1-Ouisa and Flan 1.53
2-Ouisa: 6 Degrees
Of Separation* 1.22
3-Just One Of
Those Things
composé par Cole Porter
Paroles de Cole Porter 1.06
4-Paul: Sidney Poitier* 1.26
5-Give Six 2.32
Musique de Paul Gravowsky
6-Flan: Painters* 0.30
7-There Is A God 1.30
8-Ouisa: Cats* 1.53
9-The Teacher 1.36
10-Flan: Dream About
Painters* 1.09
11-The Blade 0.43
12-Paul: Imagination* 1.55
13-The Kiss 0.55
14-Paul: Dream Sequence* 0.44
15-Safe Trip 0.45
16-Both Sides 0.25
17-Ouisa, Flan, Kitty,
Larkin: Do We Have
A Story To Tell You* 1.28
18-No Heart 1.05
19-Doug: You're Not A Idiot* 0.44
20-Not Family 0.33
21-Ouisa: The Truth* 0.29
22-Quartet In G Minor,
Opus 10 1.18
Musique de Claude Debussy
23-Paul: Listen To Me* 2.04
24-Ouisa: I Read Today* 2.21
25-No Heart 5.05

*Dialogues originaux
extraits du film
Ecrits par John Guare

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

Elektra Records
61623-2

Album produit par:
Jerry Goldsmith
Montage musique:
Ken Hall
Assistant de Mr.Goldsmith:
Lois Carruth
New Regency Executive
Music Supervisor:
Mitchell Leib
Coordinateur de l'album:
Jill Lorie

Artwork and pictures (c) 1994 Metro-Goldwyn-Mayer Inc/Monarchy Enterprises C.V. All rights reserved.

Note: ***
SIX DEGREES OF SEPARATION
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
'Six Degrees of Separation' est décidément un film à part dans la filmographie du réalisateur Fred Schepisi. Adapté d'une célèbre pièce de théâtre à succès, 'Six Degrees of Separation' est un film qui joue beaucoup sur les dialogues plutôt touffus de John Guare et la peinture des divers protagonistes du film. Schepisi respecte bien les codes du théâtre dans de cette étrange comédie de moeurs dramatique en plaçant un Will Smith totalement inattendu dans ce registre - l’acteur sortait à peine de la série du 'Prince de Bel-Air' et enchaîna trois téléfilms et deux petits films méconnus avant d'atterrir sur le long-métrage de Schepisi, très loin des rôles qu'il campera par la suite dans des superproductions hollywoodiennes comme 'Independence Day', 'Enemy of The State' ou 'Men In Black'. Will Smith interprète Paul, un mystérieux jeune noir élégant qui débarque un soir chez Ouisa (Stockard Channing) et Flan Kittredge (Donald Sutherland), un couple de bourgeois new-yorkais marchand d'art. Paul se fait passer pour le fils de Sidney Poitier et se présente comme un ami de leur fils, sachant tout sur lui et leur famille. Les Kittredge lui offrent généreusement l'hospitalité jusqu'à ce qu'ils le surprennent le lendemain matin au lit avec un homme. Furieux, Flan les flanque tous les deux à la porte en vérifiant qu'il n'a rien volé dans la maison. Abasourdi par le comportement soudainement étrange de Paul, les Kittredge vont rencontrer un autre couple de bourgeois a qui Paul a fait le même numéro. Ouisa et Flan finissent alors par découvrir que Paul est en fait un escroc menteur et manipulateur qui essaie juste de s'insérer dans l’aristocratie pour s’enrichir facilement. En réalité, Paul va vraiment s'attacher aux Kittredge, jusqu'à ce qu'il décide de les appeler après avoir été recherché par la police. A la suite de cette discussion, Ouisa changera brutalement de comportement et comprendra enfin que la vie de luxe qu'elle mène avec son mari est complètement superficielle et dénuée 'd'imagination' (cf. excellent dialogue de Will Smith dans son speech au début du film), bien que dans le contexte du film, le mot 'imagination' doit être pris avec des pincettes.

