1-A Storm Is Coming 1.12
2-Your Mission 2.14
3-Should You Choose To Accept...2.34
4-The Manifesto 1.44
5-Good Evening, Mr. Hunt 4.19
6-Change Of Plan 5.47
7-A Terrible Choice 2.54
8-Fallout 1.30
9-Stairs And Rooftops 6.00
10-No Hard Feelings 4.20
11-Free Fall 4.14
12-The White Widow 4.42
13-I Am The Storm 2.07
14-The Exchange 5.54
15-Steps Ahead 1.02
16-Escape Through Paris 5.05
17-We Are Never Free 6.57
18-Kashmir 4.29
19-Fate Whispers To The Warrior 3.54
20-And The Warrior Whispers Back 3.56
21-Unfinished Business 1.49
22-Scalpel and Hammer 5.10
23-The Syndicate 6.00
24-Cutting On One 3.42
25-The Last Resort 2.55
26-Mission: Accomplished 1.15

La La Land Records
Bonus Tracks:

27-Plutonium Trade 2.54
28-As Ugly As They Come 2.26
29-Framing Ethan 2.01
30-Je Suis Désolé 1.06
31-Trapped 3.26
32-This Mission Is Terminated 2.10

Musique  composée par:

Lorne Balfe

Editeur:

La La Land Records

Musique produite par:
Lorne Balfe, Steffen Thum
Musique additionnelle:
Max Aruj, Steffen Thum
Orchestrations:
Shane Rutherfoord-Jones
Supervision préparation musique:
Jill Streater
Montage musique:
Cecile Tournesac
Coordination production musique:
Queenie Li
Producteur sample:
Will Bedford

Artwork and pictures (c) 2018 Paramount Pictures. All rights reserved.

Note: **1/2
MISSION IMPOSSIBLE : FALLOUT
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Lorne Balfe
La franchise des « Mission Impossible » est à l’heure actuelle l’une des rares sagas hollywoodiennes qui semble se bonifier avec le temps, fait plutôt rare dans l’univers des suites de blockbusters U.S. Il faut dire que depuis le 3ème épisode de J.J. Abrams (après l’excellent premier tome hitchcockien de Brian De Palma et le très décevant tome 2 torché par un John Woo en toute petite forme), les films ont été confiés à des réalisateur inspirés qui ont su tirer le meilleur de ces épisodes avec un Tom Cruise toujours plus inspiré, toujours plus présent dans toutes les étapes de la production (il produit lui-même ses films) et surtout toujours plus dingue sur ses tournages. Car le vrai plus des « Mission Impossible », c’est ça : aller toujours plus vers l’impossible, l’infaisable, les scènes d’action et les cascades les plus extrêmes. On se souvient notamment de cette scène ahurissante où Tom Cruise sautait sur le toit d’un immeuble à Shanghai et dévalait une structure en pente à toute vitesse dans MI3, celle où il escaladait la paroi de verre verticale d’un building gigantesque à Dubaï dans MI4 ou celle où l’acteur s’accrochait sur le bord d’un A400M en plein décollage dans MI5.

A chaque fois on se dit que Cruise ne pourra pas faire plus dingue que ça (il met un point d’honneur à ne pas être doublé et à faire ses cascades lui-même sans recours à des effets numériques !) et à chaque fois bien sûr, il est là pour nous contredire et nous rappeler que le vrai boss sur « Mission Impossible », c’est lui ! Ainsi donc, « Mission Impossible : Fallout » débarque dans nos salles en août 2018 et se voit à nouveau confié à Christopher McQuarrie. C’est la première fois dans l’univers de la franchise qu’un film est confié deux fois d’affilée au même réalisateur, et c’est aussi la première fois que l’histoire est une vraie suite au précédent épisode, puisque « Fallout » raconte bel et bien l’histoire après « Rogue Nation » (2015). Le scénario se déroule ainsi deux ans après les événements de « Rogue Nation ». Ethan Hunt (Tom Cruise) se voit confier une nouvelle mission sur une bande magnétique pour son équipe de la Force Mission Impossible : le « Syndicat » a repris du service, même avec l’arrestation de leur chef, Solomon Lane (Sean Harris). L’organisation terroriste internationale s’est reformé de plus belle avec un nouveau groupe nommé « Les Apôtres », recevant le soutien du physicien norvégien Nils Debrukk (Kristoffer Joner), spécialiste des armes nucléaires. Hunt et son équipe doit intercepter une livraison de 3 bombes portables de plutonium à Berlin, destinées aux Apôtres. Il est alors accompagné de Benji et Luther, mais la mission tourne mal, et les terroristes s’enfuient avec les bombes. Suite aux aveux de Debrukk, l’équipe accède aux informations d’un téléphone portable de l’un des Apôtres et la CIA découvre qu’un mystérieux individu nommé John Lark s’apprête à rencontrer la Veuve Blanche lors d’une réception au Grand Palais à Paris, pour conclure la vente de plutonium.

