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1-Universal Emblem 0.28
2-Passing the Truck 2.12 3-Truck and Car Encounter 1.33 4-Studying Drivers 2.24 5-Mann's Thoughts 3.37 6-Lone Driver Eating 2.01 7-Truck Leaving 1.17 8-Truck Stops 3.06 9-Hide and Seek 1.27 10-Truck Waiting #1 2.38 11-Truck Waiting #5 1.52 12-Truck Racing Car 4.47 13-Final Duel 4.50 14-The Duel (End Title) 2.30 The Extras Radio Source Music (Billy Goldenberg) 15-Instrumental No.1 3.40 16-Instrumental No.4 2.15 17-Instrumental No.2 3.33 18-Instrumental No.3 2.33 19-The Duel (Alternate End Title) 1.02 Musique composée par: Billy Goldenberg Editeur: Intrada Special Collection vol. 305 Musique conduite par: Billy Goldenberg CD produit par: Douglass Fake Producteur exécutif CD: Roger Feigelson Direction de la musique pour Universal Pictures: Mike Knobloch Direction business musical pour Universal Pictures: Philip M.Cohen Supervision musique: Hal Mooney CD mixé et séquencé par: Douglass Fake Manager production: Regina Fake Assistant éditorial: Frank K.DeWaldDesigner graphique: Kay Marshall American Federation of Musicians. Artwork and pictures (c) 1971/2015 Universal Studios. All rights reserved. Note: ***1/2 |
DUEL
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ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
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Music composed by Billy Goldenberg
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Bien avant de connaître un grand succès et de devenir l’un des cinéastes les plus influents du cinéma américain des années 70/80/90 et même 2000, Steven Spielberg débuta fort avec son premier long-métrage destiné à l’origine pour la télévision, « Duel ». Diffusé dès 1971 sur la chaîne ABC, le film de Spielberg, inspiré d’une nouvelle de l’écrivain américain Richard Matheson (qui s’occupe aussi du scénario du film), met en scène Dennis Weaver dans la peau de David Mann, un employé de commerce et représentant en informatique qui se trouve à bord de son véhicule, une Plymouth Valiant rouge sur une autoroute à deux voies qui traverse une bonne partie du désert de la Californie. Alors qu’il roule pour rentrer chez lui et qu’il lui reste encore pas mal d’heures de route, David croise à plusieurs reprises un camion-citerne de type Peterbilt 281 de 1955, qu’il double à plusieurs reprises. Furieux d’avoir été doublé, le mystérieux conducteur du camion décide alors de prendre en chasse la voiture de David. Débute alors une redoutable course poursuite pour le malheureux employé de commerce qui ne faisait que se rendre chez lui et va vivre un véritable calvaire, poursuivi sans relâche par le camionneur fou qui va le terroriser et le pousser jusque dans ses derniers retranchements. Sous ses apparences de thriller hitchcockien et de road movie américain, « Duel » est une formidable réussite pour le jeune Spielberg, qui prouvait déjà dès 1971 qu’il était un metteur en scène de génie destiné à un grand avenir dans le cinéma. Tourné en 12 jours sur les routes du nord-est de Los Angeles et dans une région située entre Santa Clarita et Palmdale en Californie, le film connut un vif succès dès sa diffusion à la télévision et remporta le Grand prix international du Festival d’Avoriaz, permettant à Spielberg d’obtenir un financement conséquent afin de tourner des scènes supplémentaires et de rallonger la durée du film pour une diffusion au cinéma un an plus tard par le biais d’Universal.
