1-The A400 6.38*
2-Solomon Lane 4.08
3-Good Evening, Mr. Hunt 2.35*
4-Escape to Danger 2.46*/**
5-Havana To Vienna 5.13*
6-A Flight At The Opera 2.23*
7-The Syndicate 3.44*
8-The Plan 3.21*
9-It's Impossible 1.23*/+ 1.23
10-The Torus 7.02*
11-Moroccan Pursuit 2.28*
12-Grave Consequences 4.12*
13-A Matter Of Going 5.06 */**
14-The Blenheim Sequence 4.00*
15-Audience With The Prime Minister 4.23*
16-This Is The End, Mr. Hunt 3.48+
17-A Foggy Night In London 2.10
18-Meet The IMF 1.47*
19-Finale and Curtain Call 6.14*/**

*Inclus "Mission Impossible Theme"
et "The Plot" de Lalo Schifrin
**Inclus "Nessun Dorma" (de "Turandot")
Ecrit par Giacomo Puccini
+Piste exclusive du CD.

Musique  composée par:

Joe Kraemer

Editeur:

La-La Land Records LLLCD 1361

Album produit par:
Joe Kraemer, John Finklea
Producteurs exécutifs de l'album:
J.J. Abrams, Christopher McQuarrie,
Randy Spendlove

Producteurs exécutifs pour
La-La Land Records:
Dan Goldwasser, MV Gerhard,
Matt Verboys

Coordinateur de l'album:
Jason Richmond
Assistance production:
Neil S. Bulk
Supervision montage musique:
John Finklea
Orchestrateur principal:
Matt Dunkley
Préparation musique:
Dakota Music Services
Assistant de Mr. Kraemer:
Ian Arber
Assistants Abbey Road:
Lewis Jones, Matt Jones

Artwork and pictures (c) 2015 Paramount Pictures. All rights reserved.

Note: ****
MISSION: IMPOSSIBLE
ROGUE NATION
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Joe Kraemer
Cinquième épisode de la franchise initiée par la Paramount en 1996 avec le film de Brian De Palma, « Mission Impossible : Rogue Nation » permet au réalisateur/scénariste Christopher McQuarrie de passer derrière la caméra, marquant par la même occasion ses retrouvailles avec Tom Cruise après « Jack Reacher » en 2012 et « Edge of Tomorrow » en 2014 (pour lequel il a aussi écrit le script du film de Doug Liman). Il faut se souvenir que McQuarrie est surtout connu pour sa collaboration scénaristique aux films de Bryan Singer (« Public Access », « Usual Suspects », « X-Men », « Valkyrie », « Jack the Giant Killer », etc.). « Mission Impossible : Rogue Nation » est le troisième long-métrage de McQuarrie en tant que réalisateur et une preuve évidente du talent de l’homme, aussi bien à l’aise devant et derrière la caméra. Le film commence lorsqu’Ethan Hunt (Tom Cruise) tente d’intercepter un gaz toxique vendu à un groupe terroriste avec l’aide des agents William Brandt (Jeremy Renner), Luther Stickell (Ving Rhames) et Benji Dunn (Simon Pegg). L’objectif d’Hunt est de dévoiler au grand jour l’existence du Syndicat, une vaste organisation criminelle qui semble agir depuis des années à l’échelle internationale, et serait responsable de nombreux actes de terrorisme et de crimes ayant ébranlés au cours des derniers mois des pays du monde entier. Alors que la Force Mission Impossible est désavouée et que le directeur de la CIA Alan Hunley (Alec Baldwin) obtient que l’organisation soit démantelée et que les agents soient réintégrés à la CIA, Ethan Hunt s’enfuit et continue de traquer le Syndicat, à la recherche d’un mystérieux individu qui a tenté de le piéger, un certain Solomon Lane (Sean Harris). Pendant que Brandt paraît avec Hunley devant une commission du gouvernement américain qui doit statuer sur le sort de l’IMF, Hunt poursuit sa traque à travers différents pays, avec l’aide d’une agent désavouée du MI6, Ilsa Faust (Rebecca Ferguson), qui semble poursuivre le même but qu’Hunt, mais avec des moyens différents. « Mission Impossible : Rogue Nation » possède tous les éléments dignes d’un grand film d’espionnage à l’ancienne. Visiblement, tout semble avoir été fait pour faire de ce cinquième opus un blockbuster mémorable et intelligent, servi par un script bétonné, un casting impeccable et des scènes d’action ahurissantes, dans lesquelles Tom Cruise, fidèle à son habitude, repousse toujours plus les limites (comme dans les films précédents, Cruise n’est quasiment jamais doublé dans ces scènes dangereuses !).

