1-The Picnic 2.57
2-Overture 4.21
3-The Sweetest Lady 2.07
4-The Conspirators 2.42
5-The Masked Ball 1.57
6-The Prince Woos Hero 1.20
7-A Star Dances 2.46
8-Rich She Shall Be 1.44
9-Sign No More Ladies 1.59
10-The Gulling Of Benedick 3.12
11-It Must Be Requited 2.00
12-The Gulling Of Beatrice 1.41
13-Contempt Farewell 1.37
14-The Lady Is Disloyal 2.17
15-Hero's Wedding 0.48
16-Take Her Back Again 3.10
17-Die To Love 4.44
18-You Have Killed
A Sweet Lady 3.03
19-Choose Your Revenge 1.50
20-Pardon Goddess
Of The Night 4.34
21-Did I Not Tell You 1.42
22-Hero Revealed 1.27
23-Benedick The Married Man 2.09
24-Strike Up Pipers 2.42

Musique  composée par:

Patrick Doyle

Editeur:

Epic Soundtrax
473989 2

Album produit par:
Patrick Doyle, Maggie Rodford
Superviseur de la musique:
Maggie Rodford,
Air-Edel Associates Ltd.
Monteur de la musique:
Roy Prendergast
Soundtrack Mix:
Steve Price
'The Picnic' récité par:
Emma Thompson

Artwork and pictures (c) 1993 The Samuel Goldwyn Company. All rights reserved.

Note: ***1/2
MUCH ADO ABOUT NOTHING
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Patrick Doyle
Poursuivant sa longue série d'adaptations cinématographiques d'oeuvres de William Shakespeare, Kenneth Branagh réalisa en 1993 'Much Ado About Nothing' (Beaucoup de bruit pour rien), comédie romantique adaptée de la pièce du célèbre dramaturge anglais. Comme d'habitude, Branagh joue dans son propre film en s'entourant d'une pléiade de stars absolument impressionnante: Emma Thompson (son actrice fétiche), Keanu Reeves, Robert Sean Leonard, Denzel Washington, Michael Keaton et une Kate Beckinsale très jeune à l'époque (elle n'avait que 20 ans!). A noter une apparition de Patrick Doyle dans le film, fidèle compositeur de Branagh qui interprète ici Balthazar. 'Much Ado About Nothing' est une pièce légère, loin des drames sanguinaires écrits par Shakespeare tout au long de sa vie. Branagh a parfaitement retranscrit le ton léger et désinvolte de la pièce avec un humour très bon-enfant à la limite de la niaiserie excessive. L'histoire se passe au palais de Messina en Italie. Une grande fête est organisée pour fêter le retour du prince Don Pedro d'Aragon (Denzel Washington) et ses amis, revenus triomphant de la guerre. Les femmes s'activent alors. Partout, on peut ressentir cette effervescence, cette jovialité festive qui s'empare très vite du palais de Messina. Tout le monde semble heureux, tous excepté le prince Don John (Keanu Reeves), le demi-frère de Don Pedro. Don John est un être mélancolique au coeur rempli de colère et qui voue une haine sans bornes pour Don Pedro et Claudio (Robert Sean Leonard), l'ami du prince. Ce triste sire va alors préparer un complot visant à empêcher le mariage entre Claudio et la ravissante Hero (Kate Beckinsale). Pour se faire, Don John va employer un individu du nom de Borachio (Gerard Horan) qui va se charger de faire croire au prince et à Claudio que Hero s'est donné à lui avant de se marier.

Croyant dur comme pierre qu'Hero est impure et l'a trompé avec un autre, Claudio laisse sa colère exploser le jour du mariage et calomnie la pauvre Hero qui ne comprend pas ce qui lui arrive. Traîné dans la boue et traitée comme une putain, Hero se noie dans le chagrin, au grand dam de son père, le seigneur Leonato (Richard Briers), gouverneur du palais de Messina. Pendant ce temps, le seigneur Benedick (Kenneth Branagh) tente d'avouer son amour avec Beatrice (Emma Thompson), chose d'autant plus étonnante lorsqu'on sait que ces deux individus n'ont jamais pu s'entendre et ont toujours refusé d'être avec quelqu'un. C'est Don Pedro et ses amis qui ont organisé ce complot pour rendre amoureux l'un de l'autre Benedick et Beatrice. Avec l'aide du prêtre, Leonato met sur pied un plan visant à laver son honneur ainsi que celui de sa fille: il annoncera à tous la mort de sa fille et espèrera ainsi faire ressurgir des sentiments dans le coeur de Claudio. Effondré à l'annonce de sa mort et accusé par son père de l'avoir tuée à cause de ses calomnies, Claudio va assister à la cérémonie funèbre et prononcera une épitaphe en la mémoire d'Hero. Ensuite, suivant les desideratas de Leonato, Claudio devra épouser la nièce du gouverneur, qui, selon lui, ressemble à Hero comme deux gouttes d'eau. Entre temps, le chef de la sécurité du palais, l'excentrique Dogberry (Michael Keaton), a mis la main sur Borachio et découvre le complot de Don John. Passé aux aveux, Borachio est condamné ainsi que Don John, qui s'est enfuit après avoir réussi con coup. Finalement, la vérité éclatera au grand jour et Claudio découvrira que la fameuse nièce n'est autre qu'Hero. Le jeune comte tombera alors dans ses bas en implorant son pardon. Pendant ce temps, Benedick et Beatrice en profiteront pour officialiser leur récente union en se mariant, l'ironie du destin voulant que Benedick ait toujours critiqué le mariage. La morale est sauve: tout est bien qui fini bien dans cette comédie romantique louant les vertus de l'amour courtois.