Alan Hunley (Alec Baldwin), le nouveau ministre de Mission Impossible, décide d’envoyer Hunt et ses complices à Paris pour intercepter le plutonium, mais Erica Sloane (Angela Bassett), directrice de la CIA, impose à Hunt un nouvel agent, August Walker (Henry Cavill), qui le suivra partout et sera chargé de le surveiller. A Paris, une série de violentes mésaventures obligent Hunt à se faire passer pour John Lark auprès de la Veuve Blanche (Vanessa Kirby) et découvre son plan : elle lui remettra le plutonium en échange de la libération de Solomon Lane, qui doit être escorté par la police parisienne pour être interrogé. Hunt va devoir jouer très serré, d’autant qu’Ilsa Faust (Rebecca Ferguson), agente britannique qui a infiltré autrefois le Syndicat, est de retour et tente par tous les moyens d’éliminer Solomon Lane sur ordre du MI6, quitte à mettre en danger la mission d’Ethan Hunt. Évidemment, rien ne va se passer comme prévu et Hunt aura fort à faire pour empêcher Lane de s’échapper et de faire sauter les bombes avec la complicité des Apôtres.


UN PUR FILM D’ESPIONNAGE INTENSE !


« Mission Impossible : Fallout », c’est avant tout une sorte de retour aux sources pour ce 6ème épisode qui renoue avec les codes du film d’espionnage à l’ancienne : trahison, manipulation, faux semblants, tours de passe-passe sur fond de poursuites à travers le monde et de géopolitique, on se croirait revenu au temps des thrillers d’espionnage conspirationnistes des années 70. Christopher McQuarrie n’a rien perdu de ses talents de metteur en scène et reproduit ici l’exploit de « Rogue Nation » avec 10 fois plus d’intensité et de folie. « Fallout » est un festival d’action non-stop d’une puissance inouïe dans la saga : cette fois, Tom Cruise multiplie les cascades à un rythme insensé et va encore plus loin dans la folie de ces séquences d’action ultra dangereuses : une cascade violente après une impressionnante poursuite à moto dans les rues de Paris, une séquence inédite de poursuite en hélicoptère où l’acteur a réellement piloté l’hélico (pour la première fois de sa carrière) dans des conditions extrêmes, une scène sur le bord d’une falaise qui fait un peu penser à « Cliffhanger » avec Stallone (1993), et bien sûr cette fameuse séquence à Londres où Hunt saute du toit d’un immeuble pour atteindre celui d’en face, fameuse scène qui a valut à Tom Cruise d’être blessé à la jambe et d’interrompre le tournage pendant plusieurs mois (le plan où Cruise se cogne réellement contre le bord de l’immeuble est resté dans le film!). Vous pensiez que Tom Cruise ne pourrait pas faire pire que dans les anciens films ? Vous aviez tort, cette fois, c’est un festival, quitte à frôler l’indigestion d’action, mais autant vous dire tout de suite que sur 2h20, vous en avez pour votre argent !

