1-Main Title 1.55
2-The Spanish Galleass/
Galley Slaves/The 'Albatross' 4.00
3-The Captain's Table 1.44
4-Doña Maria & Capt. Thorpe/
Elizabeth's Throne Room 6.25
5-Thorpe's Pet Monkey 0.38
6-Map Of Panama 1.09
7-The Chess Game 1.47
8-Coach To Dover 2.21
9-Farewell/Panama 1.44
10-Jungle March & Battle 3.31
11-Return To The 'Albatross' 3.05
12-Condemned To The Galley/
Doña Maria Song*+ 1.42
13-Queen Elizabeth/
Maria's Anguish 2.12
14-Escape From The Galley/
Fight On The Deck/
'Strike The Shore
of Dover'**+ 4.21
15-Reunion 3.41
16-Thorpe Confronts
Wolfingham/The Duel 2.38
17-Fanfare & Finale** 1.27

*Soliste: Carol Wetzel
+Paroles de Howard Koch
++Paroles de Howard Koch
et Jack Scholl
**The Utah Symphony
Orchestra Chorus
dirigé par Ed Thompson.

Musique  composée par:

Erich Wolfgang Korngold

Editeur:

Varèse Sarabande
VSD-47304

Album produit par:
George Korngold
Producteurs exécutifs:
Tom Null, Chris Kuchler
Producteur associé:
Richard Kraft

Artwork and pictures (c) 1940 Warner Bros. Pictures Inc/1968 United Artists Television, Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE SEA HAWK
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Erich Wolfgang Korngold
Voici LE grand classique par excellence des films de pirate typiquement Hollywoodien. A une époque où ce genre marchait encore auprès du public, Michael Curtiz nous livra 'The Sea Hawk' (L'aigle des mers), grosse production d'aventure racontant les exploits du corsaire anglais Geoffroy Thorpe (Errol Flynn, acteur fétiche du réalisateur et qui joua dans une bonne partie de ses films). Thorpe est l'un des plus fameux pirates d'Angleterre, totalement dévoué à la Reine Elizabeth Ier. Nous sommes au 16ème siècle et la tension monte entre l'Angleterre et l'Espagne. Thorpe décide de prendre d'assaut le navire de Don José Alvarez de Cordoba (Claude Rains, autre acteur fétiche de Michael Curtiz), un serviteur du Roi Philippe d'Espagne, envoyé en mission diplomatique pour rencontrer la Reine d'Angleterre. L'abordage se révèle être un franc succès, et après avoir fait couler le navire espagnol, Thorpe ramènera Don José et sa nièce Dona Maria (Brenda Marshall) à la cours de la reine en Angleterre. Scandalisé par les agissements de Thorpe, la Reine va ordonner que ce dernier stoppe immédiatement ces activités douteuses et qu'il cesse d'importuner ainsi des sujets du Roi Philippe, au risque de déclencher un grave conflit entre les deux nations. Mais Thorpe n'en fera qu'à sa tête et se lancera, avec l'accord secret de la Reine, dans une dernière mission visant à intercepter l'or du Roi d'Espagne. Malheureusement pour lui, un traître se trouve à bord de l'équipage et va tout faire pour lui mettre des bâtons dans les roues en allant avertir les troupes de Don José. Capturé, Thorpe est condamné par un tribunal espagnol et se retrouve jeté aux galères pour toute la fin de sa vie. S'il veut s'en sortir, il n a plus qu'une seule solution: s'échapper avec ses amis et ramener à la Reine les documents prouvant que l'Espagne prépare une Armada secrète compromettant la paix entre les deux nations. 'The Sea Hawk' est indiscutablement le classique même du genre des 'swashbuckler movies', films de pirate particulièrement à la mode dans les années 30/40 et 50. Si aujourd'hui il n'est pas rare de voir se planter les quelques réalisateurs qui osent encore s'aventurer dans ce genre parfois surfait (on se souvient du bide monstrueux du 'Cutthroat Island' de Renny Harlin ou le plantage financier du 'Pirates' de Polanski), il fut une époque où le public se laissait entraîner dans ces grandes aventures mêlant romance, combats interminables à l'épée, bataille entre deux navires, trahison, héroïsme, loyauté, bravoure, etc. car 'The Sea Hawk' réunit tout ces ingrédients, renforcés par une mise en excellente et une qualité technique quasiment irréprochable. Curtiz a toujours su filmer des scènes de bataille excitante et 'The Sea Hawk' nous le prouve fièrement. A noter une scène d'ouverture quasiment légendaire où Thorpe et ses hommes prennent d'assaut le navire de Don José, excitante séquence de bataille massive et impressionnante pour l'époque (1940). Bref, de l'aventure avec un grand A!

