1-Goemon Main Theme (Reprise) 3.11
2-Opening 1.28
3-The Thief 3.33
4-Zekkei 2.31
5-Goemon Credit 0.14
6-A Banquet 2.31
7-Music Box 5.14
8-Goemon vs. Saizo 4.53
9-Hanzo 3.13
10-Kagemusha 3.06
11-Gaou 0.55
12-Nobunaga 4.44
13-Chacha 1.24
14-Memories of Chacha and Goemon 3.02
15-Nobunaga's Death 2.35
16-Execution of Rikyu 1.50
17-Farewell to Goemon 2.34
18-Destiny 2.21
19-The Battle in Sekigahara 6.16
20-Goemon Main Theme
(Full Scored Version) 3.47

Musique  composée par:

Akihiko Matsumoto

Editeur:

Yoshimoto R and C Co YRCN-95127

Album produit par:
Akihiko Matsumoto

(c) 2009 Daiichi Shokai Co/Dentsu/Dream Kid/Eisei Gekijo/Goemon Pictures/Hot Toys/Kinoshita Management/Kiriya Pictures/Oz Company/TV Asahi/Warner Bros/Yoshimoto Kogyo Company. All rights reserved.

Note: ****
GOEMON
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Akihiko Matsumoto
« Goemon » est le deuxième long-métrage du japonais Kazuaki Kiriya, réalisé et sorti au cinéma en 2009. Le cinéaste s’était fait connaître avec ses clips musicaux pour la chanteuse de J pop Utada Hikaru qui deviendra sa femme malgré un écart d’âge important, et son premier film « Casshern » (2004), quasi intégralement tourné en images numériques. Avec « Goemon », Kiriya récidive et s’inspire cette fois-ci du mythe d’Ishikawa Goemon, célèbre voleur qui déroba de l’or et de nombreuses richesses pour les donner aux pauvres à la fin de l’ère Sengoku durant les guerres entre le XVe et le XVIe siècle, et dont on sait finalement peu de chose, ce qui explique son statut de héros légendaire appartenant durablement à la culture populaire japonaise (on sait en revanche qu’il échoua à assassiner le seigneur de guerre Toyotomi Hideyoshi et fut exécuté en étant plongé dans une baignoire d’eau bouillante). Le conte de célèbre Robin des Bois japonais était donc le sujet idéal pour Kazuaki Kiriya.

L’histoire débute lorsque Goemon (Yosuke Eguchi) dérobe de l’or dans un palais en plein coeur d’un festival se déroulant dans les rues de la ville. Il réussit aussi à s’enfuir avec une mystérieuse boîte violette qui est très convoitée. Goemon est traqué par Ishida Mitsunari (Jun Kaname), un samouraï de premier ordre qui travaille pour le seigneur Toyotomi Hideyoshi (Eiji Okuda), qui règne d’une main de maître sur l’ensemble du territoire et qui recherche lui aussi la boîte violette. Mais entre temps, Goemon s’est débarrassé de la boîte qui a atterrit dans les mains d’un jeune garçon, Koheita, un pickpocket qui vit avec sa mère dans les rues de la ville. Apprenant par la suite la réelle valeur de la boîte par son complice et serviteur Sarutobi Sasuke (Gori), Goemon retourne en ville pour récupérer la boîte et tombe sur le jeune Koheita, dont la mère vient d’être assassinée par les hommes de Saizo (Takao Osawa), un ninja qui travaille pour le compte de Mitsunari. A la suite d’une brève confrontation, Goemon apprend que la boîte est surnommée la « boîte de Pandore », et que si elle venait à être ouverte, les secrets qu’elle contient pourrait ravager le monde.