Le film de Fred Schepisi mélange donc plusieurs messages de façon parfois très confuse. On ne sait pas toujours très bien où le réalisateur veut en venir. Mais l'idée la plus évidente apparaît dans le fait que toute l'histoire avec Paul et les Kittredge n'est qu'un prétexte pour livrer au spectateur une critique assez piquante de la bourgeoisie américaine. N'oublions pas que les Etats-Unis est plus que jamais le pays des extrêmes : il y'a des gens très riches et des gens très pauvres, vivant parfois même les uns à côté des autres. On appréciera d'ailleurs la métaphore du tableau de Kandinsky dans le film : le chaos et l'ordre. Voilà qui résume bien l'idée du film. Effectivement, Paul dénonce à sa façon le caractère artificiel et éphémère des existences bourgeoises qui ne reposent bien souvent que sur une accumulation de biens matériels sans même prendre la peine de développer toute relation 'humaine' (le titre du film repose sur la fameuse théorie qui raconte qu'entre deux individus se trouvant n'importe où sur la terre, il y aura toujours moins de six personnes qui les séparent, six degrés de séparation). Paul nous vante dans son speech du début les 'bienfaits' de 'l'imagination', de la voix qui se trouve en nous et que nous devons découvrir pour mieux nous connaître au lieu plutôt que de mener une existence terne bâtie sur des mensonges. Le problème avec ce style de film c'est que le message est atrocement moralisateur, unilatéral et assez prétentieux de la part du réalisateur/scénariste : prétendre résoudre les problèmes dans les excès, quand il s’agit avant tout de faire le vide dans sa tête, c’est une affirmation plutôt douteuse - et une généralisation pleine d’approximation ! Evidemment, Paul ne montre qu’une facette de son personnage, celle du très pénible fanfaron moralisateur, d'autant que l'ensemble paraît un peu confus par moment - la réaction de Ouisa à la fin du film paraît soudainement disproportionnée : il est bizarre qu'elle attende les trois dernières minutes du film pour réagir aussi violemment alors qu'elle en avait tout le temps juste avant. L'interprétation de Will Smith en homosexuel manipulateur est tout à fait remarquable face à un duo Stockard Channing/Donald Sutherland très réussi. Dommage cependant que cette comédie de moeurs semble parfois traîner en longueur de façon plutôt laborieuse.

Petite anecdote amusante à signaler : dans son 'speech' initial, Paul mentionne des titres des films de son soi-disant père Sidney Poitier. Parmi les films qu'il cite, le jeune homme parle de 'Lilies of The Field' (1963), film dont le compositeur Jerry Goldsmith avait déjà signé la musique pour le long-métrage de Ralph Nelson. Enfin, signalons pour finir que 'Six Degrees of Separation' ressemble étrangement à un autre film qui semble avoir servi d'inspiration à John Guare et Fred Schepisi : 'Teorema' de Pasolini, film typique de l'esprit provocateur de la génération 68 qui aborde dans un registre similaire les mêmes thèmes. Avis donc, 'Six Degrees of Separation' est réservé aux fans du genre de la comédie de moeurs théâtrale un brin 'bla-bla' sur les bords même si les dialogues sont très captivants. En revanche, on peut douter sur le réel intérêt d'en avoir fait un film car le cadre cinématographique n'apporte finalement pas grand chose à l'histoire. Voilà en tout cas une petite fable satirique sur le pouvoir philosophique que l'on peut retirer de l'expérience d'une relation humaine, même si l'on pourra toujours trouver tout cela un petit peu prétentieux par moment.

