1-Le Loup Blanc/Gévaudan 3.12
2-Mani et Les Gitans 2.39
3-La Chasse/L'abbaye
en ruine/Image Païenne 3.14
4-La Dame des Neiges 1.36
5-La Tessier/Sylvia/Le Sorcier/
La Succube 5.33
6-L'arrivée de Beauterne 1.36
7-Déduction/Réminiscence 5.55
8-La Bergère/Retour au Gévaudan/
Le Maître 3.36
9-Chasse à la Bête 3.21
10-Le Combat de Mani/
La Mort Infâme 2.55
11-La Danse des Couteaux 1.33
12-L'Antre de la Bête/Le Bûcher 5.07
13-La Mort de Fronsac 1.48
14-Lait Empoisonné 5.50
15-Les Masques Tombent 2.12
16-Le Fantôme 1.53
17-Le Duel Sauvage 3.28
18-Jugement 0.51
19-Purification 6.14
20-Epilogue 3.09
21-Once- interprétée par
Felicia Sorenson 4.27

Musique  composée par:

Joseph LoDuca

Editeur:

Virgin France 721385693326

Musique éditée par:
Davis Films
Producteur LoDuca Music:
Kathie Stork

Artwork and pictures (c) 2001 Davis Films et StudioCanal France. All rights reserved.

Note: ***1/2
LE PACTE DES LOUPS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Joseph LoDuca
Inspiré de la célèbre histoire de la bête du Gévaudan, Christophe Gans a foncé tête baissée dans 'Le Pacte des Loups', un des plus gros succès français de l'année, la preuve que pour concurrencer Hollywood, les français doivent aussi faire de temps en temps ce style de film, quitte à faire quelques concessions avec nos camarades d’Outre-Atlantique. Autour de Samuel Le Bihan, Vincent Cassel, Mark Dacascos ou bien encore Monica Bellucci, Gans a réalisé un blockbuster français à l'américaine à faire pâlir les producteurs d'Hollywood, preuve que les français sont aussi capables de produire ce genre de film quand ils veulent s'en donner les moyens. Fait notable, on retrouve dans ‘Le Pacte des Loups’ un style très inspiré des mises en scène américaines du moment : plans rapides, montage nerveux, esthétique MTV à la mode, chorégraphies de combat inspirées des films d'action hongkongais, etc. On jurerait que 'Le Pacte des Loups' est une grosse production hollywoodienne ! Ceci dit, les images de synthèse laissent souvent à désirer, preuve que malgré les avancées techniques dans ce domaine, il reste encore beaucoup de progrès à faire. L'histoire du film est on ne peut plus simple, puisqu'elle nous transporte dans la France de 1766, dans la région du Gévaudan, terrorisée depuis près de deux ans par une mystérieuse bête qui décime la population locale. Selon les villageois, la créature en question est un gigantesque loup diabolique qui ne vit ici que pour tuer. Dépêché par le roi, le chevalier Grégoire de Fronsac (Samuel Le Bihan) est envoyé dans la région pour identifier l'animal et le naturaliser après sa mort (le chevalier est taxidermiste à ses heures perdues). Il est accompagné par Mani (Mark Dacascos), un indien Mohawk rencontré en Nouvelle-France durant la guerre de sept ans et qui le suit désormais partout. Installés chez le vieux marquis d'Apcher (Jérémie Rénier), Fronsac et Mani commencent à enquêter. C'est au cours d'une réception que le chevalier fait la connaissance de la ravissante Marianne De Morangias (Emilie Dequenne), la soeur de Jean-François De Morangias (Vincent Cassel) qui n'est autre que le fils de l'influent comte de Morangias (Jean Yanne). Pendant ce temps, les attaques de la créature continuent de se multiplier jusqu’à ce que Louis XV envoie son propre lieutenant de chasse Antoine de Beauterne (Johan Leysen) pour organiser une grande chasse et abattre l'animal. Beauterne organise alors une vaste supercherie en prétextant que le loup qu'il a récemment abattu était la bête qui terrorisait le Gévaudan depuis tout ce temps. Fronsac sait qu'il s'agit d'un énorme mensonge uniquement destiné à redorer le blason du roi, et avec la complicité de Mani et l'appui de Thomas d'Apcher, ils organisent leur propre chasse pour tenter de retrouver la créature et de la tuer pour de bon. Mais ils ignorent encore que derrière ce monstre se cache un secret bien plus inquiétant.