Durant le combat, Goemon est sauvé in extremis par Hattori Hanzo (Susumu Terajima), l’ancien samouraï aux ordres de Nobunaga Oda (Hashinosuké Nakamura), le vieux maître que servait autrefois Goemon lorsqu’il était un samouraï chargé de protéger le seigneur bienveillant et sa nièce, la princesse Chacha (Ryoko Hirosue). Hélas, Nobunaga fut trahi par Hideyoshi et Akechi Mitsuhide (Kazuaki Kiriya), et un pacte fut secrètement signé entre eux sur un parchemin noir. Par la suite, Hideyoshi assassina Nobunaga et tua son complice Mitsuhide, s’assurant ainsi une prise de pouvoir absolue sur l’ensemble du territoire. C’est ainsi que Goemon découvre que la boîte de Pandore contient en fait une carte conduisant à l’emplacement du fameux parchemin révélant le pacte secret à l’origine du coup d’état d’Hideyoshi et son acte de trahison. Après avoir découvert la vérité, Goemon, furieux, jure de tout faire pour venger la mort de son ancien maître Nobunaga et retourne au palais d’Hideyoshi dans l’espoir de l’assassiner, mais il retrouve la princesse Chacha qu’il n’a plus revue depuis des années. Peu de temps après, Goemon fait face à Hideyoshi après avoir assassiné sa doublure et reçoit une balle dans le ventre avant de l’expulser du château. Goemon est heureusement secouru en secret par Saizo et récupère de ses blessures. Peu de temps après, Goemon retrouve Chacha au cours d’un rendez-vous secret et la jeune femme lui révèle qu’elle va devenir la concubine d’Hideyoshi dans quelques heures. Désormais, Goemon n’a plus qu’une idée en tête : sauver le pays tout entier en assassinant le seigneur Hideyoshi pour de bon.


UN FILM D’ACTION ASSEZ INDIGESTE


Avec « Goemon », Kazuaki Kiriya semble avoir eu la folie des grandeurs en relatant ce conte fictif du célèbre Robin des bois japonais sur grand écran. Fait rarissime, Kiriya occupe quasiment tous les postes sur ce métrage : réalisateur, scénariste, acteur (il joue le rôle d’Akechi Mitsuhide), directeur de la photographie, monteur et co-producteur, rien que ça ! Soucieux de conserver un contrôle artistique absolu sur son film pour assumer sa vision jusqu’au bout, Kazuaki Kiriya manque du coup totalement de recul et livre un film ampoulé, bancal et inégal. Premier point notable : comme dans « Casshern », « Goemon » est largement dominé par le recours aux images numériques, omniprésentes tout au long de l’oeuvre. Tous les décors ont été recrées numériquement, ainsi que certaines animations impossibles à filmer dans la réalité. Les textures numériques du film, très modernes en 2009 bien qu’hélas déjà dépassées depuis belle lurette sur le plan technique, apportent un côté manga évident au récit, avec son lot de ninja et de combats dantesques sur fond de sauts surhumains et d’acrobaties irréalistes. Il y a un côté « Shinobi Heart Under Blade » (2005) mais aussi une influence manifeste du cinéma d’arts martiaux chinois moderne.

Malheureusement, le film a bien du mal à tenir la route sur la longueur en raison d’un scénario fourre-tout et trop complexe jouant la carte du folklore japonais mais qui risque fort de rebuter les spectateurs occidentaux et ceux qui ne connaissent pas bien les légendes de la culture populaire nippone liées à l’ère Sengoku de la fin du XVIe siècle. D’autre part, le film accumule les sous-intrigues à foison et multiplie les personnages secondaires jusqu’à saturation (avec son lot de flashbacks qui vous donneront mal de tête!), à tel point qu’on finit par s’y perdre carrément. Autre élément notable : le ton du film oscille constamment entre l’aventure familiale (les touches d’humour au début du film, par ailleurs plutôt ratées) et le film d’action violent avec ses quelques scènes de mises à mort sanguinolentes à base d’effusions d’hémoglobines numériques, un peu comme dans le « Zatoichi » de Takeshi Kitano (2003).

