1-The Proposal 4.00
2-Mitch Rapp 4.14
3-Under Surveillance 2.29
4-Hurley 2.22
5-Plutonium 1.45
6-AR Training 2.19
7-Mission Aborted 3.21
8-The Dogs 3.16
9-Annika's Identity 2.07
10-I Trusted You 4.13
11-I Knew Your Family 3.28
12-Animal Spirits 9.45
13-Brace For Impact 3.44
14-Katrina 4.33

Musique  composée par:

Steven Price

Editeur:

Varèse Sarabande 302 067 516 8

Produit par:
Steven Price
Producteurs album:
Cary E. Mansfield, Bryon Davis
Orchestrations:
David Butterworth
Monteur score :
Bradley Farmer
Monteur musique:
Suzanna Peric
Programmation synthé:
Matt Robertson
Solos violoncelle:
William Schofield, Martin Loveday
Glass Harmonica:
Alasdair Malloy

Artwork and pictures (c) 2017 CBS Films Inc. All rights reserved.

Note: ***
AMERICAN ASSASSIN
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Steven Price
Le réalisateur Michael Cuesta se fit particulièrement remarquer en 2001 avec le drame « L.I.E. Long Island Expressway », abordant les thèmes de la recherche sexuelle chez les adolescents et de la pédophilie. Le cinéaste se tourna ensuite vers la télévision en tournant diverses épisodes pour des séries telles que « Six Feet Under », « Dexter » ou « Homeland ». Trois ans après le film « Kill the Messenger » (2014), Cuesta revient en pleine forme avec « American Assassin » qui sort en salles en 2017. Le film est inspiré du roman homonyme de Vince Flynn et devait être initialement confié à Antoine Fuqua puis Edward Zwick, avec le rôle principal prévu à l’origine pour Chris Hemsworth, avant d’être finalement confié au jeune Dylan O’Brien, aperçu récemment dans la trilogie « The Maze Runner ». Le film raconte l’histoire de Mitch Rapp (Dylan O’Brien), un jeune homme dont la fiancée a été tuée par des jihadistes sur une plage d’Ibiza en Espagne, et qui se met en tête de retrouver les terroristes pour venger la mort de sa fiancée. 18 mois plus tard, Rapp fréquente régulièrement des sites internet de jihadistes pour remonter jusqu’au cerveau des attaques au Moyen-Orient, mais la pièce dans laquelle il se trouve avec le chef terroriste est soudainement attaquée par des agents des forces spéciales américaines qui réussissent à éliminer les terroristes et leur leader.

Mitch Rapp se retrouve ensuite dans les bureaux de la CIA et se voit proposer un nouveau job par la directrice Irene Kennedy (Sanaa Lathan) : rejoindre l’unité d’opérations black baptisée Orion, dirigée par un ancien Navy Seal et vétéran de la Guerre Froide, Stan Hurley (Michael Keaton) qui est chargé de former les nouvelles recrues. Peu de temps après, les américains apprennent que des armes nucléaires ont été dérobées dans un arsenal nucléaire russe, et qu’elles seraient destinées à un groupuscule iranien opposé aux accords nucléaires entre l’Iran et les USA. Le plutonium est alors intercepté en Pologne et dérobé par un ancien membre des Navy Seal et ex-agent d’Orion présumé mort au cours d’une mission, et qui se fait appeler aujourd’hui le « Fantôme » (Taylor Kitsch). Hurley décide alors d’envoyer Mitch et sa nouvelle équipe à Istanbul en Turquie pour tenter d’intercepter le commanditaire pour qui le Fantôme travaille activement, mais toute l’équipe est rapidement repérée et l’ex-agent corrompu réussit à s’enfuir avec le détonateur de l’arme nucléaire après avoir tué l’un des collègues de Rapp. Ce dernier se retrouve alors obligé de collaborer avec Annika (Shiva Negar), une agent infiltrée qui travaille pour l’Iran et qui souhaite à son tour stopper les conspirateurs iraniens qui souhaitent récupérer les armes nucléaires et de déclencher une guerre au Moyen-Orient.