Encore une fois, on a à faire ici à un très grand film dans la saga. Si « Fallout » perd un peu les nuances qui faisaient le charme de « Rogue Nation » (comme cette très belle scène à l’opéra entièrement rythmée par le musique de Puccini, influencée par Hitchcock) et s’avère beaucoup plus bourrin que son prédécesseur, force est de constater qu’il y a une folie incroyable dans ce film qui lui permet de se hisser bien au dessus de la masse hollywoodienne. Prétendre que nous sommes ici en présence de l’un des meilleurs films d’action hollywoodiens de ces 15 dernières années relèverait du pur euphémisme, mais ici, c’est la folie totale ! Le scénario est d’ailleurs très captivant puisqu’il poursuit efficacement l’histoire autour de Solomon Lane et du Syndicat – renommé cette fois les Apôtres – dont on entend parler depuis la fin de « Mission Impossible 4 » : à coup sûr nous sommes là dans les prémisses d’une grande saga consacrée à une épopée d’action autour du Syndicat, un peu comme l’histoire de Spectre dans les derniers films de « James Bond ». D’ailleurs « Fallout » est suffisamment malin pour ne pas offrir trop de réponses au sujet du Syndicat, notamment sur l’identité de John Lark (ça n’est pas si évident que ça dans le film, contrairement à ce qu’on pourrait penser à une première vision!) ou celle de la Veuve Blanche, dont on ne sait pas grand-chose pour le coup.

Détail intéressant : alors qu’Hunt arrive durant la conférence de la Veuve Blanche au Grand Palais à Paris, on entend la jeune femme parler de sa mère comme d’une certaine « Max ». Est-ce une référence au personnage campé par Vanessa Redgrave dans le premier film de De Palma (1996) ? Se pourrait-il qu’il y ait un lien caché entre ces deux personnages ? Si c’était le cas et que cette piste était explorée dans l’épisode suivant, ce serait quasiment une première dans la saga depuis ses débuts ! Il semblerait en tout cas que cette piste soit valide puisque Vanessa Kirby elle-même aurait confirmé le lien de parenté entre la Veuve Blanche et Max aux journalistes d’Ecran Large. Quand au reste du film, hormis une grosse faute de mauvais goût absurde durant la séquence dans les toilettes du Grand Palais où l’on voit une bande de jeunes riches alcoolisés quitter la pièce en chantant à tue-tête « la vie en rose » d’Edith Piaf - cliché absurde de la culture française vue par les américains : ils devraient venir plus souvent en France, les américains constateraient alors que les jeunes friqués de 30 piges qui vont dans des boîtes de luxe ne chantent certainement pas « la vie en Rose » ! Une idée franchement ridicule - le film est quand même un véritable sans-faute. Mention spéciale au montage ahurissant d’Eddie Hamilton (qui opérait déjà sur « Rogue Nation ») ou la photographie très soignée de Rob Hardy, et surtout la longue séquence de poursuite à travers une bonne partie de Paris.

L’équipe du film avoua avoir voulu montrer la capitale française comme aucun autre film américain ne l’avait fait auparavant, et il faut dire que les fans de Paris seront comblés dans « Fallout », dont une bonne partie de l’intrigue se déroule en France, et ce malgré les nombreuses incohérences et erreurs déjà relevées par des connaisseurs dans le film quand au trajet emprunté par Hunt et ses amis. En définitive, malgré ses 2h20, « Mission Impossible : Fallout » est un film d’action/espionnage monstrueux, hyper prenant, complexe et rondement exécuté, servi par un casting impeccable (Henry Cavill dans un rôle ambigu taillé sur mesure, avec sa fameuse moustache qui obligea la production de « Justice League » à la gommer numériquement sur les images !) et quelques nouvelles tête (Angela Bassett, Vanessa Kirby) et d’autres bien connus (on retrouve avec plaisir Ilsa Faust, Benji, Luther, Solomon Lane, seul absent : Jeremy Renner, pour des questions d’emploi du temps - Comble de l’ironie : Renner devait faire au même moment « Avengers Infinity War » mais il n’a même pas été retenu pour le film, du coup il n’a fait aucun des deux! - Décidément, force est de constater que la série des « Mission Impossible » est probablement la meilleure saga hollywoodienne que l’on connaisse depuis 20 ans, et l’une des rares à formidablement survivre à l’épreuve du temps et à évoluer positivement au fil des années. Du coup, on attend le septième épisode avec impatience !


