1-Morning On The Beach 2.33
2-The Funeral 3.24
3-Thanks Mom 4.26
4-Spring Cleaning 2.31
5-The Ring 2.09
6-A Brave Girl 3.50
7-Fears 2.57
8-What Did He Do 2.28
9-The Storm 3.13
10-The Carnival 2.55
11-Remember This 7.57

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

Columbia CK 473890

Produit par:
Jerry Goldsmith
Monteur de la musique:
Ken Hall
Assistant de Mr.Goldsmith:
Lois Carruth

Artwork and pictures (c) 1991 Twentieth Century Fox. All rights reserved.

Note: ***
SLEEPING WITH THE ENEMY
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
Thriller passable de Joseph Ruben qui partait sur une bonne idée et qui se plante en chemin faute d'un script mal développé, 'Sleeping With The Enemy' (Les Nuits avec mon Ennemi) nous raconte l'histoire de Laura Burney (Julia Roberts), une femme maltraité par son mari Martin (Patrick Bergin), un homme brutal et jaloux. Cherchant la moindre occasion pour le quitter définitivement, Laura réussi à s'échapper un soir et à disparaître complètement, se faisant passer pour morte. Sous le nouveau nom de Sara Waters, Laura va tenter de refaire sa vie en achetant une nouvelle maison dans une ville éloignée et sa romance naissante avec un professeur de théâtre Ben Woodward (Kevin Anderson) va l'aider à surmonter son traumatisme et ses mauvais souvenirs. Tout semble alors aller pour le mieux jusqu'à ce que Martin découvre la supercherie et se met alors en tête de retrouver coûte que coûte Laura pour lui faire payer sa fuite. L'idée était pourtant intéressante mais le réalisateur Joseph Ruben ne développe pas assez les situations de suspense ou les trois protagonistes principaux du film. Rajoutons à cela que le film accumule une série de clichés et autres stéréotypes habituels (le coup du méchant qui se relève à la fin, et qui, comme par hasard, n'a plus de balles dans son chargeur, etc.), bref, un vrai ratage pour ce petit thriller de série-B quelconque qui aurait mérité un script de bien meilleure qualité (on appréciera le coup d'associer le personnage de Martin au 'Dies Irae' de la 'Symphonie Fantastique' d'Hector Berlioz). On notera tout de même la performance remarquable de Patrick Bergin dans ce rôle de mari maniaque et violent, au regard froid et enragé.

Jerry Goldsmith a une année plutôt tranquille en 1991 puisqu'il ne compose que la musique pour 'Sleeping With The Enemy' et 'Not Without My Daughter'. Le score thriller/suspense de 'Sleeping With The Enemy' est assez surprenant aux premiers abords et devient assez vite attachant de par son utilisation assez fréquente d'un très joli thème principal qui évoque très clairement le personnage de Laura Burney. Le film s'ouvre donc aussi sur l'excellent thème de Laura ('Morning On The Beach') qui sert d'unique thème principal à toute la partition et que le compositeur utilisera énormément tout au long du film, peut être même de manière un peu trop fréquente. Soutenu par un léger petit accompagnement de synthé cristallin, avec cordes et harpe/piano, c'est une flûte très délicate qui entame la très belle mélodie de ce véritable leitmotiv de l'héroïne du film. A travers ce thème en apparence romantique et nostalgique à la fois, Goldsmith évoque le côté innocent de cette jeune femme en quête de paix qui cherche un nouveau départ dans sa vie difficile auprès d'un mari brutal et maniaque qui ne cesse de la maltraiter depuis plusieurs années. 'Morning On The Beach' introduit donc le thème principal alors que Laura se trouve au bord de la plage en train de ramasser des coquilles près de la maison de Martin au bord de la mer. Ne pouvant plus continuer à vivre ainsi, Laura décide de disparaître définitivement et se fait alors passer pour morte. C'est ainsi que l'on retrouve une fois encore le thème principal développé à l'orchestre dans 'The Funeral' (surtout confié aux cordes) pour la scène où Martin va aux 'fausses' funérailles de sa femme pendant que cette dernière se trouve dans un bus en direction d'une autre ville.

Le score de Goldsmith possède très clairement deux facettes bien distinctes autour desquelles la partition se structure de manière très efficace dans le film. La première facette est la partie plus lyrique, harmonique et mélodique du score où le thème principal apparaît la plupart du temps sous différentes formes et toujours développé à l'orchestre (et le synthé ici encore assez doux, privilégiant les sonorités cristallines comme dans 'Morning On The Beach'). Mais la seconde partie évoque le côté thriller du film avec de superbes passages de suspense vraiment prenant et d'ailleurs assez surprenant de la part du compositeur. La partie suspense arrive d'ailleurs plus tard dans le film, à peu près à la moitié de l'histoire, lorsque Martin découvre la supercherie de Laura (c'est 'Thanks Mom' qui introduit la partie suspense du score sur l'album). Un morceau comme 'Spring Cleaning' évoque la nouvelle vie paisible de Laura/Sarah en utilisant un piano plus aérien et des cordes/vents nettement plus paisibles dans un des passages plus lyriques et reposants du score qui évoquent cette seconde chance pour Laura qui semble revivre à nouveau. Une fois encore, son thème apparaît dans le morceau, développé ici autour des vents et des cordes, Goldsmith ayant crée un véritable leitmotiv émouvant pour ce personnage féminin. En réalité, le premier morceau agité de style action apparaît dans 'The Storm' pour la scène de la tempête sur le bateau qui sert alors de prétexte à Laura pour disparaître définitivement. On retrouve les orchestrations habituelles du compositeur qui, tout au long de sa partition, mettra plus souvent les cordes en avant.

