1-Main Title 4.22
2-The Hit 2.02
3-The Confessional 3.17
4-The Taxi 2.45
5-The Elevator 1.25
6-Rooftop Chase 2.32
7-The Shower 1.06
8-Angela and Michael 2.44
9-Michael the Priest 1.37
10-Dream Lovers 3.08
11-Zena's Confession 3.07
12-The Restaurant 3.08
13-Nuzo's Death 4.17
14-Into Mexico 1.36
15-Angela Splits 3.36
16-The Decision 1.07
17-Our Lady Of The Cars 3.55
18-Luis De La Vega 2.53
19-I Love You Angela 1.07
20-Vaya Con Dios 2.29
21-End Credits 3.26

Musique  composée par:

Bruce Broughton

Editeur:

Intrada Signature Editions ISE1037

Album produit par:
Bruce Broughton, Douglass Fake
Producteur exécutif:
Roger Feigelson
Direction de la musique pour
Metro-Goldwyn-Mayer Inc:
Barbara Custer
Enregistré et mixé par:
Armin Steiner
Orchestrations:
Mark McKenzie, Chris Boardman,
Bruce Broughton

CD monté et masterisé par:
Douglass Fake

American Federation of Musicians.

Artwork and pictures (c) 1998/2009 Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
LAST RITES
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Bruce Broughton
Sorti durant l’été 1988 au cinéma, « Last Rites » (Crimes de sang) est un de ces énièmes thrillers hollywoodiens que l’on voyait régulièrement sur nos écrans entre les années 80 et 90, qui marqua en quelque sorte l’apogée de ce genre usé jusqu’à la moelle, où les intrigues convenues tournaient en rond et n’incitaient plus les réalisateurs à se creuser les méninges – du moins à cette époque – Bien avant d’arriver au succès phénoménal de « Usual Suspects » ou « Se7en » au milieu des années 90, on a eu droit à toute sorte de film à suspense, du bon comme du moins bon, et c’est dans cette catégorie que pourrait se classer « Last Rites », thriller de Donald P. Bellisario qui met en scène Tom Berenger dans le rôle d’un prêtre new-yorkais chargé de protéger une jeune femme poursuivie par des hommes de mains d’un mafieux. Le père Michael Pace (Berenger) qui a des accointances avec la mafia new-yorkaise (son père est un parrain influent à New York), voit sa vie chamboulée le jour où il apprend que son beau-frère Gino – un patron de la pègre - est retrouvé assassiné après avoir couché avec sa maîtresse Angela (Daphne Zuniga), qui a réussit à prendre la fuite en s’enfermant dans la salle de bain. Poursuivi par des tueurs, Angela se réfugie dans l’église du père Michael et demande à se confesser. La jeune femme révèle au prêtre qu’elle sait des choses sur l’assassinat de Gino mais qu’elle ne peut rien dire à la police. Elle lui demande alors de la retrouver dans un appartement le soir, de l’autre côté de la ville. Sur son trajet, le chauffeur de taxi révèle au père Michael qu’il connaît Angela, et qu’elle l’a aidé autrefois à surmonter son chagrin à la suite de la mort de son jeune fils. Durant sa rencontre avec la jeune femme dans l’appartement, le père Michael commence à perdre patience lorsqu’Angela déclare soudainement qu’elle ne connaissait pas le lien qui existe entre lui et Gino – Michael est alors persuadé que la jeune femme lui ment – Mais la discussion tourne court rapidement lorsque les hommes de main ont retrouvé leur trace et tentent alors de les éliminer. Obligé de prendre la fuite, Michael s’échappe avec Angela alors que les tueurs ont reconnus le prêtre. Ce dernier décide alors de cacher la jeune femme dans son église, où elle révèle alors que c’est l’ex-femme de Gino qui l’a assassiné. Désormais, le père Michael va tout faire pour tenter de protéger Angela et va finalement tomber amoureux de la jeune femme, mais il n’est pas au bout de ses surprises !