Erich Wolfgang Korngold débuta sa collaboration avec Michael Curtiz en signant la musique de 'Captain Blood' (1935), l'un de ses premiers grands films de pirate qui mettait déjà en scène Errol Flynn dans le rôle du héros courageux et intrépide. Par la suite, Korngold écrira la musique de 'Anthony Adverse' (1936), 'The Adventures of Robin Hood' (1938) et 'The Private Life of Elizabeth & Essex' (1939). 'The Sea Hawk' marque donc les retrouvailles entre Korngold et Curtiz après que les deux compères aient travaillés ensemble sur quatre films. 'The Sea Hawk' permet une fois de plus au compositeur de renouer avec son style d'écriture 19èmiste hérité de Strauss, Wagner, Mahler. Le score s'articule autour d'une importante thématique réunissant le fameux thème héroïque attribué à Thorpe et l'inévitable thème romantique décrivant la romance entre Thorpe et Dona Maria. Le film s'ouvre donc sur la superbe fanfare entraînante associé au héros du film, une partie de cuivres plutôt énergique qui donnera sans aucun doute du fil à retordre à tout les trompettistes qui tenteront de l'interpréter. (surtout à cause du débit de notes que nécessite cet excellent thème, loin des fanfares bien carrés, tranquilles et posées - une caractéristique du style 'cuivré' de Korngold). Cette fanfare laisse la place au Love Theme exposé dans toute sa splendeur par des cordes romantiques et sirupeuses (avec ce tic d'écriture typique de l'époque: les cordes sont doublés à l'octave pour renforcer le côté ample et tendre des violons). Ce superbe 'Main Title' fait déjà partie des grands classiques de Korngold et du Golden Age Hollywoodien (John Debney citera ce célèbre thème dans 'Inspector Gadget' ainsi que James Horner dans 'Casper'). On rentre dans le vif du sujet avec 'The Spanish Galleass/Galley Slaves/The Albatross', première séquence de bataille où Korngold fait brillamment monter la tension avec des orchestrations amples et un pupitre de cuivres impressionnant (on pense par moment au genre de musique que a pu écrire sur des péplums tels que 'Ben-Hur' ou 'King of The Kings'). Le leitmotiv de la fanfare héroïque attribué à Thorpe et son fidèle équipage refait surface comme pour évoquer la bravoure et la détermination du héros qui prépare l'abordage du navire espagnol. On notera une brillante série de développements du motif vers le milieu du morceau avant que la fanfare conclut cette brillante pièce de manière entraînante. En clair, nous sommes là dans de la musique héroïque pure dans la plus pure tradition du 'Golden Age' Hollywoodien.

'The Captain's Table' ramène le calme avec une pièce plus légère privilégiant les vents et quelques cordes sautillantes, Korngold développant un petit motif comme il a l'habitude d'en faire à travers les différentes séquences des films qu'il met en musique. Le compositeur a toujours conçu son art de composition pour le cinéma sous la forme d'Opéra où chaque morceau possède un lien harmonique, une idée précise et une unicité proche d'une structure d'Opéra. C'est tout là la réussite d'un compositeur qui sait gérer la construction de ces différents morceaux en nous proposant une continuité parfois moins lourde que certains films de l'époque, souvent saturé de musique (hélas, 'The Sea Hawk' n'échappe pas à la règle, car il y a incontestablement trop de musique dans ce film et pas assez de respiration, mais c'était la manière de faire à l'époque et le style brillant et raffiné de Korngold est là pour améliorer ce constat). Le compositeur développe le côté romantique de sa partition dans la première partie de 'Dona Maria & Captain Thorpe/Elizabeth's Throne Room' où il évoque avec des cordes attendries l'amour naissant entre Dona Maria et Thorpe (scène des roses dans le jardin), le tout entouré d'harmonies qui rappellent certaines compositions postromantiques d'un Richard Strauss ou d'un Gustav Mahler (utilisation du violon soliste incorporé au milieu de la masse orchestrale) avec une pointe de Debussy dans certains enchaînements d'accords (il s'agit sans aucun doute du plus beau morceau écrit par Korngold pour 'The Sea Hawk' avec ce côté romantique qui semble flotter langoureusement dans l'air). Une fanfare résonne alors pour annoncer le retour victorieux de Thorpe à la cours de la Reine Elizabeth.

