1-Requiem (G.Verdi)-
Prologue (M.Amano) 6.37
2-Loi de réforme de
l'enseignement du nouveau siècle
(Méthode BR) 3.01
3-Le professeur du frisson 3.28
4-Commencement du jeu 4.27
5-Souvenirs de l'orphelinat 2.45
6-Les tueurs 3.32
7-Johann Strauss I:
Radetzky-March Op.228 1.43
8-Ceux qui ont pris goût au jeu
et ceux qui ont abandonné 4.35
9-Johann Strauss II:
An Der Schönen,
Blauen Donau op.134 1.21
10-Evasion de Nanahara
et Noriko 1.47
11-Amitié/Ecoute (Clandestine,
captage de conversation) 2.15
12-Auf Dem Wasser Zu Singen
D.774-Franz Schubert 2.36
13-Le vainqueur de
la tristesse 2.18
14-L'attaque de Kiriyama 4.33
15-La résolution de Mimura 1.13
16-Yukie et Nanahara/
le poison 5.30
17-La guerre sans foi ni
loi des filles 4.28
18-Retrouvailles 2.10
19-Aria de la suite pour orchestre
No.3 en Ré mineur, BWW 1068
(Johann Sebastian Bach) 2.33
20-Le troisième homme 3.33
21-Professeur et élèves/
Final Battle 1.57
22-Amère Victoire 2.17
23-Nouveau départ
en voyage 2.15

Musique  composée par:

Masamichi Amano

Editeur:

Milan Records
198 570-2

Musique arrangée et dirigée par:
Masamichi Amano
Distribution:
Tohei
Producteurs exécutifs de Milan:
E.Chamboredon, C.Kimball

Artwork and pictures (c) 2000 The 'Battle Royale' Production Comittee/2001 Editions Milan Music. All rights reserved.

Note: ****
BATTLE ROYALE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Masamichi Amano
Dans un futur très proche, la société Japonaise est en proie à l'anarchie la plus totale. Afin de réagir contre cette situation alarmante où les adultes craignent désormais les adolescents qui n'ont plus peur de rien, le gouvernement décide d'imposer dans les écoles la loi 'Battle Royale'. Chaque année, après un tirage au sort, tous les élèves d'une classe de lycée sont envoyés sur une île sauvage où le but du jeu est très simple: s'entre-tuer jusqu'à ce qu'il n'en reste plus qu'un, l'idée étant de leur faire apprendre la discipline stricte (il y'a des zones interdites sur l'île) et le respect des règles. Sur un sujet qui rappelle énormément le fameux 'Lord of The Flies' de Peter Brook (1963, avec le remake de Harry Hook en 1990), le réalisateur japonais Kinji Fukasaku (peu connu en Europe avant 'Battle Royale') nous livre un film choc, un film coup de poing d'une violence à la fois extrême et théâtrale. L'absentéisme et le non respect des adultes devient systématique dans cette société en proie à l'anarchie la plus extrême. C'est à partir de cela que le gouvernement japonais décide de réagir en instaurant cette inhumaine loi de réforme de l'enseignement de ce siècle nouveau baptisée 'Battle Royale', instaurant ainsi la discipline la plus extrême des adultes envers les adolescents. Ces 41 élèves vont devoir s'entre-tuer, tuant même leurs propres amis s'ils veulent survivre (ils ont un collier magnétique autour du cou. S'il reste plusieurs personnes à la fin du jeu, leur professeur qui supervise le combat le fait exploser, les tuant net sur le coup). A travers cette tuerie barbare et les coups bas les plus vils dont font preuve certains participants au jeu, Fukasaku nous révèle la perversité et la connerie de l'âme humaine avec un côté extrêmement cynique et un humour noir grinçant qui semble avoir étrangement échappé à la plupart des critiques qui n'ont vu dans ce film qu'une simple et bête démonstration de violence gratuite alors qu'au contraire, le film n'est rien de tout cela. La violence n'est jamais utilisé de manière gratuite mais sert toujours le dessein du réalisateur: lancer une critique cinglante contre la déchéance sociale du Japon et de sa discipline scolaire, sans oublier le thème principal abordé par le film: le conflit des générations, thème toujours d'actualité au Japon, et même ici, en France (où la mode semble être au laxisme dans certaines écoles, mais le moment n'est pas à la polémique). Mais il serait injuste de passer sous silence l'humour noir du film qui se remarque dans la manière très théâtrale dont Fukasaku décrit ses scènes de violence, surtout par l'emploi d'une musique 'à l'américaine' parfois très ironique et faussement 'spectaculaire' ou par le côté très grand-guignolesque de certaines scènes gores du film (l'explosion du cou de l'élève au début du film n'a finalement rien de vraiment très sérieux malgré son côté sanguinaire). Evidemment, certaines critiques dites 'bien pensantes' ont littéralement descendu le film (qui a fait scandale au Japon et a vite été retiré des salles de cinéma nippones alors que le film avait déjà connu un grand succès, et ce même si le montage Japonais a supprimé de nombreuses scènes de violence présentes dans la version Française) sans remarquer les thèmes de société que le réalisateur abordait à travers ce gros défouloir ironique, satirique et réellement cynique. Il est très amusant de comparer l'intrigue de 'Battle Royale' avec certains jeux télévisés à l'esprit compétitif (souvent fort stupides) à l'instar de 'Les Aventuriers de Koh Lanta' comme l'a fait Emmanuel Denis dans sa revue sur le film. Comme dans ce jeu où le but est de survivre sur une île déserte afin qu'il ne reste plus qu'un seul candidat à la fin du jeu, 'Battle Royale' se développe sur le même thème de la compétition mais qui est cette fois ci imposée et tout aussi médiatisé afin de servir d'exemple de discipline stricte au reste de la population (mais il y'a néanmoins un côté à la fois spectaculaire et hautement ironique dans cette idée là.

