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1-Main Title 2.37
2-Getting the Report Out 1.51 3-Heart Smart 1.42 4-Lance Leaves 1.30 5-Charlene Give Peter Credit 3.06 6-Peter Meets Kris 1.18 7-Peter Goes Through Flies 1.57 8-Masturbation 3.33 9-Offshore Seduction 2.09 10-Crimes 3.16 11-Love Theme 1.45 12-Paranoia 3.12 13-Sometimes I Wonder 2.17 14-Sharon's Theme 1.56 15-No Brakes 1.01 16-Peter Is Thrown Out 3.07 17-I Had This Problem 2.02 18-Confrontation 2.26 19-Kris vs. Peter 0.57 20-Don't Be So Paranoid 3.21 21-End Credits 3.50 Musique composée par: Frédéric Talgorn Editeur: Varèse Sarabande VSD 5410 Producteur exécutif: Robert Townson Orchestrations: John Bell Copiste musique: Vic Fraser Mastering: Joe Gastwirt Monteur musique: George A. Martin Orchestre: The Munich Symphony Orchestra Musique produite par: Frédéric Talgorn Supervision production musique: Graham Walker Artwork and pictures (c) 1993 Paramount Pictures. All rights reserved. Note: **** |
THE TEMP
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ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
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Music composed by Frédéric Talgorn
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« The Temp » (Meurtre par intérim) est un thriller réalisé par Tom Holland en 1993. Le réalisateur est plus connu pour ses quelques films d’horreur (« Fright Night », « Child’s Play ») ou ses adaptations de Stephen King au cinéma (« The Langoliers », « Thinner », etc.). Pour son premier essai dans le domaine du thriller, Tom Holland s’intéresse dans « The Temp » à l’histoire troublante de Peter Derns (Timothy Hutton), cadre d’une entreprise de fabrication de cookies au comportement paranoïaque – il suit une thérapie pour gérer ses émotions – qui voit sa vie basculer le jour où son ancien secrétaire Lance est remplacé par Kris Bolin (Lara Flynn Boyle), une jeune femme séduisante qui ne le laisse pas indifférent. Alors que la compagnie est sur le point d’être rachetée par de nouveaux investisseurs, Peter sait qu’il doit tout miser sur la présentation de leur nouveau produit et s’affaire à présenter son rapport à sa patronne, Charlene (Faye Dunaway), qui exige de le voir déposé dès le lendemain sur son bureau. Très vite, Kris se montre plus que compétente en aidant Peter à résoudre son problème de marketing et à présenter son produit aux nouveaux investisseurs de sa boîte. Peter et Kris se lient d’amitié et le jeune cadre en apprend davantage sur sa nouvelle secrétaire, diplômée de Stanford, mariée avec un enfant.
Mais derrière ce tableau idyllique, Peter remarque très vite le caractère ultra possessif de Kris, qui va tout faire pour favoriser la carrière de Peter, de manière obsessionnelle. Peu de temps après, d’étranges accidents surviennent au bureau de Peter : Lance, qui s’apprêtait à revenir dans une semaine, est victime d’un terrible accident avec un broyeur à papier. Hartsell (Oliver Platt), l’un de ses principaux rivaux, est retrouvé mort dans sa voiture avec une guêpe dans la bouche. Jasser (Dwight Schultz) s’est pendu dans son bureau en laissant une lettre de suicide, etc. Peter commence alors à suspecter Kris d’être liée à tous ces meurtres, sans pouvoir prouver quoique ce soit pour autant. Comble de l’ironie : tous ces meurtres sont une bénédiction pour la carrière de Peter qui prend finalement du galon et obtient une importante promotion. Le jeune cadre en profite alors pour tenter de se remettre avec son ex-femme Sharon (Maura Tierney), mais Kris n’est jamais très loin et se montre de plus en plus possessive et jalouse. Peter replonge alors dans ses accès de paranoïa, incapable de trouver la moindre preuve contre Kris. THRILLER PARANOÏAQUE SANS GRANDE ENVERGURE « The Temp » est un peu ce genre de film que l’on voyait souvent dans les années 80/90 le dimanche soir à la télévision, sympa, divertissant mais sans grand éclat. Tom Holland connaît visiblement son boulot et sait diriger des acteurs