1-Theme From Rocky 2.58*
2-Gym 2.06
3-Paulie's Robot 0.42
4-Anniversary 1.42
5-Drago Suite 2.15
6-Apollo's Death And Funeral 2.58
7-Stairs 0.59
8-Rocky And Son 2.01
9-Training Montage 5.10
10-Up The Mountain 1.51
11-Pre-Fight 2.06
12-Drago's Entrance 1.02
13-War 4.39
14-Knockout 0.34
15-Victory 0.53**

*Ecrit par Bill Conti,
Ayn Robbins, Carol Connors
Arrangé par Vince DiCola
**Ecrit par Bill Conti
Arrangé par Vince DiCola.

Musique  composée par:

Vince DiCola

Editeur:

Intrada MAF 7109

Musique conduite par:
Jeremy Lubbock
CD produit par:
Vince DiCola, Douglass Fake
Producteur exécutif CD:
Roger Feigelson
Score arrangé et produit par:
Vince DiCola, Ed Frugré
Orchestrations arrangées et conduites par:
Jeremy Lubbock
Orchestrations additionnelles:
Terry "Doc" Mahady
Assistante de production:
Regina Fake

American Federation of Musicians.

Artwork and pictures (c) 1985 Metro-Goldwyn-Mayer Studios, Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
ROCKY IV
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Vince DiCola
Véritable franchise à succès incontournable du cinéma américain, la saga « Rocky » permit non seulement à Sylvester Stallone d’accéder au rang de superstar hollywoodienne mais devint aussi le parangon du film d’action, dans lequel le héros originaire des quartiers populaires se bat pour une bonne cause et accède au rêve américain à force de persévérance. On se souvient par ailleurs que la dimension sociale du récit était très présente dans le tout premier épisode de John G. Avildsen sorti en 1976 : comme Rocky Balboa lui-même, Stallone était encore jeune et peu connu du public, il avait donc tout à prouver pour réussir son pari et s’imposer à Hollywood. Conscient du succès de son personnage et de ses films, Stallone se tailla ainsi la part du lion en réalisant lui-même les épisodes suivants (hormis l’épisode 5 à nouveau réalisé par John G. Avildsen en 1990 et souvent considéré comme le plus faible de toute la franchise). Le film débute lorsqu’Ivan Drago (Dolph Lundgren), un boxeur soviétique d’1 mètre 97, débarque aux Etats-Unis pour participer à une série de matchs d’exhibition. Son équipe veut prouver aux américains que les méthodes d’entraînement mises en place par l’URSS fonctionnent parfaitement, et qu’Ivan, un champion dans son pays, est à même de battre n’importe quel boxeur américain. Au cours d’une conférence de presse, Drago refuse d’affronter Apollo Creed (Carl Weathers), convaincu qu’il ne représente aucun intérêt pour lui et qu’il le battrait trop facilement. Piqué au vif, Creed se révolte contre l’arrogance du soviétique et décide de sortir de sa retraite pour affronter officiellement Ivan Drago sur le ring. Mais son ami Rocky Balboa le met en garde contre son nouvel adversaire et l’incite à abandonner ce combat. Convaincu qu’il peut battre le soviétique, Apollo ridiculise son adversaire au cours d’un show télévisé d’avant-match, puis très vite, le match tourne à la catastrophe alors que Drago ne fait qu’une bouchée d’Apollo. A la fin du premier round, Rocky demande à Creed d’abandonner le combat mais en vain. Peu de temps après, Apollo est victime d’un terrible uppercut de Drago au cours du second round et décède sur le ring. Terrassé par la mort de son ami dont il se sent coupable, Rocky décide finalement de remonter à son tour sur le ring et d’affronter Ivan Drago sur le sol russe, le soir de Noël, afin d’honorer la mémoire d’Apollo Creed.