Quelque part, Fukasaku critique aussi la médiatisation excessive de la violence au cinéma ou à la télévision, surtout au cinéma américain, d'où peut être le choix d'une BO aussi américaine d'esprit -sans connotation péjorative - et d'une théâtralisation saupoudrée d'humour noir. Cf. le coup de la musique classique lors de tous les rapports du prof à l'annonce des morts. Cf. aussi la séquence de la présentation débile du jeu, etc.). Finalement, 'Battle Royale' est un film rentre-dedans où Fukasaku semble ne pas vraiment s'être pris au sérieux (ce qui est le gros problème de la plupart des réalisateurs qui font ce genre de film polémique) tout en nous livrant un message alarmant sur l'état de la société japonaise (mais cela s'applique aussi à nous, la France ou d'autres pays Européens étant tout aussi concerné par ce thème du conflit grandissant des générations et du laxisme entraînant un manque de respect moral et de discipline de plus en plus inquiétant) mais aussi sur ceux qui gouvernent le pays en montrant ici que la loi imposée est absolument inhumaine et que la violence contre la violence ne résout jamais les problèmes (d'où une fin symbolique ou les survivants se retournent contre leur prof et le tuent). La plupart des acteurs interprétant les élèves débutent au cinéma (ils ont entre 15 et 16 ans pour la plupart) même si certains ont déjà joués auparavant dans des téléfilms, mais la palme revient incontestablement à Takeshi Kitano qui interprète le prof qui supervise le jeu et qui, dans le film, s'appelle ironiquement Kitano, un bel hommage à ce grand acteur/réalisateur japonais, auteur des fameux 'Hana-Bi', 'Violent Cop', 'Sonatine' ou 'Brother' entre autre. On retrouve ici aussi le côté froid, taciturne, droit, imprévisible et stoïque de ce personne qui nous renvoie aux rôles de Kitano dans la plupart de ses propres films japonais. Descriptif de la connerie humaine et de la barbarie inimitable de la violence humaine, 'Battle Royale' est décidément la grande surprise de l'année. A découvrir, mais aussi à méditer!

