1-Opening 1.21
2-Conquest of Paradise 4.30
3-Monastery of La Rabida 3.24
4-City of Isabel 2.08
5-Light and Shadow 3.31
6-Deliverance 3.20
7-West Accross The
Ocean Sea 2.44
8-Eternity 1.53
9-Hispanola 4.39
10-Moxica and The Horse 6.42
11-Twenty Eight Parallel 4.47
12-Pinta, Nina, Santa Maria
(Into Eternity) 12.37

Musique  composée par:

Vangelis

Editeur:

EastWest 4509-91014-2

Album produit par: Vangelis
Publié par Spheric BV
Assistant Producteur:
Frederic Rousseau

Artwork and pictures (c) 1992 Warner Music U.K Ltd. All rights reserved.

Note: *****
1492 CONQUEST OF PARADISE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Vangelis
Superbe fresque historique signée Ridley Scott, '1492 Conquest of Paradise' nous permet enfin de découvrir la vie tourmentée du célèbre explorateur espagnol du XVème siècle qui découvrit l'Amérique par erreur, cherchant en réalité la route des Indes. Marin d'origine génoise, Colomb (Gérard Depardieu) prétendait qu'il existait un moyen de rallier les Indes par l'Ouest, et ce malgré les protestations de ses contemporains qui réfutaient en bloc sa théorie - dangereuse, dans une société dominée par l'Inquisition où l'on n'hésitait pas à brûler vif les hérétiques et les sorcières. Pour prouver le bien-fondé de ses théories, Colomb doit réunir d'importants moyens et disposer de trois navires qui lui permettront de franchir les océans en direction des Indes. Avec l'appui de l'armateur Pinzon (Tchéky Karyo) et de Sanchez (Armand Assante), le trésorier de la reine Isabella (Sigourney Weaver), Colomb obtient satisfaction et débute un long et périlleux voyage en mer avec ses trois célèbres caravelles, Pinta, Nina et Santa Maria. Le reste appartient désormais à l'Histoire. Après avoir navigué des mois en mer, Colomb découvrit enfin un territoire inconnu, celui des Amériques, le 12 octobre 1492. Débarqués sur cette terre baptisée 'San Salvador' (il s'agit en fait de l'île de Guanahani), Colomb et ses hommes partirent à la découverte du peuple indigène de cette terre paradisiaque et apportèrent la civilisation aux indigènes. Suivant ses demandes auprès du roi d'Espagne, Colomb entama sa quête d'or et de privilèges, devant ainsi vice-roi des Indes et gouverneur du territoire. De retour en Espagne, Colomb présenta ses découvertes mais ramena peu d'or pour le royaume, tandis qu'une partie de ses hommes étaient restés en Amérique pour vivre auprès des indigènes. Pour son second voyage, Colomb revint avec des nobles de la cour d'Espagne, mais à son arrivée, il découvrit que tous ses hommes avaient été massacrés par les indigènes. Pacifique, Colomb refusa de venger ses hommes et de sombrer dans la violence, ce qui provoqua une mutinerie parmi ses hommes, dirigés par le sinistre Adrian de Moxica (Michael Wincott), qui déclencha une guerre contre les soldats de Colomb et provoqua le chaos parmi les indigènes. S'ensuivit une série de carnages et de déconvenues qui prouvèrent que ce 'nouveau monde' était un échec total et que Christophe Colomb n'avait définitivement pas les capacités pour gouverner ce nouveau pays. A son retour en Espagne, il fut emprisonné, et plus personne ne parla de sa découverte à la cour d'Espagne. Ce ne fut que grâce à ses deux fils que Colomb put enfin repartir une troisième fois en Amérique, avant de sombrer dans l'oubli et la misère la plus totale à la fin de sa vie.

Après plusieurs versions en 1949 et 1985 et 1992 (avec Georges Corraface dans la version réalisée par John Glen), Ridley Scott nous propose enfin un film grandiose et monumental sur la vie de Christophe Colomb, tentant de rivaliser la même année avec le film de John Glen, mais en vain. Le film de Ridley Scott échoue lamentablement au box-office et s'affirme comme l'une des plus grosses déconvenues du réalisateur anglais, qui entame dès 1992 une série d'échecs commerciaux tout au long des années 90. Pourtant, Ridley Scott avait toujours souhaité faire un film sur la vie et les découvertes de Christophe Colomb, un projet qui se concrétisa finalement en 1992 à l'occasion du 500ème anniversaire du célèbre marin et explorateur espagnol. La scénariste française Roselyne Bosch entama un long travail de recherche afin de nous proposer un script à la hauteur du film monumental de Ridley Scott, qui nous livre un film magnifique, beau, dur, violent et réaliste, une fresque historique d'une ampleur artistique rarement égalée (on ressent ici tous les attributs d'un véritable cinéma d'auteur - n'en déplaise à tous les détracteurs du film!). Bien loin d'être une grosse production hollywoodienne, '1492' nous propose une peinture réaliste de Christophe Colomb, campé par un Gérard Depardieu formidable comme d'habitude (seul un acteur de sa trempe pouvait interpréter ce personnage légendaire), un personnage complexe qui sera très vite rattrapé par ses défauts (son obsession du nouveau monde, ses promesses qui tardent à arriver, son incapacité à gouverner son nouveau pays, etc.), bien loin de la peinture idéalisée que l'on a souvent fait de ce personnage. Malgré quelques longueurs (154 minutes) et des scènes de violence gratuites, '1492' est un film magnifique et sombre, dominé par une mise en scène de qualité et un casting exceptionnel, réunissant quelques stars de divers horizons tels que Gérard Depardieu, Armand Assante, Sigourney Weaver, Loren Dean, Fernando Rey, Michael Wincott, Tchéky Karyo, Kevin Dunn, Frank Langella, Arnold Vosloo, etc. Reste que le film a été très injustement descendu en flèche par les critiques, qui n'ont visiblement pas réussi à se passionner pour cette magnifique fresque historique d'une intensité dramatique rare, comme on en reverra rarement dans le cinéma américain/européen.

