1-Kinshasa News 1.37
2-Jim's Bedroom 1.27
3-The Gunman 2.55
4-Seven Years Later 1.21
5-Drive to Well 0.51
6-Village People 3.38
7-Head Trouble 1.20
8-Remembering Annie 1.17
9-London Bridge 1.53
10-Cox and Cameras 2.25
11-More Head Trouble 0.33
12-Barcelona 1.31
13-Following Annie 2.20
14-Conference Room 1.19
15-Love Gunman 1.20
16-Drive to Felix's 1.01
17-Penn and Telher 2.41
18-Tripwire 3.50
19-Treehouse 2.23
20-Fairgrounds 2.13
21-Revealing Cox 4.24
22-Fish in a Barrel 3.08
23-Stanley's Death 3.01
24-Who Let the Bulls Out? 4.46
25-Penmanship 2.39
26-Cox and Bull 2.30
27-Reunited 5.21

Musique  composée par:

Marco Beltrami

Editeur:

Silva Screen Records SILED1481

Produit par:
Marco Beltrami, Buck Sanders
Enregistrement et mixage:
John Kurlander
Assistant score mix:
Tyson Lozensky
Orchestrations:
Matt Dunkley
Score additionnel:
Brandon Roberts
Montage musique:
John Warhurst

Artwork and pictures (c) 2015 StudioCanal/Silver Pictures. All rights reserved.

Note: ***
THE GUNMAN
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Marco Beltrami
« The Gunman » est l’adaptation cinématographique du roman « La position du tireur couché » de l’écrivain français Jean-Patrick Manchette publié en 1981. Confié à Pierre Morel – auteur de « Taken » et « Banlieue 13 » - « The Gunman » met en scène Sean Penn dans le rôle de Jim Terrier, un ancien tireur des forces spéciales devenu un mercenaire black-ops qui travaille dans la République Démocratique du Congo. En 2006, sa mission consiste à assassiner le ministre des mines qui s’oppose aux exploitations minières des grandes compagnies multinationales, sous couvert d’une fausse opération humanitaire. Jim fréquente Annie (Jasmine Trinca), une doctoresse qui travaille pour une ONG dans un dispensaire et dont il est tombé amoureux. Une fois sa mission accomplie, Jim est obligé de quitter l’Afrique et de laisser derrière lui Annie. Il décide alors d’abandonner définitivement sa carrière de mercenaire. Huit ans plus tard, Jim revient au Congo et se fait brusquement attaquer par un groupe de tueurs locaux, qu’il parvient à neutraliser in extremis. Désireux de savoir pourquoi quelqu’un cherche à le supprimer, Jim s’envole à Londres où il retrouve un ancien collègue mercenaire qui lui révèle que Cox (Mark Rylance), leur ancien patron au Congo, a fondé une grande entreprise de sécurité qui signe d’importants contrats avec le Pentagone. La firme de Cox cherche ainsi à assassiner tous les anciens mercenaires qui auraient travaillé par le passé avec Cox, afin de ne pas entacher sa nouvelle réputation de PDG d’une entreprise en plein essor. Et comme si cela ne suffisait pas, Jim découvre que l’agent du FBI Jackie Barnes (Idris Elba) s’intéresse de près à l’affaire. Alors que plusieurs de ses amis sont assassinés, Jim est obligé de négocier avec Cox tandis que ce dernier a retrouvé Annie et la kidnappe pour servir de monnaie d’échange. De son côté, Jim réunit des preuves impliquant Cox dans l’assassinat du ministre des mines au Congo en 2006 et compte bien s’en servir pour procéder à un échange en Espagne, pendant une corrida. Mais Jim Terrier doit maintenant mettre ses réflexes à rude épreuve, alors qu’il souffre de maux de tête sévères liés à son passé violent, et qui pourraient bien s’avérer fatal pour sa santé.