UN SCORE D’ACTION PLUS MODERNE

Changement de compositeur pour « Fallout » puisqu’après l’excellent travail de Joe Kraemer sur « Rogue Nation », le studio décida de faire appel à quelqu’un d’autre pour ce sixième film : Lorne Balfe. Le compositeur bien connu pour son appartenance à Remote Control, le studio d’Hans Zimmer, a ainsi la lourde charge de succéder à Danny Elfman, Hans Zimmer, Michael Giacchino et Joe Kraemer. Le choix de Lorne Balfe ne s’est d’ailleurs guère fait sans heurt : on se souvient qu’à l’annonce de l’éviction de Kraemer et du choix de Balfe, les fans sur les réseaux sociaux se sont déchaînés, de manière absurde, en insultant carrément Balfe et Christopher McQuarrie sur leurs comptes twitters. Devant une telle campagne de dénigrement – quasiment du jamais vu pour un film hollywoodien – Kraemer lui-même a été obligé d’intervenir pour calmer le jeu et rappeler qu’il n’a pas été viré mais que le studio n’a tout simplement pas fait appel à lui. Dans une récente interview, McQuarrie expliquait que le concept de la franchise est de se réinventer à chaque fois avec un cinéaste différent. Etant donné que c’est la première fois qu’un réalisateur rempile sur un film de la saga, il a donc été décidé de changer au moins d’orientation musicale en choisissant quelqu’un d’autre. Hélas, le choix de Lorne Balfe est extrêmement curieux et laisse songeur. Cet apôtre de Remote Control, grand adepte des musiques d’action bourrines écrites platement sur un « Mission Impossible » ? On peut comprendre le désarroi des fans et le scepticisme de certains !

Probablement conscient qu’il était attendu au tournant étant donné la qualité musicale des « Mission Impossible », Lorne Balfe s’est donné les moyens en offrant le minimum syndical à « Fallout ». A la première écoute, le moins que l’on puisse dire, c’est que Balfe ne fait pas dans la dentelle (comme toujours) : grand orchestre, choeurs, percussions déchaînées et rythmes électroniques modernes, rien de bien neuf à l’horizon mais on constate néanmoins que la musique apporte un punch impressionnant aux images, d’autant que la musique est extrêmement bien mixée et valorisée à l’écran. Dès « A Storm is Coming », le ton est donné : orchestrations pâteuses et monolithiques à base des sempiternels ostinatos de cordes répétitifs, cuivres robustes et assauts incessants de percussions dès l’ouverture du film, tels sont les ingrédients dont va user Balfe tout au long du film. Dans « Your Mission », Balfe réutilise le célèbre thème musical de Lalo Schifrin qu’il décline de manière plus personnelle avec des harmonies différentes du thème original. C’est là l’un des rares points positifs du score dans le sens où Balfe s’est totalement réapproprié le fameux thème de la série TV « Mission Impossible » et en a fait quelque chose de plus personnel, de totalement différent de ce que l’on entendait dans les anciens films.


ANALYSE DE LA MUSIQUE


Dans « Should You Choose To Accept », le ton est donné, Balfe concocte un mélange de cordes planantes et mélancoliques plutôt minimalistes – le tout enregistré avec les musiciens de Londres – qui laissent augurer une aventure plus sombre et plus dramatique, comme dans « The Manifesto » qui fait monter la tension. « Good Evening, Mr. Hunt » reprend le fameux ostinato du thème de Lalo Schifrin, mais ici aussi, comme dans « A Storm is Coming », le thème semble avoir subit un lifting complet : exit le côté jazz/cool de ce thème d’espionnage, Balfe en fait ici un motif d’action plus typique des scores d’action modernes façon Hans Zimmer (ce qui a du sens en soi étant donné que Balfe travaille pour le compte de Remote Control). C’est d’ailleurs bien là le reproche principal qu’on pourrait faire au travail du compositeur : pourquoi avoir voulu gommer absolument le côté espionnage cool du thème de Schifrin alors que c’est ce qui fait l’essence même de la musique de « Mission Impossible » ? Même Hans Zimmer lui-même avait voulu faire quelque chose de fun en s’orientant vers le hard rock dans « Mission Impossible 2 », ici, l’approche de Balfe est lourdingue et loin d’être fun ! Néanmoins, tout est loin d’être négatif dans le score.