Jerry Goldsmith retrouve le réalisateur Fred Schepisi après avoir composé le score de 'The Russia House' en 1990 et l'amusant 'Mr.Baseball' en 1992. Pour 'Six Degrees of Separation', Goldsmith a écrit une petite partition minimaliste basée sur une formation instrumentale assez restreinte, pour à peine 20 minutes de musique dans le film. La partition de 'Six Degrees of Separation' s'articule ainsi autour d'un unique thème principal, une sorte de petit tango interprété par un violon soliste soutenu par un piano, une harpe et un petit orchestre à cordes. Ecrite pour une formation de musique de chambre, le score assez modeste de Goldsmith évoque avec sa mélodie raffinée et élégante du violon le caractère élégant du monde bourgeois dans lequel se déroule l'histoire, mais avec une certaine légèreté paisible, un entrain qui renvoie quelque part au personnage de Will Smith. Entendu dans 'Ouisa and Flan', c'est ce fameux thème de tango qui ouvre le film (à noter justement la scène de tango du film avec Paul et le copain d'Elizabeth - Heather Graham) et qui fera office de thème principal pour cette partition courte et concise d’un maestro relativement peu habitué à ce style de film plus modeste, loin des grosses productions hollywoodiennes traditionnelles. On retrouve lors d’une scène en ville une reprise de ce thème sous une forme jazzy plus agréable avec piano et section rythmique, Goldsmith renouant ici avec un style jazz qu'il avait déjà abordé dans 'The Russia House' (on se souvient notamment de cette superbe reprise du thème principal sous une improvisation jazzy dans le générique de fin - idée que le compositeur reprendra d’ailleurs dans ‘The Vanishing’ et ‘The Edge’). On retrouve ici une légèreté constante et une certaine fraîcheur qui apporte un côté plutôt paisible et détendu au score même si le film pourrait aisément se passer de musique étant donné l'abondance de dialogues dans le film.

Le reste du score évoque davantage la partie musique de chambre du score - il y'a beaucoup de pièces classiques dans le film et notamment un extrait de l'excellent 'Quatuor en sol min.' opus 10 de Claude Debussy, comme pour rappeler le côté cultivé et raffiné du monde de la bourgeoisie américaine. La musique suit ainsi le déroulement de l'histoire en conservant l'utilisation du violon soliste, et ce quelque soit la situation. A noter l'utilisation d'un motif de violon légèrement plus dramatique pour la séquence où les 'victimes' des mensonges de Paul se retrouvent entre elles, le seul passage réellement dramatique de la musique de Goldsmith, qui conserve du début jusqu'à la fin un ton toujours très léger et insouciant. On retrouve quelques passages plus orchestraux dans la musique de ‘Six Degrees of Separation’, mais ces passages s’avèrent être bien rares et très brefs dans le film, car c'est finalement le style jazz que l'on retiendra surtout dans l'ultime reprise swing/jazz pour le générique de fin reprenant une dernière fois le thème principal, petite pièce pour piano assez entraînante, qui renvoie au climat de détente de ce petit score sans prétention. Au final, il n’y a pas grand chose à dire au sujet de 'Six Degrees of Separation'. La musique de Jerry Goldsmith est tellement peu présente dans le film qu'il est difficile d'approfondir un point en particulier (à noter aussi les quelques pièces illustrant les scènes de rêve). Le thème du tango retranscrit à merveille le caractère à la fois théâtral et élégant du contexte dans lequel se déroule cette histoire à la Pasolini, le reste de la musique étant du même ordre, montrant ici un Goldsmith plus minimaliste et jazzy moins connu.

Petite BO totalement méconnue du compositeur, 'Six Degrees of Separation' est un score sympa et sans prétention, une musique très modeste dont on retiendra surtout le très agréable thème de tango avec son violon soliste (Jerry Goldsmith composera une musique un peu similaire pour l'inédit 'I.Q.' en 1994), le tout agrément de quelques touches jazzy du plus bel effet. Voilà en tout cas une BO mineure et minimaliste qui nous montre une facette moins connue du maestro californien !


---Quentin Billard