On retiendra en particulier une séquence anthologique d’affrontement à l’opéra de Vienne durant une représentation du « Turandot » de Giacomo Puccini, séquence très inspirée du « The Man Who Knew Too Much » (1956) d’Alfred Hitchcock, durant laquelle un tireur embusqué s’apprête à abattre le chancelier d’Autriche lors d’une note précise jouée par l’orchestre (dans le film d’Hitchcock, c’était lors d’un coup de cymbales). A noter que toute la séquence d’affrontement entre Ethan Hunt et le tueur dans les coulisses de l’opéra est entièrement accompagnée et chorégraphiée par la musique de Puccini, une très belle scène qui place la barre haut en terme de qualité cinématographique et qui semble en dire long sur cette franchise qui nous épate toujours plus à chaque film (la passion et l’investissement de Tom Cruise pour le projet étant plus qu’évidente !). On retrouve aussi avec plaisir la plupart des principaux personnages du précédent film : Ving Rhames, Jeremy Renner, Simon Pegg (l’indispensable touche humoristique du film, mais qui parvient miraculeusement à ne jamais être lourd !), sans oublier la talentueuse Rebecca Ferguson, véritable révélation du film dans le rôle de la charismatique et mystérieuse Ilsa Faust, probablement le personnage féminin le plus intéressant de toute la franchise. Au niveau des bad guys, impossible de passer sous silence l’apport de Sean Harris dans le rôle d’un Solomon Lane pervers et sournois, qui parle de manière calme et posée, sans aucun doute l’un des meilleurs méchants de la série. Autre morceau de bravoure : la séquence où Hunt plonge dans un gigantesque bassin sans bouteille d’oxygène pour y dérober de précieuses données secrètes. On pourrait aussi mentionner la poursuite en moto sur les routes du Maroc, la scène avec le premier ministre anglais ou l’affrontement final dans les rues de Londres, avec son lot habituel de twists, de faux semblants et de rebondissements. Après deux excellents épisodes, la série maintient un niveau de qualité impressionnant avec ce superbe « Mission Impossible : Rogue Nation », grand succès au box-office 2015 qui nous laisse espérer un sixième épisode dans la même veine, pour ce qui semble être l’une des meilleures franchises cinématographiques de ces 15 dernières années !

Après deux excellentes partitions de Michael Giacchino, c’est au tour du compositeur Joe Kraemer de signer la musique de « Mission Impossible : Rogue Nation », le film marquant ses retrouvailles avec Christopher McQuarrie après « The Way of the Gun » (2000) et « Jack Reacher » (2012), ce qui explique par ailleurs sa présence logique sur ce cinquième opus. Principal mot d’ordre du score : rétro ! Le score de « Rogue Nation » est entièrement écrit pour un orchestre symphonique sans le moindre élément électronique, chose rarissime de nos jours à Hollywood ! Le but de Kraemer était de faire une musique à l’ancienne, comme s’il avait du écrire le score d’un épisode de la série TV originelle de 1966 (à la manière des musiques de Lalo Schifrin à l’époque), y compris dans les arrangements instrumentaux du score. Ecrite pour une très grande formation orchestrale enregistrée à Londres, la musique de « Rogue Nation » met les bouchées double et apporte un flot incessant de suspense, de tension et d’action au film de McQuarrie avec, pour commencer, des reprises et développements nouveaux du célèbre thème de Lalo Schifrin pour la série de Bruce Geller, sans oublier le thème de « The Plot », lui aussi assez présent dans le score de Kraemer. Au niveau thématique, le score paraît plus élaboré que les précédents opus puisqu’il présente cette fois-ci pas moins de 3 nouveaux thèmes : un motif de 5 notes pour évoquer les exploits d’Ethan Hunt et des agents d’IMF, un motif mystérieux de flûte pour Solomon Lane et le Syndicat, et un thème emprunté au célèbre aria « Nessun dorma » du « Turandot » de Puccini, associé dans le film à Ilsa Faust, la musique introduite durant la scène à l’opéra de Vienne devenant par la suite la signature musicale du personnage de Rebecca Ferguson, un lien intéressant établi entre la musique et le scénario du film - les auditeurs attentifs remarqueront par ailleurs que Kraemer anticipe la scène de l’opéra puisque, lors de la toute première apparition d’Ilsa à l’écran, on entend déjà une brève allusion à la mélodie de Puccini ! –

