1-Main Title 1.28
2-Johnny On The Spot 1.47
3-Johnny Enters Bar 1.34
4-Marv Vs. Frat Boys 3.35
5-Nancy's Kiss of Death 1.52
6-Joey 2.37
7-Kadie's 1.18
8-Ava 2.51
9-Dwight Spies On Ava 3.24
10-Ava In Bed 1.34
11-Uh Huh 1.11*
12-Marv & Dwight 2.20
13-Ava Seduces Mort 1.47
14-Mort's Descent 2.01
15-Sin City Waltz 1.39
16-The End of Ava 1.43
17-Dr. Kroenig 2.06
18-Johnny Down & Out 2.17
19-I'm Lonely 1.33**
20-Nancy Visits Grave 1.31
21-Skin City 2.38***
22-Marv & Nancy Ride 2.01
23-Marv Attacks 1.03+
24-Roark 2.25
25-End Titles 2.12

*Interprété par Marci Madison
Ecrit par Robert Rodriguez
**Ecrit et interprété par
Rebecca Rodriguez
***Interprété par Steven Tyler
Ecrit par Robert Rodriguez
+Composé par Robert Rodriguez
et George Oldzley.

Musique  composée par:

Robert Rodriguez/Carl Thiel

Editeur:

Morada Music

Produit par:
Robert Rodriguez, Carl Thiel
Mixage musique:
Carl Thiel

(c) 2014 Maddartico, Ltd. All rights reserved.

Note: ***
SIN CITY :
A DAME TO KILL FOR
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Robert Rodriguez/Carl Thiel
En 2005, Robert Rodriguez et Frank Miller livraient une adaptation audacieuse de la série de comics books de Miller, jugés « inadaptables » au cinéma par l’auteur lui-même avant de se laisser finalement convaincre par la ténacité et la passion de Rodriguez pour l’oeuvre de Frank Miller. Le film est porté par son noir et blanc esthétisant et son ambiance visuelle particulière retranscrivant l’univers original de la bande dessinée, sans oublier son atmosphère de polar/film noir des années 50, sa bande son jazzy et sa violence exacerbée. Fort du succès de ce premier épisode, Rodriguez et Miller rempilent pour un deuxième opus sorti en 2014. A l’origine de ce délai assez long (près de 9 ans séparent les deux films, ce qui est rare de nos jours pour une suite d’un film hollywoodien !), il y a des délais de production interminables des frères Weinstein, des remaniements de script et des changements au niveau du casting (par exemple, Michael Clarke Duncan, décédé en 2012, est finalement remplacé dans la suite par Dennis Haysbert). Niveau scénario, « Sin City : A Dame to Kill For » est adapté des récits des tomes « J’ai tué pour elle » et « Des filles et des flingues » de Frank Miller. L’histoire, qui se déroule peu de temps après les événements violents du premier film, met en scène un groupe de personnages perdus dans la ville de Basin City alias Sin City, la ville du vice. Johnny (Joseph Gordon-Levitt) arrive en ville pour y trouver la richesse en gagnant de grosses sommes d’argent au machines à sous ou aux tables de poker, jusqu’au jour où il décide d’affronter aux cartes le sénateur véreux Roark (Powers Boothe). Battu par le jeune homme, le sénateur, humilié, le blesse gravement en lui tirant une balle dans la jambe et en lui brisant les doigts après lui avoir pris tout son argent. Johnny doit dorénavant se faire soigner et retrouver la serveuse du bar qui lui porte chance, bien décidé à humilier à nouveau Roark aux cartes, une bonne fois pour toute. Au même moment, ailleurs dans la ville, Ava Lord (Eva Green), une belle et dangereuse séductrice, manipule son amant Dwight McCarthy (Josh Brolin) pour l’inciter à tuer son époux Damien Lord (Marton Csokas) qui la maltraite régulièrement. Peu de temps après, Dwight découvre qu’Ava l’a trompé et qu’elle lui a menti au sujet de son mari afin de se débarrasser de lui pour hériter de sa fortune. Comprenant qu’il est tombé dans le piège de la dangereuse séductrice, Dwight va tout faire pour se venger de la cruelle Ava et de son dangereux homme de main, Manute (Dennis Haysbert). Enfin, le film se termine avec l’histoire de Nancy Callahan (Jessica Alba), quatre ans après les événements du premier film. Déprimée et obsédée par la mort de John Hartigan (Bruce Willis), Nancy cherche à se venger du sénateur Roark qu’elle juge responsable du décès d’Hartigan. Elle décide de faire appel à Marv (Mickey Rourke) pour accomplir sa quête de vengeance.

