1-Young Cal 2.39
2-The Execution 2.40
3-Abstergo 4.18
4-The Animus 4.41
5-First Regression 4.13
6-Cal Recuperates 1.25
7-The Cure for Violence 1.54
8-The Bleeding Effect 2.25
9-Research Room 3.33
10-Second Regression 3.42
11-Underground 2.27
12-The Creed 4.07
13-The Apple 3.42
14-Columbus 2.11
15-You're Not Alone 5.52
16-The Mutiny 1.24
17-Leap of Faith 1.40
18-Seville 6.28
19-The Assassinations 1.25
20-Future Glory 2.21
21-He Says He Needs Me 3.21*

*Interprété par 3D & Young Fathers
Ecrit par Robert Del Naja,
Euan Dickinson, Graham Hastings,
Alloysious Massaquoi et Kayus Bankole.

Musique  composée par:

Jed Kurzel

Editeur:

Decca Records 5730934

Score produit par:
Jed Kurzel
Music clearance:
Christine Bergren
Supervision musicale:
Lucy Bright
Orchestrations:
Hugh Brunt
Orchestre:
London Contemporary Orchestra
Supervision score:
Emma Cronly
Montage musique:
Poppy Kavanagh
Mixage score:
Matt Lovell
Consultant musique:
Scottpatrick J. Sellitto
Directrice musicale:
Kathleen Shanks

Artwork and pictures (c) 2016 Regency Enterprises/Ubisoft Motion Pictures/New Regency. All rights reserved.

Note: **1/2
ASSASSIN'S CREED
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jed Kurzel
« Assassin’s Creed » est à l’origine une série de jeux vidéos bien connus produit depuis par les français d’Ubisoft et sorti pour la première fois sur Playstation 3 en 2007. Devant le succès retentissant de l’une des plus fructueuses franchises vidéoludiques des années 2000, il paraissait évident que le cinéma finisse par faire les yeux doux à cette prestigieuse saga qui mélange science-fiction et aventures médiévales. Ubisoft décida tout d’abord de produire une série de court-métrages regroupés sous l’appellation « Assassins’s Creed : Lineage », dont le premier épisode fut diffusé pour la première fois sur Youtube en 2009. Le studio va produire par la suite une série de bandes dessinées à partir de leur filiale Les Deux Royaumes fondée en 2009, suivi de la filiale Ubisoft Motion Pictures fondée en 2011, qui se chargera de produire un premier long-métrage ambitieux consacré aux jeux, « Assassin’s Creed », réalisé par l’australien Justin Kurzel, connu pour le drame « Snowtown » (2011) et son adaptation de « MacBeth » de Shakespeare (2015). Le film offre l’occasion au réalisateur de renouer avec son duo d’acteur de « MacBeth », Michael Fassbender et Marion Cotillard dans un long-métrage présenté comme un prolongement de l’univers des jeux en vue de rendre la licence plus populaire auprès du public et de booster la vente des jeux. On y suit l’histoire de Callum Lynch (Michael Fassbender), un meurtrier condamné à la peine capitale par injection létale, mais qui est finalement récupéré par une société nommée Abstergo Industries, dirigée par une organisation moderne des Templiers. Cette dernière utilise une toute nouvelle technologie révolutionnaire, l’Animus, une machine capable d’exploiter la mémoire génétique d’un individu pour se replonger dans le passé d’un ancêtre. L’expérience est dirigée à Madrid par le Dr. Sophia Rikkin (Marion Cotillard), la fille du président d’Abstergo, Alan Rikkin (Jeremy Irons). Callum apprend alors que les Templiers sont à la recherche de la Pomme, un précieux artefact qui contiendrait le code génétique du libre arbitre, et que l’organisation compte récupérer afin de mettre fin à la violence dans le monde pour mieux contrôler l’humanité toute entière. Callum est quand à lui l’ancêtre d’un maître Assassin, Aguilar de Nerha, qui combattit durant l’Inquisition espagnole en 1492. Les Assassins font partie d’une organisation secrète qui est chargée de lutter depuis le moyen-âge contre le pouvoir de l’Ordre des Templiers. Grâce à l’Animus, Callum revit les souvenirs de son ancêtre Aguilar et sa partenaire Maria (Ariane Labed), qui se rendent en Andalousie au XVe siècle pour y sauver Ahmed, le fils du sultan Muhammed XII (Khalid Abdalla), kidnappé par le grand inquisiteur espagnol Tomas de Torquemada (Javier Gutiérrez), qui cherche alors à récupérer la Pomme. Mais ce que le Dr. Sophia Rikkin ignore encore, c’est que plus Callum Lynch s’immerge dans le passé de son ancêtre, plus il acquiert de précieuses compétences qui lui permettront à son tour de lutter contre l’Ordre moderne des Templiers et d’empêcher l’organisation de dominer le monde.

