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1-Golden Gate 3.34
2-The Women Cries 3.33 3-Between Bridge and Water 1.54 4-Tender Deception 3.34 5-Bopathonix Hex 2.48 6-The Woman Warrior 2.30 7-The Softest Heart 3.45 8-The Moon Watches 1.43 9-Whisper Dance 1.51 10-Kwan Ying 2.47 11-Motel Street Meltdown 1.24 12-Judgement On Mason Street 2.03 13-Write It As Time 0.28 14-Between Bridge and Sky 2.51 Musique composée par: Elliot Goldenthal Editeur: Varèse Sarabande VSD-5470 Producteur exécutif album: Robert Townson Score produit par: Matthias Gohl Orchestrations: Robert Elhai, Elliot Goldenthal Superviseur technique: Richard Martinez Artwork and pictures (c) 1994 American Playhouse Theatrical Films. All rights reserved. Note: ***1/2 |
GOLDEN GATE
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ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
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Music composed by Elliot Goldenthal
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« Golden Gate » est un drame américain de John Madden sorti en 1994 : il s’agit de l’un des premiers films du cinéaste anglais, qui se fera surtout connaître pour son film « Shakespeare in Love » en 1998, qui remportera 7 Oscars en 1999. « Golden Gate » est avant tout l’oeuvre du dramaturge, librettiste d’opéra, scénariste américain et professeur de théâtre d’origine chinoise David Henry Hwang, qui décida de rédiger un script évoquant un drame romantique sur fond de combat contre les inégalités et les injustices envers les chinois durant la période de lutte contre le communisme en Amérique entre les années 50 et 60. Le film débute aux Etats-Unis en 1952. Kevin Walker (Matt Dillon), un jeune agent du FBI de 21 ans, se voit confier la tâche d’arrêter des communistes à tout prix afin de permettre à J. Edgar Hoover de prouver que son bureau à San Francisco fait son travail correctement. Seulement voilà, les preuves sont faibles et les mises en accusation échouent systématiquement devant les juges. Avec son ami l’agent Ron Pirelli (Bruno Kirby), Kevin organise un coup monté afin de piéger Chen Jung Song (Tzi Ma), un chinois travaillant dans une blanchisserie et qui est soupçonné d’envoyer illégalement de l’argent à sa famille en Chine. Le FBI atteint finalement son objectif et Song se retrouve emprisonné pendant une dizaine d’années. A sa sortie en 1962, l’homme ne parvient pas à reprendre sa vie en main, rejeté par sa propre communauté et incapable de retrouver du travail. Comprenant que sa réputation est brisée à jamais, Song décide de se suicider en se jetant du pont du Golden Gate, et ce sous les yeux de Kevin. Aux funérailles, l’agent du FBI fait la connaissance de Marilyn (Joan Chen), la séduisante fille de Chen Jung Song. Cette dernière vit alors une romance idyllique avec Kevin jusqu’au jour où elle découvre un vieil article de presse dans un journal et comprend que Walker est l’homme responsable de ce qui est arrivé à son père. Bien décidée à venger Chen Jung Song, Marilyn dévaste tout chez Kevin et écrit son nom en rouge un peu partout sur les murs de sa demeure. Six ans plus tard, Walker est envoyé dans une université pour enquêter sur les activités subversives de Bradley Ichiyasu (Stan Egi), un jeune étudiant américano-japonais qui milite avec Marilyn pour que le dossier de son défunt père soit rouvert, que son nom soit réhabilité et que toute la vérité sur les mensonges du FBI soit enfin révélée au grand jour.
« Golden Gate » prend donc l’apparence d’un drame romantique dans la plus pure tradition du genre, évoquant une romance impossible entre deux êtres opposés par une tragédie survenue quelques années auparavant. Le film aborde le thème du dilemme entre la loi et la justice, les stéréotypes raciaux, la chasse aux sorcières dans l’Amérique des années 50/60 (en plein contexte de la guerre froide), tout en abordant avec sérieux l’univers et les coutumes de la culture chinoise aux Etats-Unis, représentée symboliquement ici par la jolie Joan Chen, visiblement à l’aise dans son rôle. Matt Dillon paraît quand à lui plus terne et moins concerné, tout comme Bruno Kiry qui semble en faire des tonnes sans grande conviction. Le problème du film vient surtout du script de David Henry Hwang, qui semble très clairement inspiré du théâtre mais paraît peu approprié pour une adaptation sur grand écran. John Madden a bien du mal à valoriser toutes les idées d’Hwang, et finit par accoucher d’une réalisation molle et impersonnelle bourrée de clichés (la voiture des hippies durant la fin des années 60, la scène de bal des années 50 à grand renfort de swing/jazz, etc.). Fait curieux : « Golden Gate » finit même par prendre une tournure quasiment surréaliste/fantastique lorsque l’on comprend qu’après son suicide, l’esprit de Song s’est réincarné dans le corps de Kevin Walker, un fait largement confirmé par l’acte final (maladroit) du film, très mal amené et pas crédible pour un sou. En évoquant le poids de la culpabilité d’un homme tourmenté par sa conscience, comprenant qu’il a brisé l’existence d’un individu en croyant oeuvrer pour la loi (et non pour la justice !), « Golden Gate » parvient à développer ses thèmes de façon intéressante mais sans jamais concrétiser pleinement tout son potentiel. Du coup, le film s’avère être peu passionnant, peu convaincant sur la fin et finalement plutôt terne et ennuyeux, alors que les enjeux dramatiques profonds du script méritaient un traitement narratif et visuel beaucoup plus riche et ambitieux ! La partition musicale d’Elliot Goldenthal est l’un des éléments les plus mémorables du film, c’est d’ailleurs l’élément le plus souvent cité au sujet du film de John Madden. Connu