Evidemment, 'Much Ado About Nothing' n'a pas la noirceur d'un 'Hamlet' ou d'un 'Henry V'. Hormis l'intrigue centrale du complot, qui nous rappelle à quel point Shakespeare était amoureux des tragédies, l'histoire est très gentillette, très joyeuse et parfois un peu enfantine. Ceux qui détestent les récits rose-bonbon risquent fort d'être rebutés par ce film ressemblant à un conte de troubadours. La séquence où Don Pedro et ses amis préparent le complot visant à rendre amoureux Benedick de Beatrice (et réciproquement) est tout à fait représentative du ton humoristique et insouciant du film: les personnages sont comme emportés dans des élans de bonne humeur parfois infantile. Certes, le côté niais du film et ses sensibleries risqueront fort de déplaire à certains, d'autant que le film possède quelques défauts comme par exemple un manque d'explication sur l'endroit exact où se situe l'histoire ou sur la raison de la haine de Don John envers Claudio et Don Pedro. Ceci étant dit, Branagh se montre particulièrement brillant dans son rôle du seigneur Benedick et prouve son talent de metteur en scène avec des acteurs particulièrement inspirés (Robert Sean Leonard est extrêmement convaincant, tout comme Denzel Washington et les autres acteurs du film). Décors fastueux, costumes somptueux, musique de qualité, tout est fait pour retranscrire ici la vision littéraire de Shakespare sur cette comédie légère où l'amour est roi. Si l'histoire peut agacer ou paraître un peu 'grosse' par moment, nul ne pourra reprocher à Kenneth Branagh de ne pas avoir rendu un bien bel hommage à l'ouvrage de Shakespeare. Du travail de qualité!

Après ses partitions 'Shakespearienne' pour 'Twelfth Nigh, Or What You Will' et 'Henry V', Patrick Doyle retrouve Kenneth Branagh après le superbe 'Dead Again' (1991). Entre temps, le compositeur a fait un tour du côté du cinéma français en écrivant la partition pour le film de Régis Wargnier, 'Indochine' (1992) et le court-métrage de Vincent Perez, 'L'échange' (1992). Pour 'Much Ado About Nothing', Doyle continue de nous prouver avec fermeté qu'il est décidément un grand compositeur de musique symphonique au classicisme raffiné rare de nos jours. Sa musique tendrait presque parfois à nous rappeler ce que les musiciens du Golden Age hollywoodien faisaient dans les années 30/40. La partition de Doyle s'axe autour de trois grands thèmes énoncés dès la superbe 'Ouverture' du score. Pour le premier thème, Doyle a adapté les paroles du texte de Shakespeare, 'Sigh No More Ladies' (récité par Emma Thompson au début du film) pour en faire une sérénade rêveuse et poétique avec la chanson que Balthazar (Doyle, lui-même dans le film) chante dans le film en compagnie de ses amis. Doyle nous en propose une première version particulièrement poignante pour l'introduction du film, 'The Picnic', lorsque Beatrice récite son texte lors du pique-nique des dames. Pour ce prologue, le compositeur a écrit une petite pièce pour violoncelle et guitare, suivi de quelques cordes énonçant ce très beau thème de la sérénade rêveuse. Un premier grand moment de poésie, idéal pour débuter ce score en beauté!

Evidemment, la musique de Doyle prend une tournure opératique dans le film, mêlant quelques éléments traditionnels du genre: ouverture, airs, intermède, pièces symphoniques évoquant les ambiances et les personnages, etc. comme dans 'Dead Again', où il était déjà question d'un musicien qui compose un air d'opéra obsédant, 'Much Ado About Nothing' renoue une fois de plus avec le monde de l'opéra, nous prouvant à quel point la musique de film peut s'avérer riche lorsque les musiciens savent exploiter tout son potentiel dans un film.
'Overture' utilise aussi le superbe thème héroïque marquant le retour triomphant de Don Pedro et ses compagnons à Messina. L'orchestre ample se lance alors dans un hymne héroïque très cuivré qui n'est pas sans rappeler par moment le genre de musique que David Arnold fera plus tard dans 'Independence Day' (1996). Comme dit précédemment, le très joli thème de sérénade ('Sign No More Ladies') est présent sous une forme plus énergique ici, sans oublier le troisième thème qui arrivera plus tardivement, une sorte de 'Love Theme' évoquant la romance entre Hero et Claudio, puis entre Beatrice et Benedick. Le ton change avec 'The Conspirators', Doyle utilisant des sonorités orchestrales plus sombres, avec une pointe de malice et d'espièglerie évoquée par les pizzicati. Ceci étant dit, le ton du morceau est résolument plus sombre et plus pesant. Doyle évoque la menace de la conspiration de Don John et évoque sa haine contre Don Pedro et Claudio.

