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Wickedness
1-In The Beginning, There Was Nothing 4.12 2-The World Was Filled With Violence 1.30 3-The End of All Flesh Is Before Me 2.15 4-A Sweet Savour 4.28 5-The Fallen Ones 3.57 6-For Seasons, And For Days, And Years 2.27 Innocence 7-Make Thee An Ark 5.09 8-Every Creeping Thing That Creeps 5.46 9-I Will Destroy Them 2.53 10-Flesh Of My Flesh 1.42 11-The Wickedness Of Man 1.39 12-In Sorrow Thou Shalt Bring Forth Children 3.55 Judgement 13-Your Eyes Shall Be Opened, And Ye Shall Be As Gods 2.24 14-The Flood Waters Were Upon The World 3.01 15-By Man Shall His Blood Be Shed 3.33 16-The Judgement Of Man 2.45 17-The Spirit of the Creator Moved Upon The Face of the Waters 3.00 18-Forty Days And Nights 3.20 19-What Is This That Thou Hast Done? 2.11 Mercy 20-The Fear And The Dread Of You 4.23 21-And He Remembered Noah 4.18 22-Day And Night Shall Not Cease 5.49 23-Mercy Is 4.11* *Interprété par Patti Smith and Kronos Quartet Ecrit par Patti Smith et Lenny Kaye Arrnagé par Clint Mansell et Matt Dunkley. Musique composée par: Clint Mansell Editeur: Nonesuch Records 542164-2 Album produit par: Clint Mansell, Geoff Foster Producteurs exécutifs de l'album: Darren Aronofsky, Scott Franklin, Ari Handel, Mary Parent Direction de la musique pour Paramount Pictures: Randy Spendlove Coordinateur de l'album: Jason Richmond Orchestré, arrangé et conduit par: Matt Dunkley Orchestrations additionnelles: Tony Blondal, Richard Bronskill, Stephen Coleman Préparation musique: Tony Finno Monteur superviseur musique: Nancy Allen Monteur musique: John M. Davis Monteur associé: Matthew Gormaley Consultant musical: Geoff Foster Assistant mix: Angie Teo Assistant score: Nigel Wiesehan Artwork and pictures (c) 2014 Paramount Pictures Corporation. All rights reserved. Note: ***1/2 |
NOAH
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ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
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Music composed by Clint Mansell
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Régulièrement habitué aux controverses et aux polémiques sur ses films, le surdoué Darren Aronofsky sortait tout juste du succès magistral de son « Black Swan » en 2010 qu’il s’attela rapidement à la mise en production de son projet suivant, « Noah », superproduction de 125 millions de dollars très librement inspirée de l’histoire de l’Arche de Noé (tirée de quatre chapitres de la Genèse dans l’Ancien Testament). Il faut rappeler qu’à l’origine, il s’agissait d’un projet de longue date pour Aronofsky, qui commença à rédiger un premier script en 2000, avant de le reprendre quelques années plus tard tandis qu’il s’attelait à la réalisation d’autres films. Après la création d’un roman graphique adapté du script d’Aronofsky et conçu par l’artiste canadien Niko Henrichon en octobre 2011, le cinéaste s’attela très vite à l’adaptation cinématographique du script remanié par la suite par John Logan et produit par Paramount et New Regency. Alors que le tournage débuta en 2012, il fallut environ 14 mois pour finaliser des effets spéciaux fort complexes, conçus par ILM et une post-conversion finale en 3D. Ce travail titanesque et harassant (les artisans de chez ILM ont déclaré que « Noah » avait représenté leur travail le plus compliqué à ce jour !) permet au final à Darren Aronofsky de nous offrir l’un de ses films les plus visuellement impressionnants, mais aussi l’un de ses plus controversés, en raison de ses nombreuses prises de risque et libertés prises par rapport au texte d’origine de la Bible. Malmené par certaines critiques à sa sortie en salle en 2014, « Noah » a été la cible de nombreux groupuscules religieux catholiques, protestants et juifs d’horizons divers, censuré en Chine et dans de nombreux pays arabes – certains gouvernements de ces pays considèrent que « Noah » est contraire aux enseignements de l’Islam – Avec une réputation aussi sulfureuse, il y avait fort à croire que « Noah » était une provocation de plus de la part de Darren Aronofsky, mais en y regardant d’un peu plus près, les spectateurs de bonne foi se rendront