Réalisateur touche-à-tout, Ron Howard nous a prouvé à plus d'une reprise qu'il appréciait varier les genres tout au long de sa filmographie. Après le thriller 'Ransom' et la comédie 'Edtv', Howard s'attaque désormais à la fable enfantine en nous proposant un remake du célèbre 'How The Grinch Stole Christmas', inspiré du célèbre cartoon américain basé sur un roman du Dr.Seuss (de son vrai nom, Theodor Seuss Geisel). Ron Howard nous propose une vision très colorée et massive de cette fable qui critique le mercantilisme des fêtes de Noël. L'histoire se passe dans le village imaginaire de chouville, peuplé des 'choux', des êtres doux pour qui fêter Noël dans le luxe et la splendeur est indispensable. Mais l'un d'entre eux, le Grinch, est un être verdâtre et velu qui vit seul dans sa caverne, à l'extérieur du village. Humilié et rejeté durant son enfance, le Grinch a nourri une terrible aversion pour les fêtes de Noël. Cette année, il est bien décidé à gâcher le Noël des habitants de chouville. Le Grinch va ainsi multiplier les méfaits en tout genre dans l'unique but de rendre malheureux les choux, mais c'est sans compter sur la gentillesse de la petite Cindy Lou (Taylor Momsen), une petite fille qui se trouve être la seule à apprécier le Grinch et à rejeter les excès commerciaux des fêtes de Noël. Elle va tenter d'inviter le Grinch au village et de le faire se réconcilier avec les choux, mais en vain. La créature organise alors un plan visant à voler le Noël de chouville. Finalement, il finira par découvrir le véritable sens de Noël: la chaleur de l'amour familial.

Bien que le projet paraissait un peu hasardeux au départ (le Dr.Seuss lui-même considérait que la version animée de Chuck Jones en 1966 était insurpassable), Ron Howard s'en est tiré haut la main sur 'The Grinch'. Le réalisateur s'est doté d'un très gros budget pour retranscrire tout l'univers coloré et fantaisiste de la célèbre fable du Dr.Seuss. Evidemment, c'est l'excellent Jim Carrey qui domine le film avec son interprétation survoltée du Grinch (Carrey a été spécialement choisi lors d'une audition par Audrey Geisel, la veuve du Dr.Seuss). L'acteur comique nous propose un véritable numéro de pitre durant les quelques 104 minutes du film. Grimaces, rictus, folie, etc. Si vous appréciez les pitreries habituelles de Jim Carrey (tendance 'The Mask', 'Me, Myself & Irene', 'Ace Ventura' ou 'Liar Liar'), l'acteur devrait vous ravir dans le rôle du Grinch. Pour les autres, il ne fait nul doute que ce spectacle s'avèrera rapidement lourd et assez indigeste, tant l'acteur en fait des tonnes du début jusqu'à la fin du film. Du point de vue technique, le film est particulièrement impressionnant. C'est le fameux Rick Backer qui a collaboré aux nombreux maquillages et effets spéciaux du film, sans oublier le costume du Grinch, que Jim Carrey dû endosser pendant de nombreux mois. Le costume en latex et le maquillage (fausses dents, lentilles de contact jaunes, etc.) étaient très inconfortables, d'autant que Jim Carrey devait subir chaque jour plus de 3 heures de maquillage. Malgré les défauts du film, on retrouve quand même l'esprit du roman d'origine, avec sa morale sur l'esprit de Noël et la critique de l'aspect commercial de cette fête. A noter que le film est parsemé de nombreuses touches d'humour en tout genre, comme lorsque le Grinch nous fait un remake du célèbre 'Chariots of Fire' de Hugh Hudson ou lorsque le Grinch se prend pour Ron Howard, le temps d'une séquence hilarante avec son chien Max. Pour finir, on notera que c'est l'excellent Anthony Hopkins qui fait la narration du film. En dehors de l'aspect sirupeux et de l'interprétation lourdingue de Jim Carrey, 'How The Grinch Stole Christmas' se laisse regarder. A réserver cependant à un jeune public!