Un peu de fantaisie et d'humour avec 'Thorpe's Pet Monkey' qui évoque dans un petit Scherzo sautillant et léger la petite séquence avec le singe de Thorpe. Korngold utilise ici un xylophone avec un tambourin et quelques cordes sautillante pour respirer un peu entre deux moments plutôt intenses (dommage que le compositeur n'ait pas plus aéré que cela sa partition. Du coup, l'écoute dans le film s'en fait grandement ressentir!). Dans 'Map of Panama', on rentre dans la deuxième partie du film. Korngold assombrit considérablement le ton de sa partition en évoquant clairement la conspiration contre Thorpe et son équipage des 'aigles de mer'. 'The Chess Game' nous fait alors comprendre que la machine est lancée et qu'elle ne peut plus s'arrêter. Tôt ou tard, Thorpe se fera attraper. A noter ici l'utilisation d'un mystérieux motif de clarinette que le compositeur développe tout au long de sa pièce pour renforcer cette idée de menace sous-jacente. 'Farewell/ Panama' évoque les adieux entre Dona Maria et Thorpe et le départ vers Panama où le héros effectuera sa dernière mission. La seconde partie, parfaitement ancrée dans la continuité de la première partie romantique laisse place à un rythme plus agité (percussions, xylophone, cuivres, etc.) avant de déboucher sur 'Jungle March & Battle', Korngold utilisant ici un petit thème de marche sympathique dans la scène de l'embuscade de la jungle. Toujours très à l'aise lorsqu'il s'agit de développer un motif attribué à une séquence entière, Korngold prolonge cette marche au thème chantant (on notera ici les excellentes variantes orchestrales autour de ce thème) vers une nouvelle scène de bataille pour l'embuscade, lorsque Thorpe et ses hommes tombent dans le piège de Don José. A noter ici l'écriture plus rythmique du compositeur, avec cordes tendues, percussions plus agressives, glissendi de harpe/flûtes et cuivres déterminés.

Le 'Return To Albatross' permet à Korngold de développer une fois de plus le côté sombre de sa partition, utilisant au passage une variante minorisée de son 'Love Theme' qui n'a plus du tout la même fonction ici. Thorpe et quelques uns de ses amis ont échappés au piège de Don José de Alvarez en s'échappant à travers les marais pour rejoindre l'Albatross. Korngold a recours ici à une harmonie plus sombre et plus flottante, quelque chose de très mystérieux et d'inquiétant à la fois. La tension se fait surtout entendre ici au niveau de l'écriture des cordes et de l'harmonie plus chromatique. 'Condamned To The Galley' évoque donc la 'chute' du héros, jeté aux galères. On retrouve ici une fanfare proche de ce qu'on a entendu au début du 'Main Title', mais transformé ici en fanfare sombre et pessimiste, le tout s'enchaînant avec grâce avec la très jolie chanson d'amour de Dona Maria soutenue par une harpe et quelques cordes (Korngold veut évoquer ici le côté raffiné des dames espagnoles).

Avec 'Escape From The Galley/Fight On The Deck', Korngold nous ramène à l'aventure et à l'héroïsme pour l'évasion de Thorpe et de ses amis et la prise de contrôle du navire espagnol. Le thème héroïque refait très lentement son apparition lors du combat sur le pont du navire, amené par un crescendo orchestral entraînant. On notera la deuxième composition vocale que Korngold a écrit pour le film avec le superbe 'Strike The Shores of Dover', chant victorieux et allègre qu'entament Thorpe et ses hommes lors du retour en Angleterre à bord du navire espagnol. A noter que le chant se base sur le thème héroïque de Thorpe, transformé ici en hymne triomphant de pirates. Le très beau 'Love Theme' revient dans 'Reunion', lorsque Thorpe retrouve Dona Maria et que les deux amants s'avouent leur amour réciproque, et c'est l'inévitable duel final dans 'Thorpe Confronts Wolfingham/The Duel'. Korngold fait resurgir son thème héroïque (on pense parfois à certains morceaux de bravoure des poèmes symphoniques de Franz Liszt) pour un passage d'action sombre et violent, tout à l'image de cette scène de duel final entre Thorpe et Wolfingham le traître (à noter ici l'excellente écriture des cuivres et des cordes).

Le film trouve alors sa conclusion sur 'Fanfare & Finale' où Korngold reprend pour le bref générique de fin du film le 'Love Theme' et la fanfare de Thorpe associé à des choeurs triomphants. 'The Sea Hawk' est l'exemple même du talent d'écriture du compositeur, de sa maîtrise des harmonies 19èmiste et de la qualité des orchestrations de sa partition (assuré ici par Hugo Friedhofer, Simon Bucharoff, Ray Heindorf et Milan Roder). Si vous êtes fans de musiques d'aventure héroïques, 'The Sea Hawk' est fait pour vous! Si vous ne connaissez pas encore ce grand compositeur du 'Golden Age Hollywoodien' (qui eut une brillante carrière musicale à Vienne avant de devoir quitter son pays lors de la montée en puissance du Nazisme pour émigrer vers les Etats-Unis), ruez vous sur 'The Sea Hawk', car il s'agit bien là de l'un de ses plus grands classiques qui n'a pas pris une seule ride! Un peu long et lourd au bout d'un moment, mais toujours aussi entraînant et captivant! Un classique!


---Quentin Billard