vite compte que tout ceci tire plus de l’exagération généralisée et ultra passionnée que d’un constat réellement objectif – passion évidente lorsqu’il s’agit d’un thème religieux transposé au cinéma, on se souvient par exemple de controverses similaires à la sortie du « The Passion of the Christ » de Mel Gibson en 2004, qui fut largement accusé d’antisémitisme par une partie des critiques liées à la communauté juive américaine, sans oublier les polémiques intenses et les actes de violence lors de la sortie du « The Last Temptation of Christ » de Martin Scorsese en 1988 – « Noah » raconte ainsi l’histoire d’un monde en perdition, livré au chaos et à la violence généralisée. Parce que les hommes ont ravagé la Terre et vivent quasiment comme des bêtes primitives (ils volent, assassinent leurs semblables et massacrent les animaux), Dieu – surnommé « Le Créateur » tout le long du film, alors que, curieusement, le mot « Dieu » n’est jamais prononcé une seule fois – décide de détruire le monde, et l’annonce à Noé (Russell Crowe) par le biais de visions prophétiques. Après avoir rendu visite à son grand-père Mathusalem (Anthony Hopkins), Noé comprend alors que le Créateur l’a chargé d’une importante mission : construire une immense arche pour sauver sa famille et les animaux de l’Apocalypse annoncé, qui prendra la forme d’un gigantesque déluge détruisant le monde.
Pour construire l’arche, Noé, sa femme Naameh (Jennifer Connelly), leurs fils Shem (Douglas Booth), Ham (Logan Lerman), Japheth (Leo McHugh Carroll) et leur fille adoptive Ila (Emma Watson) sont aidés des Gardiens, des anges déchus – les Nephilim - condamnés à prendre l’apparence de géants de pierre parce qu’ils ont osé aider les humains bannis autrefois du Jardin d’Eden. Mais alors qu’il observe la déchéance humaine sous le règne du cupide Toubal-Caïn (Ray Winstone), descendant de Cain et porteur de la malédiction des hommes, Noé croit que l’humanité est condamnée à jamais pour les générations suivantes et se met en tête de tuer le futur enfant d’Ila et Shem si c’est un garçon, convaincu que c’est la volonté du Créateur. Alors que les animaux sont tous réunis dans l’arche, le périple de Noé et ses proches débute enfin, chacun affrontant sa destinée. « Noah » reprend ainsi les grandes lignes du récit d’origine et extrapole largement (il faut se souvenir que le texte d’origine est relativement court !) en ajoutant une dimension fantastique et hollywoodienne à cette aventure biblique. Le problème, c’est que l’on a parfois l’impression de voir un melting-pot de plusieurs blockbusters réunis en un seul : les Nephilim/Gardiens géants ressemblent à des robots « Transformers », les scènes de bataille rappellent « Lord of the Rings » (la confrontation avec les Gardiens rappelle clairement une scène similaire avec les arbres géants dans « The Two Towers ») avec un zest de « 300 », et dans tout cela, l’aspect biblique et religieux n’est finalement qu’un prétexte à un déluge d’effets spéciaux et d’images numériques ahurissantes mais un peu too much par moment. Darren Aronofsky reste néanmoins fidèle à son goût pour les expérimentations visuelles, avec en particulier, une scène de flashback sur la création du monde totalement stupéfiante ! Néanmoins, « Noah » ne se limite pas qu’à se photographie spectaculaire mais apporte aussi une réflexion intéressante sur la foi, le rapport à la religion, les limites de l’être humain et le fanatisme religieux (Noé agit-il selon la volonté de Dieu ou selon sa propre volonté ?). Le problème, c’est qu’Aronofsky veut mélanger trop de chose et manger à tous les râteliers, plaire autant aux studios hollywoodiens qu’aux fans de péplums bibliques et aux religieux hardcore, si bien que le résultat est un peu trop bancal pour satisfaire pleinement. Quand au casting du film, il reste assez exceptionnel et confirme notamment l’ascension hollywoodienne d’Emma Watson, sortie de la saga « Harry Potter » et désormais destinée à des rôles plus sérieux et matures. Relecture audacieuse, moderne et iconoclaste d’un récit célèbre de la Bible, « Noah » est donc avant tout un défi artistique relevé haut la main par Darren