« Assassin’s Creed » s’avère être au final une adaptation plutôt honnête et dense des jeux vidéos produits par Ubisoft. Sur une trame scénaristique similaire au premier jeu de 2007, le film de Justin Kurzel a pourtant bien du mal à convaincre pleinement, en raison d’un script souvent très confus et d’une avalanche d’effets spéciaux 3D particulièrement indigestes. Le film vaut surtout pour ses incroyables séquences de combat, alternant entre le passé en 1492 et le présent en 2016, incluant quelques cascades spectaculaires filmées à un rythme effréné. « Assassin’s Creed » ne fait pas dans la dentelle, et le réalisateur assume son spectacle de bout en bout, dans un véritable déluge de fureur, de combats et de conspirations à l’échelle mondiale. En jouant la carte de la lutte ancestrale de deux organisations ennemies, les Assassins et les Templiers, le film de Justin Kurzel joue clairement la carte des théories conspirationnistes modernes (les loges templières dévoilées dans le film rappelant clairement celles de la Franc-Maçonnerie contemporaine) qui ne servent ici de prétexte qu’à une longue succession de scènes de bataille épiques totalement déchaînées. Le problème, c’est que les scènes d’action sont filmées de manière illisible par une caméra à l’épaule épileptique qui bouge dans tous les sens, renforçant le caractère indigeste des visuels du film. Le budget semble conséquent ici, avec des effets spéciaux impressionnants – incluant des scènes quasi mystiques avec l’Animus – et des cascades démentielles, réalisées sans trucage, dans des lieux réels pour renforcer le côté réaliste des décors. Malheureusement, et malgré tous les moyens mis en œuvre, « Assassin’s Creed » a bien du mal à convaincre le public et semble avoir divisé une bonne partie des critiques : considéré comme l’une des meilleures adaptations ciné d’un jeu vidéo, le film semble avoir aussi déçu par sa sur-utilisation des images de synthèse, son scénario confus et laborieux, bien qu’il faille saluer ici le concept original de ce blockbuster particulier qui ne ressemble finalement à aucun autre. Niveau casting, on retrouve deux des meilleurs acteurs du moment, Michael Fassbender et Marion Cotillard (vue récemment dans le « Allied » de Robert Zemeckis), entourés de seconds rôles solides incluant Jeremy Irons, Charlotte Rampling, Denis Ménochet, Michael K. Williams ou Brendan Gleeson, un casting étonnamment riche pour un film adapté d’un jeu vidéo. Les acteurs semblent s’être donnés à fond sur cette superproduction de 125 millions de dollars. Hélas, le résultat est particulièrement inégal et le film déçoit tout en étant assez fidèle aux jeux d’origine. Froid, mécanique et indigeste, « Assassin’s Creed » s’avère visuellement indigeste, totalement desservi par une trame scénaristique très alambiquée et des personnages très creux dont on ne parvient pas vraiment à s’attacher. Malgré de très bonnes idées, la sauce ne prend pas – sans oublier une bande son abrutissante dominée par des basses tonitruantes à vous défoncer les oreilles ! –

Justin Kurzel collabore à nouveau sur « Assassin’s Creed » avec son frère Jed Kurzel, plus connu en tant que chanteur et guitariste du groupe australien The Mess Hall. Kurzel avait déjà fait les musiques des films précédents de son frère, « Snowtown » (2011) et « MacBeth » (2015) – il est aussi annoncé sur le très attendu « Alien : Covenant » de Ridley Scott – La musique de « Assassin’s Creed » s’impose avant tout par son utilisation très prononcée des percussions, des ambiances électroniques étranges et des parties orchestrales sombres et agressives. Dès « Initiation/Intro Running », Jed Kurzel nous plonge dans une ambiance étrange à l’aide d’un motif mystérieux et entêtant de quatre notes. Puis, les percussions mettent en place un ostinato brutal et tribal accompagné de cordes oscillant entre live et samples. A noter ici le jeu étrange des instruments produits par le sul ponticello (jeu sur le chevalet) et un premier motif d’action introduit à la fin de « Intro Running », évoquant les exploits de Callum Lynch/Aguilar de Nerha. Dans « Execution Onwards », le compositeur suggère la sombre destinée de Callum lors de son exécution au début du film à l’aide de cordes dramatiques et élégiaques toutes en retenue. L’étrange motif introductif de quatre notes est ici repris, baignant dans une atmosphère sonore mêlant sons électroniques mystérieux et parties orchestrales limitées ici aux cordes, aux cuivres et aux percussions tribales/guerrières. Kurzel expérimente ici autour de son matériau sonore sans grande originalité, recyclant certaines idées empruntées à John Powell (on pense ici aux « Jason Bourne ») ou à Junkie XL (« Mad Max Fury Road »). Dans « Abstergo Rooftop », les cordes développent une mélodie mystérieuse sur fond de tenues de contrebasses et de notes éthérées des synthés suggérant la découverte de l’institut Abstergo où se trouve Callum. Plus ambiguë, la musique ici évoque un mélange d’émerveillement, de mystère et d’inquiétude avec une certaine adresse, sans jamais en faire de trop.