et créer du suspense à l’écran. Le problème, c’est que la réalisation est essentiellement télévisuelle et sans brio particulier. Holland se contente bien souvent de poser sa caméra et d’attendre que quelque chose s’y passe devant. Il faut dire que « The Temp » est sorti au moment où la mode était au thriller sulfureux à Hollywood : « Basic Instinct » de Paul Verhoeven était sorti l’année d’avant en 1992 et avait connu un très grand succès au cinéma. Très vite, tout le monde a voulu proposer son thriller : on se souvient notamment de « The Hand That Rocks The Cradle » avec Rebecca De Mornay (1992), « Body of Evidence » avec Madonna (1993), « The Last Seduction » (1994) et « Jade » avec Linda Fiorentino (1995) ou bien encore un film plus ancien et grand classique du genre, « Fatal Attraction » avec Michael Douglas (1988). Ces films ont tous en commun l’image typiquement hollywoodienne de la femme fatale qui manipule et détruit les hommes pour accomplir ses désirs et ses fantasmes. Symbole d’un cinéma à suspense originaire des années 30/40, la femme fatale est un peu l’icône de tout un pan du cinéma américain, de Rita Hayworth dans « Gilda » (1946) jusqu’à Sharon Stone dans les années 90, la femme fatale est indissociable du cinéma à suspense et « The Temp » n’est qu’une de ces très nombreuses déclinaisons opportunistes qui ont pullulé dans les années 90, avec des hauts et des bas. Clairement, Tom Holland tente de rendre hommage ici à Alfred Hitchcock (la séquence dans la voiture avec les freins coupés) mais le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Holland n’a pas le quart du talent d’Hitchcock. Il manque à son film une esthétique plus personnelle, une mise en scène plus robuste, plus audacieuse. Là où Hitchcock apportait toujours des nuances, des idées ou des éléments artistiques presque uniques en leur genre, Tom Holland se contente de filmer mollement ses acteurs sans grande conviction. Lara Flynn Boyle campe une allumeuse obsessionnelle à base de regards de séductrice lourds de sens, même si l’actrice n’a rien d’Ava Gardner ou de Linda Fiorentino. Quand à Timothy Hutton, acteur très présent dans les années 80/90, il fait sa part du boulot en incarnant un cadre paranoïaque qui va perdre la tête à cause des agissements de sa secrétaire en intérim. C’est correct pour un thriller, mais étant donné que « Fatal Attraction » et « Basic Instinct » ont placé la barre haut quelques années avant, on était en droit d’attendre autre chose de plus prestigieux sur « The Temp » ! UNE PARTITION A SUSPENSE TRÈS CLASSIQUE C’est le toulousain Frédéric Talgorn qui a été choisi pour écrire la musique de « The Temp ». Le compositeur était encore assez peu connu lorsqu’il composa la musique du film de Tom Holland, puisqu’il venait de faire seulement 4 films auparavant, dont « Edge of Sanity » (1989), « Robot Jox » (1990), « Delta Force 2 » (1990) et « Fortress » (1992). Enregistrée avec les musiciens du Munich Symphony Orchestra, la partition de « The Temp » est un hommage plus qu’évident aux grandes heures de la musique à suspense hollywoodienne des années 30/40/50, et notamment à Bernard Herrmann, dont l’ombre plane constamment tout au long de la musique de « The Temp ». Premier fait notable : le score repose sur un thème principal aisément reconnaissable, basé sur une cellule de 3 notes de cordes dévoilé dès les premières secondes du film dans le « Main Title », motif énigmatique et inquiétant évoquant le lien entre Peter et Kris dans le film et l’obsession troublante de la jeune secrétaire en intérim pour son nouveau patron. ANALYSE DE LA MUSIQUE La parition de « The Temp » met donc l’accent sur le suspense et le mystère dans une ambiance à la fois sombre et envoûtante, qui rappelle vaguement le travail de Jerry Goldsmith sur « Basic Instinct » mais qui évoque surtout les musiques de Bernard Herrmann pour certains films d’Hitchcock. Dès le « Main Title », Frederic Talgorn utilise judicieusement les fameuses Ondes