Deuxième collaboration entre Fukasaku et le compositeur japonais Masamichi Amano (après 'Omocha' en 1999), 'Battle Royale' est un excellent score dans lequel le compositeur s'est livré de manière fort surprenante à un exercice de style remarquable: imiter la musique de film Hollywoodienne tout en parsemant sa partition de diverses références et allusions à des oeuvres du répertoire de la musique de film américaine contemporaine. Interprété par l'Orchestre Philharmonique National de Varsovie (et ce depuis 1992) sans oublier l'imposante chorale, la musique d'Amano retranscrit toute la brutalité théâtrale de l'oeuvre et les quelques rares moments plus intimes avec une puissance orchestrale rarement égalée dans la musique de film japonaise contemporaine. Le générique de début s'ouvre sur le prologue du superbe Requiem de Guiseppe Verdi qui nous plonge tout de suite dans le contexte chaotique et sombre du film. S'ensuit ensuite l'introduction composé par Amano avec un style orchestral très imposant lors de l'introduction du film qui nous rappelle brièvement l'état dans lequel se trouve cette société japonaise du futur (on notera la première brève allusion au thème de Kitano, mélodie de hautbois que l'on retrouvera dans 'Professeur et Elèves/Final Battle' et 'Amère Victoire', le compositeur faisant un usage très modéré de ses quelques thèmes au début du film). A la fois sombre et par moment agitée, cette introduction orchestrale nous permet d'entendre quelques rythmes martiaux de caisse évoquant la présence menaçante des militaires ne laissant présager rien de bon (scène du début dans le bus transportant les élèves), Amano nous faisant ensuite entendre un thème de piano et cordes plutôt romantique et nostalgique pour ce bref moment paisible avant que les élèves ne partent sur cette île cauchemardesque (le thème reviendra dans les quelques rares moments plus 'intimes' du film, entre certains élèves).

'Loi de réforme de l'enseignement du nouveau siècle' nous plonge dans un univers plus sombre avec un début très martial évoquant l'arrivée du prof sur l'île avec les militaires qui vont prendre le contrôle des opérations. Mais on rentre dans le vif du sujet avec le superbe 'Le professeur du frisson', Amano illustrant réellement la violence du film avec ce passage qui nous permet d'entendre la première grosse référence à une musique de film américaine. Le prof poignarde un de ses élèves récalcitrant et provoque la terreur alors qu'il menace de faire exploser le collier de l'un de ses élèves - notons alors ce début très agité avec un rythme de caisse brutal et un orchestre rythmé et très excitant (bel usage des cordes et des cuivres ici, qui sonnent toujours de manière assez guerrière), la seconde partie du morceau illustrant la scène du collier étant en fait une habile variation reprise du fameux 'Hot Water' du score de 'Outland' de Jerry Goldsmith. Le compositeur ne plagie pas vraiment le morceau de Goldsmith (il ne reprend pas de formule mélodique) mais se contente de reprendre la structure exacte du morceau et de ses orchestrations avant de préparer une formidable montée de tension brutale jusqu'à l'inévitable issue de la scène - la mort sanguinaire de l'élève -, un de ses amis le pleurant avec un bref rappel du thème nostalgique entendu ici pour flûte et harpe. Kitano fait alors comprendre à ses élèves que c'est lui le maître des opérations et qu'ils doivent obéir aveuglement à la discipline (fasciste!) sous peine de terrifiantes et mortelles représailles. L'utilisation de ce morceau dans la scène m'a d'ailleurs assez surpris. 'Le professeur du frisson' paraît plutôt exagéré dans cette scène qui n'aurait pas ce côté aussi théâtral sans la musique d'Amano, mais le parti pris du compositeur est de renforcer cette idée de grosse mise en scène à l'Hollywoodienne nous rappelant une fois de plus que rien de tout cela n'est à prendre au sérieux malgré un message social plus profond (une sorte de manière de dire que l'on peut faire passer ce genre de message sans vraiment se la jouer comme le font malheureusement la plupart des réalisateurs). Si le morceau peut donc paraître un peu surfait ou démesuré dans la scène, il n'en est rien dans la réalité puisque cela fait partie d'une habile stratégie ironique visant à 'critiquer' le côté spectaculaire des mises en scène violentes comme on peut en voir fréquemment dans le cinéma américain, d'où le choix de ce style de musique d'action - ici influencé de Goldsmith.

