1-Générique-Part 1 2.02
2-Señorita, par Christophe 2.48*
3-Cravate Club 2.30
4-Chicamour 0.35
5-Bernard et son tableau 1.24
6-La lampe 0.37
7-Le lendemain 2.47
8-Les status de notre amitié 0.24
9-La cravate 3.46
10-L'escalier 0.48
11-C'est presque ça,
par Rouge Rouge 4.06**
12-Générique-Part 2 2.216
13-La lucarne 2.23
14-Adrien met sa cravate 1.31
15-Le repos après combat 1.24
16-Le supermarché 2.16
17-Les jouets 0.30
18-La cour 2.49
19-Adrien et la voisine 2.07
20-Générique de fin 2.19

*Composé par Christophe
et Jean-Michel Jarre
Interprété par Christophe
**Composé par Nicolas Errèra
et Jean Croc
Interprété par Rouge Rouge

Musique  composée par:

Nicolas Errèra

Editeur:

East West France
092747983-2

Production exécutive:
Valérie Lindon pour
Ré-Flex Music.

Artwork and pictures (c) 2002 ENKA/ALICELEO. All rights reserved.

Note: **1/2
CRAVATE CLUB
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Nicolas Errèra
'Cravate Club' est adapté d'une pièce de théâtre de Fabrice Roger-Lacan, reproduit au cinéma par le réalisateur Frédéric Jardin. Après 'La folie douce' (1994) et 'Les frères soeur' (2000), Jardin nous plonge pour sa troisième réalisation dans une histoire plutôt bizarre: une dispute entre deux amis qui tournent à la descente aux enfers. Charles Berling et Edouard Baer interprètent respectivement Bernard et Adrien, deux amis de longue date qui travaillent dans le même cabinet d'architecte. Le jour de son anniversaire, Bernard apprend qu'Adrien ne peut pas venir. D'abord intrigué, Bernard commence à harceler Adrien par des questions: pourquoi ne peut-il pas venir? Qu'a t'il de plus important à faire qui justifie le fait de manquer l'anniversaire de ses 40 ans, etc. fatigué par ses questions, Adrien finit par lui dire qu'il doit se rendre à un repas organisé par un club mystérieux, le club des 'hérissons' où se regroupent des personnes qui ne se connaissent pas toujours très bien mais qui discutent entre elles sans véritable arrière-pensée. Bernard a du mal à le croire: son ami de toujours préfère aller à ce repas (au risque de ne plus faire partie du club en cas d'absence) plutôt que d'aller à sa soirée. A priori, rien de bien méchant, en tout cas, rien qui justifie le fait de se mettre dans des états pareils, et pourtant, Bernard va commencer à sombrer dans la folie obsessionnelle limite autodestructrice en harcelant quotidiennement Adrien pour qu'il rentre à son tour dans le club. Ce harcèlement durera des mois, jusqu'au jour où, à bout de nerf, les deux amis en viendront aux mains.

'Cravate Club' est tourné comme une comédie, sauf que le ton du film s'assombrit considérablement au bout d'une vingtaine de minutes pour tourner au drame pur et dur. A la base, difficile de trouver de la crédibilité dans une histoire pareille: comment un événement aussi anodin peut il se transformer en une véritable bataille entre deux amis de longue date? On a du mal à rentrer dans cette histoire, d'autant que le côté 'pièce de théâtre' du film a tendance à susciter l'ennui, gâchant le rythme lent du film. On rigole légèrement durant les 20 premières minutes, mais on s'ennuie tout au long du film. Le problème vient surtout du fait que le personnage interprété par Charles Berling est affreusement lourd: on en vient même à se demander comment Adrien n'a pas pu l'envoyer balader plus tôt...il devait avoir des nerfs d'acier! 'Cravate Club' devient très vite lourd, tellement lourd qu'on se demande même quand cela va s'arrêter. Bernard pète les plombs et devient fou à force de s'obstiner pour une raison qui, finalement, n'en vaut absolument pas la peine, ce qui fait de lui un véritable cas psychiatrique qui aurait plus sa place dans un asile d'aliéné que dans un cabinet d'architecte. Adrien est quand à lui un homme extrêmement patient, peut être l'être le plus patient que l'on pourra voir au cinéma, car ce qu'il endure durant les 80 minutes du film, personne ne pourrait l'endurer sans craquer avant la fin, sans compter qu'il y a une ou deux scènes plutôt bizarre, comme par exemple la séquence où Adrien retrouve Bernard dans la douche et le fait se dessoûler sans presque dire lui dire un mot (la scène du petit poussin mécanique était-elle vraiment indispensable? Et que dire de la scène de danse qui est atrocement ridicule et totalement incongrue), comme s'il semblait n'en avoir strictement rien à foutre; étrange, on ne comprend pas toujours où le réalisateur veut en venir, même si le résultat y est (l'humour décalé reste quand même assez maladroit). Au final, on retiendra surtout de ce film très lourd une performance d'acteur remarquable, surtout pour Charles Berling, toujours aussi à l'aise dans le rôle d'individu un peu sombre et dérangé.