Doyle s'est amusé à écrire une petite farandole pour 'The Masked Ball' écrit pour trompette, flûte, violon, mandoline et quelques percussions, dans un style plus proche de la musique de la Renaissance. 'A Star Danced' évoque cette ambiance à la fois romantique et nostalgique, Doyle conservant ce ton paisible avec des orchestrations plus fines et parfois plus aériennes. A part 'The Conspirators', la musique évoque encore ici le calme et la tendresse. C'est là qu'intervient 'Sigh No More Ladies' chanté par Patrick Doyle accompagné d'un choeur d'hommes, de quelques cordes et d'une guitare, un grand moment de musique en compagnie du musicien toujours inspiré. La poésie laisse alors la place à l'humour dans le sautillant 'The Gulling Of Benedick' où Doyle nous laisse entendre une reprise très amusante du thème de sérénade sous une forme plus 'mickey-mousing'. Le morceau évoque le complot gentillet visant à rendre amoureux Benedick de Beatrice. Doyle allège considérablement son orchestre et privilégie ici les bois avec flûtes, hautbois ou bassons sautillants. Après un 'It Must Be Requited' plus lyrique et rêveur (qui nous permet d'entendre les prémices du 'Love Theme'), 'The Gulling of Beatrice' reprend le même genre d'ambiance sautillante et légère, mais du côté de Beatrice cette fois-ci (joli reprise du thème de sérénade sous la forme d'une petite valse légère).

'Contempt Farewell' reprend le thème héroïque de l'Ouverture pour ce qui semble être une sorte d'intermède central du score. Effectivement, après ce passage triomphant, Doyle casse l'ambiance rêveuse et romantique de son score avec le sombre 'The Lady Is Disloyal', évoquant le début des ennuis pour Claudio et Hero. 'Hero's Wedding' nous permet d'entendre le 'Love Theme' que Doyle attribuera par la suite à Beatrice et Benedick. Le 'Love Theme' évoquant ici la puissance de l'amour concrétisé à travers le mariage, le thème étant joué ici sous la forme d'un petit hymne solennel et triomphant. Mais c'est le sombre 'Take Her Back Again' qui vient rompre l'ambiance avec des cordes plus agitées, Doyle évitant néanmoins de tomber dans le tragique pur. 'Die To Love' développe le 'Love Theme', synonyme d'espoir et de jours meilleurs pour Hero et ses amis.

On entre ainsi dans les quelques passages plus mélancoliques du score, notamment avec le très beau 'You Have Killed A Sweet Lady' reprenant le 'Love Theme' avec des cordes plus réservées, évoquant la souffrance du père d'Hero, bien décidé à laver son honneur. On retrouve le même genre d'ambiance dans 'Choose Your Revenge' et c'est l'excellent 'Pardon Goddess Of The Night' qui nous permet de réentendre la nouvelle chanson de Patrick Doyle pour la cérémonie funèbre d'Hero. Ecrit pour choeur d'hommes et orchestre avec chant soliste, reprenant le 'Love Theme' encore chanté ici aussi par Balthazar (Doyle). Voilà un autre morceau incontournable du score et tout en beauté, preuve de l'immense talent d'écriture du compositeur. Les choses s'arrangent enfin avec 'Hero Revealed' reprenant le 'Love Theme' sous sa forme la plus paisible, se concrétisant avec le mariage d'Hero et Claudio. L'amour triomphe avec 'Benedick The Married Man', où Doyle associe ici aussi le 'Love Theme' à Benedick et Beatrice pour l'annonce de leur mariage. Doyle nous propose une conclusion toute en beauté avec 'Strike Up Pipers' reprenant le thème de la sérénade chanté par un choeur mixte avec un orchestre plus ample, une très belle conclusion pour ce score romantique inspiré.

Certes, 'Much Ado About Nothing' n'égale pas la puissance d'un 'Henry V' ou la grandeur d'un 'Hamlet'. Le score n'en demeure pas moins synonyme de qualité, tout à fait dans l'esprit du film: romantique, poétique, paisible, léger et par moment plus dramatique, le tout baignant dans un esprit opératique rare de nos jours. Les parties vocales du score sont elles aussi de grande qualité, nous prouvant à quel point Patrick Doyle est un musicien accompli et toujours aussi inspiré lorsqu'il s'agit d'écrire la partition pour un film de Kenneth Branagh ('Henry V' et 'Dead Again' ont été de grandes réussites dans le genre). Voilà donc une sympathique partition symphonique à ne pas manquer!


---Quentin Billard