On appréciera par exemple l’emploi des choeurs quasi religieux dans « Change of Plan » pour la scène où Hunt et ses complices s’affairent à capturer Solomon Lane et à quitter Paris avec lui. Balfe utilise ici le thème de « The Plot » de Lalo Schifrin (vers 3:33) dont il modifie là aussi les harmonies jusqu’à le rendre quasi méconnaissable (à moins de bien connaître la mélodie par coeur), ce qui est un comble dans un film « Mission Impossible » ! A ce sujet, le titre du générique apparaît dans le traditionnel montage de « Fallout », où Balfe nous propose un lifting intégral du thème, y compris harmoniquement. A ce sujet, même si l’on peut apprécier le côté inédit de cette nouvelle version, on reste songeur sur les capacités musicales de Lorne Balfe : le thème de Schifrin reflétait toute la science harmonique et musicale du compositeur argentin notamment à travers certains accords à base de septièmes ou de neuvièmes (sur le final par exemple), ici, force est de constater que Balfe n’a pas le quart du savoir-faire de Schifrin et la comparaison entre les deux est très rude et extrêmement peu flatteuse pour Lorne Balfe (il n’a même pas essayé en somme, ce qui explique peut être les changements d’harmonies plus simplifiées!).

Avec « Stairs and Rooftops », Balfe nous offre l’un des meilleurs morceaux de « Mission Impossible Fallout » durant la séquence où Hunt poursuit Walker dans les rues de Londres. Pendant plus de 6 minutes, le compositeur maintient une tension et un rythme ultra nerveux avec son flot incessant de percussions, ses choeurs quasi religieux (pour la traque dans l’église), ses allusions au thème de Mission Impossible et l’utilisation très intéressante d’un motif mystérieux de piano, associé au personnage d’Henry Cavill dans le film. A noter le passage qui débute à partir de 3:32 avec ses accords puissants et majestueux qui reflètent la ténacité obsessionnelle d’Ethan Hunt à stopper Walker, sans aucun doute l’un des grands moments de la musique de « Fallout » (et du film!), superbement mis en avant par un mixage très généreux. A noter l’utilisation également réussie du piano avec les percussions dans « No Hard Feelings », un détail intéressant qui aurait nécessité d’être mieux exploité, avec des orchestrations plus sophistiquées et moins monolithiques (comme toujours avec Balfe, on a l’impression que tout est écrit en bloc!).

La séquence du saut en parachute au dessus de Paris (« Free Fall ») est un autre morceau d’action tonitruant où Lorne Balfe singe encore une fois le style de « The Dark Knight » ou « Inception » d’Hans Zimmer, deux scores qui semblent avoir servis de modèle au compositeur sur « Mission Impossible Fallout » ! On appréciera ici l’envol des choeurs qui renforcent le caractère ultra spectaculaire de cette séquence, jusqu’à une coda étonnamment dissonante, sombre et agressive, à base de rips répétés de cors (samplés) alors que l’oxygène de Walker s’est bloqué durant le saut et que les deux hommes menacent de s’écraser sur le sol parisien. On pourrait presque pu apprécier le côté quasi expérimental de ce passage si Balfe avait été un meilleur compositeur…Le thème de Mission Impossible revient en mode ‘action’ dans « The White Widow », l’un des rares morceaux où Balfe se décide enfin à utiliser des bois (flûtes) même si la seconde partie, plus atmosphérique, est un peu trop fonctionnelle et inintéressante en écoute isolée. Le motif de piano de Walker est néanmoins toujours présent, comme une sorte d’idée obsessionnelle qui traverse une partie de la musique du film (vers 1:05). « The Exchange » est un autre morceau majeur de la partition de « Fallout », pour la scène où Hunt et les hommes de la Veuve Blanche font l’échange à Paris contre Solomon Lane. L’influence de « Inception » d’Hans Zimmer est ici incontestable : tout le morceau est basé sur un long ostinato rythmique développé pendant plus de 5 minutes, faisant monter la tension durant toute cette séquence avec, encore une fois, un mixage très généreux de la musique à l’écran ! L’ostinato rythmique de « The Exchange » paraît même totalement calqué sur celui de Bane dans « The Dark Knight Rises ».