Aronofsky, qui, malgré de nombreux défauts, livre un blockbuster impressionnant et visuellement splendide, abordant les névroses humaines, les thèmes habituels du bien et du mal et les excès de l’intégrisme religieux (Noé est finalement présenté comme un dangereux extrémiste convaincu du bien-fondé de ses actions), sans oublier un message écolo/pro végétalien ultra manichéen – les humains sont mauvais, les animaux sont purs et innocents. D’ailleurs, dans le film, les méchants mangent de la viande animale ! – Malgré des longueurs fastidieuses, des personnages bâclés (Mathusalem qui cherche des baies en plein déluge apocalyptique !!!), des clichés hollywoodiens en veux-tu en voilà et des dialogues pompeux, « Noah » est un solide péplum bilico-fantastique d’heroic-fantasy visuellement stupéfiant et résolument moderne, mais bien en dessous des précédentes réussites du cinéaste. Le compositeur britannique Clint Mansell retrouve à nouveau Darren Aronofsky après une collaboration fructueuse sur « Pi » (1998), « Requiem for a Dream » (2000), « The Fountain » (2006), « The Wrestler » (2008) et « Black Swan » (2010). Pour sa sixième collaboration à un film d’Aronofsky, Clint Mansell signe pour « Noah » une partition orchestrale essentiellement dominée par l’interprétation solide du prestigieux Kronos Quartet accompagnant l’orchestre symphonique de Londres – dirigé et arrangé par Matt Dunkley, plus connu pour être le complice habituel de Craig Armstrong - la chorale de, et quelques instruments solistes supplémentaires (le violoncelle de Vanessa Freebairn-Smith, les guitaristes Mike Fonte et Mark Stewart, la guitare viole de Nigel Wiesehan, une guitare basse, un clavier Moog, un piano préparé et un clavier électrique Mellotron). A l’instar du film, le travail de Clint Mansell s’avère résolument moderne, à des années lumières des travaux d’Alfred Newman ou de Miklos Rozsa sur les péplums bibliques des années 50/60. Bien au contraire, Mansell élabore une partition articulée autour d’un thème principal développé tout au long du film, que l’on peut entendre dès 0:56 dans l’ouverture du film (« In The Beginning, There Was Nothing »). Mansell a réussit à apporter une vraie personnalité à ce thème aisément reconnaissable, grâce à ses couleurs instrumentales/synthétiques particulières et récurrentes dans le score, le thème étant régulièrement associé aux sons si particuliers du clavier Mellotron, évoquant la quête spirituelle et humaine de Noé et ses proches dans un univers décadent. Le roi Toubal-Cain possède à son tour son propre thème, un motif de deux notes (une tierce mineure descendante), souvent joué en formule d’accompagnement comme c’est le cas tout le long de « I Will Destroy Them », dans « The Wickedness of Man » et aussi dans « The Judgement of Man ». Moins facilement perceptible que le thème principal, le motif de 2 notes de Toubal-Caïn est pourtant très présent durant une bonne partie du film, évoquant aussi bien le roi que les humains décadents et la violence de leurs actes. Enfin, le Créateur/Dieu a droit à son propre thème, une identité musicale plus perceptible dans l’optimiste « The Spirit of the Creator Moved Upon the Face of the Waters », lui aussi présenté sur une tonalité de Ré mais qui alterne cette fois-ci entre le mineur et le majeur. Le motif du Créateur est constitué d’une série de 3 notes descendantes et répétitives, entendues pour la première fois aux cordes à 0:28, aussi présent dans « The Flood Waters Were Upon the World ». Un premier élément caractéristique est à noter ici. L’essentiel de la structure harmonique du score de « Noah » repose avant tout sur des longues pédales de Ré (mineur), une tonalité récurrente dans la quasi totalité des morceaux du score, à quelques exceptions près. Cet effet est assez particulier et contribue à renforcer le ton sombre, mystique et immersif de la musique de « Noah », et rappelle par la même occasion l’un des fameux tics du compositeur Hans Zimmer, qui procède de façon similaire dans certaines de ses partitions (c’est notamment le cas dans « Inception » ou « The Dark Knight »). Certes, on pourra toujours reprocher le caractère