Les vraies stars du film, ce sont avant tout les deux véhicules qui se pourchassent et surtout le terrifiant camion-citerne, véritable monstre de la route que rien ne semble pouvoir arrêter. La terreur est largement suggérée ici dans le sens où l’on ne voit jamais le visage du camionneur, hormis ses bottes ou son bras à quelques reprises. Face à cette menace sans visage, Dennis Weaver campe un conducteur terrifié en proie à la paranoïa – scène superbe pleine de tension où David est assis dans le restaurant et observe les camionneurs, persuadé que l’un d’entre eux est son mystérieux agresseur – Comme son titre l’indique, le film est avant tout un duel implacable entre les deux hommes, aussi bien physique (la course poursuite, la vitesse effrénée sur les routes pour tenter de semer l’autre) que psychologique (le camion devient un symbole phallique et viril où l’homme cherche à prouver sa supériorité face en écrasant l’autre). Le choix de situer l’action du film sur des routes du désert californien prend alors tout son sens, le duel entre les deux conducteurs évoquant ici l’univers des westerns traditionnels américains et les grandes étendues désertiques du Far West. Et pour mieux renforcer la tension dramatique du récit, Spielberg ajoute une voix off qui traduit les pensées de David Mann dans le film, comme pour la scène du restaurant ou au détour de quelques séquences durant lesquelles l’homme se lamente sur le coup du sort et la curiosité de la vie, alors qu’une existence ordinaire en apparence peut basculer du jour au lendemain dans le cauchemar pur sans raison apparente. Techniquement impressionnant, filmé avec des caméras embarqués au véhicule pour un rendu visuel plus immersif et spectaculaire, « Duel » est un coup de génie du jeune Steven Spielberg, qui, suite au succès de son film à la télévision et au cinéma, obtiendra suffisamment de fonds pour tourner son film suivant pour le cinéma - un autre road movie – « Sugarland Express », suivi un an plus tard d’un premier classique, « Jaws ». « Duel » est aussi remarquable par la qualité de la partition orchestrale du compositeur new-yorkais Billy Goldenberg, connu pour ses musiques pour la série TV « Columbo » dans les années 70 et ses nombreux travaux pour la télévision américaine. Spielberg avait déjà travaillé avec Goldenberg sur le pilote de la série TV « Night Gallery » de 1969, l’épisode de la série TV « The Name of the Game » (« L.A. 2017 ») en 1971 et l’épisode « Murder by the Book » de la série « Columbo » en 1971. Le choix de Billy Goldenberg sur « Duel » était donc on ne peut plus évident, d’autant que le compositeur avait déjà l’habitude de travailler pour la télévision avec des budgets modestes et des délais très courts. La composition musicale de « Duel » représenta d’ailleurs un véritable challenge puisque Goldenberg n’avait que quelques jours seulement pour écrire la musique et n’avait même pas la possibilité de travailler sur un montage définitif du film. Pour gagner du temps et être le plus créatif possible, Spielberg invita Goldenberg à visiter les lieux du tournage sur les routes désertiques et à conduire l’immense camion-citerne afin de ressentir le plus de sensations possibles et d’entendre toutes les sonorités que l’on perçoit au volant de ce véritable monstre de la route. En se basant ainsi sur son propre ressenti et ses propres sensations au cours de ces quelques jours passés sur le tournage, Billy Goldenberg s’attela de toute urgence à l’ouvrage, composant en quelques jours seulement une partition écrite pour un petit ensemble de 39 musiciens incluant un groupe de cordes, une harpe, des claviers, des guitares et des percussions, mais sans vents ni cuivres. Parmi les percussionnistes se trouvait l’incontournable Emil Richards qui interpréta une partie des percussions exotiques étranges entendues dans la bande son du film, tandis que le claviériste Paul Beaver interpréta quelques parties de synthétiseur Moog pour les besoins de la partition. Ecrit dans une veine résolument non thématique mais totalement expérimentale et avant-gardiste, la musique de « Duel » s’apprécie surtout pour la radicalité de son propos musical sans concession, typique des expérimentations musicales des années 70. A noter que la musique n’apparaît dans le film qu’au bout de 18 minutes (hormis les étranges sons de raclements de gong de « Universal Emblem »), et lorsque le score de Billy Goldenberg se fait entendre, c’est pour mieux nous plonger dans une atmosphère très particulière et intense dans « Passing the Truck ». Ici, Goldenberg met en avant l’un des éléments majeurs du score de « Duel », le waterphone, fameux instrument circulaire métallique rempli d’eau, et dans lequel se trouve au centre une longue colonne verticale qui permet de tenir l’instrument, avec plusieurs tiges de différentes longueurs qui, une fois frottées de différentes manières, peuvent créer des sons assez surréalistes et particuliers. Goldenberg élabore ici une série de textures sonores atypiques, en mélangeant des gammes ascendantes/descendantes du waterphone sur fond de glissandi de timbales, d’effets aléatoires dissonants et stridents de cordes, de sons de gong, de guitare électrique et de quelques nappes sonores du synthétiseur. « Truck and Car Encounter » est plus représentatif de l’aspect ‘action’ du score de « Duel », évoquant la terreur suscitée par le camionneur fou à l’aide de percussions exotiques raclées de manière répétitive, avec des cordes survoltées, des ponctuations de piano, de guitare