Encore une fois, on reste très dubitatif sur ce choix d’avoir voulu absolument moderniser le son « Mission Impossible » en utilisant tous les clichés musicaux hollywoodiens des années 2000 – était-ce vraiment bien utile ? On notera ensuite la reprise du « The Plot » de Schifrin dans « Steps Ahead » alors que Luther et Benji ont récupéré Solomon Lane et s’enfuient sous les quasi en bateau. Balfe utilise ici un rythme militaire de caisse claire avec la mélodie de « The Plot » développée ici mécaniquement par des contrebasses staccatos. Dommage qu’ici aussi Balfe se sente toujours obligé d’écrire lourdement dès qu’il reprend les motifs bien connus de Schifrin, ces reprises manquant totalement de finesse, de subtilité ou même de savoir-faire ! Dans « Escape Through Paris », Balfe illustre la scène de la poursuite en moto dans les rues de Paris. Le thème de Mission Impossible est largement repris ici sur un flot incessant de percussions tonitruantes, de rythmes électroniques et de cuivres robustes, incluant de nouvelles allusions à « The Plot ».


UN BILAN TRÈS MITIGE


La musique devient plus sombre dans « We Are Never Free » reprenant la tonalité plus tragique et mélancolique de « Should You Choose to Accept ». Il s’agit de l’un des rares morceaux calmes de la musique de « Fallout » construit sous la forme d’un adagio de cordes élégiaque avec une série de variations intéressantes autour du motif de piano de Walker. L’action s’intensifie dans « Kashmir » pour le dernier acte du film incluant l’explosif « And the Warrior Whispers Back » et surtout la poursuite en hélicoptères de « Scalper and Hammer », autre morceau d’action-clé du score de « Mission Impossible Fallout ». Plus intéressant, Lorne Balfe développe un motif intriguant de piano et cithare dans « The Syndicate » évoquant la menace des Apôtres tout au long du film, on aurait simplement aimé que cette identité musicale obsédante soit plus présente et davantage développée dans le film. Dans « The Last Resort », l’aventure touche à sa fin avec un piano et des cordes plus mélancoliques, pour évoquer les dernières scènes avec Ethan et son ex-femme Julia au Cachemire, piano très vite rejoint par des basses synthétiques un peu kitsch, très années 90.

Enfin, le thème de Lalo Schifrin est repris dans « Mission : Accomplished » avec un arrangement surpuissant ponctué de choeurs épiques qui n’ont visiblement rien à faire là : on croirait entendre l’un de ces arrangements musicaux over-the-top qu’on entend régulièrement dans les trailers de gros blockbusters hollywoodiens ! Force est donc de constater que la partition de « Mission Impossible Fallout » n’a rien de vraiment passionnant et semble avoir été écrite au rouleau compresseur par un compositeur qui n’a jamais brillé de par ses talents d’écriture (Lorne Balfe a déjà déclaré dans des interviews être autodidacte et se moquer complètement des règles d’écriture musicale qui, selon lui, ne sont plus nécessaires aujourd’hui!). Hélas, quand on écoute son travail sur « Fallout », difficile de ne pas être déçu en pensant ce que Michael Giacchino ou Joe Kraemer auraient pu faire sur un tel film.

Erreur de casting ? Choix regrettable du studio ? Manque de talent du compositeur ? La réponse pourrait bien être oui à ces trois questions. Néanmoins, paradoxalement, il y a de bonnes choses dans cette musique comme une utilisation intéressante d’un motif de piano, un réarrangement inédit du thème de Lalo Schifrin, l’emploi de choeurs à consonance religieuse, etc. Mais tout ceci est trop dispersé au milieu d’un océan de banalité qui rend la partition lourdingue et indigeste, d’autant que le score est somme toute trop répétitif - trop de morceaux d’action tout le temps, mal écrits et hyper bruyants où Balfe se prend trop au sérieux et oublie le côté « fun » et « espionnage groovy » des « Mission Impossible »! - Quel dommage, car pour la première fois dans la franchise, on se retrouve avec un score plutôt raté et musicalement très faible comparé aux autres opus. On espère que Tom Cruise et les producteurs comprendront qu’une musique façon « Dark Knight » ou « Inception » n’a rien à faire dans un « Mission Impossible », laissons ça aux blockbusters de Michael Bay ou de Christopher Nolan ! Un bilan très mitigé, donc !



---Quentin Billard