1-Papillon 2.15
2-The Camp 2.57
3-Reunion 4.33
4-New Friend 2.02
5-Freedom 3.53
6-Gift From The Sea 6.42
7-Antonio's Death 2.25
8-Cruel Sea 1.26
9-Hospital 3.46
10-Survival 5.20

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

Silva Records
FILMCD029

Album produit par:
Jerry Goldsmith

Artwork and pictures (c) 1988 Silva Screen Records Ltd. All rights reserved.

Note: ****1/2
PAPILLON
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
Brillantissime film de Franklin J. Schaffner qui dénonce les conditions inhumaines de prisons françaises du début du 20ème siècle, 'Papillon' raconte l'histoire vraie du prisonnier français Henri Charrière surnommé 'Papillon' à cause de son tatouage sur le torse (et son envie de toujours s'évader). Steve McQueen interprète Charrière dans sa lutte pour survivre et tenter de s'évader de la prison de L'île du diable avec l'aide de son ami Louis Delga (Dustin Hoffman). F.J. Shaffner a laissé quelques grands films derrière lui et 'Papillon' reste un classique du genre, intéressant dans sa mise en scène et, évidemment, illustré par une splendide superbe musique de Jerry Goldsmith.

Pour beaucoup, c'est probablement avec Schaffner que Goldsmith a écrit ses meilleures musiques de film. 'Planet of The Apes', 'Lionheart', 'Patton', 'Islands in The Stream', etc. Tous ces films sont restés des chefs-d'oeuvre dans la carrière exemplaire du maestro. 'Papillon' est généralement considéré comme la meilleure partition qu'ait écrit Goldsmith pour un film de Schaffner. La célèbrité de sa partition tient déjà à son thème principal mémorisable, le style d'air inspiré que le compositeur trouve dans ses plus grands moments musicaux. Le thème principal évoque donc le personnage d'Henri Charrière allias "papillon", facilement reconnaissable à l'utilisation d'un accordéon qui reste un cliché typique en musique lorsque l'on veut évoquer la France. Goldsmith fait aussi démarrer son thème avec l'utilisation d'un clavecin (comme dans le 'Main Tite' de 'Cassandra's Crossing') qui suit l'accordéon avant que l'orchestre ne reprenne ce thème en forme de valse possédant un esprit typé très parisien, mais sans effet festif, avec au contraire une certaine pointe de nostalgie, de regret, le regret d'un homme qui a l'impression d'avoir gâché sa vie, le regret d'un homme qui a perdu toutes ses années à vivre en prison à cause d'un crime qu'il n'a pas commis. Ce superbe thème sera la base de la partition de Goldsmith et on le retrouvera sous diverses formes tout au long du film. On notera cependant le fait que, comme dans 'Patton', il y'a assez peu de musique dans le film ou du moins de longue séquence sans musique, ce qui permet de rendre les morceaux encore plus marquants lorsqu'ils font leur apparition (c'est exactement le même principe dans le score de 'Patton'!).

Goldsmith a voulu évoquer dans un premier temps l'environnement terrible de la prison de l'ïle du Diable. Lorsque les prisonniers arrivent sur l'île vers le premier quart d'heure du film, Goldsmith décrit l'arrivée des prisonniers avec une lente marche sombre et inquiétante, utilisant un motif que l'on retrouvera un peu plus loin, le motif évoquant clairement la prison. l'orchestre est donc sombre (cordes, cuivres, vents et timbales qui marquent la marche des prisonniers) et Goldsmith appuye déjà ici ce que Schaffner veut montrer dans son film: les conditions inhumaines des prisons françaises du début du siècle. Le style d'écriture rappelle beaucoup le Goldsmith de 'Planet of The Apes' et 'Patton', en moins avant-guardiste que 'Planet of The Apes' évidemment (ce n'est pas non plus le propos du film!).

