1-Chiteioo Hades/Main Theme 2.42
2-Athena To Apollon/Seneka 3.33
3-Arion/Main Theme 2.09
4-Sentoo 1.38
5-Resufina/Omoi 4.48*
6-Purometeusu/Kaishoku-doo 4.51
7-Poseidon 1.43
8-Uijin 3.33
9-Shukumei, Hades/Poseidon no Shi 2.41
10-Olympus He 1.36
11-Tyupon 3.12
12-Daiboshin Gaia/Apollo 3.25
13-Resufina To Arion 2.30
14-Pegasus No Shoojo 4.24**

*Interprété par Miki Takahashi
**Interprété par Kyouko Goto
Paroles de Takashi Matsumoto
Musique de Tetsuji Hayashi
Arrangé par Mitsuo Hagita.

Musique  composée par:

Joe Hisaishi

Editeur:

Animage Records 32ATC-111

Album produit par:
Joe Hisaishi
Producteur musique:
Koki Miura

(c) 1986 Bandai Visual Company/Hakuhodo/Marubeni/Sunrise/Tokuma Shoten. All rights reserved.

Note: ***1/2
ARION
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Joe Hisaishi
« Arion » est un film d’animation japonais réalisé par Yoshikazu Yasuhiko en 1986. Il s’agit en fait de l’adaptation animée de son propre manga publié entre mars 1979 et septembre 1984 et qui raconte les aventures d’Arion, un jeune héros de l’Olympe au temps de la mythologie grecque. Arion est le fils de Déméther mais il ignore encore qui est réellement son père et, devenu un jeune adulte, se persuade que son géniteur est le dieu Poséidon. Un jour, Hadès, le dieu des enfers, l’enlève et l’emmène dans le monde souterrain où il grandit et devient un valeureux guerrier. A l’âge adulte, Hadès l’envoie guerroyer dans l’Olympe de la Grèce antique pour mettre fin aux guerres entre les dieux qui ravagent le pays. Au cours d’une bataille, Arion est capturé par les soldats d’Athéna qui s’apprête à l’exécuter. Mais le jeune homme est finalement délivré par Lesphina, une jeune servante muette dont Arion tombe sous le charme. Après avoir réussi à s’enfuir, Arion jure de revenir un jour pour délivrer Lesphina. Durant son périple, Arion retrouvera Poséidon, persuadé qu’il s’agit de son père, qu’il tuera accidentellement sous le coup d’un cauchemar provoqué par Hadès, puis il s’enfuit sur le mont Atos où il rencontrera un vieil ermite, Ryucahon, qui lui révélera ses véritables pouvoirs et l’identité de son vrai père. Accompagné d’un géant à trois yeux et de son jeune compagnon d’aventure Seneca, Arion réalise que Zeus est à l’origine de tous ses maux et va tenter de lever une armée pour mettre fin aux plans de conquête du père des dieux.


UN FILM D’ANIMATION PARTICULIER


Que voilà un film d’animation assez étrange, réalisé par l’auteur du manga original publié quelques années avant. Produit par le studio Sunrise, « Arion » se voulait comme une relecture libre de la mythologie grecque mais revue et corrigée à la sauce japonaise. Le film s’impose d’emblée par son chara-design impeccable : les personnages sont nombreux, bien dessinés et l’animation, qui s’est pris un bon coup de vieux (le film date de 1986 !) tient encore la route aujourd’hui, même si à la même époque, Hayao Miyazaki faisait bien mieux dans le genre (on pense notamment à « Nausicaä »). La mise en scène est plutôt réussie, avec des passages jouant sur des effets de couleur hypnotiques intéressants pour renforcer certaines émotions (scènes de rêve surréalistes, scènes rougeâtres lors de violents combats intenses, etc.). En revanche, le point faible du film tient surtout dans son scénario fourre-tout et brouillon qui a bien du mal à tenir la route sur les quelques 2 heures de métrage (générique inclus). Proposer une variante « manga » sur le thème de la mythologie grecque était une bonne idée mais les puristes risquent fort de se fâcher avec les nombreuses libertés prises par le script de « Arion ». Premier constat : la plupart des personnages présentés dans ce film n’ont rien à voir avec les personnages originaux de la mythologie. Zeus est devenu un vieux monarque barbu et pétochard qui s’avère être un gamin, Arion est à l’origine un cheval immortel doué de la parole, Prométhée n’a pas épousé Pandore comme cela est évoqué dans le film, Hercule est bien différent du rôle qu’on lui donne dans « Arion », sans parler des absurdités autour d’Athéna, Arès ou Apollon.