De plus, le film est visuellement indigeste avec ses effets numériques moches qui noient constamment l’image et sa photographie verdâtre à base d’images ultra contrastées, sans oublier des dialogues médiocres et des longueurs fastidieuses (le film fait 2 heures mais il aurait fallut couper au moins 30 minutes au montage car c’est parfois interminable!). En bref, « Goemon » est un film d’action/aventure lourd qui se voulait épique et spectaculaire mais échoue à susciter quoique ce soit hormis l’ennui avec ses visuels qui ressemblent beaucoup aux cinématiques d’un jeu vidéo Playstation et ses personnages factices : tout est ici tellement appuyé et irréaliste que même lors des moments plus tragiques et émouvants, on arrive pas à ressentir la moindre émotion. Preuve s’il en est que Kazuaki Kiriya a eu tort de vouloir contrôler tous les aspects de la production de son film : voilà ce qui se passe lorsqu’on manque de recul sur sa création !


UNE PARTITION ÉPIQUE ET DRAMATIQUE


La musique de « Goemon » a été confiée au compositeur japonais Akihiko Matsumoto connu pour ses musiques de film telles que « Flay » (2017), « Saigon Bodyguards » (2016), « Dirty Hearts » (2011), « Summer Wars » (2009), « The Suspect : Muroi Shinji » (2005), « Bayside Shakedown 2 » (2003), « Returner » (2002), la série d’animation « Black Jack » (2005) ainsi que ses musiques de jeux vidéos sur « Resident Evil Outbreak ». Pour « Goemon », Matsumoto a concocté une grande partition orchestrale teintée de percussions et d’instrumentations ethniques/japonaise évoquant l’univers du Japon traditionnel au XVIe siècle. Epique, spectaculaire et dramatique, tels sont les maîtres mots pour résumer le travail de Matsumoto sur « Goemon », avec pour commencer, un superbe thème principal malheureusement peu développé dans le film (« Goemon Main Theme »). Il s’agit d’un thème de cordes dramatiques ample et poignant typiquement japonais d’esprit, qui rappelle le « Princesse Mononoké » de Joe Hisaishi mais dont la mélodie fait parfois vaguement penser au thème principal de « Braveheart » de James Horner.


ANALYSE DE LA MUSIQUE


Le film débute au son du somptueux « Opening », sombre et mystérieux, avec ses choeurs tapis dans l’ombre et ses cordes amples. Dans « The Thief », Matsumoto évoque les premiers méfaits de Goemon au début du film lorsqu’il cambriole le temple et s’enfuit avec son butin sur les toits de la ville. Le compositeur met l’accent ici sur l’action à l’aide d’un ensemble de tambours taïkos japonais traditionnels avec cordes, éléments électroniques et choeurs épiques en latin. C’est la dimension chorale de la partition de « Goemon » qui est ici l’un des éléments les plus notables du travail d’Akihiko Matsumoto : l’auteur de « Summer Wars » développe les parties chorales de manière quasi opératique tout au long du film, apportant un souffle épique ahurissant à un film déjà très spectaculaire sur le plan visuel. « The Thief » est l’un des premiers moments fort de la partition de « Goemon », et nous n’en sommes qu’aux premières minutes du film : impressionnant ! Dans « Zekkei », le compositeur poursuit son exploration des choeurs spectaculaires avec des orchestrations privilégiant des cordes survoltées et des percussions guerrières.

Dans « A Banquet », Matsumoto se dirige vers un style plus proche de l’électro/pop japonaise moderne tandis que « Goemon vs Saizo » développe les choeurs guerriers démesurés de « The Thief », durant la séquence où Goemon affronte Saizo vers le début du film. « Hanzo » permet à Matsumoto de créer une ambiance maléfique impressionnante pour le samouraï qui servait autrefois le seigneur Nobunaga Oda. Dans « Kagemusha », on retrouve les choeurs en latin (mixés en revanche avec une tonne de réverbération, ce qui rend les paroles des choristes complètement inaudibles!) pour un autre passage opératique assez saisissant, dont l’ampleur épique et dramatique rappelle parfois les travaux de Vangelis sur « 1492 » ou « Alexander », bien que certains ont souvent comparé le travail choral de Matsumoto aux « Carmina Burana » de Carl Orff. Dans « Gaou », on devine l’influence des musiques d’action hollywoodiennes avec un travail similaire sur les cordes, les ponctuations de cuivres et de percussions – dommage qu’ici aussi, le mixage laisse un peu à désirer : l’orchestre semble très loin des micros et le son est noyé dans une réverbération outrancière -