Martenot, ce célèbre instrument à clavier électronique inventé par le français Maurice Martenot en 1928 et très utilisé par Elmer Bernstein dans les années 70 à 90 (« Ghostbusters », « Black Cauldron », « The Good Son »), Maurice Jarre dans « Mad Max Beyond Thunderdome » (1985), dans la musique du jeu vidéo « Dark Void » de Bear McCreary (2010) et dans de nombreuses œuvres classiques du XXe siècle (la « Turangalîla-Symphonie » d’Olivier Messiaen, « Jeanne d’Arc au bûcher » d’Arthur Honegger ou le fameux « Concerto pour Ondes Martenot » d’André Jolivet). A noter que l’instrument est interprété ici par Cynthia Millar, la spécialiste anglaise des Ondes Martenot, avec Jeanne Loriod en France et John Morton en Angleterre, dont elle fut l’élève. Grand maître de la musique symphonique à Hollywood au début des années 80, Frédéric Talgorn impose son style élégant, riche et éminemment classique dès les premières minutes du « Main Title » qui résume tout l’esprit du thriller de Tom Holland. Dans « Getting the Report Out », Talgorn évoque la course de Peter pour remettre son rapport à temps à sa patronne avec l’aide de Kris. La musique est ici richement écrite et orchestrée dans un style symphonique luxuriant et très classique, évoquant à la fois John Williams, Jerry Goldsmith et Bruce Broughton. On devine ici une énergie et un enthousiasme très communicatif assez agréable dans le film, le calme avant la tempête. Rien ne laisse encore présager ici quelque chose de mauvais va se passer par la suite. Pour Peter, c’est un peu comme une sorte de résurrection professionnelle : la musique veut nous faire comprendre qu’il va enfin pouvoir compter sur une collaboratrice solide en la personne de Kris Bolin. De la même façon, « Heart Smart » adopte une écriture très romantique avec cordes, clarinette et violon soliste, dans un style qui ferait presque penser à Miklos Rozsa, mais le rappel du thème principal à 1:17 par des cordes plus sombres vient nuancer ce tableau idyllique. L’obsession de Kris est bien là, et Peter ignore encore qui est réellement la jeune femme qui lui sert de secrétaire en intérim. Dans « Lance Leaves », Talgorn reprend le thème joyeux et dynamique de « Getting the Report Out » avec sa mélodie de bois/piano et ses cordes enjouées. Kris peut enfin prendre place dans son bureau de secrétaire et savoure son nouveau travail avec une passion évidente. Dans « Charlene Gives Peter Credit », une ombre plane sur la partition et sur le film : Charlene félicite Peter pour son dernier travail alors que ce dernier sait que l’idée vient de Kris et qu’elle s’est volontairement mise en retrait pour que Peter soit félicité à sa place. Intrigué, le jeune cadre commence à se questionner sur qui est vraiment Kris et ce qu’elle cherche réellement. Le thème principal est repris ici de manière plus sombre avec des harmonies plus inquiétantes et torturées. « Peter Meets Kris » développe une atmosphère romantique qui ne laisse aucun doute sur les sentiments de Kris à l’égard de Peter. De son côté, le jeune cadre se sent attiré par sa secrétaire fort charmante mais résiste parce qu’il est marié. Le mélange cordes/clarinette/harpe opère ici parfaitement, avec un charme suave et une élégance raffinée, typique du style classique sophistiqué de Frédéric Talgorn. Dans « Peter Goes Through Flies », les Ondes Martenot font leur retour avec le thème principal, plus sombre et menaçant, incluant quelques passages dissonants de style suspense avec des cordes stridentes et des notes mystérieuses de piano. « Masturbation » évoque le début de la paranoïa de Peter, qui suspecte que Kris joue un double jeu avec lui. Il s’agit de la scène où la jeune femme se masturbe dans sa baignoire. La musique est ici plus agressive et dissonante, très herrmannienne, avec ses Ondes Martenot hypnotisantes et ses montées violentes de cordes et de cuivres agressifs. On nage ici en pleine musique de thriller pure à l’ancienne et le résultat est très impressionnant et