Entièrement tourné en 3D, « Sin City : A Dame to Kill For » n’offre finalement pas grand chose de nouveau par rapport au film de 2005. Rodriguez et Miller continuent de développer leur esthétique visuelle et cinématographique si particulière, avec une réalisation assez ahurissante et d’une inventivité constante, notamment dans les jeux d’ombre chinoise, l’utilisation partielle des couleurs et les différents tons de noir et blanc. Hommage évident aux grands films noirs et aux polars d’antan, « Sin City 2 » reprend à la fois les qualités et les défauts du premier film, alors que ni Rodriguez ni Miller ne cherchent à se dépasser en proposant quelque chose de plus ambitieux ou de plus abouti. Entre violence sanguinaire, sensualité étourdissante (Eva Green joue une fois de plus les séductrices envoûtantes et utilise son corps de rêve comme peu d’actrice le font de nos jours à Hollywood !) et humour noir, le film n’a pourtant rien de bien original dans le fond, surtout qu’il se contente bien trop souvent de reprendre les recettes du premier opus sans jamais réussir à les transcender (comme par exemple l’utilisation systématique de la narration en voix off). Faute de renouvellement, le film, qui débute de façon admirable, semble s’épuiser sur la longueur, ne tenant pas complètement toutes ses promesses. Certes, le mélange entre cinéma et BD opère pleinement et le casting ahurissant du film reste l’un des points forts de « Sin City 2 », mais force est de constater que les différentes histoires racontées dans le film manquent cruellement de consistance, et tournent un peu trop autour de deux méchants-clé : la séduisante et sexy Eva Green et le politicien véreux et cruel brillamment campé par le vétéran Powers Boothe, spécialiste des rôles de bad guy dans les films d’action des années 80/90. A part cela, rien de bien particulier, si ce n’est quelques scènes d’action admirables et visuellement très belles et de l’ultra violence typique du tandem Rodriguez/Miller. Hélas, à l’inverse du premier film de 2005, « Sin City : A Dame to Kill For » ne trouvera pas son public à sa sortie en salles en 2014, se soldant par un échec commercial cuisant, ne parvenant même pas à rembourser la moitié du budget initial du film !

La musique de « Sin City 2 » permet à Robert Rodriguez de signer à nouveau la musique de son propre film comme il l’avait déjà fait sur « Spy Kids 2 », « Once Upon a Time in Mexico », « Spy Kids 3-D », « The Adventures of Sharkboy and Lavagirl in 3-D », « Planet Terror » ou bien encore « Sin City » premier du nom. Comme pour ses précédents film, Rodriguez se voit adjoindre sur « Sin City 2 » les services de son complice Carl Thiel avec lequel il avait déjà collaboré sur le dernier « Spy Kids » mais aussi sur « Machete Kills » (Graeme Revell et John Debney n’ayant pas rempilés sur cette suite !). A la première écoute de la musique dans le film, pas de surprise particulière : Rodriguez et Thiel savent où ils vont en reprenant l’ambiance et l’esthétique musicale du premier « Sin City », le tout écrit en seulement six semaines. Le score reprend donc les sonorités musicales du premier film, à commencer par le mélange entre orchestre, synthétiseurs et saxophone jazzy pour l’aspect polar/film noir du film. Rodriguez et Thiel reprennent un concept déjà instauré dans le score du premier « Sin City » : trois mélodies bien distinctes pour les trois histoires racontées dans le premier film. Le duo a donc choisi de reprendre des thèmes du premier score tout en introduisant de nouvelles idées pour les nouveaux personnages (Ava, Johnny, Joey), avec un accent sur les ambiances sonores et les passages atmosphériques. Parmi les nouveaux thèmes, il y a celui d’Ava, motif constitué d’une série de notes descendantes qui fait office ici de nouveau thème principal, puisqu’il est introduit dès le générique de début du film dans « Main Title ». Rodriguez et Thiel introduisent le thème sur un rythme agressif de cordes staccatos avec le fameux saxophone indissociable de l’ambiance musicale de « Sin City », sans oublier l’emploi des cuivres, des percussions et du piano dans le grave. Le duo met aussi l’accent ici sur des dissonances plus agressives des cordes évoquant clairement l’aspect polar et violent du film.