'Commencent du jeu' impose un climat grave avec piano et violoncelles sombres empruntant très clairement ici le style de l'introduction du fameux score de 'Dracula' de Wojciech Kilar, Amano installant ensuite un ostinato de cordes insistant (un peu comme dans 'Mars' de Gustav Holst) pour évoquer le début du jeu et les préparatifs des divers équipements, chaque élève devant prendre un sac contenant des objets divers et des armes. L'ostinato nous rappelle ici très clairement l'excellent 'Vampire Hunters' de 'Dracula' de Kilar tandis que le choeur imposant fait son apparition sur un autre grand thème du score, un thème qui rappelle vaguement le thème de la force de 'Star Wars' de John Williams mais qui fait aussi beaucoup penser au thème de 'Cutthroat Island' de John Debney auquel le compositeur fera quelques références tout au long du score. Ce thème évoque l'affrontement avec un côté à la fois héroïque et solennel, quelque chose d'assez ironique puisque cette tuerie n'a rien d'héroïque et encore moins de solennel (le compositeur rejoint l'humour noir du film en évoquant à travers ce côté très 'américain' d'esprit). La tuerie commence alors à la fin du morceau avec un premier élève qui pète un plomb et tire sur les premières personnes qu'il voit. Pour ce final, Amano emprunte ici le morceau 'The Jail Cell (Part I)' du score de 'Hard Rain de Christopher Young. (on est quand même étonné de lire dans le livret du CD la phrase suivante: 'ces mélodies originales ont su tirer parti de toutes les ressources d'un grand orchestre, bien loin des consonances Hollywoodiennes, qui sont le lot de la majorité des films' alors qu'au contraire, sur Battle Royale, c'est justement tout l'inverse).

La touche d'émotion arrive avec 'Souvenirs de l'orphelinat' où un élève se souvient d'un moment tendre avec une de ses amies dans un orphelinat, Amano réutilisant le thème de piano/cordes (on pense au style des thèmes poétiques écrit par Joe Hisaishi pour les films de Kitano) du Prologue superbement développé ici d'abord au piano, ensuite aux cordes puis par une flûte, le tout dans une certaine nostalgie pleine de tendresse. Mais la douceur laisse très vite place à la noirceur et à la violence dans le sombre 'Les Tueurs' qui nous permet d'entendre le thème de Kiriyama, le tueur fêlé du film, celui qui tire sur tout le monde avec son automatique (qui semble avoir des munitions à l'infini vu le paquet de pruneaux qu'il balance), un thème très rythmé marqué par un étrange 'oh' insistant des choeurs d'hommes et un petit ostinato de cordes. (le début du morceau me fait vaguement penser aux premières secondes du début de 'Empty Rooms' du score de 'Air Force One' de Jerry Goldsmith) A noter l'intrusion de choeurs de femme mystérieux dans la suite du morceau et l'utilisation d'un rythme de caisse et une terrifiante montée de tension (avec choeurs et orchestre) lié aux méfaits du tueur et qui est ici clairement emprunté à la fin de l'introduction du score de 'Dracula' de Kilar.