'The Grinch' marque la cinquième collaboration entre Ron Howard et James Horner. Ce dernier nous livre une partition orchestrale sans surprise pour 'The Grinch'. Si vous vous attendez à entendre ici le nouveau chef-d'oeuvre d'Horner, passez votre chemin, vous risquez fort d'être déçu. Malgré tout, le score colle bien au film d'Howard et nous propose une vision musicale assez juste du conte du Dr.Seuss. Horner nous introduit à son excellent thème principal dès l'ouverture du film, un thème de cordes assez émouvant et qui évoque la magie incomparable de Noël. Ce thème servira de balise musicale au score d'Horner, souvent lié à la petite Cindy Lou et à sa gentillesse reflétant sa sympathie pour le Grinch. Le score va par la suite se partager entre des pièces orchestrales agitées évoquant les méfaits du Grinch et des moments plus doux ou plus enjoués évoquant la magie des fêtes de Noël. A noter que Horner a aussi écrit quelques unes des chansons du film, et plus particulièrement la très belle 'Christmas, Why Can't I Find You?', que chante la petite Cindy Lou devant une fenêtre de sa chambre. En dehors du manque de justesse typiquement infantile de la voix de l'actrice Taylor Momsen, la chanson est une très belle variante autour du thème principal, qui devient ici plus intime et touchant, introduit par une flûte et soutenue par quelques cordes chaleureuses. On retrouve ici le style plus intimiste d'Horner ainsi que son habituel talent de mélodiste, Horner ayant le don pour trouver des mélodies mémorables et bien écrites.

'Memories Of A Green Childhood' s'attarde sur la jeunesse du Grinch, le morceau s'apparentant à une petite pièce espiègle avec un motif de 4 notes attribué au Grinch. A noter qu'Horner s'est amusé à associer l'utilisation d'un accordéon avec le personnage de Jim Carrey, afin de retranscrire tout le côté agité et fantaisiste du personnage. Puisque l'on parle de fantaisie, on ne pourra pas passer à côté de l'excellent 'Stealing Christmas', superbement orchestré, Horner décrivant pendant près de 7 minutes la longue séquence où le Grinch vole les cadeaux et les sapins de Noël dans le village. On retrouve quelques touches fantaisistes comme l'utilisation étonnante et furtive d'un théremin (dans 'The Big Heist'), d'un orgue hammond ou de l'accordéon. Niveau instrumental, on notera l'utilisation traditionnelle des petits tambourins et des cloches évoquant l'esprit musical de Noël, une idée déjà mise en avant par John Williams dans 'Home Alone'. 'The Big Heist' décrit la séquence où le Grinch escalade la montagne avec son traîneau rempli des jouets volés. On notera ici le côté inventif de l'instrumentation, avec l'utilisation de saxophones (on pense immédiatement ici à 'Casper') ou de percussions métalliques comme ces sons qui ressemblent au claquement de deux couvercles de poubelle (rappelons que le Grinch vit dans une montagne de détritus).

'Does Cindy Lou Really Ruin Christmas' nous permettra d'entendre un bref passage de saxophone jazzy à la 'Casper' lors de la scène où le maire du village se retrouve dehors en pleine neige dans son lit, et ce avant que ce dernier accuse Cindy Lou d'avoir gâché Noël en invitant le Grinch à descendre au village. Le morceau évoque à la fois l'espièglerie, la malice et les conséquences néfastes des méfaits du Grinch. C'est le superbe 'A Change Of The Heart' qui attirera alors notre attention, lorsque le Grinch comprend enfin le vrai sens de Noël. C'est là que l'on pourra entendre une très belle utilisation d'un choeur quasi féérique pour évoquer le grossissement du coeur du Grinch qui se met à devenir gentil et aimable (il s'agit ans aucun doute de l'un des plus beaux morceaux du score, qui illumine radicalement cette séquence du film). Après un peu d'action dans l'agité 'The Sleigh of Presents' (Cindy Lou et le Grinch tentent d'empêcher les cadeaux de tomber de la falaise), 'He Carves The Roast Beast' conclut le film de manière plus optimiste avec une reprise du sympathique 'Welcome Christmas' chanté en choeur par Taylor Momsen et le reste des acteurs, qui conclut le score sur une ultime touche d'allégresse et une reprise finale du joli thème principal, chanté par Faith Hill pour le générique de fin.

'How The Grinch Stole Christmas' est un score orchestral sympathique et sans aucune prétention particulière. Comme d'habitude, James Horner nous livre une partition de qualité pour un film de Ron Howard, mais sans grande inspiration. La musique colle très bien au film, Horner ayant sut retranscrire toute la magie et l'espièglerie du conte du Dr.Seuss. Hélas, on oublie très rapidement la musique d'Horner, même après une première écoute, faute de pouvoir se rattacher à des éléments forts ou mémorables, même en dehors du très beau thème principal. Comme annoncé vers le début de cette revue, le score du 'Grinch' est loin d'être ce qu'Horner a fait de mieux dans le domaine, et même si le compositeur était apparemment en petite forme sur ce film, l'ensemble n'en demeure pas moins très sympathique et agréable, à défaut d'être indispensable!


---Quentin Billard