1-The Others 2.24
2-Wakey Wakey 1.44
3-Old Times 3.25
4-They are Everywhere 2.35
5-Reunion 1.06
6-Changes 1.37
7-I Do Believe It 3.15
8-Charles 1.46
9-Communion Dress 1.21
10-No Curtains 2.48
11-Give Me The Keys! 1.32
12-The Attic 1.47
13-Sheets and Chains 5.49
14-A Good Mother 5.42
15-End Credits 4.10

Musique  composée par:

Alejandro Amenabar

Editeur:

Sony Classical
SK 89705

Album produit:
Lucio Godoy

Artwork and pictures (c) 2001 Miramax Film Corp./Sony Music Entertainment, Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE OTHERS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Alejandro Amenabar
Talentueux jeune réalisateur espagnol, Alejandro Amenabar n'en est pas à son premier coup d'essai puisqu'il a déjà réalisé le fameux 'Tesis' ainsi que son autre fameux film, 'Abre Los Ojos', film dont les américains se sont inspirés pour faire le remake intitulé 'Vanilla Sky'. N'oublions pas non plus de mentionner 'Himenoptero' (1991) ainsi que 'Luna' (1995), deux court métrages en forme de petit thriller qu'il réalisa avant de faire 'Tesis' en 1996, ce dernier étant son premier long métrage. Fan des thrillers et autre film d'épouvante, le très doué Amenabar revient à nouveau sur un film effrayant, 'The Others' dans lequel il narre l'histoire de Grace Stewart (lumineuse Nicole Kidman), une femme qui vit dans un manoir avec ses deux enfants qui ne supportent pas la lumière du jour et qui doivent se cacher dans l'ombre à cause d'une maladie très rare les rendant allergique à la lumière. Lorsque les nouveaux domestiques arrivent, les choses vont commencer à changer étrangement et cela va être le début du cauchemar par Grace et ses enfants jusqu'à ce qu'elle découvre ce qui lui arrive. Je n'en dit pas plus si ce n'est que le film renvoie à 'The Sixth Sense' de Shyamalan, le film auquel on le compare le plus souvent, simplement parce que la forme et le style du récit (plus certains trucs très précis) rappellent beaucoup le film de Night M.Shyamalan. A part cela, Amenabar a tout de même réussi un film superbement filmé utilisant la lumière naturelle, la mise en scène étant toujours très tendue et le film très prenant. Une grande réussite qui doit beaucoup à l'interprétation sans faille de Nicole Kidman dans ce rôle d'une mère dépassée par les événements étranges qui surgissent dans sa grande maison.

Alejandra Amenabar a un point commun avec le réalisateur John Carpenter: tout comme son collègue américain, Amenabar compose lui même ses propres musiques, même si le réalisateur espagnol a beaucoup plus de connaissance musicale et de maîtrise de l'écriture que Carpenter qui n'a reçu seulement que quelques leçons de Solfège avec son père. Pour The Others, le score que le réalisateur a lui même composé renvoie directement à tous les classiques du genre, en particulier dans l'écriture pour cordes à la Bernard Herrmann, mais pas seulement. On pense aux BO thrillers de Jerry Goldsmith, de James Newton Howard ('Devil's Advocate', 'The Sixth Sense', etc.) ou d'Alan Silvestri ('Shattered', 'What Lies Beneath', etc.). Le compositeur/réalisateur joue avec ses références pour créer une atmosphère sinistre et lugubre pour la musique de son film, avec une touche très américaine dans la conception. Le Main Title pose un faux air de berceuse enfantine qui semble être à la fois apaisante et intriguante par son côté très vaguement ambigu. On ne peut pas dire d'entrée si ce Main Title est sombre ou s'il est au contraire très doux. Amenabar utilise une harpe, une flûte, un violon avec en arrière plan un chœur d'enfants évoquant évidemment les deux enfants de cette sombre histoire. Notons aussi l'utilisation surprenante d'un clavecin et d'une guitare, le clavecin venant donner une vague couleur baroque probablement inspiré par le manoir dans lequel se déroule l'histoire (cela lui donne un côté un peu gothique). Avec ses accents enfantins et doux à la fois, ce Main Title est très astucieux pour débuter le récit: le compositeur nous indique très clairement que les véritables personnages principaux de cette histoire, ce sont les deux enfants. Très rapidement, la musique d'Amenabar devient de plus en plus sombre, au fur et à mesure que des choses étranges se produisent dans la maison.