Mais ce sont étrangement les passages de suspense qui semblent être les plus réussis et les plus intéressants dans le film. Dans 'The Ring', les ennuis commencent alors que Martin découvre la supercherie de Laura en trouvant son alliance au fond de la cuvette des WC plus un coup de fil d'une de ses amis qui lui met la puce à l'oreille. Goldsmith transforme le côté auparavant paisible de son orchestre en tension pure et dure, les orchestrations et les harmonies devenant subitement beaucoup plus sombres et agitées. Le compositeur utilise aussi des sonorités plus sombres comme par exemple ces sons de cloches qui apparaîtront très souvent dans les morceaux suspense du score ('The Ring' fait un peu penser aux passages action de 'Total Recall'). Evidemment, l'arrivée de ces passages de suspense ne font pas disparaître les utilisations du thème principal qui reste toujours présent pour évoquer la nouvelle vie de Laura. Mais le thème (un peu trop fréquentes dans la première partie du film) est nettement moins présent dans cette seconde partie du film plus dans l'esprit thriller/suspense où Martin se lance à la recherche de Laura. 'The Carnival' est très sombre et évoque le côté suspense du film dans lequel Goldsmith fait une utilisation plus nette du synthétiseur en associant des sonorités lugubres au personnage fou de Martin qui a retrouvé dans cette scène Laura dans une fête foraine en compagnie de son nouveau mec, Martin les dévisageant tout les deux avec un regard haineux terrifiant. Tendu et très dur, 'The Carnival' fait déjà monter la tension, au même titre que le superbe 'Thanks Mom' qui nous propose aussi un usage très astucieux des différentes sonorités sinistres du synthétiseur, le tout englobé dans une véritable ambiance de peur et de suspense.

Comme nous l'avons déjà mentionné au dessus, les parties suspense du score de 'Sleeping With The Enemy' sont vraiment surprenantes de par cette utilisation très travaillé du synthé et la quasi absence des clichés orchestraux habituels du compositeur (très peu de cordes stridentes dans ces morceaux, pas de cuivres agressifs comme on en trouvera dans 'Malice' ou plus tard dans 'The River Wild' par exemple, pas de grosses percussions brutales, etc.). Le très sombre 'Thanks Mom' est le pur passage de suspense par excellence, un peu comme le ferait Christopher Young dans un thriller: nappe de synthé tendue, sons électroniques à la fois sombres et menaçants (on retrouve les sons de cloches attribués au sentiment de menace évoqué par la présence de Martin dans les environs), le morceau trouve sa voix lorsque le mari fou de Laura se trouve dans l'hôpital où Laura est venue voir sa mère, et qu'il décide alors de venir l'interroger en se faisant passer pour un policier qui recherche sa fille. 'The Carnival' augmente ainsi d'un cran la tension qui atteint évidemment son apogée dans 'Remember This', l'inévitable scène de confrontation finale (NDLR: il faut mentionner l'intrusion aussi inattendue que surprenante d'un très bref extrait de 3 ou 4 secondes issu de 'Atmosphere Station' du score d'Aliens de James Horner, probablement du aux temps-tracks du film? L'utilisation de ce très court passage issu d'Aliens d'Horner apparaît au moment où Julie voit passer quelqu'un derrière elle dans le reflet d'une fenêtre). 'Remember This' finit plus de manière violente dans un style orchestral et plus action/thriller où l'on retrouve l'influence de scores tels que 'Poltergeist' ou 'Total Recall', 'Remember This' étant le final parfait pour ce petit thriller banal.

Au final, 'Sleeping With The Enemy' est un score de thriller/suspense plutôt réussi même si l'on regrettera l'absence d'un second thème qui aurait put permettre à Goldsmith d'éviter la monotonie qui s'installe dans la première partie du film avec un usage trop répété de son thème principal. Heureusement, certaines parties de suspense du score sont à la fois étonnantes et réussies (surtout dans le film où elle créent une ambiance de peur parfaite) et permettent d'apporter un contrepoids essentiel au style plus mélodique et lyrique du reste de la partition. Pas vraiment un chef-d'oeuvre et encore moins un classique du compositeur, 'Sleeping With The Enemy' est une petite BO sans prétention qui colle très bien à cette petite série-B à suspense, elle aussi sans prétention.


---Quentin Billard