1-Selma (générique début) 2.47
2-Le grand départ 2.05
3-Zingal (générique fin) 2.51
4-Zingal s'envole 2.15
5-Le triomphe de Zaïna 2.18
6-Dans la course 3.17
7-Rencontre du père et de la fille 1.00
8-L'herbier de Selma 1.48
9-L'écurie en feu 0.50
10-Mustapha et Zaïna 0.59
11-Les cavaliers d'Omar 0.51
12-Au lever du soleil 1.43
13-Les voleurs de chevaux 0.33
14-Zaïna endormie 1.37
15-La cavalcade heureuse 2.17
16-L'embuscade 1.48
17-Le rêve de Zaïna 0.30
18-L'affrontement 1.19
19-La fuite 1.49
20-Kadour se révolte 0.51
21-La caravane dans l'Atlas 2.38
22-La mutinerie 1.22
23-Zaïna apprivoise Zingal 1.57
24-Le chant de Selma 1.17
25-Les neiges de l'Atlas 1.20
26-Le passage de la crête 2.49
27-Au bord de la rivière 2.30
28-La Reine Fatyn 1.11
29-L'arrivée à Marrakech 1.50
30-Mustapha défie Omar 2.34
31-L'apprentissage de Zaïna 2.38

Musique  composée par:

Cyril Morin

Editeur:

Naïve France K1620

Musique produite par:
Cyril Morin
Mixage score:
Jérôme Devoise
Coordination album:
Thomas Jamois
Manager production musicale:
Asen Kanchev
Mixage enregistrement musique:
Bruno Mercere
Oud Soliste:
Cyril Morin

Artwork and pictures (c) 2005 Rézo Films. All rights reserved.

Note: ***1/2
ZAÏNA, CAVALIÈRE DE L'ATLAS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Cyril Morin
« Zaïna, cavalière de l’Atlas » est les second long-métrage de Bourlem Guerdjou, réalisateur qui a travaillé notamment pour la télévision et a eu quelques petits rôles dans des téléfilms français. Dans « Zaïna », le réalisateur évoque les montagnes de l’Atlas, au nord-ouest de l’Afrique du nord, s’étendant du Maroc, de l’Algérie jusqu’à la Tunisie. Il s’agit d’un conte classique dans son traitement évoquant l’histoire d’une jeune fille qui cherche à fuir un beau-père tyrannique et va apprendre à découvrir son véritable père et à l’aimer. Zaïna (Aziza Nadir) se retrouve seule lorsque sa mère décède, et que son beau-père Omar (Simon Abkarian), puissant seigneur de la ville, décide de la garder pour lui en souvenir de sa mère. Zaïna rencontre alors Mustapha (Sami Bouajila), son père qu’elle n’a pas revu depuis des années après qu’il ait répudié sa mère Selma suite à un scandale survenu il y a longtemps. Mustapha doit mener les cheveux de sa tribu à la grande course de Marrakech. Père et fille ne se connaissent pas, mais Zaïna réalise qu’il est la seule personne qui puisse l’aider à échapper au despotique Omar, qu’elle accuse d’avoir assassiné sa mère. Mustapha emmène alors Zaïna dans les montagnes en direction de Marrakech avec la complicité de ses amis, mais ils vont devoir faire face aux voleurs de chevaux et à Omar et ses sbires, qui décident de les traquer dans les montagnes. Arrivés finalement à Marrakech, Zaïna prend son courage à deux et défie Omar pour l’empêcher de tuer Mustapha : s’il arrive avant elle durant la course de chevaux, elle partira avec lui. Si elle gagne la course, Omar devra s’en aller et Zaïna pourra rester avec son père et vivre en paix.


UN CONTE ARABE ASSEZ CLASSIQUE


« Zaïna, cavalière de l’Atlas » est donc un joli film qui se présente sous la forme d’un conte traditionnel, une impression renforcée notamment par l’utilisation de la voix off au début du film. Bourlem Guerdjou voulait réaliser un film authentique et évoquer ses origines à travers cette description saisissante des montagnes de l’Atlas durant une époque indéfinie. Les décors sont donc magnifiques, les chevaux sont superbement filmés mais le vrai problème vient surtout ici de la direction d’acteur. On ne sait pas si Guerdjou manquait d’expérience lorsqu’il tourna ce film en 2006, mais le jeu des acteurs est assez plat, malgré la présence de deux vétérans : Sami Bouajila (la révélation de « Indigènes ») dans un rôle finalement assez tendre et Simon Abkarian, qui surjoue un peu en fronçant les yeux pour interpréter le tyran et violent Omar, sans oublier Michel Favory, grand acteur de théâtre de la Comédie-Française qui campe ici Abdellatif ou Assaad Bouab qui interprète le jeune Kadour, aperçu lui aussi dans « Indigènes ». Le film est donc un conte archi traditionnel avec les gentils d’un côté et les méchants de l’autre, portant un message simple sur l’amour familial, les choix difficiles d’une enfant vers l’âge adulte et le pouvoir du pardon.

