnon Billy Nolan (John Travolta), parce que Miss Collins l’a exclue du bal après s’être rebellée contre la punition infligée par la prof de sport. Chris et Billy ont truqué les résultats du concours de la reine de la soirée afin de permettre à Carrie et Tommy de monter sur l’estrade, au dessus de laquelle ils ont disposé un seau rempli de sang de porc, qu’ils déversent finalement sur la jeune fille, humiliée devant tous ses camarades et ses professeurs. Horrifiée et enragée, Carrie déchaîne alors ses pouvoirs sur l’assemblée toute entière, bien décidée à se venger une bonne fois pour toute de tous ceux qui lui ont fait du mal.

Avec son atmosphère de teenage movie, son casting jeune, sa mise en scène particulière et sa bande son typique des années 70, « Carrie » avait tout pour devenir un film culte : avec son affiche célèbre qui montre Sissy Spacek recouverte de sang avec un regard incroyablement hypnotisant et inquiétant – il s’agit en fait de la mythique scène finale du film – « Carrie » prend des airs de film d’épouvante mais raconte surtout le drame d’adolescents américains cruels et bêtes qui n’hésitent pas à humilier leur camarade et à la traiter comme une moins que rien sous prétexte qu’elle est différente d’eux. Dénonçant l’enfer que vivent parfois certains adolescents dans des écoles américaines tout en égratignant au passage la religion et le puritanisme U.S. avec le personnage de Piper Laurie en mère cruelle et fanatique entièrement vouée au culte, « Carrie » est au final un véritable électrochoc visuel dont on ressort étrangement secoué, notamment grâce à la célèbre séquence finale du bal de fin d’année, où Carrie déchaîne ses pouvoirs dans un enfer visuel sublimé par des effets de mise en scène très maniérés : De Palma en profite pour nous rappeler son affection pour la technique du split screen (qu’il utilisera dans de nombreux autres films du même genre), technique consistant à décompenser l’écran en plusieurs tableaux offrant différents points de vue d’une même scène, le tout accompagné de ralentis intenses, d’éclairages particuliers, de zooms grotesques, de gros plans extrêmes et de trucages divers (la scène où Susan marche vers la tombe de Carrie à la toute fin du film a été entièrement tournée à l’envers). Certes, le film prit quelques libertés par rapport au roman de Stephen King (pour des questions de budget, De Palma n’a pas été en mesure de retranscrire la destruction intégrale de la ville à la fin du film, et la mort de Carrie a été modifiée par rapport au livre), mais l’essentiel est bien là. Enorme succès commercial de l’année 1976, « Carrie » reste l’un des plus grands succès dans la carrière de De Palma et sera suivi d’une suite tournée en 1999 (« The Rage : Carrie 2 »), d’un remake pour la télévision réalisé par David Carson en 2002 et d’une nouvelle adaptation du roman conçue par Kimberly Peirce et sorti au cinéma en 2013 (avec Chloë Grace Moretz dans le rôle de Carrie et Julianne Moore dans celui de sa mère). Véritable icône de la culture cinématographique des seventies, « Carrie » sera référencé par la suite dans de nombreux long-métrages et inspirera même le film de Christophe Gans « Silent Hill » (2006) dans lequel on retrouvera des similitudes dans l’histoire.