pour son style avant-gardiste si particulier, Goldenthal se restreint sur « Golden Gate » et élabore une musique romantique, mélancolique et planante assez accessible – peut être l’œuvre la plus accessible du compositeur à ce jour - avec des orchestrations relativement classiques mélangées à un ensemble d’instruments ethniques aux consonances asiatiques. Le film ayant pour thème le poids de la culpabilité, la musique reflète les sentiments et les tourments du personnage campé par Matt Dillon, par le biais d’orchestrations et d’harmonies contemplatives façon Arvo Pärt, d’un ensemble d’instruments asiatiques (le traditionnel koto, la shakuhachi, la flûte japonaise) et de quelques éléments électroniques. Tous ces éléments s’agencent rapidement dès l’ouverture dans « Golden Gate », où les accords planants et retenus des cordes créent une ambiance méditative et mélancolique de toute beauté, avec quelques notes furtives du koto et de la flûte nippone. Dans « The Woman Cries », Goldenthal apporte un supplément d’émotion à travers les impros d’un saxophone soliste à la limite du jazz fusion, sur fond d’harmonies planantes des cordes et des notes disparates du koto. Ici aussi, on appréciera la grande beauté qui se dégage de cette musique retenue et poignante si particulière de la part d’un Elliot Goldenthal peu habitué à ce type d’ambiance méditative et intime dans les films qu’il met en musique. A noter que le saxophone jazzy évoque clairement l’Amérique des années 50/60 par ses sonorités si caractéristiques. Le morceau évolue rapidement vers un style plus dramatique avec des cordes et des vents plus torturés. Dans « Between Bridge and Wat », on retrouve cette même mélancolie si indissociable du film de John Madden, avec des harmonies plus sombres et tragiques, alors que Goldenthal nous propose un magnifique adagio funèbre évoquant le suicide de Chen Jung Song dans le film et la culpabilité de Kevin Walker. « Tender Deception » évoque là aussi un rapprochement évident avec la musique d’Arvo Pärt avec ces harmonies planantes de cordes, tandis que la dernière partie, aux harmonies majeures, évoquerait quasiment un segment du célèbre adagietto de la Cinquième Symphonie de Gustav Mahler. Quelques éléments électroniques discrets viennent compléter l’ensemble, mais l’on remarque très vite l’omniprésence du pupitre des cordes pour renforcer le ton dramatique et mélancolique du film. Plus typique de Goldenthal, « Bopathonix Hex » est une pièce plus avant-gardiste durant laquelle le compositeur s’essaie au jazz sur un mélange entre rythmes rapides effrénés de be-bop et jazz fusion à la limite du free jazz (notamment dans l’emploi des dissonances), le tout dominé par le saxophone soliste de Billy Drewes, avec batterie, piano et guitare basse. Dans « The Woman Warrior », Goldenthal évoque la vengeance de Marilyn avec un passage dissonant plus typique de Goldenthal, pour la scène où Walker rentre chez lui et découvre son nom écrit en rouge partout sur ses murs. Les éléments électroniques et les dissonances se mélangent ici dans une esthétique très proche de « Alien 3 » et « Interview with the Vampire ». Le thème principal associé à Walker dans le film, basé sur une cellule de 4 notes de cordes, est repris à 1:52, déjà introduit dans « Golden Gate » à 0:34, thème peu mémorable à la première écoute mais plutôt touchant et très réussi dans l’émotion subtile qu’il cherche à véhiculer sur les images. Le reste du score s’inscrit dans la continuité des premières pièces du score : « The Softest Heat » développe cette ambiance intime et mélancolique, tandis que « The Moon Watches » met l’accent sur les sonorités asiatiques du koto et le retour du thème principal de cordes, alors que le jazz fait son retour dans le sensuel et planant « Whisper Dance » évoquant la romance entre Walker et Marilyn dans le film. « Motel Street Meltdown » est plus particulier dans son utilisation expérimentale de samples de voix conçus par Goldenthal lui-même sur fond de jazz traditionnel – associé aux agents du FBI dans le film : à noter que parmi les mots entendus en fond sonore, on reconnaît les phrases « what the hell », « communists », « right wing », etc. Dans le bref « Write It As Time », Goldenthal utilise le saxophone avec un chorus lointain avant de le doubler de manière agressive lors des dernières secondes, un truc que le compositeur reprendra quelques années plus tard pour la partition du film « In Dreams » (1998). Enfin, l’histoire touche à sa fin dans le mélancolique « Between Bridge and Sky », où le thème est repris par la flûte japonaise, avec des synthétiseurs et quelques cordes tragiques et poignantes marquées par le retour des harmonies à la Gustav Mahler pour la séquence finale. Vous l’aurez donc compris, « Golden Gate » est un score assez particulier d’Elliot Goldenthal, dans le sens où le compositeur délaisse son style avant-gardiste habituel et nous propose une musique toute en retenue, basée sur l’émotion et la finesse des sentiments à partir de notes hésitantes ou plaintives, mais sans jamais verser dans le mélodrame. Bien évidemment, Goldenthal reste fidèle à lui-même et certains passages paraissent plus modernes ou dissonants (le brutal « Woman Warrior »), mais cela reste minoritaire dans le score. A l’image, la musique paraît posée avec délicatesse, enveloppant le film dans une atmosphère intimiste globalement mélancolique où l’on alterne entre le jazz, les sonorités asiatiques et la pudeur des orchestrations. Les fans de Goldenthal devrait donc écouter d’une oreille attentive cette oeuvre méconnue du compositeur, injustement tombée dans l’oubli en même temps que le film de John Madden. ---Quentin Billard |