Si le film de Ridley Scott n'a pas réussi à trouver son public, on ne peut pas en dire autant pour l'immense musique de Vangelis, qui a connut un succès phénoménal tout au long des années 90, venant rejoindre le rang des rares bandes originales de film les plus vendues au monde (au même titre que 'The Last of The Mohicans', 'Chariots of Fire', 'Dances with Wolves' ou 'Titanic'). Avec sa somptueuse et audacieuse partition mêlant électronique, choeurs épiques/religieux et nombreuses touches ethniques aux sonorités hispano-arabes, Vangelis a immortalisé à tout jamais la vie et les découvertes de Christophe Colomb, le succès de sa musique dépassant même le simple cadre du film si l'on en considère l'exploitation massive du célèbre thème 'Conquest of Paradise' dans des cérémonies diverses un peu partout dans le monde. Effectivement, si la BO de '1492' a connut un tel succès, c'est avant tout pour le sublime 'Conquest of Paradise', célèbre thème principal de la partition de Vangelis qui se caractérise sous la forme d'une marche soutenu par un ostinato rythmique, des synthés et des choeurs grandioses. 'Conquest of Paradise' évoque à merveille cette idée de la découverte d'un monde nouveau, avec ces choeurs affirmant ici une dimension universelle, celle de la quête de l'humanité vers le paradis. On ne pouvait ainsi rêver mieux pour une fresque historique d'une telle ampleur, une musique pour rêver et s'évader, tout simplement! Dans le film, le thème est entendu pour la première fois lorsque Colomb et ses hommes se préparent à partir à bord des trois caravelles pour entamer leur premier voyage en mer. Le second thème majeur de la partition apparaît dans le très beau 'Monastery of La Rabida', thème associé à Colomb tout au long du film et qui possède une mélancolie poignante. Le thème apparaît pour la première fois au début du film lorsque Colomb vit encore dans un monastère espagnol. Avec ses sonorités new-age et ses sonorités cristallines, le magnifique thème associé à Colomb évoque à merveille les rêves et les idéaux du personnage de façon plus intimiste, avec un certain soupçon de tristesse qui semble annoncer les échecs dramatiques de l'entreprise de Colomb. A noter que le morceau présent sur l'album est une version inédite pour l'album, incluant des choeurs latins grégoriens collés par dessus le très beau thème de Colomb. Comme toujours, on regrettera le fait que l'album de la musique ne respecte nullement le score tel qu'on l'entend dans le film, omettant de nombreux passages particulièrement magnifiques non présents sur l'album (comme par exemple la musique pour la scène de la cérémonie avec la reine Isabella ou celle pour la scène de la construction de la cloche), des oublis honteux qui ne peuvent que provoquer la frustration des béophiles désireux d'entendre une version intégrale de cette partition.

Vangelis poursuit son exploration de la musique chorale dans le superbe et incontournable 'Hispanola', sans aucun doute l'un des morceaux les plus présents tout au long du film, et ce dès le générique de début (le 'Opening' de l'album n'étant pas utilisé dans l'ouverture du film!). Morceau sombre aux rythmes implacables, 'Hispanola' est soutenu par un ostinato rythmique obsédant, des sonorités de flûtes indiennes, des synthés et l'improvisation d'un chanteur hispano-arabe avant que des choeurs épiques viennent rejoindre le morceau, illustrant ainsi la plupart des scènes majeures du film - l'ouverture du film, la bataille contre les troupes de Moxica, la découverte de l'Amérique, etc. 'Hispanola' possède un côté quasiment apocalyptique avec ces choeurs sombres qui renforcent avec une intensité rare le côté dramatique du film. Ici, on est très loin du côté universel et majestueux de 'Conquest of Paradise'. A vrai dire, 'Hispanola' pourrait se résumer comme étant le parfait pendant musical de 'Conquest of Paradise' qui, tout en utilisant les mêmes formules musicales (choeurs, synthé, ostinato, etc.), différent largement de par l'esprit que dégage ces deux morceaux. A l'écoute de 'Hispanola', on ne peut s'empêcher de pensant à la noirceur et à la violence du film de Ridley Scott, tant la musique de Vangelis a sut parfaitement une fois de plus capter toute l'intensité du propos de cette grande fresque historique. Moins massif et sombre, 'Light and Shadow' évoque à son tour le côté dramatique du film mais avec un choeur harmonisé de manière plus tonale. On ressent ici aussi le côté à la fois épique et sombre du film de Ridley Scott, les images étant une fois de plus transcendé par une écriture chorale absolument grandiose, d'une qualité rare. 'Deliverance' nous permet quand à lui d'entendre à 2.21 un bref 'Dies Irae' poignant écrit par Vangelis, dont les paroles sont issus de la traditionnelle messe de 'Requiem' latine, illustrant la scène où l'un des hommes de Colomb meurt après avoir été piqué par un serpent et est enterré sur le sol du nouveau monde, un passage choral à nouveau sombre et dramatique qui semble noircir considérablement à l'écran cette idée de la quête d'un nouveau monde paradisiaque.