Conservant toujours son écriture orchestrale en utilisant différents instruments solistes, Amenabar amène très rapidement un sentiment de malaise et de terreur dans sa musique, et ce à travers des orchestrations remarquables de la part de ce jeune réalisateur (il est tout de même assisté par trois autres orchestrateurs) et digne des grands maîtres du genre. Si dans un premier temps c'est le suspense et le mystère qui s'installent dans la musique, créant une atmosphère tendue renvoyant aux interrogations de Grace qui ne comprends pas ce qui se passe dans la maison, c'est la terreur qui arrive très vite avec des séquences comme le coup des rideaux qui disparaissent partout dans la maison ou la scène où Grace agresse l'enfant sous un drap, des moments où Amenabar déchaîne son écriture atonale/dissonante de l'orchestre utilisant les percussions et de véritables sursauts orchestraux effrayants et des cordes stridentes. Le compositeur utilise un thème principal qui est assez peu marquant et qui est vite dépassé par le climat de tension et de malaise qui parcourt l'ensemble de cette sombre partition. (mais il est néanmoins présent dans le score) Les cordes dramatiques et le violoncelle soliste de la scène pour le retour de Charles, le mari de Grace possède un côté ambigu: sans être romantique ou apaisant, le morceau conserve toujours un côté assez sombre en particulier à cause de l'écriture assez tendue des cordes, comme pour évoquer le fait que la plongée en enfer de Grace est loin d'être terminée, et ce jusqu'à ce qu'elle découvre le secret qui entoure toutes ses hallucinations et ses visions étranges qui semblent s'agripper à elle (on pense parfois à 'What Lies Beneath' de Zemeckis).

La séquence de l'enfant sous le drap renvoie clairement au 'Devil's Advocate' de James Newton Howard et plus particulièrement au morceau 'Baby', là où le compositeur de 'The Fugitive' utilisait une voix d'enfant lointaine semblant surgir de manière angoissante des profondeurs. Ici, c'est le même cliché musical qu'utilise Amenabar et même si le morceau donne une impression de déjà-entendu, l'effet à l'écran est saisissant et réellement effrayant. Le morceau devient vite violent alors que Grace se jette sur cette petite fille et commence à la frapper comme si elle était en train de perdre la tête avant de s'apercevoir qu'il s'agit en fait de sa propre fille. L'écriture atonale et déchaînée des cordes violentes et du reste de l'orchestre (percussions et cuivres bien mis en avant) est saisissante comme dans la plupart des moments bien flippants du score. La terreur atteint son paroxysme dans le final du film, là où les secrets sont enfin dévoilés. Le End Credits est intéressant parcequ'il récapitule bien l'atmosphère à la fois ambiguë, dramatique et sombre du score.

Plus qu'un simple exercice de style, The Others est un score montrant une volonté tenace de créer l'atmosphère la plus adéquate possible dans le film du réalisateur. Même si la partition d'Amenabar est traversé de références diverses, de Herrmann à Newton Howard, l'ensemble n'en demeure pas moins très intéressant au sein du film et surtout très réussi puisque la musique arrive à créer une ambiance assez forte pour cette sombre histoire. On attends maintenant les futures oeuvres de ce jeune cinéaste/compositeur prodige qui devrait gagner en maturité pour mieux développer son style personnel.


---Quentin Billard