Christophe Gans aurait prévu à l'origine de confier la musique de son film à Ennio Morricone, qui selon des rumeurs, avait plutôt apprécié le film. Mais, probablement en raison de problèmes d'emploi du temps, le réalisateur s'est finalement tourné vers un autre compositeur avec qui il avait déjà collaboré sur un de ses anciens films, ou plutôt sur un segment du film comme le précise le livret du CD, c'est-à-dire 'Necronomicon' (1993). Ce compositeur, c'est Joseph LoDuca, musicien connu principalement pour sa musique sur la trilogie des 'Evil Dead' de Sam Raimi et de ses musiques pour les séries 'Xena' et 'Hercules'. 'Le Pacte des Loups' marquera probablement une étape importante dans la carrière du compositeur, première production européenne à laquelle il collabore. Sa partition pour 'Le Pacte des Loups' est explosive, puissante, extrêmement sombre, glauque et atmosphérique. LoDuca fait preuve d’une certaine imagination sur la musique du film de Christophe Gans. Le seul problème, c’est que la partition s’avère être très brouillonne, extrêmement décousue et morcelée : il n'y a pas d'unité véritable, le compositeur se contentant d'enchaîner diverses ambiances sans toujours réussir à trouver un lien entre elles (tout à l'image du film d'ailleurs, qui s'). C'est ainsi que la première partie du score nous permet d’entendre plusieurs morceaux aux sonorités ethniques/indiennes (« La Chasse »), avant d’enchaîner sur une marche militaire (« L’arrivée de Beauterne »), une valse synthétique plutôt étrange (« La Tessier »), une mélodie de guitare romantique (« La Dame des Neiges ») pour aboutir ensuite à des passages plus sombres et atmosphériques teintés de sonorités instrumentales et électroniques (« Déduction/Réminiscence, « La Bergère », « Chasse à la bête », etc.) et des pièces plus symphoniques dans lesquelles l'orchestre se détache clairement du reste de la masse sonore, comme c'est le cas pour les cordes de « Lait Empoisonné » et le frénétique « Le Duel Sauvage ».

Joseph LoDuca a écrit un thème pour le film, celui de l'idylle naissant entre Fronsac et Marianne De Morangias, entendu pour la première fois dans « La Dame des Neiges » (scène où Fronsac et Marianne discutent sur le toit enneigé d'un château) avec sa guitare tendre et le violon synthétique qui sonne particulièrement ‘cheap’ au milieu des sonorités orchestrales du morceau, un thème que l'on ne réentend plus jusqu'à la fin du film, c'est-à-dire pour l'épilogue. On peut d’ailleurs s’interroger sur la réelle pertinence d’écrire un thème qui ne revient quasiment pas tout le long du film ? Voilà en tout cas un exemple flagrant du manque d’unité dans cette sombre partition. Les auditeurs plus attentifs pourront certainement remarquer un thème de guitare ethnique pour la région du Gévaudan, qui n'apparaît que peu de fois dans la musique, comme c'est le cas pour l'ouverture du film dans « Le Loup Blanc/Gévaudan » ou « La Bergère/Retour au Gévaudan ». Un autre motif est entendu dans « Lait Empoisonné », motif qui illustre la douleur de Marianne à l'annonce de la mort de Fronsac, lorsqu'elle découvre le sombre complot qui se cache derrière la mystérieuse bête du Gévaudan. Hélas, tous ces thèmes n'offrent aucune unité thématique pertinente à la partition du « Pacte des Loups ».

Ceci étant dit, « Le Pacte Des Loups » compense son sérieux manque d'unité et son caractère brouillon par une puissance accrue dans les passages atmosphériques et les quelques morceaux d'action. Impossible de ne pas frissonner dans « Les Masques Tombent » avec ses choeurs d'enfants religieux sur des « Agnus Dei » latins semblant tout droit sortir de l'au-delà (encore un score influencé par le « Alien 3 » d'Elliot Goldenthal !), lorsque Fronsac démasque les conspirateurs qui se cachent dans la secte religieuse du maître de la bête. LoDuca utilise ici toute une série de sonorités diverses, des synthétiseurs macabres, des cordes frénétiques, des coups de cuivres dissonants à la Don Davis, etc. D'une façon similaire, le compositeur illustre la scène où Fronsac descend dans le repère de la bête dans « L'Antre de la Bête/Le Bûcher » avec son atmosphère atonale brumeuse et ses gargouillis macabres des cordes semblant ramper comme des rats visqueux. Ce morceau nous permet d’entendre un travail de sonorités intéressant, Joseph LoDuca utilisant des techniques instrumentales avant-gardistes à la Penderecki, mélangeant habilement orchestre et électronique à travers ses différentes textures sonores. Le compositeur crée dans le film une véritable ambiance cauchemardesque qui suggère clairement une sombre et terrifiante descente aux enfers. On pourrait aussi évoquer le très sombre « Déduction/Réminiscence » qui décrit la terreur et les méfaits de la bête, morceau basé ici aussi sur un intéressant travail de sonorités angoissantes, avec notamment la présence de voix indiennes et de la voix d’une sorcière vers la fin du morceau. En bref, une atmosphère musicale d'une noirceur macabre et pesante, redoutablement efficace à l'écran !