UN FILM D’ACTION SANS SURPRISE


« American Assassin » est donc une adaptation ordinaire d’un roman plutôt ordinaire qui semble avoir été conçu dans l’ère du temps. Le film s’intéresse au conflit au Moyen-Orient et aborde le spectre du terrorisme dans le premier acte du film, avant d’évoluer très vite vers une bête série-B d’action façon « Jason Bourne », solidement rythmée et superbement interprétée par Dylan O’Brien et l’impeccable Michael Keaton, vétéran du cinéma américain qui reste à jamais l’éternel interprète du « Batman » de Tim Burton en 1989. Le film aborde aussi le contexte de tensions géopolitiques sur fond d’agents infiltrés et d’espionnage façon 007, avec son lot de faux-semblants, de trahison et de revanche. Car c’est bien de cela qu’il s’agit ici : Mitch Rapp est un homme brisé par la haine, qui décide de supprimer tous ceux qu’il juge responsable de la mort de sa fiancée. C’est comme cela qu’il deviendra un membre black-op à part entière travaillant clandestinement pour la CIA dans de nombreux pays du monde entier. Dylan O’Brien fait son boulot avec une certaine conviction mais il manque au jeune acteur un certain charisme (et une plus grande expérience du cinéma?) qui lui aurait permis de se hisser grandement au dessus de la masse. On a parfois l’impression que les producteurs l’ont choisi lui car ils ne pouvaient pas se payer une star avec plus de bagage (on est très loin de Daniel Craig ou même Matt Damon !).

C’est fort dommage car le film de Michael Cuesta contient pourtant son lot de bonnes idées, à commencer par des scènes mémorables avec Michael Keaton, qui semble voler la vedette à tous les acteurs du film et s’impose par sa présence et sa force indéniable. Comme dans la plupart de ses derniers films, l’acteur impressionne par sa posture, son regard dur et l’aura qu’il dégage dans la plupart de ses scènes. A ses côtés, les seconds rôles font pâle figure: Sanaa Lathan, Taylor Kitsch, Scott Adkins ou le vétéran et shakespearien David Suchet tentent de co-exister dans le film, mais on retient finalement surtout ici les scènes avec Michael Keaton. « American Assassin » aborde aussi le thème délicat du jihadisme et du terrorisme avant d’abandonner complètement cette idée dans un second acte plus conventionnel ou le film se transformer en une longue chasse à l’homme sur fond de contexte géopolitique moderne. Dès lors, Cuesta prouve qu’il sait filmer de solides scènes d’action et accumule les scènes violentes de combat et de poursuite avec une intensité remarquable mais sans éclat particulier. Ainsi donc, malgré toutes ses bonnes intentions, « American Assassin » n’est rien de plus qu’une solide série-B parfaitement réalisée mais sans grande conviction, idéale pour se divertir le temps d’une soirée pluvieuse.


UN SCORE D’ACTION SURVITAMINÉ


La musique de « American Assassin » a été confiée au britannique Steven Price, compositeur remarqué ces dernières années pour ses participations à des films tels que « Gravity » (2013), « Fury » (2014) ou « Suicide Squad » (2016). Le compositeur nous revient en pleine forme sur « American Assassin » où il livre un score d’action prévisible mais assez bien troussé et de bonne facture. Le film débute sur « The Proposal », qui dévoile le thème principal joué par un violoncelle mélancolique (à 0:37) sur fond de nappes de cordes et de sonorités électroniques éthérées. Le thème évoque clairement ici la quête de revanche du héros campé par Dylan O’Brien suite à la mort de sa fiancée dans un attentat terroriste. La seconde partie s’oriente quant à elle vers un style plus sombre et atmosphérique à l’aide de cordes dramatiques et de sonorités électroniques pesantes et tendues. Le ton est ici immédiatement donné : la composition musicale de Steven Price est sombre, mélancolique et imposante comme il se doit. Dès « Mitch Rapp », on retrouve le style électronique habituel du compositeur à l’aide des rythmiques synthétiques modernes, de cordes et de quelques notes de guitare électrique mystérieuses. La musique semble avancer inlassablement sur un rythme soutenu, évoquant les efforts de Rapp pour retrouver les assassins de sa fiancée et venger sa mort. On devine ici l’influence plus qu’évidente des « Jason Bourne » de John Powell, dont on retrouve le même style synthético-orchestral habituel mais avec des orchestrations un brin plus imposantes, notamment à travers le puissant crescendo orchestral de la coda de « Mitch Rapp ». C’est l’occasion pour Steven Price de dévoiler ici le thème associé à Rapp tout au long du film, à la guitare.