Sur le fond, c’est très réussi, d’autant que Bourlem Guerdjou a déclaré à la sortie du film avoir voulu faire ce film pour permettre aux jeunes issus de la cultre maghrébine de « découvrir, par le biais du conte, les traditions et les valeurs de cette culture ». C’est tout à son honneur, seulement voilà, l’exécution du conte à l’écran laisse fortement à désirer. Le film est trop lisse, trop aseptisé, sans aucune prise de risque. Les personnages sont trop monolithiques : ou trop gentil, ou alors trop méchant, il n’y a aucune nuance. Pire encore, les dialogues sont creux, parfois inexistants (Zaïna et Mustapha passe une bonne partie du film à se regarder...ça va 5 minutes mais au bout d’une heure, ça devient un peu gonflant et trop facile) et le choix d’avoir tourné le film sans accent maghrébin laisse songeur.

Puisque le but était de faire un film authentique, pourquoi ne pas avoir poussé ce choix jusqu’au bout en demandant aux acteurs de parler en arabe ? Le fait d’entendre tous ces personnages de l’Atlas parler dans un français académique très propre sonne complètement faux et nous renvoie à l’idée d’une reconstitution fictive. Dommage, il y avait pourtant matière à faire quelque chose de bien plus authentique (par exemple le film aurait pu être entièrement sous-titré dans toutes ses versions) hormis les quelques timides « inch’allah » ou « Yalla Yalla ! » occasionnels. Malgré cela, on appréciera ici le jeu de la jeune Aziza Nadir, entre non-dit (elle met beaucoup de temps à parler dans le film) et colère intériorisée, tandis que Sami Bouajila nous offre un rôle plus sage dans la peau de ce père qui va apprendre à découvrir sa fille et à l’aimer – la scène où il donne ses derniers conseils à Zaïna juste avant la course de chevaux est très touchante – Alors oui, on pourra toujours regretter le côté lisse de ce conte à la limite des bons sentiments, mais force est de constater qu’il y a une réelle volonté de bien faire de la part du réalisateur comme pour cette course de chevaux finale, filmée avec brio et passion. Un joli conte arabe en somme, assez inégal et bancal mais plutôt réussi malgré tout.


UNE PARTITION ORIENTALE DEPAYSANTE


La musique de « Zaïna » a été confiée à Cyril Morin, compositeur français talentueux connu pour ses musiques de films tels que « Samsâra » (2003), « La Fiancée Syrienne » (2004), le téléfilm « Capitaines des ténèbres » (2004) ou le film « La Petite Jérusalem » (2005). Pour parvenir à ses fins, Cyril Morin élabore une partition à base d’orchestre à cordes avec divers solistes : deux chanteuses arabes, des percussions orientales (darboukas, bendir, riqq, sagattes), des percussions diverses (tambours, cymbales), un oud, une flûte ney, un duduk arménien et quelques synthétiseurs. Dès les premières minutes du film, la musique s’impose par son ton émotionnel et sentimental à la fois poétique et raffiné, évoquant l’histoire touchante de la jeune Zaïna. Le score de Cyril Morin repose tout d’abord sur un superbe thème principal dévoilé dès l’ouverture du film dans « Selma (Générique Début) ». Il s’agit d’un thème de cordes mélancoliques et poignantes liées au souvenir de Zaïna de sa mère Selma. Le morceau est émouvant, renforcé ici par les vocalises de la chanteuse arabe soliste dont les mélopées orientalisantes évoquent la mère de Zaïna, la seconde voix étant quand à elle associée à la jeune fille. C’est aussi une façon pour Cyril Morin de rendre accessible au public occidental tout un pan de la culture musicale des peuples berbères de l’Atlas, même si l’ensemble tient plus de la « world music » que de la musique arabe traditionnelle.


ANALYSE DE LA MUSIQUE


« Le Grand Départ » reprend les vocalises de la soliste arabe avec l’ajout de la flûte ney et des cordes. L’ambiance est ici plus intime et touchante, évoquant clairement l’idée d’un conte populaire avec une certaine poésie. Dans « Zingal », Morin dévoile un autre thème du score qui prend l’accent d’un chant arabe populaire : ostinato d’oud, de darboukas avec sagattes et riqq et flûte ney, c’est l’occasion pour le compositeur d’offrir un nouveau chant pour ses deux solistes principales. Le morceau évoque ces chants de nomades traditionnels avec l’envolée majestueuse de cordes optimistes liées à la sensation grisante de chevaucher un bel étalon sauvage. Le morceau évoque non seulement le cheval Zingal que Zaïna va apprendre à apprivoiser tout au long du film mais aussi les magnifiques décors de l’Atlas. Idem pour « Zingal s’envole » où l’on retrouve les vocalises féminines éthérées pour Zaïna sur fond de cordes grandioses et aériennes, empreintes de noblesse.