A l’origine, Brian De Palma avait prévu de confier la musique de « Carrie » à Bernard Herrmann, avec lequel il avait déjà travaillé sur « Sisters » (1973) et « Obsession » (1976). Hélas, Herrmann décéda en décembre 1975 après avoir complété la musique de « Taxi Driver » de Martin Scorsese, obligeant alors De Palma à chercher un autre compositeur pour son film, jusqu’à ce qu’il découvre la musique de l’italien Pino Donaggio pour le film atypique « Don’t Look Now » (1973) de Nicolas Roeg, et décide de l’engager sur « Carrie ». Le film marque d’ailleurs le début de la collaboration entre De Palma et Pino Donaggio, qui se concrétisera par la suite sur de nombreux autres films tels que « Home Movies » (1979), « Dressed to Kill » (1980), « Blow Out » (1981), « Body Double » (1984), « Raising Cain » (1992) et « Passion » (2012). Pour « Carrie », Pino Donaggio suggère les différentes émotions du film, de la mélancolie du thème de Carrie aux moments de suspense plus horrifiques pour l’acte final ou aux sentiments des différents protagonistes du récit, le tout avec une justesse de ton qui permet à Donaggio de capturer chaque nuance du récit à travers ses notes de musique. Le film débute au son du très beau thème mélancolique de Carrie, thème nostalgique, doux et rêveur dont l’aspect poétique rappelle la fragilité de la jeune fille brillamment campée par Sissy Spacek dans le film. Ce thème est introduit par des cordes touchantes avec une flûte soliste et une guitare dans le « Main Title ». Présent au début de « The Principal’s Office/The Ashtray », le thème est alors repris avec douceur avant de céder la place aux premières mesures sombres du score, portées par des mesures de cordes dissonantes très herrmanniennes et quelques sonorités électroniques discrètes graves évoquant les pouvoirs étranges de Carrie. Dans « Margaret Comes Home/The Telephone Call », Donaggio met ici aussi l’accent sur les cordes de l’orchestre et instaure un climat plus sombre et froid pour suggérer la relation complexe entre Carrie et sa mère Margaret. Quelques glissandi ascendants de harpe et une écriture contrapuntique des cordes suffisent à suggérer ici la dureté de Margaret et les mauvais traitements qu’elle inflige à sa fille. On notera l’emploi du piano et du glockenspiel dans « The Telephone Call » avec le retour des cordes mystérieuses aux harmonies sombres et tourmentées, reprises dans « The Closet/St. Sebastian/The Mirror/The Reflection ». A noter que le lien avec Bernard Herrmann est plus qu’évident à 0:37, alors que Carrie utilise ses pouvoirs au son de grincement stridents des violons, élément bien connu repris du « Psycho » d’Herrmann et présent à plusieurs reprises dans le film.

Le film ayant été tourné dans les années 70, Pino Donaggio s’autorise un détour du côté de la musique pop kitsch de l’époque dans « Calisthenics », censé évoquer l’univers de la jeunesse américaine du film – c’est aussi un élément récurrent chez Donaggio, qui utilise très souvent la musique pop dans ses scores des années 70/80 – On notera ici l’emploi de synthétiseurs nasillards assez agaçants et qui, s’ils possèdent le charme évident des musiques kitsch des seventies, cassent complètement le charme musical instauré dans les premières pistes. Heureusement, on se rattrape vite dans le sombre « The Card Catalogue/Telekinesis » qui reprend les harmonies lugubres et pesantes des cordes, avec l’emploi de la harpe. La musique reste simple et un brin minimaliste dans ces scènes, y compris dans les reprises du thème de Carrie (« Carrie and Miss Collins »). Les passages de suspense comme « The Slaughter/The Storm/Outside the Gym/Margaret Prays » permettent à Donaggio d’accentuer le sentiment d’horreur avec, ici, un emploi assez virtuose des cordes et d’une flûte traversière aux notes ascendantes ultra rapides. La musique demeure dissonante mais jamais cacophonique, Donaggio conservant un aspect contrapuntique très Herrmannien dans l’écriture des cordes. On pourra aussi signaler les passages pop kitsch comme « The Tuxedo Shop » - qui reprend le thème pop de « Calisthenics » - ainsi que les chansons originales écrites par Donaggio pour la scène finale du bal, et notamment les jolies ballades romantiques de « Born to Have It All » et « I Never Dreamed Someone Like You Could Love Someone Like Me », interprétée par Katie Irving, pour évoquer le rapprochement entre Carrie et Tommy Ross à la fin du film, des chansons sympathiques mais totalement kitsch, qui ont bien mal vieillies. La musique reflète une douce mélancolie dans « The Ballot/Carrie and Tommy/The Conspirators », tandis que les harmonies lugubres des cordes évoquent à nouveau la conspiration orchestrée par Chris et Billy, à grand renfort de cordes stridentes et aiguisées, et de rappels tourmentés du thème de Carrie.