Autre élément que l’on remarque rapidement : la plupart des morceaux sont longs, certains dépassant parfois les 6 ou 7 minutes, ce qui permet à Joe Kraemer de développer pleinement ses ambiances musicales et ses harmonies comme il le souhaite. Le film débute avec les 6 minutes intenses de « The A400 » pour la scène de l’avion au début du film, premier moment de bravoure qui introduit le thème bien connu de Lalo Schifrin, et les premiers éléments musicaux du score, à commencer par ces notes répétées de manière métronomique (souvent doublées par un shaker), principale signature musicale de « Mission Impossible : Rogue Nation ». La formule est simple, mais la cohérence avec laquelle Kraemer structure une bonne partie de son score autour de cet élément est tout bonnement remarquable ! Très vite, les rythmes s’emballent à grand renfort de cordes, cuivres, bois et percussions, autre élément notable du score. Kraemer convoque un ensemble impressionnant de percussions, en plus du lot habituel de timbales, grosse caisse, gong et cymbales : bongos, congas, shakers, claves, etc. Quel plaisir de retrouver le thème de Schifrin pour le générique de début (5:18) dans toute sa splendeur, après 5 minutes d’action pure et dure, à la manière d’une introduction d’un James Bond. Le nouveau thème de Kraemer pour l’IMF est dévoilé dans « The A400 » à 3:12, et restera très présent tout au long du film. On appréciera ici la qualité indéniable des orchestrations et la clarté impressionnante de l’écriture orchestrale de Kraemer, développant aussi bien le pupitre des cordes et des cuivres que ceux des bois et des percussions quand l’occasion s’en présente. « Solomon Lane » dévoile le second thème du score, celui de Lane et du Syndicat. Le thème du bad guy se divise en fait en deux éléments précis : un motif A constitué de 3 notes répétitives et mystérieuses, évoquant la présence de Lane dans le film, et un thème B plus mélodique souvent confié aux bois, qui se distingue par son aspect envoûtant et ondulant, passant rapidement d’un bois à un autre (basson, flûte, hautbois, etc.), jusqu’à un crescendo dramatique du thème dans toute sa splendeur, sans aucun doute le thème le plus impressionnant du score de « Rogue Nation ».