Sorti en 1985, « Rocky IV » est sans conteste le film qui a connu le plus grand succès dans la saga et aussi celui qui a été le plus critiqué en raison de son idéologie politique plus que douteuse. Réalisé en pleine ère reaganienne, « Rocky IV » est un pur produit de propagande. Il faut se souvenir que le clivage entre les USA et l’URSS était toujours à l’ordre du jour dans les années 80 et que la Guerre Froide faisait encore partie du monde à cette époque. Pour Sylvester Stallone, qui symbolise depuis les débuts de « Rocky » au cinéma le modèle de réussite sociale tant convoité et idéalisé par les américains, il paraissait évident de suivre l’évolution de son personnage emblématique devenu une sorte d’alter-ego cinématographique enfin devenu une star adulée de tous. C’est pourquoi Stallone incarne dans les années 80 le rêve américain et devient le porte-parole de l’étendard U.S. avec la franchise « Rambo » pour le côté militariste et revanchard, puis « Rocky » pour l’idée de l’ascension vers la gloire et les valeurs symboliques portées par le sport. Seulement voilà, ce qui paraissait suggéré dans les épisodes 2 et 3 éclate ici au grand jour dans ce quatrième épisode : Rocky n’est plus qu’un faire-valoir de l’Oncle Sam doublé d’un donneur de leçons. En plaçant cette fois-ci Rocky face à un adversaire soviétique, c’est toute la thématique de la Guerre Froide qui refait ici surface avec un message asséné lourdement tout au long du film : d’un côté, on voit le célèbre boxeur américain se dépasser et s’entraîner à la dure, de l’autre, un colosse soviétique corrompu qui reçoit moult piqûres et se dope au maximum pour devenir invincible.

Comme toujours, le film vaut surtout pour la qualité de ses scènes de boxe, le match final entre Rocky et Drago tournant au pugilat pur et simple comme dans les autres épisodes, à ceci près que le film se conclut sur cette fameuse réplique de Stallone : « si j’ai changé, et que vous avez changé, alors tout le monde peut changer ! ». Rocky est si fort qu’il parvient même à obtenir l’adhésion du public soviétique qui lui était hostile au début du match. Le film tente alors d’apporter un message de paix en apaisant les tensions américaines/soviétiques, mais en vain. Le métrage est réalisé à grands coups de massue par un Stallone en perte de vitesse, plus soucieux de son image auprès du public américain et des recettes de ses films que par la qualité même de ses oeuvres – son passage chez la Cannon lui vaudra même l’un des plus gros nanars de sa carrière, « Over the Top » réalisé par Menahem Golan en 1986 – Le film reste néanmoins populaire auprès du public grâce à la performance de Dolph Lundgren, dont le succès de « Rocky IV » lancera sa carrière au cinéma, sans oublier la séquence 80’s culte où James Brown entonne « Livin’ in America » lors d’un show d’avant-match totalement extravagant et typiquement américain. Capitalistes vs. Communistes ? Tel aurait pu être le sous-titre de ce quatrième épisode de la franchise à succès de Sylvester Stallone. Hélas, cinq ans plus tard sortira un « Rocky V » plutôt raté et qui connaîtra un succès très modéré au cinéma, obligeant Stallone à abandonner sa luxueuse franchise avant la résurrection totalement inattendue du sixième épisode tourné en 2006 et du spin-off « Creed » réalisé par Ryan Coogler en 2016.