Nicolas Errèra est l'un des fidèles représentants de la nouvelle génération de compositeurs de musique de film français avec Bruno Coulais, Alexandre Desplat et les autres. Errèra avait déjà collaboré avec Fréderic Jardin sur son film précédent, 'Les frères soeurs'. Récemment, le compositeur a signé une musique plutôt 'easy listening' pour 'Le papillon' de Philippe Muyl. Pour 'Cravate Club', le compositeur spécialisé dans l'électronique à la française a signé un petit score sympathique à défaut d'être particulièrement mémorable. Le score est écrit pour synthés avec un petit groupe instrumental dont un trio à cordes, un saxophone et quelques percussions. Le film annonce le côté 'humour décalé' avec la phrase d'ouverture d'Edouard Baer qui en dit long sur le film: "Avec Charles, on est vraiment vraiment amis, et c'est vraiment vraiment un gros connard". Suit ensuite le premier motif du score, un motif de deux notes sifflées au synthé et accompagné par des pizz du synthé et quelques petites percussions. Errèra en profite pour amorcer le style 'down beat' de sa partition, une musique électronique répétitive faite de samplers qui tournent en boucle de manière obsessionnelle. Sur le fond, le compositeur a parfaitement cerné l'esprit du film, puisque le côté en apparence serein, mélodique et répétitif de sa musique évoque de manière métaphorique la relation amicale/ambiguë entre Bernard et Adrien. Cette astuce nous prouve que le musicien possède plus d'un tour dans son sac. Sur le plan de la forme, c'est nettement moins intéressant, car la musique a tendance à devenir très rapidement ennuyeuse, faute d'un développement quelconque. 'Générique-Part 1' ouvre le film pour la scène du début dans le supermarché nous introduisant les deux personnages principaux du film. Ce motif sifflé de 2 notes sur un fond plutôt léger et répétitif apporte un certain humour décalé au film. Très minimaliste, la partition d'Errèra évoque par moment le 'Thomas Newman' des films plus intimistes, le compositeur abordant par moment un style musical assez semblable, surtout dans le choix de ses sonorités électroniques qui tournent en boucle (heureusement, les morceaux ne dépassent que très rarement les 2 minutes).

En adoptant un ton entre l'easy listening' et le 'down-tempo' (terme générique évoquant mélange de genres ou d'ambiances très à la mode, dont les contours musicaux sont encore très flous: on pourra citer dans le genre la 'Drum & Bass', l'Acid Jazz, le 'Mood Rock', le 'Trip-Hop' ou le 'Hip-Hop', bien qu'une définition exacte de la 'down-tempo' est assez difficile à formuler), Errèra donne un ton humoristique assez décalé par rapport au film. Le côté 'ambiance tranquille' de la musique d'Errèra (d'où son qualificatif de 'down-tempo') s'affiche déjà comme résolument décalé par rapport à une histoire où la tension ne cesse de monter. 'Cravate Club' nous introduit au thème principal que le compositeur reprendra lors de son 'générique de fin', accompagné par le synthé, des petites percussions, le trio à cordes et un thème de boîte à musique plutôt léger.

'Chicamour' prolonge cette ambiance avec un petit thème de piano très serein, le thème du personnage de Chicamour qui revient dans le film à deux ou trois reprises lors des séquences de transition où l'on voit le personnage jouer son thème au piano. Errèra reprend de manière très amusante le thème de 'Chicamour' dans 'Bernard et son tableau' pour la scène où Adrien fait son cadeau à Bernard. Le thème se distingue ici par son rythme à trois temps dominé par le marimba et des sonorités électroniques plus cristallines. On sent très clairement ici l'influence du thème de 'True Romance' par Hans Zimmer, 'Bernard et son tableau' étant très proche du thème d'ouverture de la fameuse partition de Zimmer.

'La lampe' possède un côté plus anodin avec ses marimbas se répondant à des vents du synthé de manière quasi obsédante, une sorte de dialogue calme entre les deux sonorités, trop calme pour être honnête. 'Le lendemain' affiche quant à lui un ton plus décalé avec l'utilisation d'un saxophone psychotique sur fond de rythmique jazzy et de percussions diverses (Adrien retrouve Bernard complètement saoul sous la douche). L'utilisation d'un saxophone très 'free jazz' rappelle par moment le Goldenthal de 'Titus' ou de 'The Butcher Boy', preuve que si le compositeur a tenu à faire quelques référence à ses collègues américains, il s'y est pris d'une assez bonne façon (la ressemblance avec 'True Romance' restant quand même assez douteuse). Errèra reprend son thème principal dans 'La cravate', petit leitmotiv de l'histoire évoquant cette amitié obsessionnelle qui tourne au cauchemar pour Adrien.

Le reste du score n'apportera rien de plus car il s'agit de reprises parfois inutiles des morceaux déjà entendus durant la première partie de l'album (et du film), renforçant encore le côté ennuyeux d'une musique sympathique mais qui manque un peu de punch, d'énergie. Si le résultat à l'écran est très satisfaisant, l'écoute isolée est nettement plus décevante, d'autant que le côté répétitif et calme de la musique fini par très vite nous ennuyer, faute d'un certain manque d'idée vers la fin. Errèra pose les bases pour sa musique mais se refuse à tout développement; du coup, sa musique tourne en boucle et finit par lasser, comme si le musicien n'avait plus d'idées. Voilà donc un score assez particulier, à recommander en priorité aux fans inconditionnels des musiques d'ambiance plutôt calmes et répétitives, une sorte de 'easy listening' peu inspirée mais qui rempli néanmoins ses fonctions à l'écran, un point c'est tout. Pas de quoi sauter au plafond, loin de là!


---Quentin Billard