Enfin, le prélude vers l’horreur débute pour le couronnement de Carrie et Tommy dans « The Coronation/The Blood », qui reprend de manière lyrique et romantique le thème principal de Carrie aux cordes et au piano, suivi de la flûte traversière, un très beau passage dans la partition de « Carrie ». Le morceau suit judicieusement la construction de la scène en alternant entre le point de vue Carrie/Tommy et celui de Chris/Billy, sur le point de commettre l’irréparable en déversant le sang sur Carrie. Pour se faire, Donaggio alterne simplement entre les phrases mélodiques lyriques pour la jeune héroïne et les cordes staccatos plus menaçantes pour les conspirateurs. Le morceau est un superbe exemple de mise en musique d’une scène, suivant chaque action et chaque sentiment avec une dextérité évidente. La section « The Blood » permet au compositeur de renforcer la tension impressionnante de la séquence où le sang se déverse sur Carrie à l’aide d’accords mineurs intenses de cuivres, de cordes aigues sombres, d’un piano et d’un glockenspiel. La tension dramatique de la séquence – accentuée par un ralenti et un montage de la scène vue selon plusieurs angles de caméra – est grandement renforcée ici par le jeu staccato des instruments, sobre et totalement efficace dans le film, sans oublier cette accélération frénétique du tempo et les glissandi dissonants et descendants des cordes, pour l’aspect purement figuratif de la musique (représentant le sang en train de couler sur la jeune fille). Dans « The Retribution », Donaggio illustre la séquence horrifique où Carrie se venger de ceux qui l’ont maltraité à l’aide d’une série de sonorités électroniques étranges et complexes, usant d’effets sonores suraigus et saturés pour parvenir à ses fins. Il règne alors ici un sentiment d’étrangeté angoissant, alors que des nappes sonores de contrebasses créent une tension permanente durant la célèbre séquence où Carrie règle ses comptes en déchaînant ses pouvoirs sur ses camarades, tandis que la partie électronique, totalement expérimentale (typique des expériences synthétiques des seventies), crée une certaine folie sonore à la fois anarchique (le magma sonore des synthés) et contrôlée (les tenues des contrebasses en fond sonore).

Et c’est sans surprise que le film se conclut de manière tragique sur « Carrie Returns Home », alors que Carrie retourne à la maison retrouver sa mère. On notera ici l’emploi d’un orgue pour une pièce imitant un choral religieux aux cuivres, alors que « The Bath/Carrie and Margaret » reprend le thème de Carrie par un violoncelle plaintif, suivi du chaotique et dissonant « The Crucifixion » et du final puissant et dramatique de « The House ». Le thème est alors repris dans « The Dream/The Nightmare/End Titles » pour la conclusion et le générique de fin du film, concluant le récit sur une ultime touche d’émotion caractéristique du travail de Pino Donaggio sur « Carrie ». On ressort alors plutôt comblé par cette très belle partition du compositeur italien pour le film de Brian De Palma, suggérant chaque émotion avec une justesse de ton permanente, et un lyrisme poétique tout en finesse, malgré le caractère kitsch évident de certains passages. La partie thriller/suspense de la musique apporte à son tour une force évidente aux images, notamment pour les scènes avec Nancy Allen/John Travolta ou pour la séquence finale horrifique du bal de fin d’année qui tourne au cauchemar. C’est l’occasion pour Pino Donaggio de connecter ces scènes avec le style du grand Bernard Herrmann, et ce à tel point que l’on sent parfois à quel point De Palma avait bel et bien prévu de confier à l’origine son film à Herrmann. Mais loin de pasticher le style du défunt maître hollywoodien, Donaggio s’en tire haut la main en imposant son mélange d’orchestrations classiques, de touches électroniques expérimentales (l’incroyable « The Retribution ») et de pop kitsch pour « Carrie », un premier bel effort dans la collaboration Donaggio/De Palma, à redécouvrir dans son intégralité grâce à la réédition 2 Cd par le label Kritzerland !




---Quentin Billard