« Rocky IV » est l’un des rares épisodes de la franchise à ne pas avoir été mis en musique par Bill Conti mais par le compositeur Vince DiCola, pianiste et percussionniste ayant travaillé avec des artistes tels que Cheryl Lynn ou Juice Newton, connu pour ses arrangements sur les chansons de « Staying Alive » aux côtés de Frank Stallone. C’est d’ailleurs grâce à son travail avec son frère que Sylvester Stallone engagea finalement Vince DiCola pour écrire une musique plus moderne et électronique sur « Rocky IV », collant davantage à l’esthétique de son montage inspiré des clips MTV des années 80. Epaulé par le claviériste Casey Young et l’orchestrateur Jeremy Lubbock, Vince DiCola sur « Rocky IV » pour une approche résolument électronique, utilisant les synthétiseurs analogiques bien connus au milieu des années 80 comme le Moog, l’Emu ou l’Oberheim. Le score fait aussi appel à un orchestre à cordes pour l’aspect plus humain du récit et des instruments additionnels incluant basse, guitare électrique et batterie. Le score de DiCola doit se frayer un chemin tout au long du film entre les différentes chansons utilisées dans la bande son de « Rocky IV », mais les quelques 30 minutes écrites par le compositeur sont enfin présentées aujourd’hui dans leur intégralité sur l’album d’Intrada publié en 2010. Bien évidemment, DiCola s’inscrit dans la continuité des précédents travaux de Bill Conti en reprenant son célèbre thème principal, « Gonna Fly Now », présenté ici dans un arrangement électro/rock typiquement 80’s dans « Theme from Rocky » (avec son lot de chorus de synthé qui paraissent aujourd’hui bien kitsch).

Le premier morceau entendu dans le film est « Gym », pour la séquence où Rocky et Apollo s’entraînent vers le début du film. « Gym » est écrit dans un style jazz/funky très 70’s, notamment dans l’emploi des synthés improvisés et des riffs de basse avec sa batterie caractéristique – on notera ici une allusion furtive au fameux thème de Bill Conti - DiCola s’essaie même à l’électro expérimentale typiquement 80’s dans « Paulie’s Robot » pour la scène où Rocky reçoit un robot domestique pour son anniversaire (scène totalement inutile dans l’histoire). « Anniversary » est en revanche plus intéressant, puisqu’il nous propose un morceau poignant pour piano et cordes durant une première scène intime entre Rocky et Adrian. A noter à 1:04 la reprise lente et touchante du thème de Bill Conti, magnifiquement accompagné par des cordes tendres et un piano délicat. A contrario, « Drago Suite » est beaucoup plus sombre et dévoile le motif associé à Ivan Drago, le colosse russe que va devoir affronter Rocky à la fin du film. Vince DiCola opte ici pour une approche résolument sombre, froide et métallique dans le choix de ses sonorités synthétiques. Le thème apparaît à 0:39 et se distingue par sa pulsation électronique entêtante, ses percussions métalliques, ses nappes sonores dissonantes et ses samples imitant une respiration humaine. Le message de « Drago Suite » est on ne peut plus clair : le soviétique est non seulement une montagne de muscles mais aussi une vraie machine à tuer, dont les boxeurs américains doivent se méfier absolument !

« Apollo’s Death and Funeral » illustre la scène du combat entre Drago et Apollo, lorsque ce dernier se retrouve au tapis au second round et meurt d’une attaque cardiaque suite à ses blessures. Le morceau prend ici une tournure dramatique et sombre avec le retour des sonorités menaçantes de Drago et une mélodie de piano/synthés/cordes tragique et intense, annonçant la catastrophe à venir. La séquence des funérailles d’Apollo Creed permet à DiCola de calmer le jeu temporairement en développant un mélange de piano, cordes et violoncelle pour parvenir à ses fins, avec une certaine émotion, une atmosphère de tristesse et de regret pour Rocky, qui n’a pas pu empêcher son ami d’aller se tuer sur le ring. L’émotion est à son comble dans « Stairs », alors qu’Adrian tente de dissuader Rocky de faire la même erreur que son ami en partant combattre à son tour Drago en URSS. DiCola accentue ici le travail autour du piano et des cordes pour parvenir à ses fins, le tout avec une certaine délicatesse et une retenue touchante évacuant tout aspect mélodramatique excessif. Le très beau « Rocky and Son » reprend le même schéma de cordes/piano émouvant alors que Rocky passe du temps avec son fils, pièce qui se conclut sur une superbe reprise du thème de Conti lorsque le boxeur part pour l’URSS (dès 1:29). On passe enfin aux choses sérieuses dans « Training Montage », l’inévitable séquence des préparatifs au combat, où Rocky s’entraîne durement à son arrivée en Russie. Ici, l’approche de DiCola est on ne peut plus manichéenne, à l’instar du film, puisqu’il évoque d’un côté l’entraînement de Drago avec des synthés sombres et menaçants, et de l’autre celui de Rocky avec un thème de claviers plus déterminé et des rythmes rock plus optimistes et enjoués.