'Papillon' est une partition qui regorge de nombreuses émotions et c'est probablement ce qui fait la richesse de ce score du maestro à la queue de cheval. Après la sombre arrivée des prisonniers, on a un moment totalement différent sur le plan musical, celui de la chasse aux papillons, pièce malheureusement non enregistrée sur l'album mais néanmoins très agréable. L'orchestre s'amuse beaucoup, les flûtes et hautbois sautillants expriment la légèreté d'un vol de papillon et un moment pour une fois agréable pour les prisonniers, une véritable petite bouffée de fraîcheur dans un environnement froid et cruel. Mais l'on passe alors à des moments de nouveau plus sombre, et l'on pense à l'évasion de Charrière et de ses deux amis qui arrivent sur une île étrangère avant d'être pris en chasse par des gardes du coin ainsi que des indiens qui se lancent à leur trousse. Là, papillon fait la connaissance d'un nouvel ami, Antonio, avec qui il ne passera pas beaucoup de temps puisque ce dernier mourra dans un piège tendu par les indiens. Dans cette séquence, on retrouve le Goldsmith action que l'on apprécie tant dans un moment musicalement intense, l'orchestre sonnant très puissant (acrobaties de cuivres étonnantes pour ce plan où l'on voit papillon tomber d'une falaise dans l'eau, après avoir été attaqué à la sarbacane par les indiens) dans un style action qui rappelle beaucoup les moments agités de 'Planet of The Apes' ou les moments action étonnamment modernes de 'Von Ryan's Express' (voire ceux de 'Logan's Run'). Avec ces passages action, Goldsmith n'oublie pas de montrer à ses auditeurs qu'il sait maîtriser l'orchestre avec beaucoup de brio et de talent. Il sait aussi montrer son talent pour accompagner en musique des séquences agitées et souvent assez complexes à mettre en musique, du simple fait de leur rapidité de mouvement impliquant une synchronisation adéquate.

Le thème principal revient plusieurs fois dans la partition de Goldsmith et sous différentes formes, parfois aux cordes, parfois à l'accordéon mais de manière lente et c'est ce qui permet d'apporter la touche d'émotion à travers les différentes expériences de 'Papillon' dans cet univers carcéral cruel. A propos d'émotion, un passage particulièrement fort reste celui où papillon a réussi son évasion en bâteau avec ses deux amis. Pendant cinq minutes, Goldsmith accompagne la scène en montrant différentes émotions. D'abord la sensation d'être enfin libre et la gaieté qui en résulte ce qui ressort bien dans l'orchestre (cordes assez denses, petite reprise du thème de la prison déformé), mais on a ensuite la séquence où papillon et son ami doivent soigner la jambe blessée de Delga qui souffre de sa blessure. On voit nettement papillon soutenir son ami dans sa douleur, Goldsmith modifiant ici le ton de sa musique pour en faire un passage plus dramatique, plus touchant, évoquant à la fois la douleur de Delga mais aussi l'amitié forte qui unie les deux hommes. Autre grand moment d'émotion, celui des adieux entre les deux amis à la fin du film, Goldsmith reprenant pour la dernière fois le thème principal avec l'accordéon pour évoquer l'évasion finale de papillon hors de l'île du diable, s'échappant sur un sac par la mer.

L'idée de liberté apparaît particulièrement dans la séquence où papillon est recueilli par des indigènes dans un petit village sur une île exotique. cette longue séquence sans paroles est une hautbaine pour Goldsmith car elle permet au compositeur de laisser s'exprimer pleinement sa musique en fonction des images sans être dérangé par l'environnement sonore. Pour cette séquence, Goldsmith utilise un motif qu'il développera tout au long de ce long morceau qui exprime à la fois la liberté (provisoire) de papillon qui a réussit à s'évader de la prison et l'aspect paradisiaque de ce coin exotique. Pour cela, les sonorités orchestrales se tournent davantage vers un aspect plus léger et plus enjoué et cette idée de paradis gagné/liberté retrouvé permet de respirer un grand coup entre deux moments sombres et agités et de laisser la possiblité au compositeur de développer une séquence musicale importante et probablement l'un des plus beaux passages de sa partition pour 'Papillon'.

'Papillon' est et reste sans aucun doute l'un des chefs-d'oeuve du maestro écrit pour un film de Schaffner au côté du superbe 'Patton' et du très épique 'Lionheart'. Avec 'Papillon', Goldsmith a sut montrer tout son talent d'écriture symphonique, de jeu orchestral avec les sonorités instrumentales mais aussi sa manière d'aborder les scènes et d'approfondir toujours plus l'émotion d'une scène ou d'une séquence (la mort d'Antonio, le voyage en bâteau, les adieux à la fin, etc.). Bien plus qu'un thème principal très inspiré, 'Papillon' est avant tout un monument dans la carrière de l'un des maîtres de la musique de film, aux côtés de 'Patton', 'Planet of The Apes', ou même d'autres partitions hors des films de Schaffner comme 'Alien' ou 'Total Recall'. Un trésor du maestro Goldsmith, à connaître absolument!


---Quentin Billard