1-Try Everything 3.16*
2-Stage Fright 0.39
3-Grey's Uh-Mad At Me 1.44
4-Ticket to Write 1.07
5-Foxy Fakeout 2.08
6-Jumbo Pop Hustle 1.50
7-Walk and Stalk 1.29
8-Not A Real Cop 1.34
9-Hopps Goes (After) The Weasel 2.19
10-The Naturalist 3.09
11-Work Slowly And
Carry A Big Shtick 0.44
12-Mr. Big 2.47
13-Case of the Manchas 4.00
14-The Nick of Time 5.02
15-World's Worst Animal Shelter 4.24
16-Some Of My Best Friends
Are Predators 3.47
17-A Bunny Can Go Savage 1.45
18-Weasel Shakedown 2.04
19-Ramifications 3.58
20-Ewe Fell For It 6.37
21-Three-Toe Bandito 0.43
22-Suite from Zootopia 7.28

*Interprété par Shakira
Ecrit par Sia Furler, Tor Erik Hermansen,
Mikkel Eriksen.

Musique  composée par:

Michael Giacchino

Editeur:

Walt Disney Records D002228002

Musique conduite par:
Tim Simonec
Orchestrations:
Brad Dechter, Jeff Kryka,
Cameron Patrick, Jonathan Sacks,
Tim Simonec

Enregistrement et mixage:
Joel Iwataki
Montage musique:
Stephen M. Davis
Album produit par:
Michael Giacchino
Monteur temp music:
Dominick Certo
Assistant scoring:
David Coker
Musique additionnelle:
Tomas Costanza
Monteur musique additionnelle:
Daniel Waldman
Programmation synthétiseur:
Brian R. Taylor, Eric Wegener,
Mae Crosby

Producteur exécutif musique:
Chris Montan
Assistant montage musique:
Benjamin R. Robinson
Supervision musique:
Tom MacDougall
Préparation musique:
Aaron Meyer, Frank Macchia
Coordination musique:
Andrea Datzman

Artwork and pictures (c) 2016 Walt Disney Pictures. All rights reserved.

Note: ***1/2
ZOOTOPIA
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Michael Giacchino
Nouveau long-métrage d’animation de Disney (le 135e à ce jour !), « Zootopia » est réalisé par Byron Howard et Rich Moore (à qui l’on doit « Wreck-it-Ralph »). Entièrement conçu en images numériques, le film est un pastiche des buddy movies des années 80, ces fameux films policiers dans lesquels deux flics que tout oppose étaient obligés de faire équipe ensemble pour résoudre une affaire. L’histoire se déroule dans un monde imaginaire à l’intérieur d’une société animale organisée comme celle des humains. On y suit les péripéties de la lapine Judy Hopps, une jeune lieutenant de police nouvellement recrutée par la police de Zootopie, une ville cosmopolite peuplée de mammifères anthropomorphes. Depuis ses 9 ans, Judy a toujours rêvé de devenir policière, mais à son arrivée à Zootopie pour son premier poste, elle va se heurter à l’incompréhension de ses collègues et de son chef Bogo, un buffle qui la méprise par dessus tout. Victime de préjugés quand à sa petite taille et ses origines, Judy se voit confier la tâche ingrate de distribuer des PV dans la rue, jusqu’au jour où elle croise la route d’un renard escroc nommé Nick Wilde. Le jour où le maire de Zootopie lui confie une enquête portant sur la disparition d’une loutre nommée Otterton, Judy saisit sa chance de faire ses preuves et entraîne dans son périple Nick, à qui elle menace de dénoncer ses magouilles au fisc s’il ne lui vient pas en aide au cours de son enquête. Le chef Bogo lui lance alors un ultimatum : si elle ne réussit pas son enquête dans les 48 heures, elle devra démissionner pour de bon. Accumulant les indices et les pistes sérieuses, Judy et Nick croisent alors la route d’un parrain de la Mafia et retrouvent la trace d’un certain Manchas, conducteur de la limousine qui transportait alors Otterton avant sa disparition. Défiguré, Manchas affirme que c’est bien la loutre qui, dans un mystérieux excès de rage, l’a mis dans cet état. Il révèle aussi l’existence des « hurleurs nocturnes » dont parlait Otterton durant son délire, avant de sombrer mystérieusement à son tour dans une rage folle, attaquant Judy et Nick. Mais au fur et à mesure que les deux enquêteurs se rapprochent de la vérité, les choses semblent se compliquer à Zootopie, où les manipulations politiques vont bon train. Il se pourrait bien que Judy se retrouve impliquée malgré elle dans de terribles événements qui risquent de bousculer l’équilibre de la société de Zootopie.