Le thème de l’entraînement (à 1:31) est ici l’un des moments forts de la partition de « Rocky IV », construit sous la forme d’un anthem 80’s mémorable indissociable du film de Sylvester Stallone (Hans Zimmer composera des thèmes assez similaires par la suite au début des années 90, et notamment sur le « Days of Thunder » de Tony Scott). A noter l’emploi des percussions militaires qui accentuent l’idée de la Guerre Froide entre l’américain et le soviétique, idée symbolique au coeur même de l’intrigue du film. De la même façon, « Up the Mountain » prend une tournure plus héroïque pour la séquence où Rocky s’entraîne à gravir la montagne, sans aucun doute l’un des morceaux les plus énergiques et les plus mémorables de « Rocky IV ». « Pre-Fight » évoque l’appréhension avant le combat final, tandis que « Drago’s Entrance » développe la thématique sombre et menaçante de Drago pour son arrivée sur le ring. DiCola se voit offrir l’opportunité de développer le thème de Drago à loisir avec le retour de l’effet de respiration et un ensemble de synthétiseurs massifs et sombres. « War » est quand à lui l’un des climax du film, illustrant durant le match final une scène où Rocky parvient à déstabiliser Drago en lui assénant de violents coups. DiCola met ici l’accent sur les rythmes rock, la guitare électrique, l’orchestre (cordes et cuivres) et les mélodies de synthé pop de Rocky, accompagnées des percussions militaires. « War » prend ici une tournure héroïque assez savoureuse nous amenant au dernier acte du film. A noter que dans le film, tout le début du match ne contient aucune musique, jusqu’à cette scène où Rocky parvient enfin à prendre le dessus au son de « War », une idée de mise en scène intéressante qui décuple le pouvoir émotionnel de la séquence.

L’orchestre – associé à Rocky dans le film – prend enfin le dessus dans « Knockout » alors que la superstar américaine parvient à mettre K.O. son adversaire à la fin du film. DiCola enchaîne ensuite sur une superbe reprise du thème de « Victory » de Bill Conti sur un tempo rapide et des orchestrations éclatantes. Au final, Vince DiCola signe un score de qualité pour « Rocky IV », typique des années 80 mais doté d’une énergie appréciable et d’une certaine personnalité. Le score est devenu par la suite une BO culte des années 80 puisque certains morceaux comme « Training Montage » ou « War » ont souvent été réutilisés par la suite dans des cérémonies olympiques ou lors d’événements sportifs importants. La popularité de la musique de « Rocky IV » est telle que le compositeur affirme dans le livret de l’album avoir reçu pendant des années de nombreuses lettres de fans le remerciant pour son travail sur « Rocky IV ». Certes, la partition de Vince DiCola n’a rien d’un grand chef-d’oeuvre et fait partie de ce genre de plaisir coupable typique de son époque. Avec ses rythmes pop et ses vieux synthés analogiques kitsch, le score a bien du mal à franchir l’épreuve du temps. Pourtant, la musique de DiCola n’a rien perdu de sa force et de sa fougue et reste encore aujourd’hui synonyme de dépassement de soi, de courage, de détermination et de volonté. Les fans de « Rocky IV » pourront enfin redécouvrir l’intégralité du score à travers l’excellent album d’Intrada, complet et soigné. Quand au compositeur, il rempilera l’année suivante sur le non moins excellent « Transformers the Movie », dont le score a aussi été édité en CD par Intrada en 2014.




---Quentin Billard