Avec un scénario plutôt ordinaire qui débute de manière intéressante, « Last Rites » évolue très vite vers une routine fatigante, le tout malheureusement desservi par un casting moyen (Tom Berenger et Daphne Zuniga sont des spécialistes des séries-B) et un scénario cousu de fil blanc, hormis un twist final plutôt bien trouvé mais finalement très prévisible, le problème étant que le film prend très souvent l’apparence d’un téléfilm poussiéreux du dimanche soir, totalement plat et sans saveur ! A sa sortie en salles en 1988, le film de Donald Bellisario sera très sévèrement critiqué en raison de ses scènes d’amour entre le prêtre et la jeune femme, l’occasion de se rappeler qu’une fois encore, dès qu’il s’agit de religion, les américains sont les premiers à monter au créneau ! On a aussi beaucoup reproché au film son manque de moyen évident et son rythme lent et monotone, un choix totalement assumé de la part du réalisateur, qui souhaitait conserver une certaine économie de moyens et jouer sur la retenue pour mieux arriver à ses fins. Seulement voilà, le public et la critique n’ont pas suivi, et le film s’est vautré lamentablement au box-office U.S. de 1988 – cela a été un tel échec qu’il faudra quand même attendre 2004 pour voir enfin débarquer le film en DVD ! – Il faut dire que Bellisario n’a jamais été un grand auteur du cinéma, mais il est en revanche beaucoup plus prolifique à la télévision, où on lui doit de nombreuses séries TV cultes de l’époque telles que « Magnum », « Airwolf », « Quantum Leap », « JAG » ou « NCIS ». Signalons par ailleurs que « Last Rites » est le seul film que Bellisario tournera pour le cinéma, avant de revenir vers son média de prédilection, la télévision, ce qui n’est finalement pas plus mal !

Le seul élément satisfaisant de « Last Rites » réside finalement dans la partition musicale de Bruce Broughton, plutôt réussie, écrite la même année qu’un autre thriller, « The Presidio » (sans oublier « The Rescue » et le segment musical pour le film musical « Moonwalker » avec Michael Jackson). Le score de « Last Rites » s’avère éminemment classique et orchestral, servi par le savoir-faire habituel de Bruce Broughton. Niveau orchestrations, l’ensemble utilisé par le compositeur est de taille moyenne pour une production hollywoodienne : 23 violons, 10 altos, 8 violoncelles, 4 contrebasses, 3 flûtes, 2 hautbois, 4 clarinettes et saxophone, 4 bassons, 2 cors, 4 trompettes, 3 trombones, une harpe, 3 guitaristes avec quelques percussions et 3 claviéristes. Dans une note du livret de l’album d’Intrada, Broughton explique que ce qui l’intéressait davantage, c’était la relation entre le père Michael et Angela, ce qui compromet dangereusement ses voeux de chasteté et son mode de vie religieux. Le score repose essentiellement sur quatre thèmes, à commencer par le thème principal aux consonances résolument baroques, dévoilé dès les premières secondes du « Main Title » aux cordes, et dont le style pourrait évoquer aussi bien Haendel que Bach. Ce premier thème est associé dans le film au père Michael et évoque l’aspect liturgique du film. A 0:31, le second thème est introduit par un hautbois accompagné d’un contrepoint de cordes, d’arpèges de guitare, de bassons et de voix féminine mystérieuse. On notera ici l’écriture contrapuntique du contre-chant des cordes qui apporte une touche baroque à ce thème résolument classique, plutôt mélancolique et élégant, évoquant là aussi l’aspect liturgique du film. Broughton se fait ensuite plaisir en développant l’écriture typiquement baroque des cordes qui semble donner du fil à retordre aux musiciens. Pour les besoins du film, le compositeur utilise parfois un orgue et un choeur féminin pour renforcer la dimension religieuse du récit, sans oublier quelques éléments électroniques typiques de la fin des années 80, comme c’est le cas à la toute fin du « Main Title ».

Le troisième thème est dévoilé dans « The Confessional », mélodie mélancolique évoquant l’attachement du père Michael à la Madone qui lui sert de guide dans ses prières. Broughton précise par ailleurs que cette mélodie est associée à l’origine au texte latin du traditionnel « Ave Maria ». La guitare est utilisée quand à elle pour apporter des éléments latinos à l’histoire, étant donné que le film débute dans la communauté italo-américaine de Manhattan et se termine à Mexico. C’est ainsi que Broughton n’hésite pas à nous offrir des morceaux sud-américains comme « The Taxi » et ses trompettes mexicaines si caractéristiques un peu cheap (on sent clairement les années 80, jusque dans l’utilisation d’une rythmique pop, de claviers et du saxophone). Enfin, le quatrième thème du score est celui associé à Angela, que l’on entend notamment dans « Dream Lovers » à la guitare dès 0:37, accompagné ici d’un piano mystérieux avec des cordes et un cor, juxtaposé ici en contrepoint avec le thème mélancolique de la Madone. Mais « Last Rites », c’est avant tout un thriller, ce que Broughton nous rappelle avec férocité dans « The Hit », pour la scène du meurtre au début du film. On retrouve ici le compositeur de « The Presidio » avec son mélange de cordes dissonantes, de cuivres agressifs et de bois inquiétants, sur fond de ponctuations percussives. Comme toujours chez le compositeur, les orchestrations sont extrêmement riches et l’écriture très sophistiquée, Broughton faisant encore une fois appel à sa science d’écriture impressionnante, n’hésitant pas à mélanger ici les styles et les ambiances pour parvenir à ses fins (classique, baroque, religieux, latino, etc.). Dans « The Elevator », le suspense est de mise avec des cordes dissonantes, des bois furtifs et un piano vaporeux, sans oublier une allusion au thème principal. Ici aussi, on devine une noirceur et une agressivité radicale dans la musique de Broughton, qui annonce clairement ses futurs travaux pour « Narrow Margin » et « Shadow Conspiracy ».