assez pauvre des harmonies, qui se limitent bien souvent à de simples pédales sans grande imagination, mais le résultat est pourtant particulier et fort intéressant à l’écran comme sur l’album, qui constitue une expérience d’écoute assez particulière – bien que sans grande originalité majeure – La musique alterne entre des éléments avant-gardistes comme les dissonances de cordes stridentes évoquant la violence humaine dans « The World Was Filled With Violence », un quatuor à cordes aux sonorités plus classiques et quasi baroques comme dans « The End of All Flesh Is Before Me » et des passages plus synthétiques et modernes comme dans « A Sweet Savor », sans oublier des percussions plus ethniques/tribales dans « Every Creeping Thing That Creeps ». Si le thème principal est omniprésent tout au long du film, varié selon plusieurs formules instrumentales (cf. une reprise intense du thème aux cordes à la fin de « Every Creeping Thing That Creeps »), les identités musicales de Toubal-Caïn et de Dieu sont très clairement représentées, avec des choix d’orchestration toujours assez judicieux. « I Will Destroy Them » est assez emblématique des choix opérés par Clint Mansell sur la musique de « Noah » : guitares, percussions, orchestre, synthés/claviers, dissonances, allusions thématiques (ici, le motif de 2 notes de Toubal-Caïn), le tout créant une ambiance sombre et extrêmement dense assez particulière. Plus intéressant, « Flesh of My Flesh » utilise le quatuor à cordes dans une atmosphère quasi baroque alors que les trémolos de guitares et le Mellotron viennent apporter une couleur moderne très spéciale à la musique, mélangeant le moderne et l’ancien pour retranscrire la dimension universelle et intemporelle du récit de l’Arche de Noé. Idem dans « In Sorrow Thou Shalt Bring Forth Children », qui utilise le Kronos Quartet de manière contemplative et doucement mélancolique. Le point fort de la partition est à coup sûr le morceau « Make Thee An Ark », morceau accompagnant la séquence de la construction de l’arche. Souvent considéré comme l’un des sommets dans la carrière de Clint Mansell, « Make Thee An Ark » est un formidable témoignage musical du savoir-faire du compositeur, qui développe en quelques minutes une atmosphère grandiose et prenante à travers un grand crescendo dramatique autour du thème principal (au Mellotron), et l’utilisation de choeurs puissants avec l’orchestre et les percussions durant les dernières secondes du morceau. La dernière partie du film alterne alors entre moments sombres, dramatiques et brutaux (le motif de Toubal-Caïn durant l’affrontement final dans « What Is This That Thou Hast Done ? »), passages plus mystiques comme « The Fear and the Dread of You » et morceaux contemplatifs et apaisés pour les derniers instants du récit dans « And He Remembered Noah » et surtout « Day and Night Shall Not Cease ». A noter que le score se termine avec la traditionnelle chanson originale d’usage, brillamment interprétée par la voix grave particulière de Patti Smith dans « Mercy Is » pour le générique de fin, accompagnée par le Kronos Quartet. La partition musicale de « Noah » est donc une nouvelle réussite dans la collaboration Clint Mansell/Darren Aronofsky, dans la continuité de « The Fountain », même si le score n’a rien du grand chef-d’oeuvre annoncé. Mansell assume totalement ses choix instrumentaux et musicaux si particuliers sur le film, créant une ambiance singulière et radicale, sans apporter d’originalité particulière à l’ensemble. Entre classicisme et modernité, la musique de « Noah » crée une atmosphère dense et plutôt libre sur les images, permettant aux notes de la partition de se développer longuement sur d’incessantes pédales de Ré, avec quelques thèmes très présents et parfaitement cohérents sur les images. Les fans de la collaboration Clint Mansell/Darren Aronofsky devraient donc se procurer rapidement le score de « Noah », qui reste une réussite incontestable, même si cette bande originale n’a rien de réellement transcendant ou d’extrêmement mémorable pour pouvoir prétendre hanter durablement l’esprit de l’auditeur/spectateur ! ---Quentin Billard |