superbement valorisé par un mixage généreux dans le film, avec comme toujours le thème principal de 3 notes, omniprésent tout au long du récit. « Offshore Seduction » évoque la scène où Kris tente de séduire Peter sur la rivière. Talgorn évoque la scène dans un climat pastoral rafraîchissant à l’aide de bois et de cordes majestueuses – à noter que plusieurs morceaux de l’album n’ont pas été utilisés dans le film - « Crimes » reprend le thème principal aux Ondes Martenot avec ses cordes lugubres et ses harmonies évoquant Bernard Herrmann. Là aussi, la musique devient plus sombre, plus dissonante, avec ses crescendos agressifs de cuivres ou ses effets avant-gardistes de cordes (nuages sonores de pizzicati, clusters, glissandi) lorsqu’un nouveau meurtre a été commis, le morceau se concluant sur un final extrêmement brutal et virtuose. A contrario, « Love Theme » reprend en fait le thème principal sous la forme d’une mélodie romantique pour piano et cordes d’une beauté renversante, typique des grands thèmes romantiques habituels de Frédéric Talgorn. Curieusement, le thème est très peu utilisé dans le film, on peut donc s’imaginer qu’il s’agissait probablement d’une démo écrite initialement par Talgorn au début du projet. Le musicien se montre aussi très talentueux dès qu’il s’agit d’évoquer le suspense psychologique ou la tension dans « Paranoia », avec le retour angoissant du thème principal aux Ondes Martenot et de cordes torturées, incluant une seconde partie plus lyrique et romantique du plus bel effet, tendance Golden Age hollywoodien. « Sometimes I Wonder » développe davantage l’ambiance romantique et suave de la partition, avec un passage classique à base de cordes en octaves qui semble surgir tout droit d’un film hollywoodien des années 30/40. Le « Sharon’s Theme », peu mémorable, évoque l’ex-femme de Peter incarnée dans le film par Maura Tierney avec une nouvelle mélodie de clarinette, hautbois et cordes. Le problème, c’est que ce thème ne laisse aucun souvenir particulier et manque un peu de personnalité par rapport au reste de la partition (il est par ailleurs très peu utilisé dans le film). UN BILAN TRÈS POSITIF POUR CETTE MUSIQUE DE THRILLER « No Brakes » est l’un des rares morceaux d’action du score de « The Temp », pour la scène très hitchcockienne où Peter et Kris conduisent la voiture avec les freins coupés. Le danger et la tension sont représentés ici à travers une série de variations brutales autour du thème principal avec Ondes Martenot, xylophone, cuivres et percussions agressives. L’ambiance s’assombrit considérablement dans « Peter Is Thrown Out » et le superbe « Confrontation », jusqu’au final qui débute dans « Kris Vs Peter » et « Don’t Be So Paranoid », où les dissonances finissent par prendre le dessus durant l’affrontement final, Peter découvrant la vérité sur Kris. Enfin, le générique de fin est accompagné du superbe « End Credits », dans lequel Frédéric Talgorn nous propose une dernière variation autour du thème principal obsédant dans un arrangement pour piano et orchestre évoquant les concertos classiques du XXe siècle pour cet instrument. Frédéric Talgorn signe donc pour « The Temp » une partition symphonique absolument remarquable, d’une richesse ahurissante, avec son thème principal entêtant et ses orchestrations classiques et sophistiquées. Avec un savoir-faire épatant, Talgorn prouve qu’il est un très grand musicien et signe une de ses meilleures partitions thriller pour le film de Tom Holland. La musique oscille entre le suspense et le romantisme tout au long du récit avec une intensité constante, Talgorn prenant un malin plaisir à brouiller les pistes dans sa musique tout en accentuant l’ambiance paranoïaque et psychologique de cette histoire troublante d’obsession. Un peu tombé dans l’oubli au fil des années, la musique de « The Temp » fait partie de ces petits bijoux du compositeur français qui méritent d’être redécouvert et apprécié à leur juste valeur ! ---Quentin Billard |