Sur une intrigue de conspiration et de chasse à l’homme classique, Pierre Morel élabore un thriller haletant qui repose quasi entièrement sur les épaules du vétéran Sean Penn. Le roman de Jean-Patrick Manchette avait par ailleurs déjà été adapté au cinéma en 1982 avec le film « Le Choc » de Robin Davis, avec Alain Delon dans le rôle principal (le film fut un énorme bide et se fera massacrer par la critique). Dans « The Gunman », l’histoire est transposée dans un contexte plus contemporain, évoquant la crise politique de la République du Congo et le conflit qui sévit dans ce pays depuis des années. Le film évoque aussi l’univers des ONG et des actions humanitaires, qui servent ici de toile de fond à un scénario plus classique reprenant tous les codes du film d’action : poursuites, fusillades, chasses à l’homme, suspense, rien ne manque ici, si ce n’est un semblant d’originalité dans un script qui brasse de l’air et manque clairement d’originalité. Prévisible et sans surprise, l’histoire avance de façon linéaire. Le film se rattrape néanmoins grâce à un casting prestigieux, réunissant Sean Penn, l’impeccable Javier Bardem, Mark Rylance, Idris Elba, Ray Winstone et la séduisante actrice italienne Jasmine Trinca. Dommage cependant que le film sacrifice un peu trop ses personnages aux nombreuses scènes d’action : Pierre Morel suggère que le personnage de Jim Terrier est un être en quête de rédemption, mais il ne parvient pas à développer cette idée jusqu’au bout et préfère le montrer comme le héros ordinaire de film d’action U.S., qui tue les méchants et sauve la fille à la fin du film. Réalisé de façon impersonnelle et sans aucune prise de risque, « The Gunman » est donc un divertissement calibré qui doit beaucoup à la force et la musculature impressionnante de Sean Penn, mais passe totalement à côté d’un sujet qui aurait pu s’avérer passionnant et subversif entre les mains d’un autre cinéaste (les mercenaires professionnels engagés par les grandes multinationales pour faire le sale boulot et protéger les intérêts des compagnies dans les pays d’Afrique). Par ailleurs, le film sera un bide retentissant à sa sortie en salles en 2015, rapportant à peine 24 millions de dollars sur les 40 millions déboursés pour faire le film. Dommage, d’autant que le livre de Jean-Patrick Manchette méritait probablement un tout autre traitement : à quand une vraie bonne adaptation de ce roman au cinéma ?

La partition musicale de Marco Beltrami apporte son lot de tension et de rythmes incisifs au film de Pierre Morel. A noter que ce n’est pas la première fois que Beltrami travaille avec un cinéaste français, puisqu’il avait déjà collaboré par le passé avec Jean-François Richet sur « Mesrine » en 2008 puis Bertrand Tavernier sur « In The Electric Mist » en 2009. A la première écoute, la musique de « The Gunman » n’apporte aucune surprise particulière et va là directement où on l’attend : le score mélange ainsi orchestre symphonique (constitué principalement de cordes et de cuivres) avec une pléiade de percussions et de sonorités électroniques modernes. Imitant le style des musiques d’action modernes de l’ère des productions Remote Control, le score de « The Gunman » débute sans surprise sur un ensemble de percussions martelées dans « Kinshasa News » posant les bases de l’histoire lors des images d’archive des médias qui introduisent le film et rappellent la crise et le conflit qui sévit au Congo. « Jim’s Bedroom » met l’accent sur les sonorités électroniques atmosphériques et utilise un premier thème de piano plus mélancolique accompagné ici de quelques cordes pour le personnage de Jim Terrier, incarné dans le film par Sean Penn. « The Gunman » développe l’électronique et nous plonge dans une ambiance plus sombre au détour d’un crescendo orchestral brutal, pour la séquence où Jim s’apprête à abattre le ministre africain au début du film. « Seven Years Later » nous amène sept ans après les événements décrits au début du film. Beltrami rappelle alors la période contemporaine en accentuant habilement les rythmes synthétiques et les samples électroniques avec une inventivité qui lui est chère – on notera ici l’utilisation d’instruments aux sonorités vaguement africaines, intégrés à sa partition pour évoquer les décors congolais du film – le thème de Jim est ensuite repris aux cordes dans « Drive to Well » pour évoquer le nouveau quotidien de Jim au Congo, ayant enfin tourné le dos à son passé de tueur à gages.