électrique, de synthétiseur et de harpe. On notera le jeu staccato et brutal des cordes qui rappellerait presque le « Psycho » de Bernard Herrmann, morceau utilisé à plusieurs reprises dans le film. Ici aussi, la musique reste entièrement atonale, riche et inventive dans son maniement des sons, malgré un mixage un peu discutable (les instruments sont un peu trop excentrés dans la stéréo, surtout les cordes !). La terreur et le suspense sont donc les principaux mots d’ordre de Billy Goldenberg sur « Duel », comme le suggère la scène du restaurant dans « Studying Drivers ». Ici, le compositeur développe une ambiance sombre et latente à l’aide de cordes dissonantes, de notes de célesta mystérieuses et de harpe évoquant les pensées intérieures d’un David Mann terrifié et paranoïaque. Cette atmosphère psychologique tendue se prolonge dans « Mann’s Thoughts » où les arpèges rapides de célesta/harpe et les cordes dissonantes prolongent l’atmosphère paranoïaque de la scène du restaurant routier avec l’utilisation particulière d’un orgue électrique qui apporte une couleur assez surréaliste au morceau, tandis que Goldenberg a la bonne idée de faire jouer ici les violons en harmoniques aigus glaçants. Enfin, la scène du restaurant se termine avec « Lone Driver Eating » où le compositeur développe des accords dissonants de cordes qui rappellent curieusement les travaux d’Ennio Morricone sur les gialos italiens de l’époque ou certaines partitions orchestrales du compositeur américain Charles Ives. Dans « Truck Leaving », la traque reprend avec un mélange de cordes menaçantes, d’arpèges rapides de célesta/harpe. « Truck Stops » utilise quand à lui les percussions métalliques de manière inventive (évoquant le camion), avec des cordes dramatiques saisissantes et des effets sonores étranges et aigus du synthétiseur, du waterphone et de l’orgue électrique. « Hide and Seek » reprend quand à lui le matériau sonore de « Truck and Car Encounter », amenant vers le climax du film dans la série des « Truck Waiting », qui développe ici la tension et le suspense pour le final de la course poursuite effrénée entre la voiture et le camion (à noter les effets sonores étranges et inédits du final de « Truck Waiting #1 »). A noter une allusion plus qu’évidente au « Psycho » de Bernard Herrmann dans « Truck Waiting #5 » (influence avouée par le compositeur lui-même). Si le score évacue toute forme thématique, on devine malgré tout un motif récurrent qui se dégage de certains passages du score vers la fin du film. Ce motif menaçant de 4 notes est introduit aux cordes et à la harpe dès 1:30 dans « Lone Driver Eating » (on le devine déjà au tout début de « Mann’s Thoughts ») et reviendra durant la dernière partie du film pour traduire le sentiment de terreur et de paranoïa de David Mann. Le motif revient notamment dans « Truck Waiting #1 » aux cordes à 0:35. Dans « Truck Racing Car », on ressent une véritable folie avec l’emploi aléatoire d’effets sonores chaotiques de la guitare électrique, de percussions métalliques diverses (incluant gong, timbales et percussions africaines), alors que la poursuite s’intensifie alors que le radiateur de la voiture de David est en train de rendre l’âme en pleine montée d’une pente. Le stress du conducteur harassé est largement véhiculé ici par l’utilisation totalement expérimentale, bruyante et anarchique des différentes sonorités qui s’entrechoquent massivement, tout comme le retour des cordes et du waterphone dans la deuxième partie de « Truck Racing Car ». Enfin, la poursuite se conclut dans « Final Duel » alors que David tend un piège au camionneur pour l’inciter à dévaler une pente et tomber dans un canyon. Le rythme s’intensifie ici avec une utilisation quasi hystérique des percussions, des effets rapides de guitare électrique, de piano et des trémolos anarchiques de cordes, renforcées par le retour des cordes acérées et meurtrières à la Herrmann. « The Duel (End Title) » conclut le film sur le plan de la carcasse du camion tout en bas du canyon, avec les effets sonores repris de « Universal Emblem » (et plus particulièrement ces étranges raclements de gong et ces nappes aigues de synthétiseur). Billy Goldenberg signa donc pour « Duel » une partition redoutablement expérimentale et assez atypique pour le film de Steven Spielberg. Bien avant de débuter sa collaboration avec John Williams dès « Sugarland Express » en 1974, Spielberg démontrait grâce à sa collaboration avec Goldenberg son talent pour exiger de ses compositeurs tout le meilleur d’eux-mêmes. Ecrite dans l’urgence et avec peu de moyens, la partition de « Duel » est un délice d’expérimentation musicale avant-gardiste pour tous les auditeurs réceptifs à ce type de travaux, utilisant l’ensemble instrumental avec une conviction et une fermeté évidente. Le score, utilisé avec parcimonie dans le film, apporte une atmosphère de paranoïa, de tension et de terreur assez saisissante à l’écran, notamment grâce à l’absence d’une mélodie fédératrice (hormis un court motif qui revient à 2, 3 reprises vers le milieu du film) et une utilisation originale des percussions, du waterphone, des claviers, de la guitare électrique ou des cordes. Ecrite à une époque où l’inventivité et la création artistique étaient encore de mise à la télévision et au cinéma, la partition de « Duel » est à redécouvrir grâce à la récente édition CD d’Intrada, présentant ce score incontournable mais difficile d’accès de Billy Goldenberg, à réserver néanmoins aux auditeurs chevronnés ! ---Quentin Billard |