Mais écrire un bon thème n’est pas le seul élément intéressant, encore faut-il savoir le développer comme il faut, et sur ce point, Kraemer remporte un point avec une série de développements subtils du thème de Lane/Syndicat dans le film, comme à la fin de « Good Evening, Mr. Hunt » lorsque Lane piège Hunt au début du film (superbe reprise grandiose et puissante du motif A à 2:00 et du thème B à 2:11 aux flûtes). Le thème de Lane est très présent dans « The Syndicate », « Havana to Vienna », « It’s Impossible », « Grave Consequences » ou « Audience with the Prime Minister », rappelant dans le film l’omniprésence du Syndicat et de Solomon Lane. Quand au thème d’Ilsa Faust, il est mentionné brièvement aux flûtes dès 2:13 dans « Escape to Danger », superbe morceau d’action déchaîné lorsqu’Ilsa aide Ethan à s’enfuir vers le début du film. C’est dans « A Matter of Going » que le thème d’Ilsa/Puccini revient en entier, dans sa version la plus émouvante et la plus poignante, alors qu’Ethan propose à Ilsa de s’enfuir ensemble et de tout laisser derrière eux. La reprise touchante du thème dès 1:54 renforce l’affection naissante entre les deux individus et semble faire un parallèle avec l’histoire tragique de l’opéra original de Puccini, une belle idée qui apporte un peu de fraîcheur à une partition somme toute largement orientée vers l’action et le suspense. Pour le reste du score, Kraemer se base sur une structure thématique solide et nous propose une pléiade de moments mémorables dans le film : l’envolée du thème A de Solomon Lane dans « Good Evening, Mr. Hunt » lorsqu’Ethan se fait piéger au début du film, le déchaînement orchestral de « Escape to Danger », les rythmes latinos de « Havana to Vienna », la nervosité impressionnante de la poursuite dans « A Flight at the Opera », l’ambiance espionnage de « The Plan », les 7 minutes immersives de « The Torus », « The Blenheim Sequence » ou la traque dans les rues de Londres dans « A Foggy Night in London », sans oublier l’excitation ahurissante du stupéfiant « Morocco Pursuit ». Il s’agit pour celui-ci de la scène de la poursuite en moto au Maroc, de très loin le meilleur morceau d’action du score, qui rappelle curieusement le style des 007 de David Arnold. Kraemer se déchaîne durant les 2 minutes intenses de cette poursuite avec un lot impressionnant de rebondissements rythmiques, de cuivres rageurs, de percussions et de cordes survoltées, un grand moment de la partition de « Rogue Nation » !

« Meet the IMF » conclut l’aventure avec une superbe envolée du thème de 5 notes de l’IMF lorsque Lane est capturé à la fin du film, débouchant sur « Finale and Curtain Call » avec une dernière reprise du thème d’Ilsa suivi du thème de « Mission Impossible » pour le générique de fin, qui permet à Kraemer de récapituler brillamment les principales idées musicales de sa partition. C’est donc un bilan plus que positif pour cette cinquième aventure d’Ethan Hunt et de la Force Mission Impossible, qui rappelle encore une fois l’indéniable fraîcheur de cette franchise cinématographique réjouissante, y compris au niveau des bandes originales de chaque opus : Danny Elfman, Hans Zimmer, Michael Giacchino et maintenant Joe Kraemer, chacun a su trouver le truc, l’élément particulier pour illustrer chaque aventure avec un intérêt et une passion évidente pour chaque projet. La musique de Kraemer n’échappe pas à la règle et reste à ce jour l’un des plus bels ouvrages du compositeur américain pour le cinéma, une partition symphonique à l’ancienne, riche, prenante et aboutie, qui rend un bien bel hommage au travail de Lalo Schifrin sur la série TV d’origine sans oublier d’apporter un vrai plus aux images en terme de thématique et d’orchestration. Certes, Joe Kraemer ne propose rien de fondamentalement nouveau ou de très original, et chacun pourra se laisser aller à deviner les influences par-ci par-là. Mais le résultat à l’écran est indéniablement réussi et particulièrement brillant, y compris d’un point de vue musical !

Chose rarissime : il faut quand même souligner que le film n’a été monté avec aucun temp-track, Christopher McQuarrie ayant souhaité trouver le rythme interne du film sans apport d’une quelconque musique préexistante, ce qui permit à Joe Kraemer d’être plus à l’aise pour composer sur les images. Une note du livret précise même que l’objectif n’était pas de placer la musique sur les images mais de trouver les moments où il ne fallait pas en mettre, et tout cela dans un délai assez court : l’écriture du score a commencé à Londres en février 2015 (avec de nombreux changements et remontages du film !), l’enregistrement à Abbey Road et British Grove a eu lieu en juin, pour une sortie du film programmée en juillet : voilà une vraie mission impossible que Joe Kraemer et l’équipe du film ont affronté avec panache et passion, le résultat étant à la hauteur du projet. Pour le compositeur, c’est donc une mission accomplie, en espérant que le succès du film de McQuarrie lui permette de s’imposer davantage à Hollywood et de travailler sur des projets encore plus ambitieux, qui lui permettront de s’épanouir musicalement, car Joe Kraemer pourrait bien devenir, dans les années à venir, un compositeur majeur du cinéma hollywoodien !



---Quentin Billard