Mais la réalité rattrape hélas notre homme dans « Village People », alors qu’un groupe de mercenaires africains tentent alors d’éliminer Jim. Beltrami accentue ici le travail des percussions en tout genre comme il le fit dans des scores comme « Wolverine » ou « World War Z », avec la partie électronique omniprésente tout au long de la musique. Premier morceau d’action-clé du score, « Village People » rappelle l’inventivité du compositeur dans le travail des sonorités et des percussions (ici, un mélange entre les percussions africaines et les percus plus modernes typiques des musiques d’action d’aujourd’hui). A la violence sèche de ces scènes, Beltrami répond par une musique percussive d’une grande brutalité et sans concession, avec quelques ponctuations de cordes et de cuivres qui font monter la tension. Idem pour « Head Trouble » où le tempo s’accélère nerveusement. Dans « Remembering Annie », Beltrami calme le jeu en développant une ambiance plus morose et mélancolique alors que le tueur à gages se souvient de la femme qu’il a laissé derrière lui en quittant le Congo il y a sept ans. « London Bridge » suggère la détermination de Jim à retrouver ses anciens complices d’il y a sept ans pour tenter de comprendre qui essaie de l’éliminer et dans quel but. La musique devient ici plus rythmique avec ses pulsations électroniques modernes rappelant par moment les « Jason Bourne » de John Powell, sans grande surprise particulière. A noter un étrange « More Head Trouble » pour lequel Beltrami expérimente autour de ses sonorités électroniques alors que Jim est à nouveau en proie à de terribles maux de tête liés à son passé violent. « Barcelona » développe un motif de 3 notes associé à la quête de Jim qui va tenter de stopper la conspiration orchestrée contre lui.

Plus intéressant, « Following Annie » évoque la filature d’Annie à Barcelone à l’aide d’une belle reprise du thème de Jim au piano (comme dans le très romantique « Love Gunman »), tandis que « Conference Room » nous ramène dans de l’atmosphérique pur, Beltrami accentuant ici le travail autour de cordes plus sombres. Dans « Drive to Felix’s », le mystérieux motif de 3 notes est repris alors que Jim se rend chez Félix (Javier Bardem) en Espagne pour affronter son ancien complice. On regrette cependant l’abondance de ces morceaux atmosphériques souvent fonctionnels qui n’apportent pas grand chose en écoute isolée et déçoivent par leur côté quelconque et le relatif anonymat de certaines idées sonores, typiques des musiques d’action/suspense modernes, sans grande conviction. On pourrait prendre pour exemple « Tripwire » pour la scène de l’affrontement dans la maison de Félix, avec ses pulsations métronomiques incessantes et ses samples électro qu’on a l’impression d’avoir déjà entendues des milliers de fois auparavant. Plus intéressant, « Fairgrounds » est un nouveau morceau d’action déchaîné utilisant les percussions de manière plus inventive. La tension monte dans « Revealing Cox » jusqu’au superbe « Fish in A Barrel », pour l’affrontement final entre Jim et les hommes de main de Cox dans l’arène en Espagne. Le morceau s’avère beaucoup plus orchestral et reprend le style action plus musclé de « A Good Day to Die Hard » ou « Wolverine » - on y retrouve par ailleurs quelques influences de Jerry Goldsmith, notamment dans l’emploi du piano martelé dans le grave – L’affrontement final se poursuit dans le sombre « Who Let The Bulls Out ? » et « Penmanship » avec ses ostinatos répétitifs de cordes, sans oublier le climax brutal de « Cox and Bull », qui se termine de façon plus dramatique et apaisée, avant la reprise finale du thème de Jim dans « Reunited » avec une magnifique envolée orchestrale triomphante.

Vous l’aurez donc compris, c’est un Marco Beltrami ordinaire et prévisible que l’on découvre dans la musique de « The Gunman », un score d’action/suspense écrit en pilotage automatique, sans originalité particulière, et sans la puissance et la force de « Live Free or Die Hard » ou « A Good Day to Die Hard ». Le score remplit sa part du contrat dans le film de Pierre Morel, apportant le suspense, la tension et l’énergie nécessaire aux scènes musclées sans jamais baisser ses gardes, et ce jusqu’au final plus paisible. Beltrami convoque le lot habituel de sonorités électroniques, de percussions et de rythmes modernes pour arriver à ses fins, mais il manque à sa musique un point de vue plus personnel, des idées plus radicales qui lui auraient permis de se hisser au dessus de la masse, un fait plutôt regrettable lorsqu’on sait pourtant à quel point le compositeur est capable de faire des choses bien plus personnelles et passionnantes lorsqu’on lui en donne réellement les moyens. « The Gunman » reste donc un score d’action fonctionnel et sans surprise, qui a bien du mal à passionner dans le film comme sur l’album, où l’ensemble demeure figé par un style atmosphérique répétitif et des morceaux d’action solides mais sans réel génie : un score certes réussi sur les images mais plutôt dispensable et qu’on oubliera probablement très vite.




---Quentin Billard