Dès lors, autant abandonner tout sens critique pour mieux percevoir les qualités intrinsèques d’un film inégal mais qui s’avère finalement assez réussi à force de prendre des risques et d’aller là où on ne l’attend pas, car le film ne manque pas de surprise ! Certes, cette relecture de la mythologie grecque est totalement foutraque et n’a ni queue ni tête, mais une fois passé ce constat, le film fonctionne bien grâce à des scènes de bataille très violentes (ponctuées d’effusions sanguinolentes), de nombreux personnages secondaires et d’un sentiment de quête héroïque et initiatique qui va crescendo tout au long du récit. Mais là où le film parvient à nous surprendre c’est par son contenu totalement non politiquement correct et très osé pour un film animé japonais. - SPOILER - Utilisant le contexte de la vie durant la Grèce antique et ses mœurs « dissolues », le film nous décrit quand même l’histoire d’un jeune héros qui va tuer son père au cours d’un cauchemar. Heureusement, la morale est sauve lorsqu’on apprend en réalité que ce n’était pas son père. On y raconte aussi l’histoire d’un adulte (Apollon) qui cherche à convoiter et à coucher avec une jeune fille, Lesphina. Aujourd’hui, on appellerait cela de la pédophilie ! Enfin, la romance entre Arion et Lesphina qui est au centre du scénario du film est incestueuse, étant donné qu’ils sont tous les deux frère et soeur. Avouez que pour un film animé japonais, cela fait quand même beaucoup !

D’un autre côté, difficile de juger ces éléments scénaristiques selon nos critères moraux et sociaux d’aujourd’hui tant il s’agit de thèmes typiques des épopées antiques grecques. Malgré plusieurs bonnes idées et quelques rebondissements scénaristiques inattendus (la révélation au sujet de Seneca, qui ne sert à rien dans l’histoire mais qu’on ne verra probablement pas arriver !), « Arion » a bien du mal à tenir la route à cause d’un scénario trop confus qui multiplie tellement les intrigues secondaires qu’il finit par en devenir lassant sur la durée. Même les révélations finales d’Apollon au sujet de ses plans de conquête du monde des Titans – ces êtres nés de l’union d’un Dieu et d’une humaine – risquent de paraître incompréhensibles, à moins de connaître sur le bout des doigts la mythologie grecque (et encore, vu que le film fait n’importe quoi sur ce sujet, difficile de s’y retrouver…). Tout ça est trop brouillon, trop confus, et « Arion » aurait mérité un script bien plus équilibré et bien moins bancal pour pouvoir fonctionner correctement. Il n’en demeure pas moins un film visuellement très réussi pour l’époque, assez méconnu dans nos contrées mais qui devrait séduire les fans d’animé japonais des années 80 puisqu’on retrouve ici un style qui rappelle les productions plus connues de l’époque : « Nausicaä», mais aussi « Princesse Millenium » ou les premières séries « Gundam ».


UNE PARTITION LYRIQUE ET AVENTUREUSE


L’élément le plus remarquable de « Arion » reste à n’en point douter la partition musicale de Joe Hisaishi, d’une qualité indéniable, typique de ce que le compositeur écrivait à la même époque chez Hayao Miyazaki. Hisaishi venait déjà d’écrire les musiques de « Nausicaä » (1984) et du « Château dans le ciel » (1986) lorsqu’il composa la même année la partition originale de « Arion ». Il n’en était donc pas à son premier coup d’essai. A la première écoute de la musique dans le film, un premier constat s’impose : on retrouve le style classique et lyrique habituel du compositeur, qui rappelle clairement ici son travail sur « Nausicaä » et « le château dans le ciel ». La partition de « Arion » a été enregistrée avec un orchestre symphonique japonais agrémentée de quelques instruments solistes et d’une pléiade de synthétiseurs 80’s typiques du style d’Hisaishi à cette époque. Le film débute au son de « Chiteiou Hades/Main Theme » avec un orchestre agité sur fond de petites percussions. Un puissant sforzando de cuivres nous amène alors au thème principal pour le générique de début, dévoilé à la flûte à bec dès 1:40. Il s’agit du superbe thème associé à Arion dans le film, écrit dans la même veine que le thème principal de « Nausicaä ». On y retrouve la même grâce mélodique et poétique, notamment dans l’emploi des instruments et des harmonies typiques d’Hisaishi, le tout accompagné ici par une harpe, quelques percussions et des cordes.

L’autre thème majeur du film c’est bien évidemment le thème romantique pour Arion et Lesphina dévoilé au piano électrique dans « Lesphina/Omoi », une mélodie douce et gracieuse à la fois rêveuse et poétique, dont les relents de nostalgie rappellent certaines mélodies du « château dans le ciel ». La seconde partie, « Omoi », est en réalité la douce mélodie que fredonne Lesphina vers le début du film (interprétée par Miki Takahashi), reprise ensuite par un très beau duo flûte à bec/harpe. Dans « Athena to Apollon/Seneca », Hisaishi s’essaie à la source music en recréant de manière imaginaire le style musical de la Grèce antique pour une scène chez Athena. Ici, le compositeur pour une approche orientale/indienne à base de sitar, de percussion et de flûte ethnique. A 2:29, Hisaishi évoque l’arrivée du jeune Seneca à l’aide d’un morceau plus léger et comique, mélangeant synthétiseurs 80’s et sonorités ethniques plus asiatiques d’esprit, mais dont l’approche sonore paraît déjà très datée. On retrouve ensuite le très beau thème principal du film dans « Arion, Main Theme » à travers une seconde variation avec cor anglais et piano électrique, tandis que la partie B de la mélodie est confiée cette fois-ci à un orchestre plus imposant et majestueux qui rappelle encore une fois bon nombre de passages de « Nausicaä ». Le style plus synthétique d’Hisaishi réapparaît dans « Sentou » au détour d’une première scène d’action du film.