A noter un morceau inédit non utilisé dans le film, 'West Across The Ocean Sea', basé sur une mélodie mélancolique et entièrement dominé par des synthétiseurs, un morceau que l'on croirait issu des précédents travaux de Vangelis pour les documentaires animaliers de Frédéric Rossif tels que 'L'apocalypse des animaux' (1972) ou 'L'opéra sauvage' (1977). Autre passage dramatique absolument incontournable, le magnifique 'Eternity' qui évoque la communion entre les espagnols de Colomb et les indigènes du nouveau monde, scène idéalisée pour le seul véritable moment de paix entre les deux peuples avant que la bêtise humaine vienne reprendre le dessus. Vangelis accompagne à merveille ce passage en utilisant diverses flûtes indiennes traditionnelles, suivi d'un magnifique thème pour synthé new-age et choeurs, un morceau poignant qui semble une fois encore surgir du paradis évoquant cette idée universelle de communion entre les peuples du monde (on regrettera le côté trop bref de ce morceau magnifique). Mais, plus l'histoire avance, plus la musique semble s'obscurcir considérablement, à l'image du film. Ainsi, 'Hispanola' et 'Moxica and The Horse' évoquent les échecs de la politique de Colomb sur son nouveau territoire, plus particulièrement 'Moxica and The Horse', illustrant à l'écran la mutinerie de Moxica et ses hommes. Vangelis base tout son morceau sur un sombre bourdon entêtant de synthétiseur, un ostinato de percussions exotiques, quelques guitares espagnoles (avec la participation du célèbre guitariste de flamenco Bruno Manjarres) et la voix du chanteur Pepe Martinez (qui se trouve être multi-instrumentiste, jouant dans des formations telles que "Zaragraf" ou bien encore "Cie Michel Bismut"). 'Moxica and The Horse' possède un côté incantatoire sombre évoquant la musique des indigènes d'Amérique, sur fond de nappes de synthé et de claviers plus moderne, une sorte de façon pour le compositeur de rendre son histoire intemporelle. Vangelis nous propose pour conclure son album (excessivement complet et frustrant) 'Pinta, Nina and Santa Maria (Into Eternity)', long morceau inédit avoisinant les 12 minutes 37, censé rendre hommage aux trois célèbres caravelles qui permirent à Colomb et ses hommes de découvrir les Amériques le 12 octobre 1492. On regrettera le côté excessivement répétitif et peu inspiré de ce morceau qui n'a même pas trouvé sa place dans le film.

Comment conclure autrement une critique sur un chef-d'oeuvre aussi monumental? Véritable trésor inégalé de la musique de film, '1492 Conquest of Paradise' est une partition que tout le monde connaît et que tout le monde a au moins déjà entendu une fois dans sa vie, une musique tellement grandiose et puissante qu'elle a finit par dépasser le simple cadre du film qu'elle était censé accompagner à l'origine, preuve qu'une musique de film peut aussi s'apprécier en dehors des images lorsqu'elle possède une force évocatrice puissante comme c'est le cas pour la partition de Vangelis. Une fois encore, le compositeur grec (qui, rappelons-le, entamait ici sa seconde collaboration à un film de Ridley Scott après 'Blade Runner' en 1982) nous prouvait qu'il était décidément un compositeur talentueux et éclectique, maniant avec une maestria rare musique vocale, musique ethnique et musique électronique comme il nous avait encore été rarement donné d'entendre dans la musique de film, ce qui nous amène une fois encore à regretter le fait que le compositeur n'oeuvre pas plus souvent pour le cinéma. Balayant avec grâce toutes les autres musiques écrites pour célébrer la vie et les découvertes de Christophe Colomb, la partition de '1492' était de loin la musique parfaite pour célébrer le 500ème anniversaire du célèbre explorateur espagnol, une véritable cérémonie musicale à la fois grandiose, universelle, majestueuse, sombre et dramatique où le compositeur déchaînait toute sa passion, son talent et son inspiration. Vous l'aurez compris, '1492' est un must absolu, un trésor de la musique de film à connaître absolument!


---Quentin Billard