ANALYSE DE LA MUSIQUE


Dans « Under Surveillance », le mélange de cordes et de loops et samples électroniques divers fonctionne parfaitement, maintenant un rythme et une tension permanente à l’écran, même si l’on retrouve toujours le défaut habituel du compositeur anglais : l’omniprésence écrasante de l’électronique qui semble envahir constamment des parties orchestrales souvent rachitiques et peu sophistiquées. « Hurley » évoque de son côté le personnage campé par Michael Keaton dans le film avec des cordes plus sombres et des rythmiques synthétiques plus « bad ass », suggérant l’expérience, les convictions et le charisme de Stan Hurley dans le film. « Plutonium » suggère les méfaits de Ghost lorsque ce dernier dérobe le plutonium et commence à mettre son plan à exécution avec ses commanditaires iraniens. Price suggère ici la tension et le suspense à l’aide de nappes sonores menaçantes et d’un violoncelle éthéré symbolisant la menace nucléaire qui pèse désormais sur le monde. « AR Training » illustre la scène de l’entraînement virtuel de Mitch Rapp à la CIA à l’aide de rythmes et de loops électros entêtants. C’est l’occasion pour le compositeur de nous offrir un premier morceau d’action assez réussi, qui semble déjà annoncer le second acte du film, bien plus violent et agité.

« Mission Aborted » mélange synthés, cordes, percussions et guitare alors que la mission à Istanbul dégénère et qu’Hurley ordonne d’abandonner les lieux suite à la trahison de Ghost. A noter ici la façon dont Price fait monter la tension jusqu’à une explosion d’action frénétique et musclée vers la deuxième minute. On notera à 2:43 l’envolée thématique orchestrale très réussie du thème de Mitch Rapp, une envolée héroïque et musclée qui constitue l’un des moments fort du score de « American Assassin ». L’action continue de plus belle dans « The Dogs » avec ses montées de tension, ses effets de violoncelle et ses percussions électroniques déchaînées qui rappellent clairement le score de « Fury » ou de « Suicide Squad ». « Annika’s Identity » nous plonge dans un suspense lugubre avec ses cordes dissonantes et ses nappes sonores brumeuses, alors qu’Annika s’avère être une espionne iranienne qui joue double jeu. La tension se prolonge ensuite dans « I Trusted You » qui maintient un rythme permanent à l’écran, entre les cordes dramatiques, les claviers éthérés, les passages plus dissonants et le flot de percussions synthétiques frénétiques. Même chose pour « I Knew Your Family », où la musique devient un brin répétitive et finit par tourner en rond, Steven Price se contentant bien souvent de répéter les mêmes formules musicales sans aucune originalité particulière.


UNE CONCLUSION INTENSE


Les 9 minutes intenses de « Animal Spirits » accompagnent brillamment la longue traque finale entre Mitch Rapp et Ghost pour l’empêcher de faire sauter la bombe nucléaire en plein milieu de l’océan. Ne loupez pas ici la superbe reprise du thème de Rapp à la guitare électrique à 6:51, symbolisant l’espoir et la détermination héroïque du jeune homme, prêt à tout pour sauver le monde de la menace nucléaire. La confrontation finale se termine finalement dans « Brace for Impact », véritable climax du film et de la musique. Le thème de Mitch Rapp revient au violoncelle vers 2:06 dans une conclusion dramatique et héroïque de toute beauté, sans aucun doute l’un des moments forts de la partition de « American Assassin ». Enfin, « Katrina » reprend le thème tragique de la vengeance, la boucle étant bouclée. Certes, Steven Price ne propose rien de bien nouveau sur le long-métrage de Michael Cuesta et se contente de reprendre le même style synthético/orchestral que l’on entend depuis plus de 2 décennies à Hollywood, style instauré en grande partie par Hans Zimmer et ses complices, et sur lequel surfe Price depuis quelques années déjà.

Les réfractaires à ce style de musique d’action moderne risquent fort d’être rebuté par « American Assassin » qui réunit tous les codes du genre sans grande saveur particulière, mais force est de constater que Steven Price sait apporter un petit plus émotionnel à ses musiques, notamment dans l’emploi de solistes ou de thèmes de qualité. Il lui manque simplement une vraie maîtrise de l’orchestre qui reste encore trop secondaire et monolithique chez lui, les parties électroniques étant, comme toujours, trop présentes et écrasantes. Il ne fait nul doute que Price gagnerait à soigner davantage l’équilibre entre l’électronique et l’orchestral qui reste encore trop bancal dans la plupart de ses musiques de film de ces dernières années. Néanmoins, au-delà de ces quelques défauts musicaux, « American Assassin » est un score de qualité qui apporte son lot de tension, d’action et d’émotion au film de Michael Cuesta sans jamais sortir des rangs, certes, mais avec un savoir-faire et un professionnalisme évident. Pour ce qui est du futur, après le mémorable « Fury », on attend toujours le chef-d’oeuvre du compositeur !




---Quentin Billard