Dans « Nobunaga », Goemon se souvient de son ancien maître qu’il servait autrefois. Matsumoto compose pour l’occasion une musique plus majestueuse empreinte de noblesse et de respect à l’aide de cordes plus amples et presque triomphantes. « Nobunaga » est un autre morceau mémorable de la partition de « Goemon », avec son final dramatique assez saisissante, avec cette écriture orchestrale typiquement japonaise - on a parfois l’impression d’entendre Naoki Sato, Masamichi Amano ou Shiro Sagisu, dont l’influence est assez flagrante dans l’écriture des choeurs épiques rappelant les travaux de Sagisu sur la série des « Evangelion » - Dans « Chacha », Matsumoto calme le jeu et dévoile le thème romantique pour Goemon et la princesse Chacha, un amour impossible et contrarié qui s’explique par la différence de statut entre les deux individus. Matsumoto devient ici plus pudique, plus réservé, avec ses notes hésitantes et solitaires de piano.

Dans « Memories of Chacha and Goemon », à contrario, le musicien se laisse aller à une imagerie musicale plus onirique et poétique, durant la scène où Goemon se souvient des moments passés avec la princesse au palais de Nobunaga. Matsumoto développe ici le thème romantique interprété par un ocarina sur fond de cordes/harpe rêveuses. C’est simple mais très touchant, apportant une certaine magie à cette séquence de flash-back (ici, l’influence de Joe Hisaishi est plus qu’évidente, on croirait entendre une de ces mélodies sortant tout droit d’un film de Miyazaki !). Le compositeur en fait peut être un peu trop lorsque la mélodie romantique est reprise de manière grandiose avec les choeurs féminins à la fin de la scène, mais qu’importe, on sent ce plaisir de la démesure musicale typique des blockbusters japonais et le résultat est très plaisant et superbement écrit ! Dans « Nobunaga’s Death », la musique devient plus torturée, plus sombre, alors que Goemon se souvient de la mort de son maître et découvre le pacte entre Hideyoshi et Mitsuhide pour trahir Nobunaga et s’emparer du pouvoir.


UNE CONCLUSION DRAMATIQUE SAISISSANTE


Le thème noble de Nobunaga est repris à 1:54 dans « Nobunaga’s Death » par des cordes amples, dramatiques et majestueuses, accompagnées de ponctuations de timbales qui renforcent l’aspect tragique de la scène. Dans « Execution of Rikyu », les tambours taïkos martèlent un rythme guerrier avec l’emploi de cordes dissonantes stridentes évoquant la musique avant-gardiste du XXe siècle et des voix typiquement japonaises pour accompagner cette violente séquence d’exécution. Dans « Farewell to Goemon », Matsumoto nous amène vers le dernier acte tragique du film sur le ton de l’émotion tandis que le thème de Goemon revient au piano solo dans le magnifique « Destiny ». Enfin, c’est la longue bataille finale avec l’éclipse qui est illustrée dans « The Battle in Sekigahara » qui reprend les choeurs guerriers épiques de « Kagemusha », développés cette fois sur plus de 6 minutes en guise d’apothéose du film.

Le film se termine avec le somptueux « Goemon Main Theme (Full Score Version) » à la toute fin de l’histoire, en guise d’adieu à Goemon. Akihiko Matsumoto nous propose une dernière reprise de son superbe thème que l’on aurait simplement aimé entendre davantage dans le film. Vous l’aurez donc compris, « Goemon » est une superbe partition orchestrale/chorale de Akihiko Matsumoto. Le compositeur de « Summer Wars » se fait plaisir en nous offrant une partition spectaculaire évoquant le monde guerrier et fantaisiste présenté dans le film de Kazuaki Kiriya. Les fans des musiques d’aventure épiques japonaises façon Joe Hisaishi ou Shiro Sagisu ne devraient manquer « Goemon » pour rien au monde, car même si l’ensemble est mâtiné d’influences musicales plus qu’évidentes et sans grandes originalités particulières, le résultat est impeccable, digne de figurer parmi les plus belles réussites du compositeur !



---Quentin Billard