L'album a la bonne idée de nous faire entendre les quelques pièces classiques diffusées ironiquement lors de scènes de rapport de fin journée dénombrant le nombre exact des morts et le nom des victimes. Ainsi, la célèbre et très enjouée 'Marche Radetzky' de Johann Strauss apporte une certaine touche d'humour noir dans un moment grave (les élèves apprenant la mort de leurs copains) qui vient une fois de plus renforcer le côté très ironique de l'histoire. (c'est la même chose pour 'Le Beau Danube Bleu', le lied de Schubert et l'Aria de Bach) Amano développe l'action dans le très excitant 'Ceux qui ont pris goût au jeu et ceux qui ont abandonné', où le compositeur utilise des orchestrations de qualité, tout en évoquant les tueries de ceux qui sont à fond dans le jeu et de ceux qui préfèrent se suicider plutôt que de continuer ce jeu de fou (le couple qui se jette d'une falaise). Notons la reprise du thème rythmique de Kiriyama qui continue à faire ses ravages. Le compositeur privilégie quelques moments de douceur émouvante comme par exemple au début du très beau 'Amitié/Ecoute' où le compositeur utilise un très beau violoncelle soliste soutenu par une harpe avant d'être rejoint par les cordes et les vents, le morceau évoquant l'amitié qui unit ici Nanahara et Noriko malgré les combats et les tueries. Notons aussi le très élégiaque 'Le vainqueur de la tristesse' qui possède un côté à la fois noble et solennel (on pense par exemple au thème de 'Band of Brothers' de Michael Kamen dans un style plus ou moins similaire) et illustrant cette séquence du flash-back de Kawadas, probablement l'un des plus beaux morceaux du CD, voire le plus émouvant avec la musique pour le final du film. 'L'attaque de Kiriyama' continue à évoquer les méfaits de Kiriyama avec un rythme martial sauvage et un style d'action Hollywoodien toujours très prenant. (son thème réapparaît une fois de plus, toujours sous une forme assez menaçante) La deuxième partie du morceau devient encore plus intense, surtout grâce à l'excitante rythmique développé dans le morceau, Amano faisant ici très clairement référence à 'Cutthroat Island' de Debney avec une reprise héroïque du thème de 'Commencement du Jeu' aux choeurs grandioses soutenus par de la percussion guerrière dans le même style que le fit John Debney pour son fameux score, le thème évoquant ici la lutte contre Kiriyama avec un côté épique étonnant pour la scène. On notera au passage 'Yukie et Nanahara/Le Poison', qui commence de manière très douce avec une harpe pour la scène du réveil de Nanahara (séquence dans le phare) servi par quelques cordes touchantes, tandis que la dernière partie du morceau fait une habile allusion au Main Title de 'Basic Instinct' de Jerry Goldsmith, le compositeur évitant une fois de plus de reprendre toute formule mélodique mais imitant simplement la structure du morceau et des orchestrations qui sont ici tout à fait similaire au détail près. On ne pourra d'ailleurs que féliciter le compositeur qui sait de quoi il parle et fait ses 'emprunts' de manière réfléchie (il n'est nul question de plagiat ici, même si les ressemblances volontaires sont parfois assez troublantes).

'La guerre sans foi ni loi des filles' fait monter la tension alors que l'une des filles du phare mange la nourriture empoisonné (notons qu'à 1 minutes 18 le morceau fait étrangement penser à 'Swing Across' du score de 'The 13th Warrior' de Jerry Goldsmith, Amano n'imitant ici aussi que la structure et les orchestrations du morceau de Goldsmith, et ce même si sur le plan mélodique c'est assez différent). Notons une nouvelle touche d'émotion dans le très beau 'Retrouvailles' où des choeurs dramatiques interviennent lors de la scène des retrouvailles entre Nanahara et Noriko. On entre dans la dernière partie sur 'Le troisième homme' et le moment où Mimuras pirate le système des ordinateurs militaires (bref passage épique) avant que Kiriyama ne refasse son apparition pour un combat décisif contre le tueur fou (notons toujours le style des rythmes martiaux aux percussions). C'est ainsi que le thème de Kiriyama revient une dernière fois sous une forme plus pressante lors de la scène de l'affrontement entre lui et le groupe des héros survivants. C'est le superbe 'Professeur et élèves/Final Battle' qui illustre le final du film, le moment où les survivants retrouvent Kitano et l'affrontent en personne. Basé sur une envoûtante mélodie pour choeurs a cappella qui commencent comme une vieille mélodie traditionnelle aux accents populaires confié aux voix de femmes (soutenu par une pédale/bourdon aux choeurs d'hommes) et qui donne un côté très surprenant dans cette scène (c'est aussi le morceau utilisé dans la bande-annonce du film), la partie centrale du morceau étant réellement poignante avec cet envol du choeur. Il faut savoir que ce thème sous forme de mélodie planante et nostalgique est un fait curieusement associé dans le film au personnage de Kitano. L'association est encore plus étrange lorsque l'on sait à quel point le prof Kitano est un individu violent et impulsif qui tue deux de ses élèves au début du film, et le fait de lui associer ce thème spirituel et quasi religieux d'esprit (choeurs a cappella typique d'une musique religieuse avec un bourdon qui lui donne un côté 'air traditionnel') souligne bien évidemment un certain décalage.