« Le Triomphe de Zaïna » développe un nouveau thème poignant porté par la chanteuse et les notes délicates d’un violon arabe, l’un des plus beaux moments d’émotion de la partition de Cyril Morin. « Rencontre du père et de la fille » marque les premiers moments entre Zaïna et Mustapha, alors que le père et la fille vont apprendre à se connaître progressivement. Ici aussi, on apprécie le caractère mélancolique, rêveur et presque élégiaque de la musique de Morin, d’une beauté ahurissante sur les images du film. A noter l’emploi de quelques synthétiseurs dans « L’herbier de Selma » où la musique devient vaguement plus sombre, plus atmosphérique aussi, avec une certaine retenue, reprenant au passage le magnifique thème principal de Selma. Dans « Mustapha et Zaïna », Morin accentue la relation difficile père/fille avec les notes hésitantes d’oud et des cordes mélancoliques et intimes, reprenant le très beau thème de « Le triomphe de Zaïna », le thème de l’amour familial.

« Les cavaliers d’Omar » développe des touches instrumentales plus sombres alors qu’Omar et ses cavaliers traquent Mustapha, Zaïna et leurs compagnons dans les montagnes de l’Atlas. Morin utilise ici quelques synthétiseurs, des percussions et des cordes plus sombres pour suggérer la menace qui pèse sur les héros. A noter que les morceaux sont généralement assez courts, ne permettant pas à Cyril Morin de développer ses différentes ambiances, qui est assez regrettable. De la même façon, « Les voleurs de chevaux » est un morceau de tension/suspense assez sinistre, alors que Mustapha et Zaïna doivent traverser un lieu où se trouvent des voleurs de chevaux. Idem pour « L’affrontement », « La Mutinerie » ou le sombre « L’embuscade » avec ses derboukas énergiques et guerrières. Dans « La Cavalcade heureuse », on retrouve le thème oriental chanté de Zingal de manière dansante et presque chorégraphiée, alors que Zaïna chevauche enfin Zingal et semble l’avoir apprivoisé. Dans « Le rêve de Zaïna », le compositeur a la bonne idée d’utiliser des nappes synthétiques pour suggérer les rêves de Zaïna.

« Kadour se révolte » est un morceau d’action assez minimaliste, dominé par le travail autour des percussions guerrières et des nappes synthétiques lorsque Kadour décide de se révolter et affronte Mustapha lors d’un duel à l’épée. A noter l’emploi du duduk arménien dans « La caravane de l’Atlas », un cliché qui a la vue dure au cinéma depuis 20 ans, au moins depuis que l’instrument a été popularisé par la musique du film « Gladiator » en 2000. On appréciera le crescendo émouvant d’espoir du majestueux « Zaïna apprivoise Zingal » ou le retour du bouleversant thème de l’amour familial dans « Au bord de la rivière », lorsque Zaïna s’occupe des blessures de son père Mustapha après sa chute dans les montagnes. A noter aussi l’utilisation des percussions plus guerrières et de vocalises éthérées dans « La Reine Fatyn » ou le retour du thème principal dans « Arrivée à Marrakech », alors que Mustapha et Zaïna sont enfin arrivés à Marrakech vers la fin du film et s’apprêtent à participer à la course de chevaux.


UNE CONCLUSION PLEINE D’ÉMOTION


« Mustapha défie Omar » accompagne le violent duel à l’épée entre Mustapha et Omar à Marrakech vers la fin du film. Étonnamment, la musique reste ici assez minimaliste, Morin se contenant de quelques percussions et de nappes synthétiques planantes, prenant le contre-pied des musiques d’action modernes que l’on entend trop souvent de nos jours au cinéma. Enfin, le film se termine avec le retour du thème de Zingal dans « L’apprentissage de Zaïna ». Ainsi donc, Cyril Morin signe pour « Zaïna, cavalière de l’Atlas » l’une de ses plus belles partitions pour le cinéma. Compositeur de l’émotion à l’aise dans tous les styles, Morin s’est imposé en quelques années comme une valeur sûre du cinéma français et international, et son travail remarquable et inspiré pour le film de Bourlem Guerdjou est là pour le prouver amplement, le compositeur illustrant les images avec un respect, une grande pudeur et une sensibilité constante. Avec « Samsâra », « La vallée des fleurs », « Capitaine des Ténèbres », « La Petite Jérusalem » ou « La fiancée Syrienne », la BO de « Zaïna, cavalière de l’Atlas » semble être un choix idéal pour tous ceux qui seraient désireux de débuter dans la filmographie du compositeur français, une œuvre de très grande qualité, poignante, dépaysante et inspirée qui reçut en 2005 un prix au festival international de la musique de film d’Auxerre.



---Quentin Billard