Formidable plaidoyer contre le racisme et les préjugés en tout genre (ethnique, sexisme, etc.), « Zootopia » est la nouvelle claque cinématographique de Disney, décidément très en forme ces derniers temps avec quelques petites perles comme « Wreck-it-Ralph », « Tangled » ou « Frozen ». Le film de Byron Howard et Rich Moore est un hommage évident aux buddy movies des eighties façon « Lethal Weapon », « 48 Hours » ou « Tango & Cash » à la sauce Walt Disney, les animaux remplaçant ici les humains. Si le film s’avère assez sombre et sérieux bien que bourré de touches d’humour et de clins d’oeil cinématographiques (autant à Disney qu’à certains films comme « The Godfather » ou les séries TV « 21 Jump Street » ou « Breaking Bad »), on appréciera non seulement l’incroyable qualité de l’animation 3D, les décors urbains de Zootopie d’une richesse époustouflante et bien évidemment l’intelligence d’un scénario très bon qui propose une excellente enquête policière à base de faux semblants et de rebondissements sur fond de dénonciation du racisme, d’abord contre la jeune lapine, qui a bien du mal à se faire accepter parmi ses collègues mammifères mâles de Zootopie qui sont tous bien plus grands qu’elle, puis contre les prédateurs de la ville, qui deviennent alors des pestiférés et des parias de la société lorsque Judy révèle dans les médias un complot visant à contrôler la férocité et la dangerosité des prédateurs de Zootopie.

En ce sens, « Zootopia » est non seulement une réussite technique admirable de la part de Disney mais s’avère être par la même occasion l’un des films les plus subversifs du studio, plus adulte dans sa réflexion sur la xénophobie et ses ravages dans les sociétés modernes. Evidemment, le message socio-politique du film risque de satisfaire davantage le public adulte que les plus jeunes, qui auront peut être davantage de mal à cerner toutes les références du film mais apprécieront à coup sûr cette galerie de personnages attachants et son intrigue policière mouvementée. Aussi curieux que cela puisse paraître, les thèmes de « Zootopia » sont clairement plus que jamais d’actualité, ce qui fait largement sourire lorsqu’on sait à quel point Disney a pourtant très souvent véhiculé un nombre incalculable de préjugés dans ses films (les gentils blancs, les sidekicks comiques avec des accents étrangers, les méchants qui sont laids et rejetés par la société, etc.). Véritable coup de maître, « Zootopia » est donc à ce jour l’un des Disney les plus enthousiasmants, les plus originaux et les plus ambitieux des années 2000, une formidable réussite en passe de devenir une nouvelle référence du genre, à coup sûr !

La musique de Michael Giacchino apporte à son tour une énergie et un charme indéniable au film de Byron Howard et Rich Moore. Habitué aux productions Pixar, c’est la première fois que Giacchino collabore à la musique d’un long-métrage Disney, signant une partition extrêmement percussive, dynamique et rafraîchissante pour « Zootopia ». A l’opposée des musiques de cartoon bondissantes trop souvent entendues dans ce type de production, Giacchino opte d’emblée pour une toute autre approche avec l’utilisation d’une large section de percussions pour les besoins du film : gamelans, percussions africaines, percussions sud-américaines, cymbales, timbales, caisse claire, etc. Avec « Stage Fright » (scène de la pièce de théâtre des enfants au début du film), le ton se veut sombre et radical, voire même un brin dissonant. « Grey’s Uh-Made at Me » dévoile le thème de piano intime et nostalgique pour Judy à 0:36, évoquant ses rêves de devenir policière et de faire régner la justice. « Ticket to Write » s’oriente quand à lui vers un style plus sud-américain et un chant choral aux consonances brésiliennes lorsque Judy commence à distribuer les PV dans la rue. Giacchino s’amuse ainsi à varier les styles et les ambiances pour retranscrire l’univers si particulier de Zootopie. Dans « Foxy Fakeout », il dévoile le thème associé à Nick, sous la forme d’une boîte à musique et d’une guitare nostalgique, un thème intime typique de Giacchino. « Jumbo Pop Hustle » reprend ensuite son thème avec un arrangement plus énergique, à l’aide des percussions exotiques/métalliques, des gamelans, d’une guitare, d’une basse et d’un orgue électrique. On sait que Giacchino aime régulièrement expérimenter autour des percussions, un élément déjà exploité dans sa musique pour la série TV « Lost » et dans « Dawn of the Planet of the Apes », aux côtés du vétéran Emil Richards, l’un des plus célèbres percussionnistes d’Hollywood, qui a travaillé par le passé avec Jerry Goldsmith et Maurice Jarre. A noter pour finir que « Jumbo Pop Hustle » dévoile le deuxième thème du score, le thème policier, plus funky et rétro, dès 0:34.

