Le petit film de Jonathan Kaplan qui a rencontré un très faible succès à sa sortie mériterait d'être un peu mieux connu. Evidemment, à part Michelle Pfeiffer, il n'y a pas de grandes stars dans ce film et le scénario reposant sur une idée intéressante aurait put approfondir un peu mieux certains points de l'histoire au lieu de les laisser parfois de côté (la fin finie beaucoup trop vite comme si le réalisateur était pressé de terminer son film!). Quoiqu'il en soit, 'Love Field' est intéressant et les acteurs semblent toujours être très spontanés, comme la touchante Michelle Pfeiffer dans le rôle de Lurene Hallett qui va rencontrer un mystérieux noir, Paul Cater (Denis Haysbert), et sa fille de 6 ans Jonell lors de son voyage pour les funérailles du président Kennedy en 1963. L'histoire se complique lorsque Lurene aperçoit des blessures sur le corps de la jeune Jonell et qu'elle décide d'appeler le FBI, prenant Paul Cater pour un kidnappeur. Ce film ne restera pas dans les annales du cinéma mais mérite au moins d'être signalé comme un bon petit film sans prétention particulière.

Jerry Goldsmith a composé un de ses scores les moins connus avec 'Love Field'. Généralement assez peu apprécié et surtout peu connu, 'Love Field' possède pourtant de très bons éléments mais l'ensemble ne peut certainement pas prétendre rivaliser avec les grandes oeuvres du maestro. La partition s'articule autour de trois grands axes: des passages orchestraux intimes et un piano jazzy, un thème principal magnifique et quelques passages de style suspense/thriller/action. L'intérêt principal du score réside dans son thème absolument magnifique, probablement l'un des plus beaux thème qu'ait écrit Goldsmith dans les années 90, au côté de ceux de 'The Russia House' ou 'Powder'. Le problème du score est qu'il est assez mal monté dans le film et que beaucoup de morceaux n'ont pas été retenus, notamment la plupart des pièces qui comportent le piano jazzy, remplacés par des compositions originales pour piano seul d'un autre compositeur, la direction ayant probablement préféré ces pièces pour des questions de contexte historique (les années 60). Le début commence avec un morceau sombre pour l'assassinat de Kennedy, avec un tambour, des cloches et quelques cuivres et cordes funèbres. Passé toute une série de pièces pour piano jazzy très sixties (qui ne sont pas du maestro!), on découvre des moments plus sombres, plus tendus, notamment pour les séquences où Lurene, Jonell et Paul vont tenter ensemble d'échapper à la police.

C'est dans ces passages que l'on retrouve le Goldsmith du suspens avec un style qui rappele évidemment des scores comme 'First Blood' ou 'Total Recall', mais sans posséder pour autant la violence sous-jacente de ces deux scores. Ici, on a plus à faire à du suspens qu'à de l'action à proprement parler même si on a un ou deux passages assez agités. Goldsmith se fait une joie de réutiliser ses fameux synthétiseurs au sein de son orchestre dans des pièces trop banales et finalement peu intéressantes dans le score ce qui tent l'auditeur à se rabattre sur la partie plus intime du score. Le thème principal évoque à la fois l'amitié entre Lurene et Jonell mais aussi l'amour naissant très difficilement entre Lurene et Paul. L'intrigue amoureuse étant plutôt avortée (voire amputée) par le scénario, comme si les scénaristes avaient décidés vers la fin à abandonner cette idée. Dommage! Le problème est que certains morceaux ne sont pas utilisés dans le film et que les quelques apparitions du thème ne sont pas assez marquantes. Par exemple, le magnifique final 'Together Again' et son piano aurait vraiment mérité être inclu dans le final (bâclé) du film. Pour un si beau thème, c'est un vrai gâchis et c'est probablement l'un des gros défauts du film et de sa musique. C'est pour cela que l'écoute du score sur CD est beaucoup plus intéressante que celle dans le film car elle fait nettement mieux ressortir l'ensemble de la partition telle que l'a conçu Goldsmith à l'origine.

On retrouve aussi une écriture plus intime, faite de cordes et vents (flûtes ou clarinettes) pour les passages avec Lurene et Jonell ou pour des moments touchants. La douceur et la tendresse de ces morceaux rappele aussi que Goldsmith n'est pas simplement un compositeur des films d'action et des thrillers et qu'il sait aussi se montrer très doux dans sa musique. Evidemment, on a en tête de ces pièces le thème romantique par excellence et réelement touchant, mais le problème de cette BO hormis un montage peu intéressant dans le film est que ce qui est entoure le thème est beaucoup moins intéressant ce qui diminue l'intérêt de ce score pourtant quand même intéressant. Malgré tout cela, 'Love Field' est un assez bon Goldsmith qui mériterait pourtant d'être un peu mieux connu même si cela reste un score totalement mineur dans la carrière exemplaire du maestro californien!


---Quentin Billard