Situé au coeur même du score de « Sin City 2 », le thème d’Ava évoque clairement l’idée de la manipulation sournoise et de la séduction du personnage d’Eva Green. On le retrouve notamment joué par des cordes langoureuses et sensuelles dans « Ava », où l’on devine toute l’ambiguïté de la femme fatale symbolisant la mort et la désolation. Le thème est aussi repris dans « Dwight Spies on Ava », « Ava in Bed », « Ava Seduces Mort » et « The End of Ava », s’imposant par son caractère obsessionnel et envoûtant très réussi dans le film. Johnny a droit aussi à son propre thème, introduit dans le jazzy et fun « Johnny On The Spot » pour l’arrivée du personnage de Joseph Gordon-Levitt au début du film. Rodriguez et Thiel proposent un pur morceau de jazz dans la tradition du genre, dominé par le saxophone et la section rythmique avec l’instrument clé de Johnny, la clarinette. On notera ici aussi l’emploi de dissonances apportant une tension constante aux images et au reste du film. Le duo n’hésite d’ailleurs pas à verser dans les techniques instrumentales avant-gardistes lorsque l’occasion s’en présente, accentuant l’aspect thriller/suspense violent du film. Enfin, le thème de Johnny, peu perceptible à la première écoute, se reconnaît à ses 4 notes descendantes entendues dès le début de « Johnny On The Spot » au saxophone, et parfois à la clarinette. Le thème est repris plus intensément aux cordes dans « Johnny Enters Bar » avec un rythme rock/électro plus présent et un riff entêtant de basse/clavier repris du « Main Title ». Le morceau évoque clairement la détermination et le caractère tête brûlée de Johnny, bien décidé à battre Roark au poker et à faire fortune à Sin City (cf. le sombre « Johnny Down & Out »). On appréciera ici l’approche musicale plus moderne du morceau, que ce soit dans l’utilisation des loops électro ou du riff de basse. Marv (Mickey Rourke) a droit lui aussi à son propre thème, un motif sombre de 3 notes introduit dans l’agressif « Marv vs Frat Boys » (aux cordes et au saxophone à 0:17), repris ensuite dans « Marv & Dwight », « Marv & Nancy Ride » et le brutal « Marv Attacks ».

Joey (Ray Liotta) se voit lui aussi attribuer un thème jazzy essentiellement dominé par le saxophone dans la pièce « Joey » où le duo n’hésite pas à avoir recours à quelques brefs rythmes de jazz latino, tandis que les dissonances glauques reprennent ici le dessus dans le travail des clusters de cordes, du piano dans le grave ou des cuivres oppressants. L’aspect jazz revient assez fréquemment tout au long du film, comme le confirme « Dr. Kroenig » qui évoque parfois Henry Mancini ou certaines bandes son jazz des polars des années 60/70 (on pense aussi à Elmer Bernstein). La belle strip-teaseuse Nancy (Jessica Alba) possède à son tour son propre thème, une mélodie aux notes descendantes pas vraiment mémorables à la première écoute, évoquant la détresse et l’obsession de vengeance de la jeune femme. Son thème apparaît dans « Nancy’s Kiss of Death », « Nancy Visits Grave » et « Marv & Nancy Ride ». Le riff du thème initial du « Main Title » réapparaît dans un arrangement clairement électro dans « Kadie’s » sur fond de guitare électrique saturée et de vocalises féminines sensuelles. L’action s’impose dans le brutal « Marv & Dwight » ou « Mort’s Descent » ou la scène finale de la fusillade dans « Marv Attacks » débouchant sur la noirceur macabre du sinistre « Roark » pour la confrontation finale. A noter que, pour des questions de délai et d’esthétique, une partie de la musique fait appel à des samples d’orchestre plutôt bien travaillés mais qui paraissent parfois un brin artificiels dans certains passages, comme c’est notamment le cas dans « Sin City Waltz » qui résonne comme une démo MIDI (d’autant que le côté sec du mixage de la musique trahit l’aspect synthétique de l’ensemble !).

Au final, la partition de « Sin City : A Dame to Kill For » remplit parfaitement son rôle dans le film et contribue à l’esthétique noire et blanc particulière du film, en apportant une dimension sonore plus atmosphérique, sombre et dissonante, basée sur une pléiade de thèmes malheureusement sans grande personnalité (on risque fort de ne pas les remarquer à la première écoute !) pour les principaux protagonistes du récit. Ce système de leitmotive a déjà fait ses preuves à plus d’une reprise au cinéma, et ici, il fonctionne parfaitement à l’écran. Narrativement, il y a donc une vraie réflexion sur les personnages et la symbolique de leurs thèmes et de leurs instruments (clarinette pour Johnny, saxophone pour Marv, cordes pour Ava, etc.). Le problème, c’est que Robert Rodriguez et Carl Thiel semblent avoir manqué de temps et ont du aller à l’essentiel. Du coup, l’ensemble reste assez monotone et répétitif, et les nouveaux thèmes ne possèdent pas suffisamment de personnalité pour s’imposer d’eux-mêmes à l’écoute dans le film comme sur l’album, d’autant qu’ils se ressemblent parfois étrangement (ils sont constitués pour la plupart de notes descendantes !) à tel point que l’on finit parfois par les confondre. Moins aboutie que la musique du premier « Sin City », cette nouvelle partition dévoile les efforts du tandem Rodriguez/Thiel mais montre aussi les limites techniques des deux compositeurs, qui livrent un travail bien moins satisfaisant que celui de John Debney et Graeme Revell sur le premier film, où chacun avait un rôle bien défini et plus personnel dans le fond comme la forme (sans être d’une folle originalité pour autant !). Décidément, à l’instar du film, ce « Sin City 2 » ne réussit vraiment pas à convaincre pleinement, avec un potentiel qui reste inachevé, et un travail beaucoup trop inégal dans l’ensemble.




---Quentin Billard