Le thème policier est ensuite repris dans « Walk and Stalk » pour lequel Giacchino s’amuse à pasticher le style des musiques de polar urbain des années 70 façon Lalo Schifrin, notamment dans l’emploi des bongos et d’une guitare électrique avec pédale funky typique des seventies, le tout accompagné de cette série de percussions métalliques. Le thème de piano de Judy revient alors dans le mélancolique « Not a Real Cop » où il est question de désillusion et de déception, lorsque Judy se rend compte qu’elle ne sera peut être jamais une vraie policière. Plus étonnant, « Hopps Goes (After) The Weasel » accompagne la poursuite avec la fouine voleuse dans la ville à l’aide d’arrangements jazzy rétro assez savoureux. C’est l’occasion pour Giacchino d’évoquer la dérision et l’extravagance de la scène à l’aide de saxophones très sixties et de percussions endiablées, sur fond de couleurs instrumentales exubérantes et farfelues. Le compositeur continue ensuite de varier les ambiances et les styles, optant cette fois-ci pour une atmosphère plus indienne et zen dans « The Naturalist » (qui rappelle ses passages indiens de Mumbai dans « Mission Impossible : Ghost Protocol »), notamment dans l’emploi très reconnaissable du sitar et des percussions. Giacchino apporte aussi de l’humour au film avec l’amusant «Work Slowly and Carry a Big Shtick », tandis que « Mr. Big » pastiche les musiques des films de mafia italienne des années 70 et notamment le « Godfather » de Nino Rota, pour la scène où Judy et Nick partent rencontrer Mr. Big, l’influent parrain de la mafia de Zootopie : accordéon, trémolos de mandoline, guitares, solo élégant de violon, décidément, la musique de Giacchino fourmille d’idées et part dans de multiples directions, pour le bonheur de ses fans, même si l’on regrette parfois cette approche très décousue et morcelée, d’une scène à une autre.

La musique devient plus sombre et agressive dans « Case of the Manchas », où l’on retrouve les percussions tribales/exotiques de « Dawn of the Planet of the Apes », avec des orchestrations plus radicales et des sonorités dissonantes et menaçantes – plutôt rare pour un film d’animation Disney ! – durant la scène où Manchas devient subitement sauvage et attaque à son tour les deux héros. C’est d’ailleurs l’occasion pour Giacchino de nous offrir un superbe morceau d’action tribal particulièrement frénétique, inventif et déchaîné. Avec « The Nick of Time » et « World’s Worst Animal Shelter » (« World’s Worst » étant une constante amusante dans les titres des morceaux de Giacchino !), on entre alors dans la seconde partie du score, plus nuancée. C’est l’occasion pour Giacchino de reprendre quelques thèmes, dont celui de Nick et le thème policier funky à la fin de « The Nick of Time ». Dans « Some of My Best Friends Are Predators », la musique devient plus sombre, plus dramatique, Judy commençant alors à réaliser son erreur lorsqu’elle déclenche un vent de paranoïa et de racisme contre les prédateurs suite à ses déclarations fracassantes dans la presse, se mettant même à dos son ami Nick, qui est un renard. « A Bunny Can Go Savage » nous propose une reprise déterminée assez savoureuse du thème de Judy, lorsque cette dernière découvre un indice compromettant sur les événements de Zootopie et retourne là-bas pour y découvrir la vérité. L’ambiance devient plus menaçante dans « Ramifications », à l’aide de cordes plus sombres, de ponctuations percussives et d’accords de piano « suspense » - à noter que l’emploi très réussi du piano ici rappelle certains passages d’infiltration/espionnage de « Mission : Impossible 3 » de Giacchino – on retrouve aussi un motif d’action de saxophones déjà entendu dans la poursuite avec la fouine et qui revient ici durant la scène où Judy et Nick infiltrent le laboratoire souterrain dans le train, Giacchino nous offrant un nouveau morceau d’action trépidant et virtuose. L’aventure touche ensuite à sa fin durant l’affrontement final de « Ewe Fell For It », marqué par le retour du thème policier (à 4:03) et celui de Judy (vers 5:31 aux cordes).

Michael Giacchino semble donc avoir passé du bon temps sur « Zootopia », nous offrant une musique assez riche, énergique et inventive, parsemée de nombreuses idées musicales et d’une variété de styles musicaux reflétant la richesse de l’univers du film de Byron Howard et Rich Moore. Les thèmes sont réussis – bien que sans grande originalité et peu mémorables – les orchestrations sont inventives et la musique s’avère même être étonnamment sombre par moment pour un Disney, à l’instar du film lui-même. On ressort donc assez comblé de l’écoute de « Zootopia », même s’il faut reconnaître qu’il manque malgré tout ce petit plus pour faire de cette nouvelle partition un classique du genre. On apprécie les prises de risque de Giacchino sur ce film et ses nombreuses touches d’humour, mais on aurait quand même souhaité qu’il aille encore plus loin, qu’il expérimente davantage – son travail autour des percussions n’est qu’un prolongement des expériences précédentes de « Lost » et « Dawn of the Planet of the Apes » - On regrette aussi le côté morcelé du score, qui passe très vite d’un style à un autre de manière un brin fourre-tout dans le film, là où une plus grande cohésion musicale aurait été davantage la bienvenue. Néanmoins, on ne peut qu’apprécier ce premier travail de Giacchino sur un film d’animation Disney, plutôt inventif et rafraîchissant d’un point de vue formel, bien que sans grande originalité sur le fond. Force est de constater que Giacchino n’est jamais aussi inventif et fantaisiste que lorsqu’il travaille pour le cinéma d’animation, un registre dans lequel il brille particulièrement, et sur lequel on attend encore bien plus de sa part dans les années à venir !



---Quentin Billard