Comme dans « Nausicaä » ou « le château dans le ciel », ces passages électroniques fonctionnent parfaitement dans le film mais ont parfois bien du mal à rivaliser avec la partie orchestrale/acoustique bien plus convaincante et aboutie. « Prometheus/Kaishokudou » dévoile quand à lui un superbe thème écrit pour un groupe vocal mixte sur fond de flûte et de percussions. Les voix accompagnent ici les scènes avec Prométhée vers le milieu du film, lorsqu’Arion réalise peu à peu qui est réellement son père. Hisaishi illustre cette scène de manière opératique avec des vocalises quasi spirituelles assez grandioses à l’écran. Dans « Poseidon », le compositeur nippon n’oublie pas non plus la tonalité plus guerrière et belliqueuse du récit au détour d’un solide morceau d’action rythmé par des percussions martiales et des cuivres imposants, durant la scène où Poséidon, Arion et l’armée du dieu des océans partent guerroyer dans l’Olympe. On retrouve cette approche guerrière dans le frénétique et martial « Uijin » plus typique du style action habituel de Joe Hisaishi, qui n’oublie jamais pour autant l’aspect essentiellement mélodique de sa musique.

« Shukumei, Hades/Poseidon no Shi » est l’un des rares passages atmosphériques et sombres du film, durant la scène où Arion fait son cauchemar et tue Poséidon. Plus intéressant, « Olympus » est une pièce de cordes et vents plus lyrique où Hisaishi dévoile un thème mélodique plus majestueux et très classique d’esprit. La longue séquence de la poursuite sur le dos du dragon Typhon (« Tyupon ») permet au compositeur de nous offrir un autre morceau d’action frénétique qui alterne entre l’orchestre et les synthétiseurs (à noter ici l’emploi d’une pulsation électronique entêtante pour maintenir la tension tout au long de la scène). On retrouve ici les voix opératiques à 1:38 qui apportent un éclairage émotionnel saisissant à la séquence et révèlent encore une fois l’ampleur du travail effectué par Joe Hisaishi sur « Arion », le tout accompagné d’orchestrations solides autour d’un thème spécifiquement conçu pour cette séquence (à base de bois, principalement).


UNE PARTITION D’AVENTURE LYRIQUE ET GUERRIÈRE


« Daiboshin Gaia/Apollon » évoque la confrontation finale contre Zeus, Gaia et Apollon mais sous un angle plus intime à l’aide de synthés, guitare, harpe, percussions et flûte à bec. On retrouve ensuite le superbe thème principal d’Arion au hautbois au début de « Lesphina to Arion » lorsqu’Arion retrouve Lesphina à la fin du film, débouchant sur la traditionnelle chanson pop (typiquement années 80) du générique de fin, « Pegasus no Shoujo » interprétée par Kyouko Goto, qui devrait séduire tous les fans de J-pop des eighties comme on en entendait régulièrement à cette époque au cinéma ou dans les animes nippons. Ainsi donc, « Arion » s’avère être une œuvre de qualité dont le principal défaut reste son inspiration trop proche des précédents travaux de Joe Hisaishi pour Miyazaki : on pense inévitablement ici à « Nausicaä » et « Le château dans le ciel », y compris dans les mélodies principales du score qui semblent familières.

« Arion » pourrait ainsi être considéré comme une sorte de « Nausicaä » numéro 2, qu’il faudra par ailleurs redécouvrir à travers les traditionnels albums « Symphonic suite » et « Image album » qu’Hisaishi propose sur la plupart de ses oeuvres majeures pour le cinéma d’animation japonais, des albums conceptuels dans lesquels le musicien prolonge son travail sur le film et nous propose des arrangements musicaux différents et plus conséquents, destinés à une écoute spécifique sur album (à ce sujet, l’album « Symphonic suite » de « Princesse Mononoké » compte parmi les plus belles réussites de l’auteur, un CD à posséder absolument!). Ainsi donc, les fans de « Arion » ne devront pas passer à côté de cette très belle partition qui, à défaut de faire partie des oeuvres majeures de Joe Hisaishi, n’en demeure pas moins une musique de qualité écrite pour un film oublié, à redécouvrir par la même occasion !




---Quentin Billard