Joseph LoDuca valorise à plus d’une reprise les sonorités ethniques/indiennes dans sa musique, évoquant bien évidemment le personnage de Mani (Mark Dacascos), le Mohawk ami de Fronsac bien décidé à franchir tous les obstacles pour traquer la bête et son mystérieux propriétaire. C'est ainsi que le compositeur nous offre des morceaux tels que « Mani et Les Gitans », avec son jeu de percussions tribales et guerrières lorsque Mani affronte ses agresseurs vers le début du film. A noter aussi le final de « Le Bûcher » avec sa flûte indienne et son duduk arménien, ou bien encore « Le Fantôme » et sa voix indienne introductive qui évoque la sauvagerie de Fronsac, bien décidé à venger la mort de Mani. On découvre ensuite certains passages orchestraux qui rappellent le traitement des cordes dans le score de « Se7en » d'Howard Shore, comme c'est le cas au début de « La Bergère » (évoquant les méfaits sanguinaires de la bête) ou dans « Lait Empoisonné », probablement une des séquences les plus sombres et les plus déprimantes du film. « Lait Empoisonné » fait intervenir la voix d’un jeune garçon soprano évoquant le personnage de Marianne qui sombre dans la déprime alors que le mal semble triompher tout autour d'elle. Ce passage s’avère être particulièrement intense dans le film. Haineux et enragé, Fronsac décide de foncer dans le tas en détruisant tout sur son passage pour finalement aboutir au frénétique « Le Duel Sauvage » où le héros affronte finalement le maître de la bête et chef des conspirateurs. LoDuca utilise aussi l’orchestre et quelques percussions sauvages et guerrières sur un rythme frénétique. A noter une voix à la Danny Elfman à la fin du morceau, entendue aussi à la fin de « Le Maître », un motif associé dans le film au mystérieux propriétaire de la bête.

Enfin, après avoir traversé cette atmosphère musicale pesante et frénétique, l’auditeur peut enfin respirer sur « Purification » et « Epilogue » pour le final plus apaisé du film, reprenant le thème romantique de Marianne/Fronsac joué ici à la guitare, avec la voix du jeune soprano et l'orchestre pour une conclusion peu surprenante. Ainsi donc, la dernière partie du score nous permet d’entendre des morceaux beaucoup plus orchestraux, et ce malgré la présence de quelques touches d'électronique (et de quelques samples parfois « cheap », comme c’est le cas dans un passage de « Le Duel Sauvage » par exemple !). Ici, la musique suggère clairement une atmosphère de libération, une sensation de soulagement, d’accomplissement et de paix retrouvée après cette sombre descente aux enfers, une idée que résume parfaitement le triomphant « Epilogue » et ses envolées orchestrales du thème romantique. Finalement, Joseph LoDuca adapte son Love Theme dans une chanson nommée « Once », interprétée par Felicia Sorenson, inévitable chanson pop du générique de fin du film.

« Le Pacte des Loups » permet donc au compositeur Joseph LoDuca d’offrir au film de Christophe Gans une musique atmosphérique extrêmement sombre, entre le thriller et l’épouvante, une partition intense qui souffre malgré tout d'un gros manque d'unité et d’une thématique assez faiblarde, deux défauts majeurs qui empêchent à la partition de LoDuca d’atteindre une certaine cohérente d’ensemble dans le film. Nous avons donc à faire à une musique bien trop décousue, manquant de cohérence, accumulant des ambiances diverses sans lien entre elles : même défaut pour le film de Christophe Gans, qui n'est qu'un patchwork massif entre film d'horreur, film d'action hongkongais, thriller, drame, film historique, etc. « Le Pacte des Loups » compense finalement ses défauts unitaires par une puissance accrue dans certains passages du score, une tension musicale toujours très intense dans les moments les plus forts du film, une véritable descente aux enfers dans les ténèbres du Gévaudan, là où Fronsac découvrira la plus sombre des conspirations qu'il n'ait jamais imaginé. Joseph LoDuca signe donc une partition sombre, intense et éclectique, qui marque enfin son retour sur une grosse production d'envergure !


---Quentin Billard