La première scène d’action intervient dans « Rooftop Chase », durant la scène de la poursuite sur les toits avec les tueurs. L’orchestre s’en donne ici à coeur joie, dans un premier déchaînement orchestral complexe et agressif, aux orchestrations très denses, incluant quelques percussions synthétiques très eighties – à noter ici l’emploi réussi du xylophone et des bois – Niveau orchestration, Broughton se montre assez inventif puisqu’il n’hésite pas à utiliser une flûte à bec au milieu de l’orchestre, chose plutôt rare dans une musique d’action hollywoodienne, la flûte à bec étant trop souvent utilisée dans un contexte enfantin, alors que le compositeur s’en sert ici pour rappeler subtilement l’atmosphère baroque de sa partition (c’est un instrument très utilisé dans la musique du 17e et début du 18e siècle !). Dans « The Shower », le compositeur nous offre l’inévitable partie romantique pour Angela et Michael avec une guitare aux accents latinos, un choeur féminin, un clavier, des bois et quelques cordes suaves – l’approche paraît aujourd’hui assez désuète – « Angela and Michael » reprend le thème principal baroque et le thème d’Angela de manière tout aussi romantique que dans « The Shower », un très beau morceau qui permet de respirer avant le dernier acte du film, plus sombre et brutal – à noter ici le rôle soliste très réussi de la guitare et du piano – Dans « Michael the Priest », Broughton développe le thème principal et son second thème baroque en contrepoint, un vrai exercice de style très réussi qui apporte une vraie touche d’émotion à la musique du film de Bellisario. Dans « Dream Lovers », la musique verse dans le romantisme pur pour la scène d’amour entre Michael et Angela (qui s’avère être en fait un rêve fait par Michael), morceau totalement kitsch et passionné dominé par le saxophone, le clavier, les cordes et une guitare électrique.

Dans « Zena’s Confession », la tension monte d’un cran et l’ambiance devient plus intrigante avec le retour des sonorités baroques (ne ratez pas la superbe reprise du thème à la flûte à bec à 2:42 accompagné par l’orchestre et l’orgue). « Nuzo’s Death » développe à son tour le thème baroque mélancolique, tandis que les sonorités latinos culminent dans « Into Mexico » pour la dernière partie du film où Broughton se fait clairement plaisir avec ses musiciens solistes. Dans « Angela Splits », le thème d’Angela est repris avec délicatesse par une guitare nostalgique, tandis que « Our Lady of the Cars » verse dans l’action et le suspense pour la scène de poursuite en voiture à Mexico, superbe morceau complexe et déchaîné dans la continuité de « Rooftop Chase ». Dès lors, la musique devient plus noire et sombre avec « Luis De La Vega » et ses harmonies tragiques et torturées (à noter ici l’emploi très réussi d’un choeur féminin quasi fantomatique !), alors que le père Michael découvre la vérité et comprend qu’il a été manipulé depuis le début. « Vaya Con Dios » conclut par ailleurs le film de manière dramatique avec un climax brutal et une dernière reprise du thème principal et du thème de la Madone par la chorale féminine en guise de conclusion.

Bruce Broughton signe donc une partition plutôt riche et intéressante pour « Last Rites », utilisant sa grande culture musicale pour varier les styles et les ambiances à travers une musique très classique d’esprit, reposant sur une poignée de thèmes réussis et des orchestrations assez inventives bien que sans réelle surprise. Et c’est justement là que le bat blesse, car le score de « Last Rites » parvient difficilement à nous surprendre, bien que l’écoute isolée sur l’album s’avère hautement recommandée (le mixage de la musique est parfois assez décevant dans le film). Evidemment, « Last Rites » fait partie des scores mineurs du compositeur, injustement tombé dans l’oubli mais qui possède pourtant un charme et une conviction évidente, résumant tout l’art du compositeur et ses multiples facettes de musicien versatile à l’aise dans tous les styles. Très inspiré par la dimension liturgique du film, Broughton nous offre ainsi une solide partition aux accents baroques assez réussie bien que très prévisible en soi et plutôt ordinaire, un score plutôt sous-estimé, enfin réhabilité par l’excellent album d’Intrada publié en 2009 !



---Quentin Billard