L'idée du compositeur rejoint en réalité celle du compositeur qui se refuse à montrer le prof comme un gros bourrin sans coeur et évoque à quelques moments dans le film le côté plus humain du personnage qui possède lui aussi ses propres problèmes comme les autres. Ainsi on le voit téléphoner à sa fille qui ne le déteste et dont on ressent quelque part sa peine, enfouie derrière sa carapace d'individu sec et brutal. Mieux encore, Fukazaku nous dévoile à un moment du film le lien d'amitié qui l'unit avec une élève du groupe qui a toujours été fidèle à ses cours, une amitié tellement forte que le professeur voudra finir ses jours à ses côtés à la fin du film, où il se suicide après avoir dévoilé aux trois survivants un tableau qu'il a peint en représentant cette élève qu'il a transformé en ange du paradis (d'où le côté religieux du morceau, qui est en fait une astuce du compositeur). Le côté religieux pourrait aussi renvoyer ironiquement au côté puissant de ce personnage qui semble être comme une sorte de Dieu sur cette île, un individu qui contrôle toutes les opérations, qui annonce la liste des morts toutes les heures, un individu craint et respecté, et ce côté faussement 'divin' est encore plus accentué dans le final surprenant où Kitano se relève après avoir été abattu pour répondre une dernière fois au téléphone et régler définitivement ses comptes avec sa fille - une touche d'humour noir très surprenante mais qui en dit long sur le personnage et sa double face - 'Amère Victoire' reprend ce thème développé cette fois à l'orchestre, le hautbois introduisant la mélodie avant que le reste de l'orchestre n'entame la magnifique partie centrale du morceau. Amano utilise ce morceau au moment où les survivants quittent l'île après avoir savouré une 'amère victoire' comme le titre du morceau le précise (après tout, ils devront vivre toute leur vie avec les morts qu'ils ont laissés derrière eux sur la conscience, d'où le côté plutôt mélancolique du morceau, alors que l'on aurait pu s'attendre à quelque chose de plus héroïque et conventionnel). Cette histoire violente trouve sa conclusion sur le magnifique 'Nouveau départ en voyage' qui reprend le thème pour orchestre et choeurs de 'Le vainqueur de la tristesse', thème nous faisant ressentir une profonde nostalgie et l'idée d'un nouveau départ dans la vie de ses jeunes qui n'oublieront jamais cette terrible et cruelle expérience, le final du film apportant un message d'espoir exprimant le fait que malgré tout ce que l'on peut vivre, il faut toujours continuer à regarder de l'avant.

Que dire de plus face à une BO aussi prenante et émouvante en même temps? Le score est l'illustration parfaite pour le film, toujours très intense dans le film, nous révélant à la fois les personnalités et l'humanité de certains élèves mise en parallèle à la bêtise et la barbarie d'autres élèves. Action, émotion et parfois terreur, 'Battle Royale' est aussi un bel hommage que le compositeur nippon rend ici à la musique de film Hollywoodienne à travers ses habiles emprunts qu'il n'échapperont pas à l'oreille des béophiles qui connaissent bien Goldsmith, Young, Debney ou Kilar. Si 'Battle Royale' est un film dur parsemé de moments plus calmes, le score de Masamichi Amano est à l'égal du film, une partition orchestrale splendide possédant quelques bons thèmes et des moments d'action à l'américaine et des passages d'émotion pure, le score étant finalement loin d'être aussi bourrin qu'on aurait pu s'y attendre avant de l'écouter. A l'instar du film, le score de 'Battle Royale' est une véritable surprise complètement inattendue de la part d'un compositeur qui est lui aussi peu connu en Europe mais qui, grâce à son superbe travail accompli sur 'Battle Royale', devrait recevoir l'adhésion du public Européen à l'avenir, en espérant que le compositeur saura continuer à écrire des partitions aussi inspiré. Remarquable!


---Quentin Billard