La première scène de l’Animus (« Animus Room ») permet à Jed Kurzel d’amplifier l’atmosphère sombre et mystérieuse de sa partition avec un adroit mélange d’orchestre et d’électronique, le sound design restant très présent sans jamais prendre le pas sur la partie symphonique. On retrouve ici ce jeu étrange des cordes, dont les notes staccatos répétitives sont renforcées par une partie synthétique intrigante qui instaurent une ambiance sonore particulière sur la scène. Un grand crescendo dramatique accompagne la première scène où Callum teste l’Animus et se retrouve plongé dans le passé de son ancêtre du XVe siècle, Aguilar de Nerha. A noter ici l’emploi des percussions guerrières à la Junkie XL et de parties électro un brin plus expérimentales. On débouche ainsi sur cette première scène d’action vue du côté d’Aguilar dans « 1st Regression/To Mountain Village/Wagon Chase », séquence bruyante et tonitruante où le motif d’action des cordes en sul ponticello est repris en grande pompe sur fond de percussions belliqueuses/tribales. On notera ici de vagues sonorités arabo-andalouses évoquant l’Espagne du XVe siècle, Jed Kurzel conservant malgré tout une approche très moderne à travers l’emploi des percussions et de l’électronique. Très inspiré de John Powell, ce morceau rappelle aussi le « Captain Phillips » d’Henry Jackman. Dommage que ces morceaux d’action soient souvent très répétitifs et écrit de manière assez terne, toujours sur la même note tenue, avec un simple enchaînement de percussions et de cordes : on aurait aimé entendre quelque chose de bien plus ambitieux, plus proche des excellentes musiques pour la série des jeux vidéos !

Dans « Cal Recuperates », Callum se repose après sa première régression dans l’Animus au son de cordes planantes et de notes vaporeuses de piano, plus fragiles et intimistes. Le sound design est développé dans l’atmosphérique « Sofia + Rikkin » qui semble surgir tout droit d’un score de Cliff Martinez, tout comme le sombre « Bleeding Effect » ou l’intriguant « Sofia’s Lab » et son utilisation adroite des cordes qui créent une ambiance vaguement médiévale planante et pleine de mystère. L’action reprend de plus belle dans « 2nd Regression/Rooftop Chase », sans aucune prise de risque particulière. Kurzel se contente de recycler les formules habituelles du genre, sans aucune originalité : percussions, ostinatos de cordes, sonorités vaguement orientales, rien de bien nouveau sur la forme comme sur le fond : on regrettera par ailleurs le mixage extrêmement bruyant de la musique lors des scènes d’action, le réalisateur ayant largement décuplé les basses et les percussions qui ont parfois tendance à se noyer dans la masse sonore de ces séquences cacophoniques. On préfèrera davantage des moments plus calmes et intrigants comme « Joseph and Cal » qu’aux basses tonitruantes et très fonctionnelles d’un morceau comme « Cal is Attacked » - où l’on remarque néanmoins le retour du motif de 4 notes de Callum Lynch – On entre dans le dernier acte du film avec l’énergique « Underground Fight » débouchant sur le très synthétique « Columbus Suite/To The Port » et ses basses techno/électro agressives, modernes et entêtantes. Le motif d’action oriental des cordes d’Aguilar de Nerha est ensuite repris dans « Ancestors », tandis que « Assassins’ Mutiny » reprend les cordes élégiaques de « Abstergo Rooftop » pour l’un des rares moments plus calmes du score.

Au final, on ressort assez déçu de l’écoute de « Assassin’s Creed » qui s’avère être un score d’action hyper fonctionnel, répétitif, peu inspiré et recyclant toutes les formules musicales habituelles des productions Remote Control à la mode depuis 20 ans à Hollywood : on y retrouve pêle-mêle le flot incessant de percussions belliqueuses, de basses techno modernes, de sound design et d’orchestrations pâteuses et monolithiques qui semblent surgir tout droit d’un score d’Hans Zimmer ou de Junkie XL. Rien de bien nouveau à l’horizon : Jed Kurzel respecte tous les codes du genre sans aucune imagination, privilégiant le bruit et les basses au profit d’une vraie construction musicale narrative, hormis quelques idées thématiques bien présentes. Hélas, c’est trop peu pour pouvoir convaincre pleinement, surtout lorsqu’on connaît l’ampleur des travaux de ses collègues Jesper Kyd, Chris Tilton, Austin Wintory et Brian Tyler sur la série des jeux vidéos. Très bruyante et très présente à l’écran, la musique de « Assassin’s Creed » cherche à nous plonger dans une atmosphère sombre et mystérieuse sans jamais vraiment susciter le moindre enthousiasme, la moindre émotion. Le travail de Kurzel est froid et mécanique, dénué de passion, de folie.« Assassin’s Creed » est par ailleurs tristement révélateur d’une production hollywoodienne malade, où la créativité est plus que jamais aux abonnés absents, la faute à une logique de studio de plus en plus intolérable, phagocytant le travail des compositeurs obligés de reprendre à l’infini les mêmes idées musicales ultra formatées des productions Hans Zimmer/Remote Control. Au bout de la 400ème partition du même genre, on ne peut que ressentir un profond ennui et une très grande lassitude devant un tel marasme artistique et une telle occasion ratée : pourquoi ne pas avoir tout simplement engagé Austin Wintory ou Jesper Kyd sur ce film ?




---Quentin Billard